Après avoir considéré la maturation de la crise systémique puis une autre construction européenne monétaire, sociale et politique, dans un précédent article, on peut passer à certains éléments de propositions à l’échelle mondiale.
Nous avons évoqué une création monétaire de la BCE pour des crédits à moyen et long terme à des taux d’intérêt très abaissés (voire nuls ou même négatifs avec des subventions). Ces taux seraient d’autant plus abaissés que les investissements ainsi financés programmeraient de l’emploi efficace et de la formation. Cela concernerait des enveloppes de création et de crédit allouées à chaque Banque Centrale du Système Européen de BC, en fonction de certaines normes économiques et de besoins sociaux, démocratiquement co-déterminés, jusqu’aux bassins d’emploi et leurs utilisations décentralisées.Déjà de telles enveloppes pourraient être déterminées avec des normes majorées pour les pays concernés par l’élargissement de l’Union européenne, étant donné leur sous-développement relatif économique et social. Il y aurait aussi des contrôles démocratiques concertés des utilisations, notamment pour des achats dans l’Union européenne en vue de l’emploi efficace, en coopération, dans les pays acheteurs et dans les pays vendeurs. En effet, dans les conditions actuelles, on tendrait, avec l’élargissement, à aggraver considérablement la concurrence entre travailleurs pour augmenter la pression sur tous. D’un côté, on jouerait sur les taux de salaire par tête plus bas à l’Est et de l’autre, sur les coûts salariaux par unité produite, plus bas du fait de l’avancée technolgique à l’Ouest, toujours pour faire pression sur les emplois et les conditions faites aux salariés, de façon différenciée selon les secteurs.
Au-delà, une autre orientation monétaire européenne peut s’articuler à de nouvelles coopérations des pays européens avec le reste du monde et tout d’abord avec les pays voisins et les zones avec lesquelles ils entretiennent déjà d’intenses relations. Avec une sorte de Plan Marshall non dominateur, des prêts sans intérêt et aussi des dons en euros pourraient être accordés aux Banques Centrales des pays des zones voisines et coopérantes, comme celles du Sud de la Méditerranée, de l’Afrique, d’Amérique latine, à l’opposé de simples zones de libreéchange comme celle prévue pour la zone euro-méditerranéenne. Ces sommes en euros serviraient à des refinancements des crédits pour sécuriser les activités en coopération : dépensées pour des achats aux pays de l’Union européenne, elles favoriseraient l’emploi et la formation des deux côtés. Elles inciteraient à des critères d’efficacité sociale des entreprises et à des partages de recherche-développement. Les dons aux Banques Centrales permettraient des remboursements des entreprises bénéficiaires des crédits et des banques refinancées à ces Banques Centrales. Ces remboursements favoriseraient des investissements publics et des prises de participation publiques, pour des entreprises mixtes et publiques ouvertes à de nouvelles coopérations très intimes, y compris des « joint-ventures » ou entreprises communes entre entreprises publiques de plusieurs pays.
Enfin, cette autre orientation de l’euro et ces coopérations monétaires au-delà de l’Union européenne fourniraient la base de rapports de force et d’expériences pratiques pour une refonte de démocratisation du FMI. A l’opposé de la domination mondiale du dollar, une véri-table monnaie commune mondiale pourrait être créée par le FMI à partir de ses Droits de Tirages Spéciaux (DTS).
Cette création monétaire attribuerait aux Banques Centrales participant au FMI, selon des normes concertées, des droits de tirer des monnaies des autres Banques Centrales participantes, pour des achats à leurs pays. Les Banques Centrales bénéficiaires utiliseraient ces monnaies étrangères tirées pour des refinancements de crédits à taux d’intérêt très abaissés pour des créations d’emploi et de formation en coopération.
Cependant, à tous les niveaux, du plan européen au plan mondial, outre des dispositions importantes de garanties des crédits sélectifs pour inciter à leur développement, le fort abaissement des taux d’intérêt devrait être très sélectif, c’est-à-dire à la fois sous condition d’emploi efficace ou de formation, et tandis que les taux seraient au contraire relevés pour les placements financiers.
Une émancipation effective de la domination des marchés financiers nécessite un financement alternatif, avec principalement un tout nouveau crédit et une nouvelle création monétaire, outre de nouveaux types de titres. Une taxe sur les flux financiers internationaux (taxe Tobin) serait utile pour conforter ce changement, mais ne changerait rien de fondamental à elle seule. L’annulation plus ou moins complète des dettes des pays en voie de développement, bien plus radicale et aux effets bénéfiques considérables, laisseraient néanmoins inchangées les conditions ultérieures des financements internationaux.
