Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Rassembler pour transformer radicalement la construction européenne

Face aux besoins de trans format ion sociale rad icale, avec les défis de la Révolution informat ionne lle, de la mond ialisat ion dominée par le capital, de l'hégémon ie amér icaine, il y a absolument besoin, d'une autr e construct ion européenne .

À ce stade il semb le que nous pouvons essa yer de réfléchir à trois grandes quest ions :

Face aux contra dictions croissantes entr e objectifs sociaux affichés et réalisations effect ives en France et en Europe, comment aider l'inter vention et le rassemb lement pour :

Constru ire un nouveau “ modèle social européen ” ;

Faire avancer une Eur o p e act ive p our constru ire un monde de paix, de désarmement et de co-développ ement ?

Quelles con quêtes de moyens financ iers et de pou voirs nou veau x peut-on viser et organiser à par tir des inst itut ions existantes en cr ise, en France et en Europe, pour avancer dans une cons truct ion commune permettant et favor isant inter ventions locales, initiatives nat ionales souveraines et coélaborat ions européennes ?

Comment cré dibiliser à par tir des luttes et des débats régionaux et nationau x une démar che de contr e-proposition dans le débat électora l des européennes face aux tentat ives de bipolarisation Droite PS ?

Je veux présenter quelques pistes pour nourr ir le débat

A) Quelle ambition pour l'Europe sociale ?

La quest ion posée ici renvoie à la hauteur , la hardiesse des objectifs sociaux visés, en même temps que leur réalisme.

C'est absolument essent iel. On a tous en tête en effet l’échec formidable de l'objectif de "retour au plein emploi" por té par L. Jospin, mais auss i par Bruxelles et même par Raffarin. C’est dire si cet objectif n’est pas à la hauteur des exigences d’aujour d’hui. Il y a des défis communs à relever pour un nouveau “ modèle social européen face à la progress ion des emplois précaires et atypiques à côté d'un chômage mass if et dura ble. Précar ité que l'on présente précisément comme la seule réponse suscept ible de conc ilier lutte contr e le chômage et exigence de soup lesse , de mobilité et d'efficacité, avec les nouvelles techno logies de l'information et de la commun icat ion.

Ces enjeux d'emploi et de format ion sont cons idéra blement amplifiés en Europe par les défis du vieillissement démograph ique et du freinage de la nata lité qui expriment ensem ble le besoin vital pour les tra vailleurs européens d'une sécur isation de tous les moments de l'existence à par tir des besoins de sécur isation et de promot ion de l'emploi et de la format ion.

La proposition de Sécur ité d'emploi ou de format ion et ses divers chantiers , autour desquels d'ailleurs pourra it se structur er un mou vement nat iona l sur l'em ploi, peuvent permettr e de dépasser la contra diction " Défense des acquis/Adaptabilité face aux mutat ions économ iques"

 

B) Des moyens financi ers e t des pouv o irs pour sécuriser l'emploi, la formation, tous l es moments de la vie :

Il s'agit de faire reculer l a d om inat ion d es mar c h és financ iers à par tir des luttes décentra lisées et convergentes en imposant de nouveaux financements.

Cela ren voie au x b u dgets nat ionau x et européens et au cré dit et à la monna ie avec la BCE et le système européen de banques centra les (SEBC).

Il conviendrait d'abord de chercher à dégager les budgets nationaux et communauta ires des contra intes du Pacte de stab ilité et de mettr e radicalement en cause l'obsess ion gouvernementa le du déficit zéro.

De même, il s'agirait d’utiliser autr ement les moyens des fonds structur els et du Fonds social européen avec, sous le contrô le décentra lisé des salariés, des citoyens, des élus, des obligations de résu ltats chiffrés en matière d'emploi et de format ion.

Enfin, on pourra it viser à organiser systémat iquement des rencontr es européennes d’élus et d'organisations syndicales pour chercher à promou voir un développement hardi du contrô le de l'uti- lisation des fonds publics attr ibués aux entr eprises, avec des obligations de résu ltats pour l'emploi soumises à l'inter vention des comités d'entr eprises, des tra vailleurs , des élus terr itor iaux .

Le second niveau, le plus impor tant , concerne celui du cré dit de la BCE et du SEBC. La grande quest ion est en effet de chercher à trans former les relations banques-entr eprises, décisives pour s'émanc iper de la domination des marchés financ iers .

Il faut êtr e attent if ici à l'expérience qui a été celle des bonifications d’intérêts octr oyées par la Communauté européenne sur les prêts accor dés par la Banque européenne d’invest issement (BEI) en contr epar tie de résu ltats chiffrés sur l'emploi (1994).

Le bilan a démontré une grande efficacité de ces mesur es, bien supér ieur e à celle des allègements de cotisations sociales patr onales au nom de l'emploi.

Cette expérience confirme la per tinence de la proposition déjà avancée d'une conversion en France des aides actue lles à l'emploi sous forme de baisses de charges sociales patronales en dotation d'un Fonds national et décentra lisé dont l'objectif sera it de prendre en charge, par bonifications, une par tie des intérêts à moyen et long terme versée aux banques par les entr eprises sur les cré dits finançant leurs invest issements . Cette bonification sera it d'autant plus impor tante que les invest issements ainsi financés programmera ient plus d'emplois et de mises en format ion.

