Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Sur certains défis fondamentaux d’une autre construction mondiale. (3eme partie)

Après  avoir  considéré  la maturation  de  la crise systémique puis une autre construction européenne  monétaire, sociale et politique,  dans  un précédent  article,  on peut passer   à  certains   éléments   de  propositions   à l’échelle mondiale.

D’une autre orientation monétaire européenne  à une autre construction monétaire  mondiale pour d’autres  financements

Nous avons évoqué une création monétaire de la BCE pour des crédits à moyen et long terme à des taux d’intérêt très abaissés  (voire nuls ou même négatifs avec des subventions).  Ces taux  seraient  d’autant  plus  abaissés que les investissements  ainsi financés programmeraient de l’emploi efficace et de la formation. Cela concernerait des enveloppes de création et de crédit allouées à chaque Banque Centrale du Système Européen de BC, en fonction de certaines normes économiques et de besoins sociaux, démocratiquement  co-déterminés, jusqu’aux bassins d’emploi et leurs utilisations décentralisées.Déjà de telles enveloppes pourraient  être déterminées avec des normes majorées pour les pays concernés  par l’élargissement de l’Union européenne,  étant  donné leur sous-développement   relatif  économique  et  social.  Il y aurait aussi des contrôles  démocratiques  concertés  des utilisations,  notamment  pour  des  achats  dans  l’Union européenne  en vue de l’emploi efficace, en coopération, dans  les pays acheteurs  et dans  les pays vendeurs.  En effet, dans  les  conditions  actuelles,  on  tendrait,  avec l’élargissement, à aggraver considérablement  la concurrence entre  travailleurs  pour augmenter  la  pression  sur tous. D’un côté, on jouerait sur les taux de salaire par tête plus bas à l’Est et de l’autre, sur les  coûts salariaux par unité  produite,  plus bas  du fait de l’avancée technolgique  à  l’Ouest, toujours  pour  faire  pression   sur  les  emplois et les conditions faites aux salariés, de façon différenciée selon les secteurs.

Au-delà, une autre  orientation  monétaire  européenne peut s’articuler à de nouvelles coopérations des pays européens  avec le reste  du monde et tout d’abord avec les pays voisins et les zones avec lesquelles ils entretiennent déjà d’intenses relations. Avec une sorte de Plan Marshall non dominateur, des prêts sans intérêt et aussi des dons en euros pourraient  être accordés aux Banques Centrales des pays des zones voisines et coopérantes, comme celles du Sud de la Méditerranée, de l’Afrique, d’Amérique latine, à l’opposé de simples zones de libreéchange comme celle prévue pour la zone euro-méditerranéenne. Ces sommes en euros serviraient à des refinancements des crédits pour sécuriser les activités en coopération : dépensées  pour des achats  aux pays de l’Union européenne,  elles favoriseraient  l’emploi et la formation des deux côtés. Elles inciteraient  à des critères  d’efficacité sociale des entreprises  et à des partages  de recherche-développement. Les dons aux Banques Centrales permettraient des remboursements des entreprises  bénéficiaires des crédits et des banques refinancées à ces Banques Centrales. Ces remboursements favoriseraient des investissements publics et des prises de participation publiques, pour des entreprises  mixtes et publiques ouvertes à de nouvelles coopérations très intimes, y compris des « joint-ventures » ou entreprises  communes entre entreprises  publiques de plusieurs pays.

Enfin, cette autre orientation  de l’euro et ces coopérations  monétaires  au-delà de l’Union européenne  fourniraient la base de rapports  de force et d’expériences pratiques  pour  une refonte  de démocratisation du FMI.  A l’opposé de la domination mondiale du dollar, une véri-table monnaie commune mondiale pourrait être créée par le FMI à partir de ses Droits de Tirages Spéciaux (DTS).

Cette  création   monétaire   attribuerait  aux  Banques Centrales participant  au FMI, selon des normes  concertées, des droits de tirer des monnaies des autres Banques Centrales participantes, pour des achats à leurs pays. Les Banques  Centrales  bénéficiaires  utiliseraient  ces  monnaies étrangères  tirées  pour des refinancements  de crédits  à  taux  d’intérêt  très  abaissés  pour  des  créations d’emploi et de formation en coopération.