D’après la Lettre de l’OFCE n° 225 21/10/2002, p. 4
Taux d’investissement total*, Etats-Unis et zone euro
Face au ralentissement économique, depuis 2001 la Réserve fédérale des États-Unis a abaissé douze fois ses taux directeurs avec une très forte baisse jusqu’à 1,25%, au dessous de l’inflation, en 2002. La BCE les a aussi abaissés, à son tour, quoique moins souvent et moins fortement, jusqu’à 2,75% en décembre 2002.
Toutefois, ces soutiens de la croissance restent très insuffisants, même aux États-Unis où elle a été plus relevée qu’en Europe, en raison des conditions d’utilisation de la baisse des taux, d’ailleurs à court terme. On prévoit pour 2002 une croissance du PIB de 0,8% dans l’Union européenne contre 1,5% en 2001 et 2,4% aux Etats-Unis contre 0,3% en 2001.Nous avons déjà évoqué, dans le précédent article, les tendances déflationnistes nouvelles. Ces tendances résultent de la maturation technologique et sociale, accélérant les économies sur les moyens matériels et humains relativement à la production et la pression sur les salaires et les dépenses sociales, déprimant ainsi la demande globale. Cette insuffisance de la demande globale se conjugue à la baisse des titres financiers, dans les portefeuilles des entreprises et des ménages et à l’importance de leur endettement. Cela contrarie la demande des crédits des entreprises ou des ménages et aussi leur offre par les banques.
Certes, à l’opposé des restrictions et des thésaurisations en or par les banques centrales, comme dans les années 1930, la création monétaire et les possibilités d’injections publiques massives de liquidités monétaire dans l’économie sont énormément accrues par le décrochement de la monnaie par rapport à l’or, tout particulièrement à partir du dollar des États-Unis. Mais ces injections monétaires seraient en partie contrecarrées par l’exacerbation de la crise systémique.
Il y a d’abord, en relation avec l’insuffisance relative nouvelle de la demande globale ainsi que la baisse des actifs financiers détenus et l’excès des endettements, la tendance à la faiblesse des investissements réels des entreprises. Mais il y aurait aussi diverses utilisations massives des profits opposées à leur emploi pour des accumulations réelles : rachats de titres (actions et obligations) abaissés et non investissements réels, remboursement des dettes excessives, tout particulièrement par les vendeurs de ces titres, etc. D’où la baisse des investissements réels aux Etats-Unis et dans la zone euro en volume et même en pourcentage du PIB pourtant lui-même réduit, contribuant à l’insuffisance de la demande et de l’emploi (voir le graphique).
La relance des dépenses d’armement, tout particulièrement aux Etats-Unis, participe des dépenses pour soutenir la demande et les profits, mais dont les résultats ne sont utilisés ni en moyens de production, ni en moyens de consommation des salariés et sont ainsi soustraits à la production réelle. D’où le caractère ambivalent, à la fois du soutien de la croissance et pervers, anti-croissance, de cette consommation militaire. Cela avait été déjà le cas à la fin de la longue phase de difficultés de l’entre-deux-guerres mondiales, où cette dépense militaire a été bien plus importante relativement. Cependant, le budget militaire serait passé aux États-Unis de 345 milliards de dollars dans le budget 2002, à 379 milliards pour le budget 2003, une augmentation de 10%.
Le dernier plan de relance de grande ampleur aux États-Unis avancé en janvier 2003 et dont la version finale serait éventuellement adoptée en avril, pourrait aller, en bonne partie, dans le même sens. En effet, ce plan de stimulation de l’économie, de 674 milliards de dollars, ajoute aux dépenses publiques une très importante suppression des impôts sur les dividendes des actions (de 364 milliards de dollars) et des baisses d’impôt sur le revenu. Or cela va stimuler les acquisitions d’actions, en favorisant encore les rachats de titres au lieu d’investissements réels. Et cela soutiendrait le niveau restant excessif des valeurs boursières face aux difficultés des résultats des entre-prises, relançant le besoin de baisses ultérieures et leurs pressions sur les capacités d’achat des détenteurs de titres. Les baisses d’impôts censées soutenir la consommation pourraient aussi être mobilisées en partie pour favoriser des remboursements de dettes, outre des achats de titres.
