Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil

34ème congrès : Discours de clôture de Marie George Buffet

le 17 décembre 2008

Chers camarades,

On nous avait promis, un peu comme d'habitude, un Congrès à feu et à sang, le congrès des fractures, ou bien encore une oraison funèbre c'est selon. A tel point que je suis arrivé jeudi avec le ventre noué ; je ne reconnaissais plus mon parti dans les articles que je lisais dans la presse. Eh bien les communistes ont préféré le débat, l'échange, la détermination à changer le monde autour de nous.

Vous avez préféré la modernité de ce combat face à la crise. J'ai entendu de la révolte, de l'envie d'aller au combat face à la droite, des idées pertinentes pour sortir notre pays de la crise. Et honnêtement, si j'osais faire un comparatif avec tout ce que j'entends à la télévision dans les émissions soi-disant politiques, de propositions contre la crise, on peut être fiers de ce que l'on dit.

Et l'on a d'autant plus de raisons d'en être fiers que nous sommes, comme tous les citoyens, concernés en premier chef par cette crise. Comme salariés de l'audiovisuel public ou agents de la Poste, comme ouvriers syndicalistes ou professeurs mobilisés, comme élus aux côtés des populations, nous sommes nous les communistes dans la vie et dans les luttes. C'est ça qui fait notre force et notre ancrage populaire.

Et c'est bien pourquoi nous avons pu entendre, dans nos débats, tous les interrogations, les exigences, les envies que l'on entendu dans notre pays et que partagent les communistes. Et toutes ces paroles, elles ont dit cette recherche permanente des innovations que nous savons nécessaires pour trouver les voies du changement, les voies de la plus grande efficacité possible de notre combat, les voies de grandes victoires futures pour notre peuple !

Il s'agit je crois, comme nous l'avons décidé très majoritairement dans le vote de notre base commune, d'être suffisamment confiant en nos valeurs pour savoir se saisir systématiquement de tous ces progrès qui effleurent dans notre société ; il s'agit d'être toujours du côté de la curiosité, de la créativité, de l'inventivité.

Il s'agit de la même façon d'être suffisamment sûrs de notre engagement pour s'engager pleinement dans les fronts progressistes les plus larges entre toutes celles et ceux qui portent aussi de la résistance et du nouveau, du progrès social, de l'épanouissement humain.

Il n'y avait pas de peur dans ce Congrès, il y avait beaucoup de combativité.

Cette combativité, c'est notre engagement demain à ce qu'au sein du comité de défense de son hôpital de proximité, on parle politique et l'on avance aussi loin que possible sur les réformes nécessaires pour garantir le droit à la santé pour tous et toutes.

Cette combativité, c'est après la rencontre-débat que l'on organise dans son usine sur l'avenir de l'automobile, proposer là encore de tenir ces réunions dans la durée pour là encore avancer, avec tous les ouvriers, les cadres, les élus, les habitants de la région, sur toutes les réponses politiques qu'exige le développement durable de notre industrie ! Cette combativité, c'est notre insistance à faire perdurer le collectif d'enseignants et de parents d'élèves constitué pour sauver cette petite malienne menacée d'expulsion, avec elle ses parents cuisiniers à Paris, pour là encore avancer sur de nouveaux rapports entre la France et l'Afrique, sur la citoyenneté, la conception de la Nation qui est la nôtre, et de ce fait sur toutes les réponses politiques qu'appelle la solidarité d'une classe envers l'une de ses élèves !

C'est la combativité aux côtés des salariés sans papiers, la combativité auprès de ce jeune licencié de Michelin parce qu'il avait osé écrire sur Internet que ses patrons étaient des exploiteurs.

Cette combativité, c'est toujours cette ténacité des militants et militantes féministes à ne pas céder aux haussements d'épaule pour continuer à faire avancer les droits des femmes et notamment aujourd'hui l'arrêt des violences faites aux femmes.

Cette combativité c'est être en permanence aux côtés du peuple palestinien pour son indépendance et sa liberté. Mais c'est aussi être curieux des chemins empruntés par les gouvernements progressistes d'Amérique latine.

Cette combativité, c'est celle de ces jeunes étudiants en IUT venus hier nous dire leur colère, c'est celle de tous ces jeunes vent debout contre la vie qu'on veut leur imposer.

Cette combativité, c'est aussi cette capacité à faire lever le débat sur la société qui pourrait être la nôtre, et de ce fait participer, petit à petit, à la constitution des fronts progressistes les plus larges possibles nécessaires pour au pouvoir aller changer enfin la vie !

