Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Cinq enjeux d’intervention dans la conjoncture

Le cycle conjoncturel actuel devrait aller à son terme, vers 2010-2013 . Cependant la montée, d’ores et déjà, des difficultés annonc iatrices de ce retournement vers une nouvelle récession mondiale se précisent et sont même ass ez sérieuses, comme en témoignent la remontée des taux d’intérêt, les tensions sur le prix du pétrole, les risques de krach sur les marchés de matières premières, financiers et immobiliers. Mais tout laiss e penser, pour l’heure, que cela n’interrompra pas le cycl e. Les capitalistes vont chercher à répondre à ces difficultés par une accumula tion matérielle et financière nouvelle qui pourrait être plus gaspill euse encore et rejetterait encore plus les homm es.

Ces nouvelles tentat ives de réponse capitalistes doivent êtr e sur veillées de près pour prendre la mesur e de leurs ambivalences . La récess ion à laquelle elles condui-
raient fera éclater la suraccumu lation matér ielle et financière ainsi relancée . Mais cette crise sera it, par hypothèse, beaucou p plus exigeante de trans format ions sociales radicales, car il y a une maturat ion sur de nom breux fronts essent iels pour la construct ion d’une issue positive à la crise systém ique. Ce tra vail est d’autant plus nécessa ire que va se nouer le débat sur le projet de société en 2007-2008 avec les élect ions en France . Or, on voit, pour l’heur e, perdurer le manque d’ambition alternat ive du PS, conc iliant avec la domination des capitaux financ iers dans la recherche de solutions de type social-libéra l.

Il faut donc pouvoir se saisir de cette conjonctur e pour faire avancer le rassemb lement et l’act ion pour des solutions alternat ives de trans format ion sociale radicale permettant d’anticiper sur la récess ion de 2010-2013. Il s’agirait, ainsi, de se placer au rendez-vous du besoin de construct ion politique, sociale, économ ique nou velle, à par tir des maturat ions objectives et subjectives qui vont progresser d’ici là. C’est dire l’impor tance des deux moments politiques que vont const ituer les élections de 2007 et 2008.

On peut sérier cinq grands fronts pour inter venir avec des contr e-propositions rassemb leuses .

Premier front : Le chômage, les pénuries de main d’œuvre qualifiée et les enjeux de sécurisation de l’emploi et de la formation avec la révolution démographique :

Le chômage est-il appelé à se résorber de façon très significative avec la fin du « papy boom » dans les pays de l’OCDE ? A l’évidence N. Sarkozy et F. Hollan de parient la-dessus en promettant le retour du « plein emploi », en 2015 pour le premier, en 2012 pour le second prêt à jouer, en la matière, le rôle de « Monsieur Plus ».

Mais on sait com bien cette promesse illuso ire, formu lée par L. Jospin…pour 2010 lors de sa dernière cam pagne présidentielle, est auss i un pari sur l’acce ptation par le cor ps social d’une plus grande précar ité des emplois. Elle const itue donc auss i un pari sur une perpétuat ion de la croissance faible avec l’affaiblissement du renou vellement des classes d’âge actif et le vieillissement de la population.

En réa lité, on peut penser que le chômage demeur era très impor tantsans parler des pays émer gents et en développement – et que cette situat ion cohabitera avec l’envolée de pénuries de travail qualifié engendrant des tens ions salariales, au minimum sector ielles, notamment dans les industr ies et ser vices de haute techno logie.

Cela ferait écho à l’exigence inassou vie, à l’échelle du monde , de for tes créat ions d’emplois qualifiées , notamment pour la main d’œuvre juvénile, et d’essor formidable des dépenses de recherche et de renou vellement des invest issements techno logiques .

D’un autr e côté , avec le vieillissement des populations, on sait qu’il va falloir dépenser beaucou p plus pour la santé , les retra ites , l’accès aux act ivités cultur elles, les infrastructur es sanitaires et sociales, la format ion des salariés pour de nou veaux ser vices à la personne , de qualité et en quant ité.