Au plan international, dans les années 1990, les États-Unis avaient joué, en liaison avec leur forte croissance tout particulièrement à partir de nouvelles technologies en maturation, un rôle ambivalent de locomotive et aussi de prédateur mondial.
D’une part, leurs importations massives de capitaux se seraient en partie effectuées au détriment des investissements et de l’emploi dans le reste du monde, notamment dans l’Union européenne ou au Japon.
D’autre part, ces mêmes importations ont aussi contribué à soutenir une demande extérieure et des collaborations favorables à une certaine croissance et à sa relance.
Il faut aussi distinguer l’opposition entre l’importance des « investissements directs à l’étranger » de contrôle des Etats-Unis et le volume bien plus grand de leurs importations de capitaux en « investissements de portefeuille », de bailleurs de fonds, pour leur domination.
Mais tout cela a renforcé aussi, avec l’explosion des capitaux financiers des Etats-Unis, leur dépendance par rapport aux limites et aux pressions imposées à la population mondiale, y compris européenne, du point de vue du progrès de la demande et des capacités productives.
Et désormais, avec les facteurs de ralentissement profonds nouveaux, les efforts de stimulation interne plus importants contribuent en partie à des soutiens de profits ne servant pas à l’investissement réel. Les Etats-Unis joueraient donc moins qu’auparavant, par hypothèse, le rôle de locomotive. Ils continuent néanmoins à prélever des capitaux qui restent très importants de façon relative.
A l’échelle mondiale, les Investissements directs étrangers ont chuté de 40% en 2001 par rapport à 2000, passant de 1 300 milliards de dollars à 760 (DRE,» Forte diminution des flux d’IDE », Problèmes économiques, 9 oct. 2002).
Fondamentalement, avec la maturation de la crise systémique et les caractères nouveaux des facteurs de ralentissement, ce seraient les structures de soutien, par les États et par les collaborations interétatiques, des marchés et des profits, des capitaux financiers monopolistes, ainsi que des rentes capitalistes, qui seraient en cause. Elles interviendraient plus que jamais au détriment des besoins formidables de développement des populations elles-mêmes et de leurs capacités, ainsi que de l’expansion et du partage des recherches et de leurs applications pour toute l’humanité.
En liaison avec le ralentissement nouveau de la croissance à l’échelle mondiale y compris aux États-Unis, montent partout le chômage, la précarité, l’insécurité sociale et, avec leur durabilité relancée, les tensions et toutes les insécurités internes et internationales. Cependant, les forces dirigeantes au plan intérieur comme au plan international, surtout celles des États-Unis notamment en relation avec les attentats terroristes depuis le 11 septembre 2001, insistent sur les violences et une politique sécuritaire pour l’ordre existant. Ils refoulent ainsi, quoiqu’ils en disent, les exigences de l’insécurité économique et sociale mondialisée accrue.
Ainsi, la menace et la préparation de la guerre à l’Irak par les Etats-Unis vise le contrôle de toute la zone, du pétrole irakien et de celui des pays musulmans, ainsi qu’à intimider tous les pays en développement et les pays développés eux-mêmes qu’ils voudraient encore embrigader derrière eux. Cela accompagne, au plan militaire, tous les efforts de renforcement nouveau de leur hégémonie mondiale au plan politique, économique, culturel et informationnel.
Cependant, ces tentatives et ces actions pourraient aussi se retourner contre eux. Cela ne concernerait pas seulement l’accentuation possible des attentats, y compris contre des installations pétrolières. Plus fondamentalement, cela pourrait renforcer les protestations et les défis d’émancipation dans les pays développés, comme dans ceux en voie de développement, pour des avancées de partage mondialisés.
A l’opposé de la conception d’une domination conjointe ou d’impérialisme collectif des Etats-Unis, des pays de l’Union européenne et du Japon avec leurs rapprochements nouveaux, comme au-delà de la simple contradiction traditionnelle entre collaborations et antagonismes inter-impérialistes, une domination généralisée superimpérialiste des Etats-Unis s’est développée sur toute la planète.
Cela renvoie surtout, au plan économique, à la prédominance des énormes importations de capitaux, actions et obligations privées ou publiques, par les États-Unis du monde entier.
Toutefois, en relation avec les luttes pour un autre modèle social de sécurisation de l’emploi et de la formation, les pays de l’Union européenne, à la fois dominant des pays moins développés et astreints à des relations de collaboration mais aussi de domination des Etats-Unis, pourraient chercher à se rapprocher des pays qu’ils contribuent à dominer, pour un renversement historique d’alliance et une convergence des émancipations, avançant vers un co-développement à l’échelle mondiale.