Et c'est celle que tous et toutes ensemble, militantes et militants communistes, nous avons décidé de déployer le plus efficacement possible en engageant les transformations de notre parti. Beaucoup a été dit sur cette question des « transformations ». Très majoritairement, nous avons décidé de poursuivre le parti communiste et de le transformer. C'est ce choix démocratique qui fonde aujourd'hui notre travail. C'est ce choix démocratique que nous sommes capables de faire.

J'ai entendu quelque fois dans des interviews que ce parti était incapable de se réformer. Eh bien moi avec vous je fais le pari de notre intelligence collective. Je fais le pari de notre humanisme collectif. Je fais le pari de notre volonté de changer les choses pour dire oui ces transformations nous allons les mener à bien et nous allons les faire tous et toutes ensemble !

Vous avez élu la nouvelle direction de notre parti.

Cette direction a un mandat clair, le texte que vous avez adopté. Je dis aux camarades des autres listes élus au Conseil national : travaillons tous et toutes ensemble, le travail est immense si nous voulons réussir. Vous pouvez compter sur moi pour animer ce travail collectif. Et je le dis, une fois que nous aurons mis en place le comité exécutif et la coordination sous l'impulsion de Pierre Laurent, la nouvelle équipe, une jeune équipe prendra très rapidement les initiatives nécessaires et je ferai tout pour que cette jeune équipe très rapidement puisse être une équipe dirigeante de notre parti.

Nous allons donc engager ce travail pour que, dans la proximité militante et la bataille politique nationale, nos idées heurtent de front le fatalisme ambiant, aiguillent la colère en espoirs de changement, fassent monter une nouvelle conscience de classe à l'image des réalités sociales de notre époque !

C'est au vu de cette détermination que je dirai que ce week end, il y a bien eu un évènement à gauche. Et il s'est déroulé ici, dans cette salle à la Défense. Ici, ce sont les représentants d'un collectif militant de plus de 130 000 hommes et femmes au contact quotidien de millions de nos concitoyens, des hommes et des femmes engagés dans le monde syndical, dans le monde associatif, élus dans de très nombreuses collectivités locales qui se sont réunis. Et ici, ce collectif humain a décidé de se transformer pour, dans la durée, avec le peuple de gauche, ouvrir de grandes perspectives de progrès social et démocratique !

Depuis des années nous dénonçons le système capitaliste. Nous avançons des propositions une visée un projet pour dépasser ce système qui impose ses logiques mortifères à tout ce qui fait notre vie. L'eau, l'air, l'énergie, privatisés ! La culture, l'éducation, la pensée, marchandisés ! Les hommes et femmes dominés et exploités.

On nous dit qu'il n'y a pas d'alternative ; il faudrait moraliser ce système ! Il n'y aurait pas d'alternative à l'explosion des forces productives, la révolution informationnelle, les progrès des sciences et des techniques, et tout ce que cela ouvre pour l'humanité de vie libérée ?

Il n'y aurait pas d'alternative à la place grandissante des savoirs dans notre vie de tous les jours, le développement sans précédent des communications et des échanges, et tout ce que cela ouvre de découvertes, de curiosité, de création pour l'humanité ?

Il n'y aurait pas d'alternative à la mondialisation réalisée et avec elle la conscience croissante du destin commun de toute l'humanité, et tout ce que cela ouvre de partages et de renforcement des relations humaines et entre les peuples ?

Eh bien si ! Nous pensons comme bien d'autres qu'un autre monde est possible. Oui ici nous pensions que la vie de chaque homme et de chaque femme de cette planète peut être sans cesse meilleure. Oui je veux dire ici que chacun d'entre-nous a la possibilité de bien maîtriser tout ce qui fait sa vie et du monde !

Aussi chers camarades, dans chacun de nos gestes, par le travail sur notre projet, par notre présence dans les luttes et dans la gestion, par l'animation de nos campagnes et le parti pris systématique pour l'intervention populaire, nous allons relever le défi de l'alternative au capitalisme. Nous allons, et toute notre direction va travailler en ce sens, nous allons nous engager pleinement dans cette bataille idéologique qui fait de nouveau rage.

Les forces progressistes ont, ces dernières années, perdu la bataille du langage. Et notre peuple, les exploités, les dominés, tous ces hommes et ces femmes ont perdu le droit de nommer les choses par leur nom. Nicolas Sarkozy nous a même volés le travail pour laisser ces copains coquins nous exploiter ! Et aujourd'hui on n'a plus droit de dire chômage technique. Il faut dire activité partielle. Il ne faut plus dire exploitation. Il faut dire création de valeur ! Il ne faut plus dire riches. Il faut dire classes moyennes ! il ne faut plus dire licenciements mais plan social !