Ce dispos itif, à l'app ui des luttes , permettra it de commencer à impliquer les systèmes bancaires et à réor ienter les investissements des entr eprises pour réaliser en pratique la priorité donnée à l'emploi.

Cela permettra it, de commencer à affronter le verr ou du refinancement de la BCE, laquelle, aujour d'hui, n’a pas à se souc ier de l'emploi et de la format ion.

À l'app ui de ces bata illes de terra in pour sécur iser et promouvoir l'emploi, on pourra it alors mettr e en cause les missions et la politique actue lle de la BCE. Celle-ci p ourra i t mob iliser ses capacités de créat ion monéta ire pour l'emploi et son efficacité avec la format ion, en Europe, en développant une politique sélective de baiss es des taux d'intérêt de ses refinancements d es b an q ues ordinaires pour la réalisation d’invest issements créateurs d'emplois efficaces . Au contra ire, ces tau x sera ient r elevés , pour les cré dits aux placements financ iers , d e concer t avec des taxations commun es sur le capital et les mouvements de capitaux spéculatifs.

Sur cette base il faut remettr e en cause le principe actue l d'indépendance de la BCE. Elle pourra it, au contra ire, êtr e contrô lée et orientée par une réun ion du Parlement Européen et des Parlements nationau x.

Ces derniers , en dialogue avec leur banque centra le nationale res pective au sein du SEBC, disposera ient d’un pouvoir de modulation de la distr ibution du cré dit dans leur pays, grâce à la poss ibilité des bonifications publiques d’intérêt déjà évoquée.

Simultanément , il s'agirait d'ouvrir tout ce champ à l'inter vention des salariés, des comités d'entr eprises et de groupes nationau x et européens , des syndicats , des assoc iations , des élus, avec le pouvoir de proposer des projets d'emploi et de format ion, de développement des act ivités , suscept ibles de solliciter, sur le terra in, le cré dit des banques.

Une concer tat ion de toutes ces inter ventions décentra lisées pourra it êtr e organisée jusqu'au niveau européen, avec une trans format ion profonde du Comité économ ique et social européen et du Comité des régions.

Cette construct ion poss ible, à par tir des luttes faisant avancer de nouveaux rappor ts de force politiques autour de propositions novatrices, appelle la con quête de pouvoirs effectifs d'inter vention des salariés dans les gest ions des entr eprises pour les réor ienter avec de nouveaux critèr es d'efficacité sociale. Cela concerne par ticulièrement les entr eprises publiques.

Tout cela laisse entr evoir alors tout autr e chose qu'un repli souverainiste ou une fuite en avant fédéraliste : la pers pective d’un nouveau type de construction confédérale de l'Europe permettant de maîtriser et de commencer à dépasser les marchés.

C) Vers une nouvelle allia nce avec les pays émergents et en développement pour une Europe active à construire un monde de co-développement :

1 La première question est celle d'une contre-offensive face aux délocalisations :

Il y a en cette matière deux extrêmes domma geables pour l'efficacité économ ique et sociale :

  • soit l'inter diction pure et simple des délocalisations ;

  • soit l'octr oi d'aides pour surenc hérir sur la baisse du coût salarial par allégement des cot isat ions sociales ou aides directes .

Comment dépasser ces deux extrêmes ?On pourra it d’un côté prendre des dispos itions imméd iates et à plus long terme de sécur isation concernant tous ceux qui risquent d'êtr e touchés par des délocalisations . Cela pourra it concerner par exemple des mises en format ion avec maintien à niveau des r evenus à p ar t i r d ' un Fonds spéc ial de protection et de promot ion des salariés. Cela permettra it, sans chômage, de réaliser les modern isations néces saires ou d’assur er de b ons rec lassements choisis avec l’expansion d’activités fondées sur les nouvelles techno logies et les ser vices corr es pondants .

D’un autr e côté , on chercherait à organiser des coo pérat ions pour sécur iser l’em ploi et la format ion des diverses p ar t ies en cause , en visant le co-développement des peuples, avec nos voisins du Sud et de l’Est et jus qu’à l’échelle de toute la planète .

2 Pour un nouveau "plan Marshall" non dominateur et une monnaie commun e mondiale de coopération :

À par tir de l'Union Européenne , ou de pays de l'Union comme la France , on pourra it chercher à organiser de très nouvelles coo pérat ions avec les pays en développement et émergents .

Dans cette pers pective on pourra it conce voir la mise en place de nouvelles aides publiques européennes qui, dans l'es prit de ce qui serait une nouvelle aide Marshall mais non dominatrice, s’effectuera it par créat ion monéta ire de la BCE.

Ces aides nouvelles con ditionnera ient des cré dits favorisant l'essor des productions nationales, des emplois et des format ions dans les pays ainsi aidés, les quels achètera ient les équipements nécessa ires aux pays européens dans le cadre de protoco les très nouveaux de coo pérat ion. Cela con duirait à une toute autr e utilisation de l'eur o.

Sur ces bases , l'Union Européenne pourra it inter venir pour des trans format ions très profondes du système monéta ire interna tional et des con ditions de financement à par tir de la Banque mond iale et du Fonds monéta ire internat iona l. Il s’agirait de produire une monnaie commune mondiale de coopération pour un co-développement à par tir des Droits de tirage spéc iaux (DTS) du FMI faisant reculer le poids et le rôle du dollar dans le monde .