Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Lutte contre le chômage et retour à l’emploi

Introduction de Marie Simone Ivorra sur le thème de l’indemnisation du chômage

En évoquant l’indemnisation du chômage, le RMI, le RMA, je ne peux m’empêcher de penser au film Bowling for Columbine ”.

Michael Moore y évoque notamment l’assass inat d’une petite fille blanc he par un enfant noir de 6 ans . L’enfant assass in venait d’êtr e chassé de son domicile avec sa mère. Celle-ci, seule au chômage ne pouvait plus payer et vivait de ce que l’on appelle làbas : “ Le programme Aide sociale contr e emploi ”. Aide sociale contr e emploi, manifestement , l’idée fait son chemin dans la “ vieille Europe ”.

Les dirigeants eur opéens et frança is veulent trans former le système d’indemnisation des chômeurs en s’ins pirant de ce conce pt ultra libéra l qui prédomine aux USA.

Notre système d’indemnisation a été fondé pendant une période du plein emploi après guerr e, avec un taux de chômage faible. Il s’a pp uyait sur un financement mutua lisé avec des cot isations patr ona les et sa lar iales , directe ment issues d u tra vail.

Avec le développement du chômage – depuis tr ois décen nies maintenant – ce système est entré en crise. Il y a au tota l plus de personnes à indemniser et moins de cotisations pour le faire. Le Patronat soutenu par cer tains syndicats , la droite, le Par ti Socialiste, confrontés à cette crise depuis des années , ont avancé des solutions qui n’ont fait qu’aggraver la situat ion.

Ce qui a prévalu en effet, c’est un refus de s’atta quer aux vraies causes du chômage. Face à la domination des marchés financ iers , ils ont cont inué à précon iser des mesur es fondées uniquement sur la réduct ion du coût du tra vail, la flexibilité des salariés, une moindre indemnisation en cas de perte d’emploi, un développement de l’ass istance minimale au lieu d’un revenu décent .

Tous les risques sont ainsi suppor tés par les producteurs de richesses , passant petit à petit d’un système mutua lisé et fondé sur la solidarité, à un système qui fait prendre et por ter tous les risques aux seuls salariés qui deviennent chômeurs . C’est le sens de la refondation sociale du Médef où il est affirmé qu’il faut savoir prendre le risque d’exister !

La crise du système d’indemnisation des chômeurs prend sa source dans l’insuffisance d’emplois utiles, stables correctement rémunérés et l’insuffisance de développement humain.

Renta bilité financ ière des groupes et des entr eprises, d’un côté , et de l’autr e baisse du coût du tra vail, intér im généra lisé dans cer taines entr eprises, contrats précaires, CDI de 2 heures par jour et bientôt contrats de tra vail à moins de 4 euros de l’heur e au lieu de 7, donc bien en dessous de la réglementat ion en vigueur, insuffisance des format ions qui ne permettent pas à un retour à l’emploi : c’est d’abord de cela dont souffre le régime d’indemnisation !

Cela conduit à présenter une 1re proposition :

Les revendications concernant le système d’indemnisation doivent être couplées avec l’action pour le développement de l’emploi de qualité et de la formation.

Cela appelle des actions concrètes , notamment :

  • S’o pp oser au x licenc iements d its p our mot if écono miq ue , d onner d e nouveaux droits aux salariés, notamment à des pr opositions alternat ives.

  • Mieu x in d emniser les pr éca ires , accr oître la période de référence pour les droits à l’indemnisation pour ceu x qui empilent de cour tes périodes d’em plois précaires.

  • Péna liser l a montée des emploisprécaires par une modu lation du taux de cot isat ion patr onale.

  • Transformer les emplois précaires en emplois stab les.

  • Augmenter cons idéra blement les dépenses pour la formation, trans former les inst itut ions , instaur er de nouveaux finance ments ,…

  • Mon expérience dans le mouvement des chômeurs , m’amène à constater que pas plus que la diminution des allocat ions pour contra indre ceux-ci à mieux rechercher un emploi, que l’empilement des dispos itifs d’inser tion qui ramènent vers toujours plus d’assistance jus qu’au minimum vieillesse pour cer taines personnes , n’ont eu d’effet sur leur retour à l’emploi et à un revenu décent .

Au contra ire, ces réformes de l’indemnisation, ont eu pour consé quence d’amplifier la pauvreté pour arr iver à la misère en cantonnant dura blement des milliers de personnes en dessous du seuil de pauvreté et ce faisant , pour en arr iver à diminuer dans les faits leurs potent ialités profess ionne lles, leur capacité à se former, empêcher leur mobilité et toute poss ibilité de promot ion.

Dans un cont inuum , ces réformes ont pour vocat ion de “parquer” des personnes , et de const ituer une soupape avant toute explosion ou implosion. Ainsi même en période de croissance économ ique, ce sont ces mêmes personnes qui en sont écar tées . Sur les terr itoires où elles vivent, même l’emploi qui s’y développe ne leur bénéficie pas, tant il y a de can didats mis en concur rence sur ces postes .

Or, trans former la société c’est auss i prendre les personnes comme elles sont , là où elles sont . Ainsi une autr e politique de l’emploi et de son accès , une autr e politique de la format ion professionne lle, dans un parcours sécur isé permettant une mobilité de promotion, deviennent -elles le para digme à reten ir face au système qui marchandise tout développement humain.