Aussi chers camarades, prenons l'engagement, tous ensemble, de regagner la bataille des mots et des luttes utiles à la lutte des classes contemporaine ? Et prenons l'engagement d'oser toujours parler de ce qui fâche, quoi que disent les médias. Osons parler des salaires, de laïcité, du rejet du tout sécuritaire, de notre croyance en la possibilité de réussite de chaque enfant !

Et plus que jamais, soyons partie prenante de tous les mouvements sociaux en cours et à venir. Je pense aux professeurs et à toute la communauté éducative aujourd'hui vent debout, dans l'unité syndicale, face à l'entreprise de démantèlement de l'Education nationale. Je pense au logement et à toute la bataille engagée contre la loi Boutin de dislocation du logement social.

Je pense aux luttes en cours pour les intérimaires virés sans ménagement, à celles contre le chômage technique et les plans de licenciements de toutes ces entreprises prétextant la crise pour continuer la casse de notre outil industriel !

Je pense enfin au combat pour le service public audiovisuel mené par les salariés et relayé aujourd'hui par toute la gauche au Parlement ! Et avec le même esprit nous allons continuer à nous battre à gauche pour constituer les fronts les plus progressistes et les plus larges sur les contenus les plus offensifs qui sont les préludes des grandes victoires populaires !

J'entends que l'horizon est bouché à gauche ! Eh bien ce bouchon, nous allons le dynamiter avec ces espaces de luttes et de débat que l'on aura contribué à faire vivre dans nos villes et nos entreprises, avec ces idées que l'on saura rendre dominantes dans la bataille idéologique, avec notre résolution permanente à dialoguer et à construire avec toute la gauche ! Nous allons le dynamiter pour ouvrir un large front d'espoirs et de possibilités de changement réel !

Aussi chers camarades,

J'ai beaucoup entendu ces quatre jours l'exigence d'un Congrès pour l'action ! Je suis d'accord. Toute la combativité que nous avons montré ce week end, à nous maintenant de la déployer le plus largement possible dans la société.

Nous avons hier participé au soutien du pouvoir d'achat. 40 millions d'euros ont été distribués aux travailleurs de la Défense !

Plus sérieusement, notre campagne « Bourse ou la vie », quand l'on entend la litanie quotidienne des plans sociaux à la télévision, quand l'on sait le choix du gouvernement de laisser les pleins pouvoirs aux banques et aux marchés financiers, eh bien je vous fais la proposition de lui faire franchir une nouvelle étape.

Je vous propose que fin janvier, nous tenions une grande initiative nationale de rassemblement populaire sur tous les sites de production touchés par la crise, les sites industriels, les banques, les pôles d'emplois tertiaires comme ici à la Défense, où chaque jour travaillent plus de 150 000 salariés ! Avec les salariés, avec nos élus, nous pourrons faire bloc, nous pourrons faire nombre pour dire tous ensemble, partout en France, « il n'y a pas de fatalité à la crise » ! Et en parallèle, je vous propose d'être à l'initiative d'une grande campagne de défense des libertés !

Entre les attaques contre le pluralisme dans les médias, la prison à 12 ans et la mise au pas de la justice, le climat de peur entretenu par la droite, la concentration extrême des pouvoirs entre les mains de Nicolas Sarkozy, les chasses aux sans-papiers, l'asphyxie organisée des communes et de la démocratie locale, les restrictions des droits des députés à l'Assemblée nationale, l'abandon du mouvement associatif, la coupe est pleine et vraiment pleine.

C'est notre République qu'ils sont en train d'assassiner ! Et la République, il est hors de question que nous la laissons dépérir sans réagir ! Ce sont nos droits, ce sont nos libertés, ce sont nos formes de vie commune qui sont en jeu !

Alors oui lançons une grande campagne « touche pas à nos libertés » ! Aussi je vous fais une proposition. Je vous fais la proposition de travailler, au plus vite, à un appel pour constituer un large front politique, syndical, associatif, citoyen de défense et de promotion des libertés !

Enfin, chers camarades, cette année sera aussi l'année de l'Europe ! L'Europe que nous voulons ou celle des grands d'Europe qui hier se sont à nouveau retrouvés en sommet européen.