Cependant,  à tous  les niveaux, du plan européen  au plan  mondial,  outre  des  dispositions   importantes   de  garanties des crédits sélectifs pour inciter à leur développement,  le fort abaissement  des  taux  d’intérêt  devrait être très sélectif, c’est-à-dire à la fois sous condition d’emploi  efficace ou  de  formation,  et  tandis  que  les  taux seraient au contraire relevés pour les placements financiers.

Une émancipation effective de la domination des marchés financiers nécessite  un financement alternatif, avec principalement un tout nouveau crédit et une nouvelle création  monétaire,  outre  de nouveaux types  de titres. Une  taxe  sur  les  flux financiers  internationaux   (taxe Tobin) serait utile pour conforter ce changement, mais ne changerait rien de fondamental à elle seule. L’annulation plus ou moins complète des dettes  des pays en voie de développement, bien plus radicale et aux effets bénéfiques considérables,  laisseraient néanmoins inchangées les conditions ultérieures des financements internationaux.

D’après la Lettre de l’OFCE n° 225 21/10/2002, p. 4

Taux d’investissement total*, Etats-Unis et zone euro

Difficultés des relances  au plan fondamental et au plan international : tendance  aux blocages  structurels et facteurs  de freinage de la croissance

Face au  ralentissement   économique,  depuis  2001 la Réserve fédérale des États-Unis a abaissé douze fois ses taux directeurs  avec une très forte baisse jusqu’à 1,25%, au dessous de l’inflation, en 2002. La BCE les a aussi abaissés, à son tour, quoique moins souvent et moins fortement, jusqu’à 2,75% en décembre 2002.

Toutefois, ces soutiens de la croissance restent très insuffisants, même aux États-Unis où elle a été plus relevée qu’en Europe, en raison des conditions  d’utilisation de la baisse des taux, d’ailleurs à court terme. On prévoit pour  2002 une croissance  du PIB de 0,8% dans  l’Union européenne  contre  1,5% en 2001 et 2,4% aux Etats-Unis contre 0,3% en 2001.Nous avons déjà évoqué, dans le précédent  article, les tendances déflationnistes nouvelles. Ces tendances résultent de la maturation technologique et sociale, accélérant les économies sur les moyens matériels et humains relativement à la production et la pression sur les salaires et les dépenses  sociales, déprimant ainsi la demande globale. Cette insuffisance de la demande globale se conjugue à la baisse des titres financiers, dans les portefeuilles des entreprises  et des ménages et à l’importance de leur endettement.  Cela contrarie  la demande des crédits des entreprises ou des ménages et aussi leur offre par les banques.

Certes, à l’opposé des  restrictions  et des  thésaurisations en or par les banques  centrales,  comme dans  les années 1930, la création monétaire et les possibilités d’injections  publiques  massives  de  liquidités  monétaire dans l’économie sont énormément  accrues par le décrochement de la monnaie par rapport  à l’or, tout particulièrement à partir  du dollar des États-Unis. Mais ces injections  monétaires  seraient  en  partie  contrecarrées par l’exacerbation de la crise systémique.

Il  y a d’abord, en relation  avec l’insuffisance relative nouvelle de la demande  globale ainsi que la baisse  des actifs financiers détenus et l’excès  des  endettements, la tendance à la faiblesse des investissements   réels   des   entreprises.  Mais il y  aurait  aussi diverses  utilisations  massives des  profits  opposées   à  leur emploi pour des accumulations réelles : rachats de titres (actions  et  obligations)  abaissés et non investissements réels,  remboursement des dettes excessives, tout particulièrement par les vendeurs  de ces  titres,  etc.  D’où la baisse des  investissements  réels  aux Etats-Unis et dans la zone euro en volume et  même en pourcentage  du  PIB pourtant   lui-même  réduit,   contribuant   à l’insuffisance de la demande et de l’emploi (voir le graphique).

