Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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De la financiarisation de l’économie en crise

Le bouleversement du système bancaire mondial s’inscrit dans le contexte élargi de la crise profonde du système capitaliste. Cette crise systémique a produit un endettement mondialisé, où le capital financier se substituant au capital industriel circule librement à travers les frontières à la recherche d’une rentabilité immédiate la plus importante possible.

Les banques se sont mises au service de ces mutations en mobilisant d’énormes masses de capitaux, libérées de l’industrie, mises en mouvement, et circulant à des vitesses accélérées, sous les formes les plus diverses.

Cette dérégulation et cette déréglementation, en Europe, ont pris une forme institutionnelle avec le traité de Maastricht qui a créé la Banque centrale européenne, indépendante des Autorités politiques de l’Europe, dont le seul objectif est le maintien d’un euro « fort », gage de sécurité pour les patrimoines financiers des milliardaires et pour les intérêts des grandes sociétés multinationales.

Ces décisions ont conduit à l’explosion des inégalités dans les sociétés civiles. Il naît, partout dans le monde, chaque année des milliers de millionnaires en dollars ou en euros, alors que meurent de faim des milliers d’enfants dans le monde.

Pourtant, une politique alternative est possible, qui passe par la maîtrise démocratique des banques et la mise en œuvre de nouveaux critères de distribution des crédits, en faveur des besoins humains et écologiques. Compte tenu de l’expérience passée de la nationalisation des banques, en 1945 et 1982, cette socialisation-nationalisation doit pour réussir s’affranchir de l’étatisation technocratique et faire prévaloir l’autonomie de gestion, l’élection démocratisée des Conseils d’administration, leur socialisation avec une intervention démocratique dans leur gestion des salariés, de l’épargne populaire, mobilisée pour l’économie réelle, la recherche-développement, l’emploi, les besoins sociaux et l’écologie.

Le bouleversement du système bancaire mondial s’inscrit dans le contexte élargi de la crise profonde du système capitaliste, en particulier, marqué par la suraccumulation du capital accompagné par la baisse tendancielle de son taux de profit. Parallèlement, les forces du capital déploient une volonté farouche de mise en concurrence généralisée de tous les salariés du monde sur lesquels elles exercent une pression inouïe, se traduisant par de véritables reculs de civilisation.

La spéculation se développe dans tous les domaines de la société marchande…

Les conséquences immédiates de cette crise systémique, c’est un endettement mondialisé, le capital financier se substituant au capital industriel, circulant librement à travers les frontières à la recherche d’une rentabilité immédiate la plus importante possible, favorisant une spéculation à l’échelle internationale sur les monnaies, sur les valeurs mobilières, mais également sur les matières premières, et sans oublier sur les denrées alimentaires les plus nécessaires à la vie, entraînant un développement rapide et effrayant de toutes les inégalités sur la planète.

Donc, dans leur recherche pour restaurer le taux de profit immédiat du capital investi, en période de crises récurrentes, les plus grandes sociétés multinationales, devenues de plus en plus financières, ont élargi au niveau mondial, avec de nouvelles formes d’intervention, sans cesse renouvelées, la financiarisation de l’économie et sa mondialisation.

Destruction du capital matériel et humain

On ferme des usines dans les pays les plus industrialisés et on les délocalise vers les pays émergents où le « coût » de la main-d’œuvre est moins cher, on détruit du capital matériel et on supprime des millions d’emplois qualifiés, on augmente ainsi les dividendes, on rachète en Bourse des actions pour améliorer, à tout prix, la rentabilité financière de l’actionnaire. On concentre le capital dans des sociétés les plus multinationales en éliminant les plus faibles. On transfère le capital ainsi récupéré en créant des holdings financiers d’abord nationaux puis internationaux, logés à l’abri des yeux de tous, dans des paradis fiscaux, débarrassés des syndicats de salariés et des fiscalités nationales pour restaurer, sans risques, des taux croissants de rentabilité du capital.

La démesure spéculative des banques

Les banques se sont mises au service de ces mutations en mobilisant d’énormes masses de capitaux, libérés de l’industrie, mises en mouvement, et circulant à des vitesses accélérées, sous les formes les plus diverses (hedge funds, OPCVM, CDS, equity funds, private equity, Leveraged Buy Out (LBO), stock options, swaps, titrisation etc. ), en quête d’une recherche systématique et spéculative de rentabilité toujours en croissance et développant toujours plus de crises. Dans cette période troublée, l’hégémonie des états-Unis a continué à se déployer, omniprésents sur tous les marchés du monde entier, grâce à une croissance sans limite de la création monétaire de sa Banque centrale, la FED, utilisant comme arme pour fausser par une concurrence déloyale, imposée au monde entier, sa monnaie démonétisée : le dollar américain.

