Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Bouches-du-Rhône : ouverture des premiers chantiers de la sécurité d'emploi ou de formation

La proposition d'une sécurité d'emploi ou de formation fait l'objet dans les Bouches-duRhôn e d'une campagn e et d'expérimentations militantes à partir des situations de salariés confrontés à des restructurations et des fermetures de sites ou de celles de chômeurs en lutte pour leur retour dans l'emploi.

Pour cela, un collectif a vu le jour dans la direction départementa le du PCF. Il s’agit de faire de la sécur ité d'em ploi de format ion un object if soc ial et une démar che.

En septembr e 2003, sous l'impu lsion de ce collect if, une initiative dépar tementa le dans les quar tiers , loca lités , bass ins d'emploi et entr eprises a été lancée : La cara vane dépar tementa le pour l'emploi.

Celle-ci a perm is d'aborder de nom breux thèmes tels que : la sécur ité sociale, les salaires, les con ditions de tra vail et son organisat ion, le chômage, la pr écar ité, la format ion, les déloca lisat ions , les pr ivat isat ions , la r e tra i te et b i en enten du leur financement et l eur contrô le.

Le fil con ducteur p our d onner une co h ér ence à ces actions et pour les ar t icu ler est l a rec h er c h e d’un progrès de la sécurité d'em ploi et de sa qualification par la format ion. Ainsi par exemple, sécur iser l'emploi est la con dition pour maintenir et développer la retra ite par répar tition, tand is que le développement de l'emploi qualifié, créateur de richesses , permet d'accr oître les salaires et d'empêcher auss i de se « placer » sur des productions à bas coûts salariaux, et donc en concurr ence directe avec les pays y recourant mass ivement .

Nous avons commencé à populariser cette proposition avec tracts , pétitions , badges, calicots , peintur es, bus, musique, presse , rassemb lements sur les places de marché, devant les entr eprises...

Cette cara vane a permis, par exemple, de reprendre pied dans cer taines entr eprises, dans des sites comme celui de l'étan g de Berr e ou du bass in de Fos sur mer, d’Aix les Milles et notamment d ans la vallée d e l'Huveaune ,

« Marse ille 11e   arrondissement », déjà fortement touchés par la casse industr ielle et par le chômage.

Nombre de grandes usines et industr ies par tent en laissant des familles entières sans ressour ce, dans la précar ité et la pauvreté . Les militants d e ces entr eprises (parfois même touchés par cette dur e réa lité) avaient quelque peu abandonné l'act ivité sur les lieu x d e tra vail.

La cara vane pour l'emploi leur a donné l'occas ion de cibler d es entr e pr ises , comme l'usine Nestlé connue p ar les Marse illaises et les Marse ill a i s tant l'odeur du chocolat et d u café em b aument les alentours .

Les nou veaux liens tissés avec les salariés ont permis, face à la décision de la direction de Nestlé de fermer le site, de créer, avec les organisations syndicales (CGT-CGC), les salariés et les assoc iations du quar tier, les par tis politiques, un front du refus avec la créat ion d'un collectif de défense regroupant une trenta ine d'organisations.

Des initiatives sont élaborées avec tous les acteurs de ce mouvement . Cela a permis d’imposer cer tains reculs et de mettr e sur table avec le représentant de l'Etat et les élus des propositions alternat ives pour le maintien de l'usine sur le site, sa modern isation et son développement .

Une journée d'action s'est tenue le samed i 16 octo bre avec 1500 personnes faisant une chaîne humaine autour de l'entr eprise symbo lisant notr e décision commune de mettr e cette entr eprise sous la protect ion des citoyens ainsi qu'un forum de 500 personnes qui ont débattu sur des solutions alternat ives.

Le collectif dépar tementa l a également proposé que la journée du 16 octo bre chez Nestlé soit le départ de la caravane N° 2 qu'il nous reste aujour d'hui à préparer. Notr e am bition est de tra vailler concrètement avec les entr eprises qui ont décidé des suppr ess ions d’emplois et des cessat ions d'activité.

D'un front du refus, nous sommes aujourd'hui dans le débat sur la perspective.

Cela non seulement avec les « Nestlé », mais également partout où les salariés sont confrontés aux déloca lisat ions, plans sociaux et cessat ions d'activité.

La région PACA est fronta lement touchée par les questions d’emploi : Total, BP Chimie, Napht achimie, Atofina, Arcelor, Ascometa l, Nest lé, Lustucru , Pioule, Silk Epil, Diebold, la filière maritime, SNCM et la réparat ion navale etc.