La  relance   des   dépenses d’armement, tout particulièrement  aux Etats-Unis, participe des dépenses  pour soutenir  la demande et les profits, mais dont les résultats  ne sont utilisés ni en moyens de production,  ni en moyens de consommation des salariés et sont ainsi soustraits à la production réelle. D’où le caractère ambivalent, à la fois du soutien de la croissance et pervers, anti-croissance, de cette consommation militaire. Cela avait été déjà le cas à la fin de la longue phase de difficultés de l’entre-deux-guerres mondiales, où cette dépense militaire a été bien plus importante relativement. Cependant, le budget militaire serait passé aux États-Unis de 345 milliards de dollars dans le budget 2002, à 379 milliards pour le budget 2003, une augmentation de 10%.

Le dernier plan de relance de grande ampleur aux États-Unis avancé en janvier 2003 et dont la version finale serait éventuellement adoptée en avril, pourrait aller, en bonne partie, dans le même sens. En effet, ce plan de stimulation de  l’économie, de  674 milliards de  dollars,  ajoute  aux dépenses publiques une très importante suppression des impôts sur les dividendes des actions (de 364 milliards de dollars) et des baisses d’impôt sur le revenu. Or cela va stimuler les acquisitions  d’actions, en favorisant encore les rachats  de titres  au lieu d’investissements  réels. Et cela soutiendrait  le niveau restant  excessif des  valeurs boursières  face aux difficultés des  résultats des  entre-prises, relançant le besoin de baisses ultérieures  et leurs pressions  sur  les capacités  d’achat  des  détenteurs de titres. Les baisses d’impôts censées  soutenir  la consommation pourraient  aussi  être  mobilisées en partie  pour favoriser  des  remboursements  de  dettes,   outre  des achats de titres.

Au plan international, dans les années 1990, les États-Unis avaient joué, en liaison avec leur forte croissance tout particulièrement  à partir de nouvelles technologies en maturation, un rôle ambivalent de locomotive et aussi de prédateur mondial.

D’une part, leurs importations massives de capitaux se seraient en partie effectuées au détriment des investissements et de l’emploi dans le reste du monde, notamment dans l’Union européenne  ou au Japon.

D’autre part, ces mêmes importations  ont aussi contribué à soutenir une demande extérieure et des collaborations favorables à une certaine croissance et à sa relance.

Il faut aussi distinguer l’opposition entre l’importance des « investissements  directs  à l’étranger »  de contrôle  des Etats-Unis et le volume bien plus grand de leurs importations de capitaux en « investissements  de portefeuille », de bailleurs de fonds, pour leur domination.

Mais tout  cela a renforcé  aussi,  avec l’explosion des capitaux financiers des Etats-Unis, leur dépendance  par rapport  aux limites et aux pressions  imposées à la population mondiale, y compris européenne,  du point de vue du progrès de la demande et des capacités  productives.

Et désormais,  avec les facteurs  de ralentissement  profonds nouveaux, les efforts de stimulation  interne plus importants contribuent en partie à des soutiens de profits ne  servant  pas  à  l’investissement  réel.  Les Etats-Unis joueraient donc moins qu’auparavant,  par hypothèse,  le rôle de locomotive. Ils continuent  néanmoins à prélever des capitaux qui restent très importants de façon relative.

A  l’échelle mondiale, les Investissements  directs  étrangers ont chuté de 40% en 2001 par rapport à 2000, passant de 1 300 milliards de dollars à 760 (DRE,» Forte diminution des flux d’IDE », Problèmes  économiques, 9 oct. 2002).

Fondamentalement, avec la maturation  de la crise systémique et les caractères nouveaux des facteurs de ralentissement,  ce seraient  les structures de soutien, par les États et par  les collaborations  interétatiques,  des  marchés et des profits, des capitaux financiers monopolistes, ainsi que des rentes  capitalistes,  qui seraient  en cause. Elles interviendraient  plus que jamais au détriment  des besoins formidables de développement des populations elles-mêmes et de leurs capacités,  ainsi que de l’expansion et du partage des recherches et de leurs applications pour toute l’humanité.