Les banques se sont transformées en un système diabolique très sophistiqué de circulation ultrarapide de l’argent à travers le monde, s’adjoignant, au passage, la création monétaire retirée au pouvoir régalien des États…

La dérégulation, la déréglementation, formes de la liberté des échanges

Cette dérégulation et cette déréglementation, en Europe, ont pris une forme institutionnelle avec le traité de Maastricht qui a créé la Banque centrale européenne, indépendante des Autorités politiques de l’Europe comme le sont également, aujourd’hui, les banques centrales des pays européens, indépendantes de leurs États respectifs dans la zone de l’euro, à la différence du statut des banques centrales des États-Unis et de la Grande-Bretagne. C’est une différence fondamentale.

L’oligarchie financière européenne et sa technocratie ont vite pris la mesure de l’avantage que constituait cette « indépendance » de la Banque centrale européenne, soustraite à l’autorité politique de l’Europe, comme l’indépendance des banques centrales des 17 pays européens, (comme la Banque de France), pour assujettir les États et leurs économies à la dictature des marchés financiers et des agences de notation sur la zone euro.

L’ennemi de la finance, c’est la démocratie

Le système financier actuel constitue un véritable nouveau pouvoir technocratique, incontournable (concédé par les États), s’exerçant sous des formes diverses et multiples sur l’ensemble des pays européens et dans le monde.

La BCE a pour seul objectif le maintien d’un euro « fort », gage de sécurité pour les patrimoines financiers des milliardaires et pour les intérêts des grandes sociétés multinationales, même si cela doit s’obtenir par l’austérité renforcée pour les peuples et par la croissance du chômage.

L’euro avait été créé à parité avec le dollar ; aujourd’hui il vaut 40 % de plus. Les marchandises européennes valent ainsi 40 % plus cher que celles provenant des états-Unis.

Les banques utilisent toutes les inégalités structurelles du marché à leur profit en se dotant des moyens d’asseoir encore plus complètement leur pouvoir, via les marchés financiers spéculatifs, via les agences de notation et les paradis fiscaux. Pour imposer plus facilement leurs pouvoirs démesurés, leur arme de prédilection c’est la soumission des peuples par le recul de la démocratie.

Le pouvoir de l’argent parvient à soumettre à sa loi les États, et même quelques fois quelques grandes entreprises aux ukases des agences de notation et aux marchés spéculatifs. Les lois financières forgées à Wall Street et expérimentées aux États-Unis s’appliquent au monde entier. En dépit de la crise structurelle du capitalisme américain, cruel paradoxe, ce sont le Japon et la Chine qui financent, en dollars, dans la plus large part l’immense déficit des états-Unis. Et ainsi, ils entretiennent les plus grandes inégalités économiques et sociales du monde entier et empêchent même d’entrevoir, pour le moment, leur éradication rapide.

La banque américaine Goldman Sachs impose sa loi dans le monde entier

En France, le grand patronat et ses relais politiques craignant, toujours, plus que jamais, les révoltes sociales, et affolé par le mouvement sporadique des nationalisations de 1945 et de 1982, a investi directement dans le pouvoir politique pour consolider ses intérêts de façon pérenne. Sa démarche est de pouvoir reprendre en mains les « affaires » et de ne plus se satisfaire d’exercer une influence grâce à son seul poids économique mais de conquérir solidement y compris le pouvoir politique. Les hommes de Goldman Sachs sont ainsi à la manœuvre à la Banque centrale européenne et ont remplacé les hommes politiques élus par le suffrage universel, en Italie, en Espagne, en Grèce…

Il n’y a pas de jour où un nouveau scandale financier de cette nouvelle oligarchie éclate qui ébranle la planète et creuse encore plus profondément ces inégalités économiques et sociales entre les États, entre les citoyens les plus riches et les plus pauvres, et entre les nations du Nord par rapport à celles du Sud.

L’accroissement des inégalités dans le monde

Les inégalités dans les sociétés civiles ont pris des proportions incommensurables : il naît, partout dans le monde, chaque année des milliers et des milliers de millionnaires en dollars ou en euros, alors que meurent de faim des milliers d’enfants dans le monde.

