Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil
 
 
 
 

Aéronautique : l’emploi et la formation au décollage

Avant projet pour un système de sécurité d’emploi ou de formation dans l’industrie aéronautique et spatiale.

L’évolution des techn ologies, les nouveaux process d’étude et de fabrication, la guerre économiqu e que se mènent les principaux constructeurs au niveau mondial imposent de faire du neuf, de rechercher avec tous les intéressés de nouvelles mani ères de produire, de concevoir l'entreprise à travers les territoires, d'organiser autrement le travail, d’élever massiv ement la qualification et la formation, de rechercher de nouveaux mode s de financements, de coopérer. Il s'agit en bref d'imaginer les entreprises du 21e siècle.

 

Le 32e congrès du Pcf a décidé de faire de notr e proposition de Sécur ité d’emploi et de format ion un axe for t de nos bata illes politiques pour la période qui s’ouvre.

Il le fait à par tir d'une situat ion grave de l’emploi dans notr e pays : environ 4 millions de personnes privées d'emploi et près de 5 millions de travailleurs précaires ou en sous emploi.

L'ampleur et la bruta lité de tels chiffres montr ent à l'évidence la profondeur de la crise.

Il s’agit mainten ant de sortir des discours et de passer aux tr avaux pratiques, en constr uisant des initiative s politiques for te s qui s'inscrivent dans la durée et dans le contenu.

Le 45e salon de l’Aér onaut ique et de l’Espace a une nou velle fois montré les formidables atouts humains et techno logiques que possè dent la France , l’Europe dans cette branc he.

L’in dustr ie Aéronaut ique et Spatiale va-t elle pouvoir jouer le rôle pour lequel nous avons toujours agi et même mar qué des points: une industrie au service des homm es, de l’emploi, du transport, des échang es , de la communication? La quest ion est posée !

Comme les autr es industr ies, l’industr ie Aéronaut ique et Spatiale est désorma is soum ise aux mêmes objectifs de gestion : « réduct ion des coûts , renta bilité financ ière, profits dits “ raisonnab les ”, privatisations, déloca lisat ions, externalisations ...etc ».

Ces choix se tradu isent par une press ion accrue sur le tra vail vivant en matière de salaire, d’emplois, d’organisation du tra vail, de sites industr iels...etc .

Ils menacent le développement de l’industr ie Aéronautique et spat iale qui pendant plus de quatr e décenn ies a reposé sur :

  • Une volonté politique for te d’exister face aux ambitions hégémon iques des Etats -unis.
  • Un statut social élevé avec un emploi stab le.
  • Un effor t constant en matière de recherche et développement .
  • Des coo pérat ions où la volonté de domination éta it relativement maîtrisée.
  • Une présence for te de l’Etat dans les entr eprises et les com pagnies aériennes .

En s'app uyant sur les acquis des 4 dernières décenn ies, mais également en pointant les limites de ce que l'on peut appeler l'état isme des nationalisations, les commun istes proposent de sor tir des sent iers battus en pariant sur les individus : leur inte lligence , leurs ca pacités créatr ices comme leviers essent iels pour constru ire une proposition d'une grande por tée politique.

Cette proposition, c'est celle de mettr e en place dans cette industr ie majeure un système de Sécur ité d'emploi et de format ion, système qui allie tout à la fois efficac ité sociale et efficacité économ ique.

La volonté des commun istes c'est de traiter autr ement les défis auxquels nous sommes confrontés .

Plusieurs défis sont à relever avec une série de propositions se con ditionnant les unes aux autr es.

1° Partir des besoins en plein développement

Dans le domaine civil des avions de plus de 100 places tous les exper ts prévoient un doublement des livraisons pour les 15 ou 20 prochaines années .

Aujour d'hui Airbus et Boeing livrent chacun un peu plus de 300 avions par an. Dans quelques années ce sera le double.

Prévisions mond iales d'ici 2010 :

  • 5300 avions commer ciaux.
  • 2000 avions régionau x.
  • 3000 avions d'affaires.
  • 5000 avions militaires.
  • 8000 hélicoptères.
  • Lancement de GALILEO.

En bref des charges de tra vail assurées dans tous les groupes pour des périodes de 2 à 5 ans .