Défis de l’agressivité  nouvelle des États-Unis pour renforcer leur hégémonie mondiale

En liaison avec le ralentissement  nouveau de la croissance à l’échelle mondiale y compris aux États-Unis, montent partout  le chômage, la précarité,  l’insécurité sociale et, avec leur durabilité relancée, les tensions et toutes les insécurités  internes  et  internationales.   Cependant,  les forces dirigeantes au plan intérieur comme au plan international, surtout celles des États-Unis notamment en relation avec les attentats  terroristes depuis le 11 septembre 2001, insistent  sur les violences et une politique sécuritaire pour l’ordre existant. Ils refoulent ainsi, quoiqu’ils en disent,  les  exigences  de  l’insécurité  économique  et sociale mondialisée accrue.

Ainsi, la menace et la préparation  de la guerre à l’Irak par les Etats-Unis vise le contrôle  de toute  la zone, du pétrole irakien et de celui des pays musulmans, ainsi qu’à intimider  tous  les pays  en développement  et  les pays développés eux-mêmes qu’ils voudraient encore embrigader derrière eux. Cela accompagne, au plan militaire, tous les efforts de renforcement  nouveau de leur hégémonie mondiale au plan politique, économique, culturel et informationnel.

Cependant,  ces  tentatives  et  ces  actions  pourraient aussi se retourner  contre  eux. Cela ne concernerait  pas seulement  l’accentuation possible  des attentats,  y compris contre  des installations pétrolières.  Plus fondamentalement, cela pourrait  renforcer les protestations et les défis d’émancipation dans les pays développés,  comme dans ceux en voie de développement, pour des avancées de partage mondialisés.

A l’opposé de la conception d’une domination conjointe ou d’impérialisme collectif des  Etats-Unis, des  pays  de l’Union européenne  et du Japon  avec leurs  rapprochements nouveaux, comme au-delà de la simple contradiction traditionnelle  entre  collaborations  et antagonismes inter-impérialistes,   une  domination  généralisée  superimpérialiste des Etats-Unis s’est développée  sur toute la planète.

Cela renvoie surtout,  au plan économique, à la prédominance des énormes importations  de capitaux, actions et obligations privées ou publiques, par les États-Unis du monde entier.

Toutefois,  en  relation  avec  les  luttes  pour  un  autre modèle social de sécurisation  de l’emploi et de la formation, les pays de l’Union européenne,  à la fois dominant des pays moins développés et astreints à des relations de collaboration  mais aussi  de domination  des  Etats-Unis, pourraient   chercher   à  se  rapprocher  des  pays  qu’ils contribuent  à dominer, pour un renversement  historique d’alliance et une convergence  des émancipations,  avançant vers un co-développement à l’échelle mondiale.

Besoins de partages mondialisés non dominateurs pour le co-développement des populations et responsabilité des pays de l’Union européenne

Les partages pour un co-développement mondial, qu’il serait possible d’impulser par une autre orientation des pays de l’Union européenne  et leur rapprochement fondamental des pays en développement et émergents, répondraient également aux exigences radicales nouvelles tenant à la révolution écologique et à la révolution démographique.

En effet, les limites traditionnelles de la croissance capitaliste résultant de sa progression même, du côté des ressources de la Terre ou écologiques et du côté des ressources humaines ou des populations, et les réponses technologiques   par  de  nouveaux  produits,   engendreraient désormais des antagonismes, des potentiels et des défis radicaux qui se précisent en ce moment.

Du côté écologique, à partir de la révolution écologique de  l’excès intolérable  des  pollutions  et  aussi  des  nouveaux domaines naturels, on peut insister sur trois ensembles de questions  majeures. Tout d’abord, en première ligne de toutes les pollutions industrielles, il s’agit des risques que font peser les gaz à effet de serre sur le changement climatique et le réchauffement, avec notamment  la  hausse  du  niveau  des  mers  envahissant   des terres.  Cela concerne  tout particulièrement  les consommations des sources d’énergie fossiles (surtout  charbon, mais aussi pétrole et gaz). Cela implique le besoin d’une action de tous les États, mais tout particulièrement un rapprochement pour une autre  mondialisation entre  les pays de l’Union européenne et les pays en développement ou émergents, face au conservatisme des États-Unis sur ce plan, ne voulant pas mettre en cause leur modèle énergétique (voir notamment, Roger Guesnerie, Kyoto et l’économie de l’effet de serre, Rapport du CAE, La Documentation Française, Paris, 2003).

