Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Les contrats de génération : une victoire franche pour le Medef

Les contrats de génération (CdG) s’inscrivent dans la longue lignée des contrats dérogatoires du droit commun censés, par les avantages financiers accordés aux employeurs (exonération de cotisations sociales patronales dans le secteur marchand ou subvention dans le non marchand), encourager l’embauche de populations en difficulté structurelle sur le marché du travail. Ils concerneraient 500 000 jeunes et « seniors » sur 5 ans.

Ce projet se présente aujourd’hui avec l’énorme prétention affichée de « corriger » l’un des maux les plus terribles du marché du travail français : le chômage et la non activité des jeunes (16 à 25 ans) de plus en plus obligés de « galérer » pour accéder à l’emploi et des « travailleurs âgés » ou « seniors » (57 ans et plus) de plus en plus précocement rejetés. Au-delà, l’idée de solidariser l’embauche de jeunes en difficulté par les entreprises avec le maintien dans l’emploi de « seniors » est une belle idée.

Le grand problème tient dans ce fait que le nouveau « pacte inter-générationnel » ainsi envisagé, et qui donnerait lieu à négociation dans les grandes entreprises en liaison avec une « sécurisation de l’emploi » faisant la part belle à la flexibilité, serait construit :

– Autour de la baisse du coût du travail réservé à ces deux catégories de salariés ;

– Et moyennant la poursuite relancée des emplois précaires, d’ici à trois ans.                               

Par ailleurs, les moyens mobilisés sont extrêmement insuffisants, surtout si l’on songe à l’ampleur des dépenses de formation qu’il faudrait mettre en œuvre. Et il faudrait pouvoir évaluer dans quelle mesure, cela ne va pas s’accompagner d’effets d’aubaine et d’incitation au rejet des salariés concernés vers le chômage à l’issue de la période aidée.

Les moyens mobilisés sont aussi très contradictoires avec l’objectif affiché, puisque, acquis par la diminution du coût salarial de l’emploi, ils vont :

  • Peser négativement, à terme, sur la masse des salaires et, donc, la consommation salariale et la demande finale ;
  • Handicaper l’efficacité de l’offre avec l’insuffisance de formation.

De plus, aujourd’hui, ce programme de CdG n’est pas financé, alors même qu’il devrait coûter 12,5 milliards d’euros sur 5 ans.

En effet, le candidat Hollande avait promis que les CdG ne devraient coûter « pas un centime au budget de l’État » car ils devraient être financés intégralement sur les 19,6 milliards d’euros qu’ont coûtés en 2011 les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires accordées aux entreprises.

Il était envisagé que le plafond de ces exonérations soit ramené de 1,6 smic à 1,5 smic afin de dégager les 2,5 milliards d’euros nécessaires. Or, la pression formidable du Medef, la collaboration très active de la CFDT à ce chantage, de même la complaisance croissante dont fait preuve F. Hollande face aux problèmes de compétitivité tels que posés par le Medef ( coût du travail trop élevé et insuffisante flexibilité) ont eu raison de cette promesse.

L’aide promise par le gouvernement sur les CdG1 « sera financée sans remise en cause des allègements existants de cotisations sociales sur les salaires inférieurs à 1,6 smic » précise le document gouvernemental remis aux syndicats.

Cette franche victoire pour le Medef fait que l’engagement de ces 500 000 CdG ne serait plus, pour l’heure, financé. Compte tenu de la contrainte d’un rapport déficit public/PIB de 3 % en 2013, cela laisse ouverte la possibilité d’un nouvel effort de redéploiement des dépenses budgétaires au détriment des ministères non prioritaires, accélérant ainsi les suppressions nettes d’emplois publics dans leurs services.

Et on ne saurait séparer cette évolution du bras de fer qui se joue sur le financement de la protection sociale à propos duquel on sait qu’il est question de remplacer une partie des cotisations sociales patronales existantes par une augmentation de la CSG, voire d’une « taxe écologique ».

Une alternative sur laquelle on peut bagarrer consisterait en ce que l’avantage financier accordé aux entreprises, au lieu de consister en allègements de cotisations sociales patronales, consisterait en baisse de charges financières du crédit, lesquelles pourraient alors s’accompagner de la mise en extinction des allègements de cotisations sociales patronales. n

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(1) Maintien des allègements déjà accordés aux entreprises de 300 salariés et plus en cas de négociation, baisses nouvelles de cotisations sociales patronales et aide supplémentaire de 4 000 € par an sur 3 ans pour les entreprises de moins de 300 salariés.

 

 

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