Nous sommes face à une onde de choc contr e le tissu industr iel de notr e région et ses emplois.

Une rencontr e avec les assoc iations d’Arles a mis en place un collectif pour la défense de l’usine Lustucru dont la maison mère veut fermer le site camar guais en prétextant les difficultés engendrées par les inon dations dans l'entr eprise, mais dont la véritable raison est une volonté de délocaliser là où le coût du tra vail est le plus faible.

Le collectif fédéral a auss i été dans la dernière période contacté par des chômeurs commun istes . Ils ont souha ité tra vailler sur la proposition de sécur ité d'emploi de formation. Du cou p, il existe maintenant un collectif des privés d'emploi au sein même du collectif emploi. Il est encor e à l'état embr yonna ire, mais commence à aller au-devant des chômeurs , prend des contacts , confronte et débat.

Sur quelles difficultés buttons-nous ?

En premier lieu, les difficultés liées au conte xte politique : nous nous heur tons au sent iment de fata lité et à une difficulté liée à la prise en com pte insuffisante , par les intéressés , du niveau des enjeux auquel ils sont confrontés .

Trop souvent les atta ques contr e l'emploi et les acquis sociaux sont vécues comme des mauvais cou ps, et seulement comme des mauvais cou ps, décidés par des directions d'entr eprise, mais n'ayant pas de liens entr e eux.

Il suffirait donc de mener une lutte très loca lisée pour essa yer de freiner la bruta lité de ces décisions. Ce sent iment a été constru it depuis des décenn ies par une impr essionnante bata ille d'idées qui, dans les entr eprises, structur e aujourd'hui la pensée du salariat d'autant que, la dispar ition du politique à l'entr eprise n'a pas permis de la contr er, faute de montr er les contra dictions entr e le discours patronal et ses choix effectifs et de constru ire des alternat ives.

Il s'agit, pour les classes dominantes , de remo deler la société pour renforcer et pérenniser leur domination.

Pour cela la concurr ence est intr oduite sur tous les terra ins :

  • celui de l'em ploi avec toutes les formes de pr écar ité multipliant dans les entr eprises les statuts multiples et rendant plus difficile la con vergence des luttes , celui des processus de tra vail par l'instaurat ion de rappor ts marchands entr e différents ser vices dans une même entr eprise, imposant aux salariés un com por tement conforme à leurs critèr es de gest ion,

  • celui des rappor ts sociaux, par l'individualisation des salaires, des carr ières instaurant la concurr ence et la com pétitivité entr e les salariés, et cela non seulement sur la performance éventue lle, mais auss i sur la capacité à êtr e un relais de la politique patr onale.

Si à ces ingréd ients , nous ajoutons qu'une cer taine gauc he, se réclamant de la défense du monde du tra vail pour aller au pouvoir, n'a pas con duit ensu ite les politiques es pérées par celui-ci, nous avons là le parfait cocktail du renoncement et du fata lisme ouvrant la por te à un individualisme de repli sur soi.

Pour tant des potent ialités permettant d'inverser cette tendance existent . Elles rés ident dans les contra dictions mêmes qui sont à l'origine de la crise structur elle dura ble que nous conna issons :

  • avec, d'une par t, le besoin d'invest ir dans la format ion, la recherche et les qualificat ions et, de l'autr e, l'obsession de rechercher des économ ies sur le coût du tra vail,

  • avec, d’un côté , les exigences de mob ilisat ion des intelligences , con dition d'efficacité des processus de travail et, à l’opp osé, le dictat patr onal dans la prise de décision et la domination des critèr es financ iers des grands groupes. L’intérêt des actionna ires passe avant toute autr e cons idérat ion telle que la sécur ité au tra vail, la format ion et même le développement de l'entr eprise, avec, d’un côté , le besoin énorme de par tages et de coo pérat ion, et de l'autr e, le dogme de la concurr ence et du marché.

Face à cela, nous cherchons à montr er que les critères de gest ion de la renta bilité financ ière et le sout ien public au marché et à la concurr ence , au cœur du consensus entr e le patr onat et les politiques libéra les et sociales-libéra les aggravent les difficultés des entr eprises et con duisent à l'éc hec.

Il s'agit donc de constru ire, non seulement une riposte contr e les mauvais cou ps, mais auss i d'engager un débat sur des propositions alternat ives pour l'act ion.

Un tel débat doit critiquer les propositions simplistes , telles que celles de l'inter diction des licenc iements qui ne traitent pas les problèmes réels auxquels sont confrontés les salariés et les entr eprises (alors que chaque année plus de 1,5 millions de salariés changent d’entr eprises ou de poste) .