Au delà de ces « plans officiels », nous pouvons auss i ajouter les besoins aéronaut iques de défense anti-incen die comme l’été vient d’en montr er l’urgence . Mais auss i, le défi de la trè s forte progression de la productivité et des baisses d’emploi corrélative s du type de gestion actuelle impos e de répondre autre ment à ces besoins avec une nouvelle orient ation des gestions .

L'industrie aéronautique et spatiale est cycliqu e

A des années où les comman des dépassent de loin le chiffre d'affaires, peuvent succéder des années de « vaches maigres » où les comman des sont inférieur es au chiffre d'affaires. Toute son histoire est faite de bosses et de trous affect ant la ten dance forte à la progression. Au delà d’un effor t de réflexion sur ces cycles et la manière de les éliminer sur le long terme , dans l’imméd iat l'équilibre de l'activité en étu de mais sur tout en production nécess ite donc un « lissa ge » des charges de tra vail.

Les grands groupes se ser vent de ces variations pour com primer l'em ploi et just ifier les externa lisat ions . On pour rait au contr aire le s compenser pour mainten ir et dével opper le s activité s par la massivité des mises en formation.

2° Sécuriser l'emploi et la formation pour produire autrement

Répondre de manière offens ive aux défis du développement nécess ite de parier sur les hommes en matière d'emploi et de format ion, en matière de statut social.

Pour avoir oublié cette donnée essent ielle, l'industr ie aér onaut ique et spat iale amér icaine est aujour d ' hui confrontée à de graves problèmes de qualité et de fiabilité. Les restructurat ions, les suppr ess ions mass ives d'emplois des années 90 et 2000 ont affaibli gravement les collectifs de tra vail jus qu'a mettr e en cause la qualité des avions.

Si aujour d'hui bon nom bre de com pagnies aér iennes amér icaines choisissent Airbus contr e Boeing c'est tout simplement que les avions du constructeur eur opéen sont plus sûrs , moins chers en consommat ion de car burant par siège passa ger, moins bruyants , en bref plus performants .

a) en est la pyramides des âges des entreprises : 1/3 des effectifs à renouveler d'ici 2010

Selon le res ponsa ble de la format ion au GIFAS, 1/3 des effectifs va par tir à la retra ite d'ici 2010. Les grands groupes vont profiter de ces dépar ts pour accentuer leur politique d'externa lisat ion de leurs activités . Exter nalisations su r le ter rito ire national avec un appel plus impor tant à la sous-tr aitance avec évi demment un statut so ci al au r abais pour le s s a l a rié s, ou par des tr ansfer t s de pro du cti ons d ans des p ays à fa i ble coût de main d'œuvre. L'élargiss ement de l'Europ e à 10 pays leur en donne la poss ibili té.

La sécur isation de l'emploi et de la format ion devient donc un enjeu majeur pour la période qui s'ouvre. Il faut emb aucher et surtout massivement former aujour d'hui pour être com pétiti f demain. Cela concer ne le s jeunes à la recher che d’emploi et la lutte contr e la préc arisation du tr avail dans le s bassins d’ emplois concer nés.

La question du statut

Ne devons-nous pas proposer un système qui « unifie par le haut » tous les statuts existants en un même statut social pour toute la branc he: salaires, grilles de qualifications , garant ies collectives, droits et pouvoirs...etc. Un tel statut permettra it de lutter efficacement contr e la mise en sous-traitance et les externa lisations Que ce statut inter dise dans les faits les licenc iements (cette inter diction existe déjà dans la fonct ion publique), permette la mob ilité choisie

d'une entr eprise à une autr e, d'un secteur d'activité à un autr e, dans la garant ie du statut . Que ce système s'applique à toutes les entr eprises et dans toutes les régions . La mise en place d'un tel système permettra it une gest ion de l'emploi dynamique avec des changements de secteur d'activités ou de régions, de métier...

La formation initiale et continue

Si il existe de nom breuses écoles d'ingénieurs qui forment aux métiers de l'aér onaut ique et du spat ial, la plupar t des écoles profess ionne lles liées aux grands groupes ont été fermées .

Ne pouvons-nous pas proposer de mettr e en place sur le plan national en coo pérat ion avec les écoles d'ingénieurs , les IUT, les écoles profess ionne lles une véritab le filière de format ion initiale et cont inue aux métiers de l'aér onautique. Cette filiè re de for mation ser ait financée par le s cotis a tions patron ale s pour l a for mation, le ur augment ation massive, leur mutualisation accr ue et mieux contrô lée ainsi que le sou tien par un nouveau cré dit.

