Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Le spectre d’un nouveau krach

La chronique économique de Pierre Ivorra. "Ce flot de liquidités n’a, pour l’essentiel, servi qu’à relancer les marchés financiers."

L’évolution pourrait paraître étonnante : les grands prêtres du marché capitaliste, les adorateurs de la prétendue concurrence libre et non faussée sont aujourd’hui tétanisés. Ils voient se dessiner à l’horizon encore vierge de cette année 2016 le spectre d’un krach financier qui, après celui de 2007-2008, risque de secouer la planète encore plus sévèrement.

La croissance des pays émergents fléchit, celle de la zone euro a du mal à retrouver des couleurs, le prix du pétrole continue de chuter, il a baissé de 70 % depuis l’été 2014. Les places boursières sont chahutées, nombre de monnaies vacillent, se déprécient face au dollar.

Ceux-là mêmes qui vilipendaient la trop grande épaisseur du Code du travail, les 35 heures, la dépense publique, les taxes, les impôts, les cotisations sociales, l’assurance maladie, le Smic et qui, pour certains, n’ont dû leur survie, lors de la dernière crise, qu’à l’intervention publique, recommencent à invoquer le G20, la Banque centrale européenne, la Fed américaine, les autorités chinoises… « Léviathan, priez pour nous et surtout bougez-vous ! »

Le problème, aujourd’hui, est que ce qui a été fait après septembre 2008 et lors de la récession de 2009-2010 peut être difficilement refait avec succès. Les banques centrales ont, depuis, déversé des dizaines, voire des centaines de milliards de dollars, d’euros, de yuans… et ce flot de liquidités n’a, pour l’essentiel, servi qu’à relancer les marchés financiers, qu’à permettre aux multinationales d’accumuler des trésoreries alibabesques au détriment de la croissance, de l’emploi, des conditions de travail et de vie de centaines de millions d’hommes et de femmes à travers le monde. Le rapport de l’homme à la nature, à son environnement a continué de se détériorer. Des régions sont à feu et à sang et même le terrorisme s’est financiarisé et mondialisé.

Tout cela devait s’écrouler, tout cela va s’écrouler, mais que peut-il en résulter ? Si nombre de peuples cèdent à la tentation xénophobe, au mythe de l’État fort, l’on va vers de nouveaux affrontements, de nouvelles terreurs. À l’opposé se dessine, au travers de succès et d’échecs, en Grèce, en Espagne, au Portugal, en Irlande, au Royaume-Uni, au Brésil, au Venezuela… la possibilité de sortir de l’ornière. Il ne s’agit pas de prendre en tous domaines le contre-pied de l’ordre établi mais de le subvertir de l’intérieur, par exemple de changer les critères de financement de l’économie de la Banque centrale européenne (BCE) plutôt que de la livrer aux démolisseurs. De contraindre l’argent à aller au développement humain et écologique. Là est la radicalité.

 

Publié dans le journal l'Humanité

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