La 2me proposition découle de ces réflexions :

Il faut parvenir à créer progressiv eme nt un système d’indemnisation qui assure un bon revenu aux privés d’emploi et qui ne con court

pas à faire pression à la baiss e du coût du travail de ceux qui en ont un. En réduisant la concurrence entre chômeurs et salariés on favorise leur rassemblement.

Cela appelle notamment :

  • une revalorisation des minima sociaux pour les porter jusqu’à un Smic revalorisé avec l’objectif d’intégrer l’ensem ble des populations, dans un système unifié rassemb lant les indemnisés, les fins de droits, les Rmistes , les futurs Rmastes , les sans ressour ce.

  • Le rétab lissement de l’égalité et des droits des chômeurs

  • Pour les jeunes de 18 à 25 ans , une allocat ion autonom ieformat ion et des mesur es spéc ifiques en faveur des plus défavorisés d’entr e eux.

  • Des pouvoirs nouveaux pour les chômeurs comme pour les salariés et pour les organisations qui les représentent , ce qui suppose une refonte des inst itut ions qui se consacr ent à l’emploi et à la format ion, un contrô le démocrat ique sur les format ions et leurs débouc hés en emploi, sur l’utilisat ion des fonds.

Face à la montée du chômage et à l’accr oissement des indemnités , le Medef, la droite, et les gouvernements de gauc he se sont engagés dans une fuite en avant :

  • Avec la suppr ess ion du jour au lendemain des aides du fonds social Assed ic (il ne reste que quelques aides d’urgence) pour des allocata ires en difficultés les obligeant à avoir recours à l’assistance de divers dispos itifs,

  • L’impos ition de la dégress ivité des allocat ions qui devait préten dument inciter à une reprise plus rap ide d’un emploi,

  • L’instaurat ion du PARE, forme contractua lisée où l’allocata ire s’engage, s’il veut toucher des indemnités, à acce pter un emploi proposé et non choisi,

  • La réduct ion des aides à la format ion financées par l’assurance chômage,

  • La décentra lisat ion du RMI et la créat ion du RMA où des allocations d’Etat ser vent à la const itut ion d’un salaire.

Rien n’y a fait, la crise perdure, les chômeurs se sont appauvris, rédu isant dura blement leur mob ilité et n’ont pas plus retr ouvé un emploi. Si bien que l’Assed ic n’indemnise plus aujourd’hui que 57 % des deman deurs et il est prévu d’en atte indre 43%, (t rois sur dix) avec le bascu lement de plus de 800.000 d’entr e eux d’ici à la fin 2005, vers l’ass istance ou vers rien. C’est de la barbarie !

On crée le RMI parce que des dizaines de milliers de personnes se retr ouvent sans ressour ces et sont dura blement éloignées du marché du tra vail. Mais le RMI ne marche pas, il ne permet pas le retour à l’emploi. On crée alors le RMA. Celui-ci, auss i réact ionna ire soit-il, montr e que le retour à l’emploi passe par l’entr eprise. On essa ie de déconnecter l’indemnisation de l’act ivité à l’entr eprise, mais on est bien obligé de revenir à l’entr eprise !

 

J’appui e la 3me proposition sur cette idée ;

Il faut lier le système d’indemnisation et l’insertion à l’entreprise.

Cela d’autant , que développer une sécur ité des parcours relève d’un processus dont les éta pes doivent protéger et aider, notam ment les plus fragilisés. L’ass istance ne protégeant pas, les revenus ne peuvent êtr e déconnectés d’une activité, d’un emploi, d’une format ion. Si, au cœur de la crise du système d’indemnisation il y a bien la quest ion du nom bre et de la qualité des emplois, il faut bien accr oître le financement de ce système par la production de richesses supp lémenta ires. L’ass istance enferme dans la dépendance et fait des personnes des otages d’un système . Des Rmistes vont êtr e obligés un jour au l’autr e d’acce pter un RMA ! A l’opposé d e ce l a , il faut tra vailler le volet inser tion du RMI, ce qui implique de n o u v e a u x monta ges, au plus pr ès des bass ins d’emploi, ainsi que des financements p our accr oîtr e l’offre d’inser tion.

Para llèlement à l’act ion pour autr e politique de l’emploi, pour aller plus loin que le plein emploi tel qu’on a pu le désigner avec un taux de chômage de 4 à 5 %, pour suppr imer le chômage, il faut agir pour l’instau rat ion d’un autr e mode de financement et d’indemnisation qui aide à lutter contr e celui-ci, qui contr ibue à la créat ion de davantage de richesses ainsi qu’à une nouvelle conce ption de l’inser tion et de la format ion.

Cela me conduit à avancer une 4me et dernière proposition :

Il faut lier les luttes pour une nouvelle indemnisation du chômage à celles pour une autre gestion des entreprises et une autre utilisation de l’argent et du crédit.

Avec notamment :

  • Une modu lation des taux de cotisations patronales de telle sor te que les entr eprises qui licenc ient payent plus alors que celles qui maintiennent et développent l’emploi sera ient assu jetties à des taux de cotisations plus bas, cela sous le contrô le de l’inter vention des salariés.

  • Une trans format ion des exonérat ions de cotisations patr onales en aides par des prêts bonifiés pour des cré dits nouveaux permettant aux entr eprises de développer l’emploi.