Et ceux-là nous ont encore fait le coup des réconciliations. Le président a encore estimé que son action état historique c'est presque quotidien maintenant. En fait ils ont décidé de continuer l'Europe libérale. Ils ont décidé de forcer les Irlandais à ravaler leur Non au traité de Lisbonne. Ils ont décidé que leur Non, que votre Non ne valait rien ! Ils vont les forcer à revoter. Et comme concession à l'Irlande, ils se sont engagés à ne jamais faire avancer l'Europe pour faire respecter le droit des femmes à l'IVG !

Et pour le reste, rien ne bouge ! Malgré la démonstration faite par la crise de l'échec du modèle économique européen, ils laissent les pleins pouvoirs à la BCE et continuent la concurrence libre et non faussée. Dès hier, nos amis du Sinn Fein sont entrés en campagne contre ce coup d'Etat !

Eh bien nous aussi, soyons en campagne !

C'est pourquoi je vous propose, dans la droite ligne de l'appel voté par le Conseil national le 24 octobre, de porter dès aujourd'hui la volonté de changement qui se nourrit, jour après jour, des puissantes luttes sociales qui se multiplient dans notre pays et sur tout le continent !

Cette volonté de changement, ce sont donc de nouvelles règles du jeu cassant la domination de la finance et des multinationales. C'est un nouveau modèle social européen privilégiant la coopération et l'échange. C'est un engagement ferme pour le développement durable. C'est une réelle démocratisation de l'Europe. C'est une Europe libérée de la tutelle américaine et de l'OTAN et de la guerre, une Europe qui soit un levier pour changer le monde ! Aussi le 4 avril, à Strasbourg, tous ensemble à la manifestation contre les soixante ans de l'alliance atlantique ! Le PCF sera en nombre et se fera entendre !

Et je réitère ici cet appel aux forces politiques et sociales, aux femmes et aux hommes représentatifs des courants politiques progressistes, comme du mouvement syndical, social et associatif, dans toute leur diversité, qui partagent de tels objectifs et se reconnaissent dans cette démarche.

Ensemble, avec nos partenaires de tout le continent, nous pouvons faire ce large front progressiste européen pour faire événement, en juin, et obtenir un score permettant que des députés communistes et des députés partageant cette volonté de transformer l'Europe soient nombreux au Parlement européen.

Enfin, en étant dans ce combat politique, ces luttes et ces campagnes, auprès de tous nos concitoyens, nous pourrons faire vivre le texte d'orientation adopté hier !

A cette fin, je vous propose de lancer au plus tôt une large adresse à tous ces hommes et ces femmes qui sont aujourd'hui et seront demain victimes de la politique de la droite et qui veulent réagir et se battre face à la droite !

Je vous propose une adresse leur ouvrant largement les portes de notre parti, une adresse offensive pour mieux faire connaître nos objectifs, une adresse populaire allant à contre-courant de tous les fatalismes, une adresse ambitieuse faisant part de notre détermination à être d'un nouvel espoir à gauche !

Ces hommes et ces femmes, quelque soit le sens des combats qu'ils mènent à nos côtés, ont leur place dans ce parti, le parti communiste français. Ils y ont leur place pour à nos côtés faire mieux rayonner ses exigences et ses rêves, donner plus de force à son engagement, nourrir plus largement ses luttes et ses combats. Ils y ont leur place pour lui donner une plus grande efficacité, une plus grande influence, un plus grand rayonnement !

Chers camarades,

Nous avons avec ce Congrès ouvert une nouvelle page de notre combat. Nous sommes enfin pleinement entrés dans ce nouveau siècle qui est le nôtre. Nous avons pleinement pris pied dans ce 21ème siècle où fleurissent à nouveau sur la planète ces idées de partages et de commun qui nous sont si chères.

Et c'est bien cela qui nous rassemble. C'est bien cela qui nous unit ! Aussi prenons bien la hauteur que requiert cette nouvelle époque ! Elle dépasse largement tous les tiraillements qui peuvent être les nôtres. Prenons cette hauteur et repartons au combat.

Dans l'enthousiasme, dans la confiance, avec toujours le souci de l'inventivité, avec l'état d'esprit de chercher toujours ce qui nous unit plutôt que ce qui nous divise, avec cette ouverture et cette détermination à rassembler, il y a un autre monde qui nous attend !

Permettez-moi d'ajouter personnellement. Je ressens cet après-midi une immense fierté. Nous avons réussi avec ce Congrès quelque chose de grand. Je pense qu'après toute cette période difficile que nous avons vécu après la présidentielle et les mois qui ont suivi, les communistes ont montré à la fois leur détermination mais aussi leurs immenses qualités humaines. J'ai envie de vous dire simplement merci à vous tous et à vous toutes !

Alors allons-y ! Nous avons tout à y gagner !