Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Retraites : la responsabilité de la « gauche » vis-à-vis du mouvement social

Une autre réforme est-elle possibl e ? Cette question hante le formidabl e mouvement social contre le plan Raffarin-Fillon.

Chacun sait, en effet, com bien une autr e solution que l'allongement de la durée de cotisation et donc, en réalité, l'allongement du temps de tra vail salarié,

subor donné à un employeur, à l'éc helle de toute de la vie, contr ibuera it à renforcer la lutte actue lle et à rassemb ler face aux tentat ives de division et d'intimidation.

Le gouvernement , s'attac he, lui, à essa yer de ruiner tout es poir en la matière. Il mar tèle à grand renfor t des médias qu'il n'y a aucune alternat ive à son plan pour « sau vegarder » le système de retra ites par répar tition, voué en l'état , selon lui, à une implosion cer taine du seul fait des évolutions démograph iques.

La droite, largement influencée par les pros pectives catastr ophiques et les propositions libéra les du Medef, joue auss i sur le discréd it des forces politiques de gauc he du fait de l'échec, encor e tout récent , du social-libéra lisme auquel ont choisi d'adhérer les dirigeants du PS au cours des années de gouvernement Jos pin.

Car, il est bien vrai que la gauc he au gouvernement de 1997 à 2001 por te une lour de res ponsa bilité : du refus de mettr e en cause la loi Balladur-Veil de 1993 à l'accor d donné forme llement par Lionel Jos pin au sommet eur opéen de Barcelone pour retar der de cinq années l'âge moyen du départ effectif à la retraite (63 ans contr e 58 ans aujourd'hui en France ) ; de la mise en place du plan par tenar ial d'épargne salariale (PPESV) par la loi Fabius qui, aujourd'hui, permet à la droite de chercher à intr oduire en douceur et sans le dire les fonds de pension, au lancement d'un Fonds de réser ve des retra ites essent iellement branc hé sur le marché financ ier ; des exonérat ions sociales patr onales poussées par Lionel Jospin jusqu'au recor d de 18 milliar ds d'eur os par an, au recours sans com plexe à des formu les empruntées du « Workfare » anglo-saxon comme la "prime pour l'emploi (PPE)" adaptation frança ise de l'impôt négatif. Et on se souvient même que, dans sa cam pagne pour l'élect ion présidentielle, Lionel Jospin avait tenu à préciser que les fonds d'épargne salariale, pouvant ser vir pour la retra ite, ont vocat ion à êtr e placés sur les marchés de capitaux. De même , dans la foulée du sommet eur opéen de Barcelone qui s'éta it inquiété du faible taux d'activité des plus de 55 ans en France , il avait proposé la créat ion « d'emplois-vieux » en quelque sor te : pour le maintien ou le retour sur le marché du tra vail de ces salariés âgés à des con ditions analogues à celles des « emplois-jeunes », avec force sub vent ionnements publics des salaires et donc baisse mass ive du coût salarial pour l'employeur.

Aujour d'hui, les dirigeants socialistes semb lent faire comme si tout cela n'avait jamais existé, allant jus qu'à affirmer que les choix des années 1997-2001 avaient été de bons choix.

For ts d'une petite année dans l'opp osition et d'un app ui verbal très bruyant au mou vement social, ils pensent que le changement de discours suffit pour les cré dibiliser aux yeux de ceux qui aujour d'hui vou draient voir retirer le plan Raffarin-Fillon.

Mais les gens ne se laissent pas abuser auss i facilement , semb le-t-il, malgré une mob ilisat ion très com plaisante des médias déjà inscr its dans la visée d'un bipar tisme à la française.

Tous les sonda ges, en effet, montr ent que, pour la grande majorité des frança is, la gauc he (en fait le PS) ne fera it pas mieux que la droite sur les retra ites , voire fera it pire. Et, venant conforter en quelque sor te cette appr éciation, les éléments de proposition mis en avant par les dirigeants socialistes n'ont rien d'une alternat ive cré dible. Au contra ire, la hausse envisagée de la CSG, comme l'affectat ion d'une par tie des cotisations sociales patr onales, ass ises sur la valeur ajoutée éventue llement , au financement des placements financ iers du Fonds de réser ve des retra ites , résonne comme un refus de rompre avec les options sociales-libérales et d'affronter le marché financ ier et la BCE.

D'ailleurs , le pr és ident du groupe socialiste à l'Assemb lée nationale a tenu à préciser que les pistes qui seront proposées par le PS lors du débat parlementa i r e n ' ont r ien d ' une réforme alternat ive ! Mais sur quelle base peut-il alors légitimer la deman de qu'il a faite, avec les Ver ts et le PRG, d u retra it du plan Raffarin-Fillon ?

Le discréd it de la gauc he ne peut que perdurer avec de tels com por tements . Si l'app arition de com por tements exas pérés , em pr eints p arfois même d e nihilisme, est avant tout imputab le au refus buté du gouvernement de droite de retirer son plan pour renégocier, comment ne p as v o i r auss i q ue ce l a exprime le déses poir de tout effor t d'alternat ive cré dible de gauc he ?

Cette situat ion place les format ions de gauc he devant de très lour des responsa bilités et un dilemme auss i, alors que se profilent pour le premier semestr e 2004 d'impor tantes consu ltat ions électora les.

Aucune cré dibilité nouvelle ne pourra êtr e gagnée auprès des salariés, chômeurs , retra ités en lutte sans une claire volonté de s'émanc iper en pratique des options socialeslibéra les.

Le refus des dirigeants socialistes d'aller dans ce sens , tout en adoptant un discours pour faire illusion à gauc he, oblige le PCF à mener un vaste effor t de dialogue avec le mou vement social et de confrontat ion publique à gauc he, avec des contr e-propositions pr écises et cré dibles au ser vice des luttes et de leur con vergence .

C'est d'autant plus nécessa ire pour lui qui dit avoir tiré les leçons des impasses dans les quelles l'ont enfermé le suivisme du social-libéra lisme, et cela sans pour autant céder aux illusions et simplismes du gauc hisme.

 

 

Par Dimicoli Yves , le 31 mars 2003

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