Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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LA CHRONIQUE DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES

Galiléo et le mythe de lindépendance de lEurope

Yann Le Pellotec

LUnion européenne, en lançant le système de navigation et de positionnement par satellites Galiléo a enfin décidé de mettre fin au monopole économique quavaient les Etats-Unis avec le GPS (Global Positioning System).

Cest une question dindépendance économique majeure, car elle concerne tout le secteur des transports routier, maritime, aérien ou ferroviaire mais aussi lagriculture, la pêche... La navigation par satellites permet de renforcer la sécurité, d'améliorer l'écoulement des flux de trafic, de réduire les nuisances pour l'environnement et de soutenir le développement multimodal. Le développement du système Galiléo a généré 20 000 emplois en Europe. Son exploitation devrait créer 2000 emplois p e rmanents, sans compter le domaine des applications.

Lancé dans les années 70, le GPS américain, système universel de navigation par satellites, a créé les conditions dune dépendance technique, politique, stratégique et économique de millions dutilisateurs. Tout en gardant le contrôle total sur le système, les militaires américains laissent aux civils un service " brouillé ", aux possibilités volontairement limitées, dune précision horizontale (à la surface de la Terre) denviron 15 mètres. Pour préserver cette domination, les Etats-Unis via la Grande-B retagne et les Pays-Bas ont mis une pression terrible pour empêcher la naissance du système Galiléo.

La décision, prise le 10 décembre par le Conseil des ministres de lEurope, daller jusquau bout du programme Galiléo permettra, certes, de saffranchir économiquement de la tutelle américaine. Mais, en matière militaire, les Etats-Unis ont eu gain de cause, Galiléo se limitera aux applications civiles, laissant la défense des nations européennes sous la totale domination du Pentagone. En effet le moindre mouvement des armées européennes, restera sous contrôle des militaires américains. Cette décision constitue une capitulation en rase campagne dans la logique du traité constitutionnel Giscard : une Europe sous lemprise militaire des Etats-Unis, via lOTAN, et est porteuse de guerre et doppression.

Les larmes de crocodiles de la Commission européenne

Yann Le Pellotec

Pendant la session de janvier au Parlement Européen, la Commission européenne, suite au Tsunami, sest beaucoup agitée devant les caméras,. Mais lorsque Jacky Henin a posé une question orale au Commissaire Mandelson sur les conséquences économiques et sociales de la disparition des quotas dimportations dans le secteur du textile et de lhabillement pour ces populations et au delà sur celles de la planète entière, croyez-vous, quen pareille circonstance la Commission aurait eu le réflexe humanitaire de demander un moratoire à lOMC sur les quotas ? Que nenni, il ne fut question dans la réponse de la Commission européenne que «d'impact (…) difficile à évaluer au stade actuel et (…) susceptible de changer considérablement dun pays à lautre, selon les capacités de mise en œuvre davantages concurrentiels dans les segments à valeur ajoutée les plus élevés de la production et selon les politiques économiques nationales». Or cette levée des quotas va entraîner, daprès lavis de tous les experts, la destruction: 300.000 emplois au Sri Lanka, et un million en Indonésie, mais aussi un million dans lUnion

européenne, des centaines de milliers dans le Maghreb en tout plus de 30 millions demplois sur la planète . Bref, il est urgent de ne rien faire qui entrave, raz de marée ou pas, «la liberté de circulation des hommes, des marchandises et des capitaux».Il y a cent cinquante ans un certain Karl Marx disait que la bourgeoisie moderne avait «noyé les frissons sacrés de l'extase religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste». La Commission européenne de 2005 a su reprendre à son compte lhéritage de la «bourgeoise moderne» de 1848.

 

Fonds structurels européens : lorsque Neelie Kroes mange le morceau

Jacky Hénin (2)

Dans une interview accordée au quotidien Les Echos et au Financial Times, Neelie Kroes, Commissaire européenne à la concurrence, se propose den finir avec les aides dEtat à caractère régional dans les «pays riches». Pour justifier cet objectif, elle se réclame «dun mandat très clair reçu des Etats membres» de lUnion européen. Ainsi, le mot dordre est «moins daides dEtat et surtout mieux daides dEtat». Il sagit, en fait, tout à la fois de restreindre le volume des aides et de les réserver aux dix nouveaux membres de lUnion européenne.

Cela seffectuera, bien sûr, au nom de lintérêt général de lEurope (patronale), dont est garante la Commission européenne grâce à son indépendance (de la volonté des peuples). Madame Kroes est dailleurs une figure emblématique de cette indépendance et de ce souci de lintérêt général. En effet, na-telle pas siégé dans les conseils dadministration et de surveillance de P&O, Thalès, Volvo, Lucent technologie, Lockheed Martin…. ? Chacun connaît le caractère philanthropique de ces entreprises en particulier en matière demploi et de bien être social. Certes, Madame Kroes, vous avez raison quand vous constatez quil y a en Europe des pays riches et des pays pauvres. Mais, sachez quil y a aussi des régions pauvres dans les pays riches, il y a même des pauvres dans les régions riches des pays riches. Cest pourquoi, les fonds structurels européens restent indispensables dans le Nord-Pas-de-Calais, comme en Andalousie ou en Wallonie, ou dans dautres régions, pour un aménagement du territoire qui soit équitable.

Il est plus que nécessaire daider au développement des nations les plus pauvres dEurope, en particulier en matière dinfrastructures publiques. Mais, ce développement pour quil soit durable, naccroisse pas les inégalités entre les populations concernées, et profite à tous en enrichissant lensemble des territoires de ces pays, doit reposer sur une demande intérieure stimulée et non sur le tout exportation et la mono-activité. Sinon les subventions européennes ne feront que favoriser le dumping social et les délocalisations, sans guère améliorer le niveau de vie.

Reste que, Madame Neelie Kroes ninvente rien, elle applique simplement la philosophie de la Constitution européenne : «la concurrence libre et non faussée». On peut juger à laune de la détermination de Neelie Kroes à appliquer ce dogme libéral, par le caractère dérisoire des «coopérations renforcées» dans le domaine social tant vanté par les prosélytes sociaux-libéraux de la Constitution Giscard : Ce sont des tigres de papier.

Cest pourquoi partisan acharné du NON à la Constitution, je me ferais paradoxalement le meilleur propagandiste des propos de Neelies Kroes car ils sont édifiants sur lavenir que nous préparerait cette Constitution, si par malheur elle venait à être adoptée. n

  1. La revue débute une chronique régulière visant à info rmer sur les choix et décisions des institutions européennes.

  2. Député européen du PCF