Il s 'agit d 'em pêcher effect ivement les licenc iements et le passa ge dans le chômage ou la précarité :

Soit en proposant des mesur es alternatives à celles des suppr ess ions d'emplois, en rédu isant d’autr es coûts que ceux des salaires et cot isat ions sociales ut iles à toute l a soc iété , ou encor e d es em p l o i s . P ar exemple en s’atta quant aux charges financ ières, aux coûts du capital, aux gâchis matér iels, en élevant les qualifications , en développant de nouveaux projets s’appuyant sur une politique de rec herche publique et privée. Ce qui nécess ite de commencer à desserr er les contra intes des mar chés financ iers et des banques avec la mise en place d'un Fonds régional pour l'emploi et de la format ion (voir ar ticle p. 4)

Soit, lors que des suppr ess ions d'em plois sont inévitab les, en assurant des reclassements maîtrisés par les salariés, garant issant la cont inuité des revenus et des droits sociaux entr e les deux emplois, même dans une période de format ion si nécessa ire. Ce qui implique un financement mutua lisé des entr eprises et la créat ion d'inst itut ions nouvelles pour prendre en charge et organiser les périodes trans itoires.

Nous voyons bien que pour faire reculer cette fata lité, il est nécessa ire d'opposer à la notion de com pétitivité et de renta bilité des choix qui répondent aux besoins de développement et d'épanou issement de l'human ité tout entière.

Quels enseignements tirer de notre « caravane pour l'emploi » ?

24 initiatives se sont tenues dans le cadre de la « cara vane pour l'emploi ».

Elles étaient des actions volontar istes pour aller au débat sur les quest ions de l'emploi et avancer l'idée d'un système de sécur ité d'emploi de format ion. Mais nous avons vu les limites . En effet, individuellement chaque initiative a été un succès . Mais le mou vement d'ensem ble que nous recherchions n'a pas encor e vu le jour.

Nous avons été confrontés à la difficulté liée au conte xte politique et également celle de la com plexité des problèmes qui se posent . Les annonces de délocalisation, les casses de l'em ploi se multiplient et chaque situat ion différente deman de un tra itement singulier.

Dans cette guerr e sociale les intér essés atten dent « du concr et ». C'est-à-dire essent iellement les réponses immédiates aux problèmes imméd iats . Il n’est donc pas simple dans ce conte xte de tra vailler la visée d’une trans format ion de la société.

Ce constat nous a con duit à tra vailler selon deux axes :

  • Le premier est de mener un tra vail d’informat ion, de révélations , d’explicat ions , de propositions avec des débats, des initiatives, de la présence devant les entr eprises pour une bata ille idéologique.

  • Le second est d’êtr e co-moteur du rassemb lement des salariés et des populations confrontés aux difficultés . C’est le tra vail fait par les commun istes de la Vallée de l’Huveaune pour Nestlé avec aujourd’hui la volonté d’aller vers une conférence sur l’em ploi à Marse ille. C’est le tra vail fait par les commun istes arlésiens pour Lustucru . C’est le tra vail qui reste à concrét iser sur la filière de la chimie, la méta llurgie, le Por t, etc .

La cara vane pour l’emploi N°2 que nous proposons cette année s’efforcera d’avoir cet objectif.

LUSTUCRU, À ARLES, SORT DE L'EAU

Après la dernière inondation du site de Lustucru à Arles (Bouches du Rhône), le groupe Panzani avait décidé de fermer le centre de production et de mettre au chômage les 150 salariés.

Après 8 mois de lutte, le projet de redémarrage de l'entreprise défendue par les salariés est sur le point de voir le jour. On semble s'orienter vers la constitution d'une société coopérative. La phase d'étude est pratiquement terminée et l'intervention citoyenne sera déterminante pour que ce projet se concrétise. Afin de faire connaître aux arlésiens et plus largement à la région la nature de ce projet et les exigences pour sa pérennisation, un « collectif de lutte pour la reprise du site Lustucru » a été créé. Visant aussi à renforcer la viabilité économique et sociale de ce projet, ce collectif est ouvert aux associations, syndicats et citoyens. Le collectif emploi-entreprises de la fédération du PCF est aussi partie-prenante de celui-ci.

CONTRÔLE DES FONDS EN PACA : UN LEVIER POSSIBLE POUR L’EFFICACITÉ SOCIALE

En Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le 22 octobre dernier, le Conseil régional a créé une commission régionale d'évaluation et de contrôle de l'utilisation des aides publiques octroyées aux entreprises.