Ensuite, il s’agit de la persistance des à-coups de freinage de la croissance dus à la remontée des prix du pétrole  et du gaz, en liaison avec les fluctuations de leur demande et aussi de celles de leur production cherchant  à stabiliser des prix suffisamment  élevés   contre   les  àcoups de revenus des pays producteurs.

Cela renvoie aux actions interétatiques de l’OPEP sur les niveaux de production  et les prix, ainsi qu’à la stratégie  d’affrontements  pour  le renforcement  de leur contrôle  des États-Unis. Mais cela  impliquerait des   transformations   à  l’échelle mondiale pour des ententes de stabilisation des prix à un niveau acceptable  pour les différentes  parties.  En liaison avec des  apports  de financement  nouveaux,  notamment  par  la création  monétaire internationale, pour les besoins de développement rapide des peuples concernés, on ferait reculer le rôle de la rente marchande  accaparée  par  les États favorisant  leur corruption et des fluctuations des prix déstabilisatrices.

Comme à propos  du premier  ensemble de questions, cela concerne  aussi des incitations,  concertées  au plan mondial, à l’utilisation d’énergies renouvelables, non polluantes,  y compris  les utilisations  nouvelles  de  la biomasse. Enfin, tout  cela  renvoie  aux  perspectives   extraordinaires  des  bio-technologies, à leurs  potentiels  considérables d’économies en dépenses  énergétiques et aussi de matières, avec des produits, des services et des  procédés de qualité fondamentalement  nouvelle. Mais une énorme expansion des bio-technologies, répondant,  de façon non dominatrice et en minimisant les risques, aux besoins planétaires  urgents,  exigerait  sans  doute  des  transformations  de  portée  révolutionnaire  des  structures et  des régulations, face aux blocages et aux manipulations  des intérêts  établis, comme ceux des grands groupes industriels et financiers.

Du côté des populations et de la démographie, on peut insister aussi sur trois ensembles de questions. Il s’agit, tout  d’abord, face aux défis de la révolution démographique, de réduction drastique  de natalité et de progression  formidable de la longévité, des décalages de ce point de vue entre les pays les plus développés  et le reste du monde entrant  plus lentement dans cette mutation.  Cela développe  encore  les  besoins  de  partages. Ainsi, d’une part, la sécurisation  de l’emploi et des revenus d’activité favoriserait  la fécondité  et au moins une non-diminution des populations,  ainsi que les bases  de prélèvement  plus sûres pour les retraites  de répartition, surtout  dans  les  pays  les  plus  développés.  En même temps l’apport de ces pays à une promotion de l’emploi  sécurisé   pour  tous,  dans  toutes   les  populations   des autres  pays moins développés,  permettrait des productions de revenus sécurisés pour elles, mais aussi des apports grandissant, en retour de coopération, pour les populations  vieillissantes. Cela favoriserait une maîtrise pour le co-développement des pressions migratoires incitées par les décalages démographiques,  de sécurité et de revenu. De même, la promotion massive d’une formation continue de qualité de chacun et chacune partout, en coopération  à l’échelle mondiale, répondrait  à la fois aux besoins des jeunes, mais aussi des femmes plus disponibles et des travailleurs âgés, particulièrement  dans les pays les plus développés.  Cela favoriserait fortement la promotion  des  qualifications  à  l’opposé  de  la concurrence  des bas salaires  et des rejets  sociaux, partout  et plus spécialement dans les pays les moins développés.

Il s’agit ensuite de l’éradication des famines et des réformes agraires dans les pays plus ou moins sous-développés. Cela renvoie à des relations et des coopérations nouvelles avec les pays les plus développés  et d’abord ceux de  l’Union européenne.  Elles porteraient  sur  des technologies à la fois modernes et adaptées aux identités locales, sur la non-concurrence des prix abaissés des produits alimentaires importés  dans les pays sous-développés contre l’expansion des cultures alimentaires locales, ainsi que sur le soutien d’aides financières et de crédit, y compris pour sécuriser l’emploi et la formation dans l’industrie et les services. En effet, cette sécurisation  entraînerait, à la fois, un débouché  et des revenus pour la demande et le développement  des productions  alimentaires  locales et aussi une décharge  pour  le surpeuplement rural, par les emplois nouveaux.

