Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Conjoncture : La France au cœur de la tempête

Loin de protéger la France du ralentissement mondial de l’activité, à partir des Etats-Unis, la politique de sarkozy fait au contraire activement contribuer notre pays aux difficultés européennes et mondiales, envenimant ses principales fragilités accentuées au cours des 25 dernières années : la faiblesse de l’emploi en quantité et qualité, sur un fond de chômage de masse durable plus important qu’ailleurs dans la zone euro ; l’insuffisance de la demande  intérieure et des qualifications avec des salaires au pouvoir d’achat laminé par les politiques patronales, la précarisation généralisée et la hausse des prix des produits et services nécessaires  ;  l’inefficacité croissante des productions nationales rongées par le cancer financier des opérations boursières, des prélèvements bancaires et de marché et par les exportations excessives de capitaux, dont des délocalisations. La politique de Sarkozy conduit la France vers de très graves difficultés. 

La France est particulièrement en difficulté au sein de la zone euro. La politique mise en œuvre  par Sarkozy depuis  juillet 2007 coïncide  exactementavec l’éclatement et le développement de la crise financière  internationale à partir  du krach  du marché  des crédits  hypothécaires risqués (subprimes) aux EtatsUnis. Cette  politique  a-t-elle protégée  la France  des turbulences internationales ou en a-t-elle fait un contributeur actif ? A-t-elle permis « d’aller chercher le point de croissance qui manque  à la France » selon  les termes même de l’hôte de l’Elysée ?

Le gouvernement Fillon s’est tellement inscrit  dans  ce volontarisme verbal du Président de la République  qu’il n’a pas hésité,  lors du débat de printemps sur l’orientation  des finances publiques, à retenir une hypothèse de croissance du PIB de 1,7% à 2% pour 2008 et de 1,75 à 2,5 pour 2009.

En réalité,  la performance enregistrée par la France au deuxième trimestre 2008 (0,3%), comme la prévision de l’INSEE pour toute l’année 2008 (1,6%), sans doute un peu optimiste elle-même (certains prévisionnistes n’anticipant  qu’une  croissance de l’ordre  de 1%) montrent combien  ses  hypothèses ne correspondent pas  à la réalité.

1 - Au bord de la récession

Le coup de trompette triomphale envoyé par le gouvernement, après les performances pas trop médiocres du 1er trimestre 2008, visait  à illusionner : La France,  à l’image de l’Allemagne, pourrait résister au ralentissement mondial.

Aujourd’hui, comme le relève l’INSEE dans  sa dernière note de conjoncture (1), « cette perspective s’est évanouie ». L’institut estime qu’après la progression du 1er trimestre, le PIB augmenterait de 0,2% au printemps, stagnerait pendant l’été, puis s’accroîtrait de 0,2% au 4ème  trimestre.

La croissance devrait  rester très modérée (de 0 à 0,2% par  trimestre) d’ici à la fin 2008, l’année  pouvant  se terminer sur une croissance moyenne  annuelle de 1,6% après 2,1% en 2007 et 2,4% en 2006.

Sans doute,  cette  prévision  de l’INSEE pourrait être, elle-même,  trop optimiste, puisqu’elle  intègre  l’hypothèse que la croissance du PIB aurait été de 0,2% au printemps,  alors qu’elle s’est avérée négative (0,3%).

La France  « flirte  » donc avec la récession  technique (2 trimestres successifs  de croissance  négative).

La principale cause  de ces évolutions tient au « vif freinage des dépenses des ménages ». Les dépenses totales (consommation et achats de logements) n’augmenteraient,  en effet, que de 1,1% par rapport à 2007, soit la plus mauvaise performance depuis  1997.

C’est la dégradation de l’emploi, sur fond de chômage et de précarisation massive,  conjuguée  à la hausse  des prix des  postes de dépenses nécessaires (notamment alimentation et énergie),  à la faiblesse  rémanente des salaires,  pensions et retraites, et au durcissement des conditions du crédit bancaire, qui conduit à cette situation.

2 - Marché du travail : tous les indicateurs au rouge :

En 2007, plus  de 380 000 emplois,  certes  précaires surtout, ont été créés  dans  l’ensemble  de l’économie, dont 352 000 salariés dans les secteurs concurrentiels. Pour 2008, l’INSEE prévoit  que les créations d’emplois seraient nettement moins nombreuses (environ 200 000 dont 193 000 salariés  dans les secteurs concurrentiels). Deux raisons à cela :

  • Le tassement de l’activité dans les secteurs  marchands ;

  • Les sorties  des dispositifs de contrats aidés qui continueraient d’être supérieures aux entrées, freinant l’emploi salarié  dans les secteurs non marchands.

Les dégâts  seraient particulièrement lourds  dans  l’industrie où 72 000 emplois  nets  seraient détruits cette année,  avec une accélération au second semestre. Au total, la réduction des effectifs s’accélèrerait cette année :elle atteindrait 2%, après 1% l’an passé.  Dans la seule industrie manufacturière, l’emploi reculerait de 2,1%, après -1,4% en 2007.