Les partages pour un co-développement mondial, qu’il serait possible d’impulser par une autre orientation des pays de l’Union européenne et leur rapprochement fondamental des pays en développement et émergents, répondraient également aux exigences radicales nouvelles tenant à la révolution écologique et à la révolution démographique.
En effet, les limites traditionnelles de la croissance capitaliste résultant de sa progression même, du côté des ressources de la Terre ou écologiques et du côté des ressources humaines ou des populations, et les réponses technologiques par de nouveaux produits, engendreraient désormais des antagonismes, des potentiels et des défis radicaux qui se précisent en ce moment.
Du côté écologique, à partir de la révolution écologique de l’excès intolérable des pollutions et aussi des nouveaux domaines naturels, on peut insister sur trois ensembles de questions majeures. Tout d’abord, en première ligne de toutes les pollutions industrielles, il s’agit des risques que font peser les gaz à effet de serre sur le changement climatique et le réchauffement, avec notamment la hausse du niveau des mers envahissant des terres. Cela concerne tout particulièrement les consommations des sources d’énergie fossiles (surtout charbon, mais aussi pétrole et gaz). Cela implique le besoin d’une action de tous les États, mais tout particulièrement un rapprochement pour une autre mondialisation entre les pays de l’Union européenne et les pays en développement ou émergents, face au conservatisme des États-Unis sur ce plan, ne voulant pas mettre en cause leur modèle énergétique (voir notamment, Roger Guesnerie, Kyoto et l’économie de l’effet de serre, Rapport du CAE, La Documentation Française, Paris, 2003).
Ensuite, il s’agit de la persistance des à-coups de freinage de la croissance dus à la remontée des prix du pétrole et du gaz, en liaison avec les fluctuations de leur demande et aussi de celles de leur production cherchant à stabiliser des prix suffisamment élevés contre les àcoups de revenus des pays producteurs.
Cela renvoie aux actions interétatiques de l’OPEP sur les niveaux de production et les prix, ainsi qu’à la stratégie d’affrontements pour le renforcement de leur contrôle des États-Unis. Mais cela impliquerait des transformations à l’échelle mondiale pour des ententes de stabilisation des prix à un niveau acceptable pour les différentes parties. En liaison avec des apports de financement nouveaux, notamment par la création monétaire internationale, pour les besoins de développement rapide des peuples concernés, on ferait reculer le rôle de la rente marchande accaparée par les États favorisant leur corruption et des fluctuations des prix déstabilisatrices.
Comme à propos du premier ensemble de questions, cela concerne aussi des incitations, concertées au plan mondial, à l’utilisation d’énergies renouvelables, non polluantes, y compris les utilisations nouvelles de la biomasse. Enfin, tout cela renvoie aux perspectives extraordinaires des bio-technologies, à leurs potentiels considérables d’économies en dépenses énergétiques et aussi de matières, avec des produits, des services et des procédés de qualité fondamentalement nouvelle. Mais une énorme expansion des bio-technologies, répondant, de façon non dominatrice et en minimisant les risques, aux besoins planétaires urgents, exigerait sans doute des transformations de portée révolutionnaire des structures et des régulations, face aux blocages et aux manipulations des intérêts établis, comme ceux des grands groupes industriels et financiers.
Du côté des populations et de la démographie, on peut insister aussi sur trois ensembles de questions. Il s’agit, tout d’abord, face aux défis de la révolution démographique, de réduction drastique de natalité et de progression formidable de la longévité, des décalages de ce point de vue entre les pays les plus développés et le reste du monde entrant plus lentement dans cette mutation. Cela développe encore les besoins de partages. Ainsi, d’une part, la sécurisation de l’emploi et des revenus d’activité favoriserait la fécondité et au moins une non-diminution des populations, ainsi que les bases de prélèvement plus sûres pour les retraites de répartition, surtout dans les pays les plus développés. En même temps l’apport de ces pays à une promotion de l’emploi sécurisé pour tous, dans toutes les populations des autres pays moins développés, permettrait des productions de revenus sécurisés pour elles, mais aussi des apports grandissant, en retour de coopération, pour les populations vieillissantes. Cela favoriserait une maîtrise pour le co-développement des pressions migratoires incitées par les décalages démographiques, de sécurité et de revenu. De même, la promotion massive d’une formation continue de qualité de chacun et chacune partout, en coopération à l’échelle mondiale, répondrait à la fois aux besoins des jeunes, mais aussi des femmes plus disponibles et des travailleurs âgés, particulièrement dans les pays les plus développés. Cela favoriserait fortement la promotion des qualifications à l’opposé de la concurrence des bas salaires et des rejets sociaux, partout et plus spécialement dans les pays les moins développés.