Cette pro position de mise en place d’une autre organisation de la formation sur le plan national et régional est à réfléc hir en ayant à l'esp rit l'évolution importante des techno logies, des formes, du contenu et des organisations de tr avail (réseaux, tr avail en plateau, rée l ou vir tuel...etc .) de ces deux dernières décennie s, celle s à venir dans le s 20 année s qui viennent . Que ce soit dans les étu des ou la production, le contenu du tra vail a cons idéra blement évolué vers un tra vail plus « inte llectuel » les out ils ont eux auss i cons idéra blement évolué mais avec une grande unification: mêmes suppor ts stat ions de tra vail, réseau x, mêmes out ils : logiciels.

L'implication dans cette filière de format ions des inst itut ions repr ésentat ives du personne l (CE, CCE...), des collect ivités terr itor iales, des institutions de l’éducation nation ale et de la for mation cont inue est indisp ens a ble pour une vérit a ble maîtr i s e de progrè s des contenus de ces formations .

3° Une industrie qui réclame des financements importants, mais utilisés autrement

L'industr ie aéronaut ique et spat iale a toujours nécess ité des invest issements impor tants .

C’est une quest ion centra le à débattr e pour donner toute sa cohérence au projet de sécur ité emploi ou format ion. Le lancement de programmes comme Concor de, Airbus , Rafale, les moteurs , Ariane ou encor e Spot a nécess ité des financements impor tants . La plus grande par tie de ces financements ont été des financements publics. Ces financement s qui cor respo ndaient à une volont é politique impor tante ont été dans la plup art des cas assum és par la nation au tr aver s des bud get s civil s comm e des bud get s mili taires.

Dans les con ditions actue lles, face aux défis de la privatisat ion et de la dominat ion des mar chés financ iers plusieurs propositions nou velles peuvent êtr e avancées :

Il s’agit tout d’abor d de mob iliser autr ement les ressour ces des entr eprises. Chaque année , les entr eprises de l’industr ie aéronaut ique et spat iale distribue des sommes impor tantes en dividendes et il est quest ion d’accr oître bien davanta ge la levée de fonds sur les marchés financ iers . Ces sommes qui alimentent les marchés financ iers sera ient beaucou p plus utiles pour aider au financement des projets et productions nou velles, à développer l’emploi. En outr e les exigences des actionna ires font press ion sur les salaires et l’emploi. Mais il reste le besoin de capitaux cons idérab les qu’il con vient de financer autr ement .

Ce financement renvoie avant tout à une autr e utilisat ion du cré dit. Cela concerne des cré dits à long terme à des taux très abaissés et avec des garant ies de remboursement pour les invest issements . Les tau x d’intérêt sera ient d’autant plus abaissés jus qu’à des taux zéro et même négatifs (avec des sub ventions) que ces invest issements programment des em plois et des format ions . Cela permettra it de financer des projets qui répondent aux besoins des populations et des pays. Mais dans l’imméd iat des bonificat ions d’intérêt sur fon ds publics ( prise en charge d’une par tie des intérêts) pourra ient êtr e mises en place au niveau régional et nat ional. Un véritab le pôle public du cré dit, à par tir des inst itut ions financ ières publiques, semi-publiques et mutua listes , pourra it contr ibuer à cela.

Il s’agit de solliciter un engagement de l’Etat , mais pourquoi pas également des régions , des Etats au niveau de l’Europe, avec toujours comme critèr e celui de l’efficacité sociale au ser vice d’un nouveau développement industr iel fon sur la promot ion des ca pacités huma ines . Cela renvoie tout par ticulièrement à un autr e rôle de la BCE pour refinancer ces cré dits d’efficacité sociale à des taux très abaissés .

4° Un nouveau type de propriété sociale, des droits et des pouvoirs nouveaux pour l'efficacité

Notr e proposition de mise en place d'un système de sécur ité d'emploi et de format ion dans l'industr ie aér onaut ique et spat iale doit êtr e l'occas ion de réfléchir collectivement a de nou velles formes d'appr opriation sociale. Cela peut concerner une utilisation des titres publics, par exemple dans AEDS, pour qu’ils poussent à d’autr es critères de gest ion que ceux de la renta bilité financ ière, ainsi que l’extens ion de ces titres publics, y com pris au niveau d’entreprises eur opéennes .