Plus d’un milliard et demi de personnes, hommes, femmes et enfants dans le monde vivent en dessous du seuil de l’extrême pauvreté. Selon l’Unesco, 67 % des enfants du monde et parmi eux 53 % de filles, sont non scolarisés.

Les puissances d’argent ont acquis une influence démesurée

En effet, nous sommes entrés dans un régime oligarchique, avec des « élites » européennes, qui imposent leurs idées du néolibéralisme aux peuples européens, utilisant une arme rhétorique redoutable : le mot fameux de Margaret Thatcher : « There is no alternative », en français : il n’y a pas d’alternative, que tous répètent à satiété à travers les médias : « Il n’y a pas d’alternative au capitalisme! Pas d’alternative au marché! Pas d’alternative à cette mondialisation mettant les travailleurs en concurrence entre eux! Pas d’alternative à la déréglementation financière! Pas d’alternative aux baisses de salaires, aux délocalisations, à la mise en cause des services publics, aux reculs des protections sociales!, etc. »

Cette idéologie pernicieuse est mise en œuvre y compris par la social-démocratie pour permettre au système capitaliste de tenter de survivre à ses pires turpides. Cette idéologie du « pas d’alternative » infeste les sociétés occidentales provoquant le déclassement social du plus grand nombre et en même temps favorise le développement de forces politiques néofascistes par la démagogie, tout en continuant à générer des profits gigantesques pour quelques-uns.

On parle souvent à l’endroit des banques de tremblements de terre, de séisme mondial, de tsunami, quand elles sont au bord de la faillite, et les Grands de la planète, inquiets de cette crise systémique, les renflouent avec l’argent des contribuables. Avec notre argent.

Un immense désordre ébranle l’économie mondiale et menace les sociétés humaines

Les banques renflouées ont continué à distribuer des dividendes à leurs actionnaires et à assurer des salaires extravagants à une poignée de leurs dirigeants, qui ne se sentent absolument pas responsables des pertes insondables qu’avait générées leur gestion spéculative… ni responsables de la crise globale dont souffre le plus grand nombre d’humains.

Scandales au niveau des banques centrales

Aujourd’hui, encore plus grave, les banques centrales sont impliquées dans des affaires de manipulations des « taux directeurs bancaires » pour favoriser la spéculation des plus grandes banques internationales, pour leur propre compte, comme le conglomérat bancaire anglais Barclays Bank et de nombreuses autres banques, dans l’affaire dite « du Libor » (Taux officiel de base interbancaire fixé à Londres) sur lequel repose l’ensemble des échanges interbancaires, où selon les spécialistes il y aurait eu une « collusion internationale des banques ».

Les patrons anglais de la Barclays, parmi les plus payés du monde, ont préféré démissionner de leurs postes pour échapper à leurs responsabilités.

Des milliards d’euros et de dollars continuent à se déplacer à la nano-seconde, à travers toutes les frontières en se servant des différentiels de cours des places financières et des paradis fiscaux, à la recherche des milliards d’euros ou de dollars spéculatifs en utilisant les procédés informatisés les plus sophistiqués et plus performants dénommés : le «trading à haute fréquence ».

Les dépôts dans les banques, c’est notre argent

À Paris, (le 12.07.12) c’est la Banque de France (son Gouverneur seul) qui a décidé de ne pas relever le taux d’intérêt du livret A (2.25 %) sous la pression du lobby des banques françaises, bien que le nouveau pouvoir politique eût marqué une préférence à se servir de l’épargne populaire générée par le livret A pour financer avec plus d’efficacité la construction du logement social. Où est passé le pouvoir politique?

Depuis, le plafond du Livret A est passé de 15 300 à 19 125 € et le livret de développement durable a doublé, à 12 000 € au grand dam des banquiers, rageant de voir près de 30 milliards d’euros d’épargne quitter leurs caisses pour celles de la Caisse des Dépôts mais qui doivent se réjouir de voir leur taux passer de 2,50 à 1,7 %.

Il faut dénoncer les pouvoirs politiques d’hier qui ont cédé toutes leurs prérogatives régaliennes aux banques et aux marchés financiers.

Il faut alerter l’opinion sur les responsabilités du pouvoir actuel qui ne semble pas avoir le courage de restaurer le pouvoir de l’État, des citoyens, sur la puissance de l’argent et en particulier sur celui qui lui revient de droit, la création monétaire, et laisse ainsi les banques et les marchés financiers ériger la loi du profit comme seule règle de l’activité humaine.

Le capital bancaire ne sert que le capital, pas l’économie

Il est inadmissible que la puissance publique se mette à genoux devant les ukases des agences de notation, se soumette aux exigences des marchés financiers.