L’enjeu paraît donc êtr e de constru ire les bases de nouvelles solidarités intergénérat ionne lles avec la sécur isation de tous les moments de la vie, de la petite enfance jusqu’à la mor t. L’essor cons idéra ble des dépenses en ser vices publics nécessaires devra êtr e alors pérennisé par l’avancée de nouvelles con ditions de l’activité dans la production et les ser vices. La visée d’une Sécur ité d’emploi ou de format ion, de tous les moments de la vie active, de chacun-e (accè s des jeunes à l’emploi stab le, sécur isation des parcours professionnels, fin de vie active et passa ge à la retra ite) va êtr e la seule perspective alternat ive face au consensus libéra l sur le « plein emploi ».

Il paraît d’autant plus nécessa ire d’invest ir les chantiers pratiques de cette construct ion que, face aux difficultés montantes , il va y avoir une accé lérat ion des effor ts pour diviser les salariés, essa yer de les intégrer et, y com pris, faire appel à une « immigrat ion choisie ».
Deuxième front : les technologies et la révolution informationne lle :
La montée des difficultés systém iques dans cette fin de cycle conjonctur el va sans doute s’accom plir avec une radicalité nouvelle. On peut penser qu’elle poussera à une accélérat ion de l’arr ivée à matur ité et du recours à de nouvelles générat ions d’innovations techno logiques informat ionne lles, avec, par ticulièrement , les biotec hnologies et les nanotechno logies. Sous contra inte de renta bilité financ ière accrue dans la concurr ence internat ionale, cet appel aux nouvelles techno logies pourra it accentuer le rejet des hommes , tout en aiguisant , de façon para doxale, le besoin objectif de débouchés solvables, de qualifications et de recherches, c’est à dire de promot ion de toutes les capacités humaines.

De même , on peut penser que le recours à ces innovations techno logiques coûteuses donnera lieu à une poussée nouvelle des gaspillages engendrés par le refus de coo pérer pour partager coûts et résu ltats des recherches avec, notamment , la relance des dépenses de domination pour les OPA, OPE…et l’endettement que cela entra îne.

La crise qui s’annonce pour 2010-2013, comme les difficultés qui la préparent, notamment en 2007-2008, pourra it faire saillir beaucou p plus fortement le besoin de traiter tout autr ement l’enjeu de maîtrise des techno logies informat ionne lles avec, au cœur, la quest ion du par tage des coûts , des informat ions et des financements pour développer les capacités humaines.

Troisième front : Les enjeux énergétiques avec la révolution écologique :

C’est un élément fondamenta l, alors que même aux Etats-Unis, désorma is, la crainte de la dépendance par rappor t au pétrole, d’un côté , et, de l’autr e, l’angoisse du changement climatique, font poser par divers milieux la nécess ité d’une trans format ion du système énergétique avec, notamment , l’appel aux éner gies non polluantes et le développement des biocar burants .

Dans quelle mesur e la press ion à la hausse des prix du pétrole brut ne va-t-elle pas exaspérer, dans la conjonctur e qui se profile, le besoin de recherches, de format ions, d’investissements efficaces pour l’essor des éner gies alternat ives, un nucléaire pleinement sécur isé, mais auss i pour des modes de transpor ts et de logements beaucou p plus économes en éner gie ? Et, dans ces con ditions, comment cela pourra it-il ser vir de point d’appui pour mettr e en accusat ion, notam ment , les gestions des groupes énergéticiens, leur refus de coo pérer pour organiser le changement de système énergétique et les gâchis de profits qu’ils accumu lent ? Car, la principale barrière à l’engagement d’une révolution énergétique c’est la renta bilité financ ière, sans parler des rappor ts de domination vis à vis des pays producteurs d’éner gie foss ile, à commencer par les EtatsUnis.