Il s’agit ensuite de l’éradication des famines et des réformes agraires dans les pays plus ou moins sous-développés. Cela renvoie à des relations et des coopérations nouvelles avec les pays les plus développés et d’abord ceux de l’Union européenne. Elles porteraient sur des technologies à la fois modernes et adaptées aux identités locales, sur la non-concurrence des prix abaissés des produits alimentaires importés dans les pays sous-développés contre l’expansion des cultures alimentaires locales, ainsi que sur le soutien d’aides financières et de crédit, y compris pour sécuriser l’emploi et la formation dans l’industrie et les services. En effet, cette sécurisation entraînerait, à la fois, un débouché et des revenus pour la demande et le développement des productions alimentaires locales et aussi une décharge pour le surpeuplement rural, par les emplois nouveaux.
Il s’agit enfin, ici aussi, de l’expansion massive des biotechnologies et de leurs partages non monopolistes, notamment pour les besoins nouveaux de vieillissement ou encore de santé dans le monde, comme d’ailleurs des capacités alimentaires.
Les projets concernant toutes ces transformations sociales rejoindraient les revendications novatrices sur la consommation, la qualité des productions et des services, des points de vue écologique et de santé ou encore de la diversité culturelle pour la créativité culturelle partout, revendications qui montent dans les mouvements pour une autre mondialisation. Ils permettraient de les articuler avec les revendications plus classiques, mais profondément renouvelées, concernant les revenus des travailleurs, l’emploi et également la formation, c’est-àdire les activités pour la production.
Résultats comme activités des productions se réfèrent d’ailleurs, tous deux, aux conditions des critères de gestion d’efficacité sociale, de pouvoirs nouveaux des travailleurs et des populations dans les gestions, de l’appropriation sociale, concernant les entreprises. Cela va jusqu’à l’avancée de nouvelles entreprises publiques coopérant intimement entre elles au plan international, zonal et mondial, avec éventuellement des sociétés publiques conjointes plurinationales.
Toutes ces transformations renvoient enfin à la créativité d’autres principes pour d’autres constructions politiques de démocratie participative et d’intervention, au plan zonal et au plan mondial, que nous ne faisons qu’évoquer.
Les institutions politiques relativement nouvelles actuelles, au plan zonal et au plan mondial, sont caractérisées par l’exacerbation des principes de délégation et d’éloignement des citoyens. Ainsi, dans l’Union européenne, les délégations aux gouvernements nationaux sont encore aggravés par leurs propres délégations à la Commission ou au Conseil européen et aux conseils des ministres. Au plan mondial, au-delà des élégations aux assemblées de l’ONU à la portée limitée, ce sont les super-délégations aux G7, G8, etc, avec le rôle prédominant des États-Unis. Ce sont les délégations aux agences et institutions dites d’autorité indépendantes, FMI, Banque Mondiale, Banque des règlements internationaux, OMC, etc. Les constructions institutionnelles plurinationales, au plan zonal comme au plan mondial, pourraient se fonder sur des principes de décentralisation ou de partage des pouvoirs, ainsi que de concertation sur les cadres et orientations d’ensemble, à différents niveaux. Ces décentralisations ne maintiendraient pas seulement l’importance du niveau national, mais aussi au-dessous de lui, permettraient la promotion des niveaux régional et local jusqu’aux travailleurs et citoyens. Les concertations auraient lieu, dès le plan national, à partir de ces échelons plus limités. Dans ces conditions, les concertations dans les institutions plurinationales pourraient en définitive s’appuyer sur les interventions des citoyens et des travailleurs depuis le niveau local. Une démocratisation nouvelle s’acharnerait à faire participer tous les intéressés aux décisions les plus importantes, grâce aux nouvelles technologies informationnelles, avec des débats transparents, des référendums, etc. Ainsi, le niveau national pourrait être, à la fois, valorisé de façon nouvelle et relativisé. En mettant en valeur les diversités de situations, comme les communautés d’intérêts, on ferait avancer le respect de la créativité d’autrui et l’intercréativité.
*. 3e partie de l’article « La crise, l’Europe, la monde . Défis de radicalité des solutions ». Les deux premières parties ont été publiées dans le numéro de septembre-octobre 2002 d’Economie et Politique.