Le pacte budgétaire Sarkozy-Merkel, que le gouvernement socialiste-verts a fait adopter en force par l’Assemblée nationale pour ratification, constitue à la fois un nouvel abandon de souveraineté et l’acceptation d’une politique d’austérité, de « régression sociale, économique et écologique » exigée par la technostructure antidémocratique des institutions européennes.

Un grand débat doit être organisé

Une autre politique économique et financière, crédible, est réellement possible, immédiatement, à substituer à la politique d’austérité imposée par les forces de droite ultralibérales européennes et aujourd’hui par la social-démocratie.

Des avancées démocratiques et sociales sont exigées en France, par le suffrage universel et par les mouvements sociaux qui se mobilisent chaque jour, de façon de plus en plus consciente et importante.

Mais cela nécessite encore plus, pour les salariés, de réaliser de nouveaux et plus importants rapports de force dans la société, pour obtenir des résultats positifs, par exemple, dans les affrontements frontaux comme ceux chez Arcelor-Mittal et chez PSA/Peugeot-Citroën, par exemple.

Le processus de financiarisation de l’économie et de sa mondialisation a eu pour corollaire d’accroître à l’échelle de la planète la concurrence des travailleurs entre eux et l’approfondissement de la crise.

Le meilleur cadre pour inverser la tendance et pour peser dans les luttes émancipatrices qui sont en œuvre dans le monde entier, c’est d’engager, dans chaque pays, des combats démocratiques contre les pouvoirs économiques en place et contre les banques et les marchés financiers où les salariés devraient parvenir à imposer leur représentation dans les organismes de pouvoirs.

Les dépôts, c’est notre argent !

Ayons à l’esprit ce que représentent dans les banques, en France par exemple, les dépôts à vue des déposants, votre argent à vous salariés, retraités… cela représente 1 503 milliards d’euros et l’assurance-vie logée dans les Compagnies d’assurances, c’est 1 300 milliards (dont la moitié est transférée par le truchement des Fonds communs de placement les hedge funds, les produits dérivés, vers les marchés financiers. Sans oublier le marché parallèle bancaire le « shadow banking » de l’ordre de 67 000 milliards de dollars.

L’argent existe, rien ne justifie l’austérité la France est le second pays du monde après le Japon pour le niveau d’épargne de ses habitants (16 %).

Cette épargne, les banques s’en sont emparées et en disposent à leur guise.

La BPI, pour quoi faire ?

C’est pourquoi on peut trouver ridicule, à l’échelle des besoins d’investissement et de résorption du chômage, la réponse de l’État, créant cette Banque publique d’investissement, dotée de 42 milliards d’euros en 3 ans, pour financer, dit-on, les PME alors que l’an dernier, ces mêmes PME ont investi pour 213 milliards sur les 815 milliards de crédits provenant du secteur financier. Ce n’est pas cette BPI qui entamera le pouvoir discrétionnaire des banques qui pourront continuer à décréter la vie ou mort de milliers de PME et, bien sûr, de nombreuses entreprises en difficulté.

D’ailleurs Nicolas Dufourcq, le Préfigurateur de la Banque publique d’investissement a déjà prévenu : « Je rappelle que nous interviendrons toujours dans une logique de cofinancement, il est hors de question de faire du crédit sec en concurrence frontale avec les banques. Nous n’en avons d’ailleurs pas les moyens. La BPI est une institution de place, qui s’inscrit nativement en cofinancement avec ses partenaires bancaires et la profession du capital-investissement. C’est la banque qui fait la courte échelle au marché» (Les Échos, 18.12.12).

Nationalisons les banques !

La maîtrise démocratique des banques, c’est-à-dire leur nécessaire nationalisation-socialisation, est une exigence impérative, dans la situation de crise profonde dans laquelle la société se débat elle doit s’accompagner de la mise en œuvre de nouveaux critères de distribution des crédits, en faveur des besoins humains et écologiques. Compte tenu de l’expérience passée de la nationalisation des banques, en 1945 et 1982, la nouvelle nationalisation doit s’affranchir, pour réussir, de l’étatisation technocratique et faire prévaloir l’autonomie de gestion, l’élection de leurs Présidents par leurs Conseils d’administration démocratisés, leur socialisation avec une intervention démocratique dans leur gestion des salariés, de l’épargne populaire, mobilisée pour l’économie réelle, la recherche-développement, l’emploi, les besoins sociaux et l’écologie. 

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