Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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La bataille du rail et de la route

Le service de statistiques Eurostat vient de dresser un bilan de l’évolution du transport de marchandises en Europe de 2007 à 2012, il est accablant pour la France.

 

Au sein de l’Union européenne, notre pays est dans le peloton de tête de ceux qui, depuis des années, ont donné une large priorité au développement de la route. Après l’Irlande, la Grèce, l’Espagne, le Danemark et le Royaume-Uni, la France est, avec l’Italie et le Portugal, le pays qui accorde la plus grande place au mode de transport le plus coûteux et le plus polluant : la route ; 86,1 % du trafic mesuré en tonnes par kilomètre y est assuré par camions, seulement 11 % par le rail, 3 % par les voies navigables intérieures. En Allemagne, pays souvent érigé en modèle par les prêchi-prêcha du capital, le transport par la route est en deçà de 16 points au nôtre, avec une répartition modale un peu plus équilibrée : 70,2 % pour la route, contre 19,4 % pour le chemin de fer et 10,3 % pour les voies navigables intérieures. Certes, les infrastructures chez nos voisins d’outre-Rhin sont souvent dégradées et souffrent d’une insuffisance d’investissements, mais cela ne suffit pas à expliquer le décalage et « l’autoroute-mania » à la française. Cette prépondérance de la route sur le rail est-elle inéluctable ? On peut en douter. La place du camion est en recul en Belgique, au Danemark, en Irlande, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas, au Portugal, en Finlande, en Suède, au Royaume-Uni et dans plusieurs pays de l’Est. On peut même remarquer qu’aux Pays-Bas le transport par les voies navigables intérieures fait presque jeu égal avec la route. Hors lignes de TGV, le réseau ferré français a la même configuration qu’au XIXe siècle. Il s’étalait sur 36 117 kilomètres en 1970, il s’est depuis rétréci et n’en compte plus que 29 273. Certes, des sommes importantes y ont été investies, mais elles ont surtout été réservées au réseau TGV. La bataille du rail et de la route a été menée à armes inégales. Si le poids des investissements pour le train pèse sur les comptes de la SNCF, la contraignant à verser chaque année des intérêts considérables aux marchés financiers, le camion a, lui, pu utiliser à bon compte un réseau financé pour l’essentiel par le contribuable. D’autres choix, d’autres critères de société doivent s’imposer. Il faut notamment mettre un terme au tête-à-tête ruineux entre Réseau ferré de France, la SNCF et les marchés financiers, trouver pour la France et pour l’Europe de nouvelles sources de financement à très faible coût et favorisant l’efficacité sociale plutôt que la rentabilité financière. La BCE et les banques ont un rôle à jouer.

 

Mercredi, 12 Novembre, 2014
L'Humanité

 

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