Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Grèce - Le coup d’État de l'Union Européenne

1. Ce week-end, un coup terrible a été porté à la démocratie par les dirigeants de l'Union Européenne : le couteau sous la gorge, la Grèce a été contrainte de signer un accord dont le 1er Ministre, Alexis Tsipras, affirme qu'il ne sortira pas la Grèce de la crise, bien au contraire.

2. Cet accord prévoit la poursuite et l'aggravation d'une politique d'austérité qui a déjà mis le pays à genou. Dans cet accord, ils s'agit avant tout de satisfaire les appétits de la finance et du grand capital : ainsi le groupe Vinci vient illico de candidater pour le rachat de 14 aéroports grecs privatisés...

3. En réalité, les dirigeants de l'Union européenne n'ont jamais eu la volonté de négocier avec la Grèce, mais au contraire, de faire plier un gouvernement qui tente de mettre en œuvre une autre politique, de briser tout espoir d'alternative.

4. Certes, une bataille vient d'être perdue. Le coup porté est rude, mais la lutte ne fait que commencer. Le peuple grec, par son esprit de résistance et le gouvernement Syriza par sa ténacité ont semé une graine, celle de l'espoir, qui peut germer demain à travers l'Europe tout entière.

 

Extrait de l'intervention de Pierre Laurent, sénateur, secrétaire national du PCF lors du vote sur le plan concernant la Grèce.

 


Grèce - Intervention de Pierre Laurent sur l... par CN-PCF

 

« Nous abordons ce vote crucial, toujours sous le choc, et certains que le coup porté ce week-end à la démocratie marquera durablement les esprits et les relations entre pays européens. Trois sentiments nous animent:

La volonté de défendre l’intérêt du peuple grec qui a eu le courage de se lever - le 25 janvier et lors du référendum - pour crier à la face de l’Europe sa souffrance et son exigence de voir lever le pilon qui l’écrase !

 

Je salue le peuple grec digne et libre. Je salue  Alexis Tsipras dont le courage et la responsabilité politique sont exemplaires.

 

Le second sentiment, c’est la colère contre la violence de dirigeants de l’UE - au premier rang desquels Angela Merkel et Wolfgang Schauble. Ils viennent de montrer quels intérêts ils défendent. Qu’un peuple se lève contre l’ordre libéral et l’oligarchie financière, et ils s’affairent à le soumettre et le punir.

 

Depuis le premier jour, ils n’ont jamais recherché un accord viable avec la Grèce et ont organisé son asphyxie financière (…) Ils se sont alors acharné jusqu’à la dernière minute à provoquer un « grexit » de fait. Alexis Tsipras, porteur du mandat de son peuple de rester dans la zone euro et de faire respecter la souveraineté de la Grèce, dans l’UE, s’y est refusé avec juste raison. Dès lors, leur choix a été l’humiliation et le chantage pour imposer le couteau sous la gorge, un nouveau plan drastique à la Grèce. Ces dirigeants et leur méthode sont la honte de l’Europe ! Ils ne servent que les pouvoirs financiers, quitte à s’appuyer sur l’extrême droite.

 

Le troisième sentiment est alors celui d’une très grande inquiétude pour l’avenir de l’Europe. Elle meurt dans les cœurs et dans les têtes si elle continue ainsi. Tous ceux qui persistent à soutenir de telles méthodes prennent une très grave responsabilité devant l’histoire !

 

Des frustrations et des humiliations générées par une telle arrogance et la seule loi du plus fort naîtront des monstres politiques ! Ils grandissent déjà au cœur de l’Europe !

 

La leçon première à tirer, est l’impérieuse nécessité de la refondation sociale et démocratique de l’UE, et son émancipation urgente des logiques financières qui l’étouffent. L’accord qui nous est soumis écarte à première vue le « grexit » qui était et qui reste l’objectif des dirigeants allemands.

 

Alexis Tsipras a dit hier, avec une grande loyauté à l’égard de son peuple, dans quelles conditions il a assumé un accord contraint et forcé, pour éviter ce cauchemar à la Grèce.

 

Je sais, que devant la brutalité de cet accord, certains en viennent à penser que le grexit ne serait plus qu’un moindre mal. Je ne le crois pas. Les Grecs non plus. Parce qu’une sortie de la zone euro ferait passer la Grèce de la crise humanitaire à l’hécatombe. Parce que toutes nos économies seraient déstabilisées.(...)

 

Joseph Stiglitz, prix nobel, a déclaré : «  les efforts demandés à Athènes dépassent la sévérité, ils recèlent un esprit de vengeance ! », comme si le peuple grec devait payer le prix de son insoumission. Si les exigences des créanciers sont toutes respectées, elles s’avéreront une nouvelle fois injustes socialement et empêcheront les objectifs de redressement productif du pays.

Alexis Tsipras a redit sa volonté de protéger les plus faibles et d’aller chercher de nouvelles recettes fiscales auprès de ceux qui s’enrichissent. Il a redit la nécessité absolue d’investissements productifs pour relancer l’économie et d’allègement du fardeau de la dette. Mais tout est fait pour l’en empêcher.(...)

 

Plusieurs engagements financiers sont envisagés par l’accord à la demande de la Grèce (…). Sans ces engagements, tout le monde le sait, aucune relance ne sera possible ! Or, sous la pression de l’Allemagne, tous ces engagements sont rendus hypothétiques et seront soumis au chantage permanent des créanciers !

 

Quant à la France, si le Président de la République a joué tardivement un rôle pour éviter le « grexit », elle a accepté que le prix exorbitant à payer soit fixé par Angela Merkel, qui a dicté, une fois de plus ses conditions.(...)

 

La bataille ne fait que commencer.(...)

 

Notre intérêt commun, grecs, français, espagnols, européens de toute nationalité est au contraire de pousser au changement dans toute l’Europe, de la libérer des forces libérales et des marchés financiers .

 

La France doit agir immédiatement pour :

 - obtenir le déblocage immédiat des liquidités de la BCE sans les soumettre à de nouvelles conditions

 - mobiliser le plus vite possible les 35 milliards d’investissements prévus en engageant sans tarder la contribution de la France et en proposant à d’autres pays de se joindre à la création d’un fonds de développement pour la Grèce qui pourrait préfigurer un fonds de développement pour l’Europe toute entière

 - travailler à concrétiser le rééchelonnement de la dette.

 

Notre vote est aujourd’hui un acte de lutte et de solidarité aux côtés du peuple grec, d’Alexis Tsipras et de nos camarades de Syriza.(...)

Mais nous disons d’un même mouvement, au nom de la France, que l’accord scandaleux imposé à Bruxelles n’est pas digne de l’Europe et qu’aucun maintien dans l’euro ne le peut légitimer.

Le Groupe CRC votera majoritairement contre.