Quatrième front : La monnaie et le financement des balances de paiement avec la révolution monétaire :

On mesur e les pressions qui vont se développer contr e le dollar et com bien ces difficultés vont const ituer un élément particulièrement aiguë de la futur e récess ion mond iale. Beaucou p plus encor e que lors de la dite « crise asiatique » de la fin des années 1990, puis de la dernière récess ion mond iale, les Etats-Unis vont être directement impliqués. Simultanément va s’accr oître le rôle et la responsa bilité, non seulement des pays émergents Chine en tête mais auss i de l’Europe, avec la quest ion de l’organisations zonale du monde . En pers pective de ce choc, il ne s’agit pas tant de savoir de quelle ampleur, plus ou moins catastr ophique, sera la corr ection de la baisse du dollar, mais quel défi politique va s’aiguiser du besoin d’une autr e monna ie commune mond iale de coo pération, pour un co-développement , et non plus de domination. Le débat autour de la trans format ion rad icale du Fonds monéta ire internat ional (FMI) et de la Banque mond iale pourrait pren dre une dimens ion inédite. Il y a, en effet, une nouveauté cons idéra ble du besoin de s’émanc iper de l’hégémon ie du dollar. Sans doute , la maturat ion subjective des idées doit-elle encor e beaucou p progresser sur ce terra in. Cependant, désorma is, cet enjeu est infiniment plus ouvert. De même, va se préciser, comme jamais, l’enjeu de rappr ochements Europe/ pays émergents face à la domination américaine étou ffante , avec l’affirmat ion du poids et du rôle de la Chine et de l’Inde, mais auss i de l’Amér ique latine.

Cinquième front : La construction européenne :

Les leaders histor iques de cette construct ion, Allema gne, France , Italie, font face à des difficultés sans précé dent. Elles sont dues à leurs énormes expor tat ions de capitaux qui sont un peu comme le prurit de la crise de cette tentat ive capitaliste de construct ion zonale.

L’enjeu de coo pérer, au lieu de dominer, en Europe et avec les pays émer gents pour se développer, contr e la croissance financ ière des capitaux, est appelé à s’aiguiser très vivement , alors que la paralysie sur la construct ion inst itut ionnelle, après le refus du projet de Traité const itut ionne l, va devenir de plus en plus intoléra ble, appelant une créat ivité nouvelle. L’irres ponsa bilité de la BCE vis à vis de la croissance réelle, du social et de l’emploi, avec son dogmatisme anti-inflationniste et la remontée des taux d’intérêt , pourra it apparaître encor e plus intoléra ble en cet fin de cycle intermé diaire. En liaison avec la double nécess ité de révolutionner la politique monéta ire européenne et de conce voir tout autr ement la coo pérat ion entr e les politiques budgétaires nationales, elles-mêmes trans formées , pourra it se poser, avec infiniment plus de force, la quest ion d’une émanc ipation du marché financ ier et d’une sélectivité nouvelle du cré dit, de même que d’une libérat ion de la dépense publique, pour sécur iser et promou voir toutes les capacités humaines. Enfin, de façon trans versa le à ces cinq fronts , pourra it progresser la quest ion du rôle et de la finalité des entr eprises, avec l’exigence de pouvoirs nouveaux d’inter vention des salariés sur leurs gestions pour les réor ienter. Le problème de la responsa bilité sociale, terr itor iale, environnementa le des entr eprises a déjà beaucou p mûri depuis le début de la crise systém ique. On voit pour tant perdurer l’insuffisance de maturat ion subjective sur la gestion, mais auss i sur la place de l’entr eprise au sein du système de pouvoirs et de la culture des sociétés modernes . L’enjeu de nouvelles entr eprises publiques assumant , au-delà de leurs missions éventue lles de ser vice public, une mission généra le de sécur isation-promot ion de l’emploi et de la format ion pourra it se poser for tement en France et en Europe. Mais cela se posera it auss i à l’échelle du monde entier, avec le souci grand issant du développement et de la gestion des biens communs à toute l’human ité. Ÿ

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