Il s’agit enfin, ici aussi, de l’expansion massive des biotechnologies et de leurs partages non monopolistes, notamment pour les besoins nouveaux de vieillissement ou encore de santé dans le monde, comme d’ailleurs des capacités alimentaires.

Les projets concernant  toutes ces transformations sociales rejoindraient les revendications novatrices sur la consommation,  la qualité  des  productions   et  des  services, des points de vue écologique et de santé ou encore de la diversité culturelle pour la créativité culturelle partout, revendications qui montent dans les mouvements pour  une autre  mondialisation.  Ils permettraient de les articuler avec les revendications plus classiques, mais profondément renouvelées, concernant les revenus des travailleurs,  l’emploi et également la formation, c’est-àdire les activités pour la production.

Résultats comme activités des productions  se réfèrent d’ailleurs, tous deux, aux conditions des critères  de gestion d’efficacité sociale, de pouvoirs  nouveaux des  travailleurs et des populations dans les gestions, de l’appropriation sociale, concernant  les entreprises.  Cela va jusqu’à l’avancée de nouvelles entreprises  publiques coopérant intimement entre elles au plan international, zonal et mondial,  avec  éventuellement   des  sociétés   publiques conjointes plurinationales.

Toutes ces transformations renvoient enfin à la créativité d’autres principes  pour d’autres constructions politiques de  démocratie  participative   et  d’intervention,  au  plan zonal et au plan mondial, que nous ne faisons     qu’évoquer.

Les  institutions   politiques   relativement   nouvelles actuelles, au plan zonal et au plan mondial, sont caractérisées par l’exacerbation des principes  de délégation et d’éloignement  des  citoyens.  Ainsi, dans  l’Union européenne,  les  délégations  aux  gouvernements  nationaux sont encore aggravés par leurs propres  délégations à la Commission ou au Conseil européen  et aux conseils des ministres. Au plan mondial, au-delà des   élégations aux assemblées de l’ONU à la portée limitée, ce sont les super-délégations aux G7, G8, etc, avec le rôle prédominant  des États-Unis. Ce sont les délégations aux agences et institutions   dites   d’autorité   indépendantes,    FMI, Banque Mondiale, Banque des règlements  internationaux,  OMC, etc. Les constructions institutionnelles plurinationales, au plan zonal comme au plan mondial, pourraient  se fonder sur des principes  de décentralisation ou de partage des pouvoirs,  ainsi  que  de  concertation   sur  les  cadres  et orientations  d’ensemble, à différents niveaux. Ces décentralisations  ne  maintiendraient  pas  seulement l’importance du niveau national, mais aussi au-dessous  de  lui, permettraient la promotion des niveaux régional et local jusqu’aux travailleurs et citoyens. Les concertations auraient lieu, dès le plan national, à partir  de  ces  échelons  plus  limités. Dans ces conditions,  les concertations dans  les institutions   plurinationales  pourraient   en définitive s’appuyer  sur  les  interventions des  citoyens  et  des  travailleurs  depuis  le niveau local. Une démocratisation nouvelle s’acharnerait à faire participer tous les intéressés  aux décisions  les plus importantes, grâce aux nouvelles  technologies  informationnelles,  avec  des  débats  transparents, des référendums, etc. Ainsi, le niveau national pourrait être, à la fois, valorisé de façon nouvelle et relativisé. En mettant en valeur les diversités de situations, comme les communautés  d’intérêts,  on  ferait  avancer  le respect  de la créativité  d’autrui et l’intercréativité.  

*. 3e partie de l’article « La crise, l’Europe, la monde . Défis de radicalité des solutions ». Les deux premières parties ont été publiées dans le numéro de septembre-octobre 2002 d’Economie et Politique.