Celle-ci a pour objectif : « de limiter, d'une part, les risques de délocalisations d'entreprises et des fermetures d'établissements de filiales de grands groupes et d'autre part les aides aux entreprises qui ne s'investissent pas durablement pour le développement du territoire régional en termes d'emploi (création et maintient), de respect de l'environnement et de responsabilité sociétale dans son ensemble et afin d’évaluer l'utilisation et le bon usage des aides accordées aux entreprises …

Cette commission sera présidée par le Président du conseil régional...(pour)...atteindre la composition suivante :

  • 7 Conseillers régionaux,

  • le Préfet de région et trois représentants des services déconcentrés de l'État,

  • 7 représentants d'organisations syndicales de salariés représentatives,

  • 7 représentants du patronat,

  • 4 personnalités qualifiées et désignées par le président du conseil régional et le président du CESR. »

Elle aura pour mission :

« de suivre, pour les entreprises bénéficiant d'aides directes, les créations d'emplois (en CDI) et le respect des critères environnementaux, de formation et ceux liés aux pratiques sociales qui seront adoptées à l'issue de l’élaboration du schéma régional de développement économique,

  • de vérifier la bonne application des critères et le respect de l'engagement des entreprises en termes de créations d'emplois,

  • de formuler des propositions à l'exécutif régional sur les mesures à prendre si une entreprise ne remplit pas les engagements affichés au départ dans la convention qui la lie de la région, notamment en termes de créations d'emplois. Ces mesures pourront aller jusqu'au remboursement de l'aide régionale...

...seront habilités à saisir la commission les personnes suivantes : le Président du conseil régional le Président du conseil économique et social régional, les Parlementaires de la région, les présidents des conseils régionaux, les maires, les secrétaires des comités d'entreprise et comités d'établissement, dûment autorisés et les délégués syndicaux après validation de leur saisine par l'union départementale. ».

Cette décision sera un levier pour les élus et les salariés de PACA afin de responsabiliser les entreprises sur l'emploi et la formation. Elle devrait permettre de contrôler l'usage des fonds publics par les entreprises, d’agir pour empêcher leur gâchis et aussi d'évaluer l'efficacité des dispositifs d'aide existants. Cela pourrait permettre, dans le cadre du bilan annuel envisagé et avec des critères d’évaluation à définir, de promouvoir les dispositifs incitatifs à l’emploi les plus efficaces, remettre en cause les plus déficients et d’en créer de nouveaux.

SAGEM-SNECMA : une privatisation inavouable

La responsabilité du gouvernement

Contr e l’obtention de marchés juteu x, le gouvernement veut pousser Sagem à s'engager dans une OPA/OPE sur la Snecma.

Sans l’accor d et l’app ui du gouvernement , une telle opération est inimaginable et infaisab le. Ce dernier a pris soin de choisir Sagem, une entr eprise frança ise, afin que les intérêts nationau x apparaissent comme étant préser vés, au moins dans un premier temps .

Une opération avant tout financière soutenue par les banques :

Si l'argument techno logique est avancé pour just ifier cette opérat ion, la motivation principale est financ ière. Avec la privatisation de la Snecma , il s'agit d'élargir le champ d’action des marchés financ iers pour leurs placements et de déres ponsa biliser l'État . Or, ce secteur est straté gique pour l’emploi qualifié et pour des centa ines de sous tra itants , déjà étran glés par la gest ion actue lle de la Snecma qui prépare ainsi son changement de statut .

Pour financer cette opérat ion de 1,25 milliards d’eur os, la Sagem va devoir faire appel au cré dit pour 900 millions d’eur os (1) que, selon son PDG Grégoire Olivier, le groupe

« n'aura aucune difficulté à négocier avec ses banques ». Une fois encor e le cré dit coule à flot pour les opérat ions financ ières contr e l'emploi, alors que ces cré dits sont si sélectifs pour les PME.

Après FimalacFacom , Sanofi-Avent is, une fois de plus nous avons un exemple d’une per vers ion du cré dit au profit des opérat ions financ ières. C’est dire le besoin de réor ienter toute autr ement les cré dits des banques et l’utilisat ion des ressour ces des entr eprises pour l’emploi et de la format ion.

1. Il est noté que 900 millions d’euros de crédit représentent plus que tous les Fonds publics attribués par les vingt-deux régions de France pour leur intervention économique en direction des entreprises.

 

Par Fernandez Gaëtan , le 30 septembre 2004

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