Les nationalisations de 1936 ou 1945 corr es pondaient à un stade de développement de la société, des forces productives,

Elles ont été à l'origine du développement de plusieurs grands secteurs industr iels et de ser vices comme l'éner gie, les transpor ts, les télécommun icat ions , l'aér onaut ique, mais auss i les banques, la protect ions sociale...etc.

Face au défi de la privatisation au nom de la nécessa ire coo pérat ion eur opéenne , il s'agit aujour d'hui d'aller plus loin. Il s’agit de donner à cette branc he industr ielle une efficacité sociale avec une maîtrise publique et sociale jusqu’au niveau eur opéen de l’aér onaut ique et de l’es pace pour favoriser des coo pérat ions, la mise en commun des savoirs et des expériences , le par tage des coûts de recherche, une promot ion sans précé dent et une sécur isation de l’emploi et de la format ion. Il s’agit de rendre la maîtrise de ces entr eprises à la collectivité.

La quest ion de la propriété est posée mais ce n'est pas la seule. La mise en place de droits et de pouvoirs nou veaux est une des con ditions indispensab les pour aller vers plus d'efficacité et de maîtrise sociale.

La quest ion de nou veaux critèr es de gest ion d’efficacité sociale opp osés à la domination de la renta bilité financière est tout à fait cruc iale. Cela concerne en relation avec une utilisat ion des nouvelles techno logies de la révolution informat ionne lle, des économ ies sur les capitaux matériels et sur tout financ iers , en développ ant les coo pérations internat ionales, en élevant l‘efficacité des capitaux, et en développant les capacités humaines avec la recherche et de la format ion.

Il s'agit là non pas de simples droits « consu ltat ifs » comme c'est le cas aujour d'hui avec le droit des CE ou des CCE, mais de véritables droits décisionne ls des salariés, de leurs représentants , des usagers et de leurs représentants , des élus à tous les niveaux : commune , département , région, nation et Europe, et cela renverra it auss i à l’avancée d’une autr e cultur e de gest ion .

  • Les droits décisionne ls por tera ient sur tout ce qui fait la vie de l'entr eprise :
  • Le social en terme de salaire, d'emploi et de formation.
  • La straté gie industr ielle de l'entr eprise et son impact sur les terr itoires et les coo pérat ions .
  • Les invest issements et leur financement .

5° De nouvelles coopérations nationales, européennes et internationales

La France possè de une solide cultur e aér onaut ique et spat iale. De grands noms d'industr iels sont attac hés à son histoire: Blériot, Farman , Dassau lt, Voisin, Pote z..., etc .

Depuis plus de 30 ans avec Airbus , Ariane, CFM, la France est engagée dans de grandes coo pérat ions internat ionales avec d’impor tante s percée s techno logiques. Ces coo pérat ions et ces percées ont été avant tout le fruit d'accor ds politiques entr e les gouvernements . EADS est une entreprise europée nne avec des participations publiques. Ces coo pérat ions se révèlent-elles « mutue llement avantageuses » ? Leur bilan est sans doute contrasté ! A l’opp osé de la fuite en avant par l’app el aux marché s financier s et aux délocalisations aux Etats-Unis, il s’agirait de renforcer le caractère pub lic , social et europ éen de ces coo pér ations .

Plusieurs problèmes se posent :

La répartition des tâches :

Sur les programmes visant à spécialis er les entreprises sur une partie de l'avion ou du moteur au détriment d'une maîtrise plus globale. Aujourd'hui Dassau lt -Aviation est le seul constructeur frança is à étu dier et fabriquer des voilures !

La répartition des plans de charge

La difficulté à lancer des programmes nouveaux.

Puisque les financements publics sont dans les faits indispensab les, ce sont en définitive les Etats qui décident. L'A380 a atten du plusieurs années avant d'êtr e finalement lancé . Dans le domaine militaire l'A 400 M a connu les mêmes difficultés .

La dimens ion eur opéenne des coo pérat ion devrait êtr e cons idéra blement renforcée sur des bases nou velles avec une très for te élévation des dépenses de recherche et de format ion et le sout ien de cré dit à long terme financé par la Banque Centra le Européenne favorisant les capacités huma ines et l’em ploi à l’opp osé de l’app el accru aux marchés financ iers et des dépenses de contrô le des entr eprises.

 

Par , le 31 juillet 2003

A voir aussi