Et les services  marchands continueraient, certes, de tirer  l’emploi total  à la hausse,  mais beaucoup  moins qu’en 2007 : +149 000 contre +195 000. Ainsi, les effectifs n’augmenteraient  que de 1,6% cette  année  dans le tertiaire, après 2,7% en 2007. Et il s’agira, pour  l’essentiel,  d’emplois très précaires.

De ce fait, le taux de chômage  officiel (en définition BIT), qui est très inférieur au sous emploi réel, remonte à partir  de la fin du deuxième  trimestre 2008, pour atteindre, selon  l’INSEE, 7,1% en fin d’année.  Mais la situation risque  d’être plus dégradée.

Rappelons que la France est dans le peloton de queue des pays de l’Union européenne pour ce qui concerne le chômage : avec 7,4% de taux de chômage (en données standardisées) en mai 2008, elle fait pire que la moyenne des  pays  de l’Union européenne à 27 (6,8%) et pire même que la moyenne  des pays de la zone euro (7,2%).

3 - Pouvoir d’achat des salaires en berne  :

Les revenus salariaux vont décélérer tout au long du 2ème semestre 2008 sous l’effet de la casse  de l’emploi, de la précarisation massive  et de la remontée du chômage. En effet, la masse salariale  versée  aux ménages  connaîtrait un brutal  refroidissement (+ 1,8% au 2ème  semestre 2008 après + 2,2% au premier  semestre) du fait de la dégradation de l’emploi et  du refus  obstiné  des employeurs, du privé comme du public, de répondre aux revendications, alors que les rémunérations sont largement bloquées, depuis  la fin des années  1990 !

C’est cette  pression sur les revenus salariaux  qui, pour l’essentiel,  serait  à l’origine du net  ralentissement du revenu nominal des ménages : il n’augmenterait que de 1,3% au 2ème semestre 2008, contre 2% au 1er et 2,8% au 2ème semestre 2007.

Ce ralentissement intervient  alors  que les prix à la consommation s’envolent,  tout  particulièrement ceux des produits alimentaires et de l’énergie. Au total, les prix de détail augmenteraient de 3,2% en moyenne annuelle, après 1,5% en 2007. C’est le niveau le plus élevé depuis 15 ans (3,2% en 1991).

Le salaire moyen  par tête, corrigé de l’inflation ( et donc en pouvoir d’achat), stagnerait dans l’ensemble de l’économie  2008,  après une hausse  de 1,6% en 2007.

L’Etat  patron  donne  l’exemple : dans  les administrations publiques, le salaire moyen par tête baisserait de 0,9% en termes réels (c’est à dire corrigé de l’inflation) en 2008, après avoir augmenté de 1,2% en 2007. Dans les entreprises, le salaire par tête réel continuerait de chuter en 2008 (0,1%), après avoir diminué successivement en 2006 et 2007, la baisse  s’accélérant au 4ème trimestre (0,4%).

On mesure la nécessité  d’une très grande mobilisation pour arracher des hausses générales  de salaires aux employeurs du privé comme du public. Cela pourrait commencer en portant immédiatement le SMIC à 1 500 euros mensuels valeur 2007, puis se prolonger dans des négociations  sur les salaires, l’emploi, les qualifications pour des augmentations  générales.

4 - La demande intérieure faiblit :

Après le coup d’arrêt du 1er trimestre 2008 (+ 0,1% après + 0,6% au 4ème    trimestre 2007), la consommation aurait du mal à repartir. Sa croissance serait  comprise entre + 0,1% et + 0,3% par trimestre seulement.

De même, la crise immobilière  s’accentue en France. Selon les chiffres des services de l’Equipement du ministère  de l’écologie, les ventes  de logements neufs  ont chuté  de 33,9% au 2ème      trimestre 2008 par  rapport au même  trimestre de 2007 (21 500 unités).  La baisse dépasse même 50% dans 5 régions (Aquitaine, Lorraine, Midi-Pyrénées,  Bourgogne, Limousin).  Et les mises  en chantier de logements  en France ont reculé au cours de la période allant de mai à juillet pour atteindre le nombre de 107 238 seulement, soit  11,8% de moins  qu’un an plus  tôt.  Ces évolutions pourraient entraîner un freinage plus important de la croissance économique d’ensemble.

Mais l’INSEE prévoit  que l’investissement productif soutiendrait légèrement la demande intérieure, tout en ralentissant nettement : sa croissance passerait de 7,3% en 2007 à 4,4% en 2008. La croissance trimestrielle prévisionnelle  ne serait  que  de +0,6% seulement au 2ème semestre. Bien sur, cette prévision est entachée d’aléas. Cela concerne, notamment, le durcissement des conditions de crédit à l’investissement par les banques.

5 -  Profits  et crédit : du mouron pour  les PME et les TPE :

En 2007, déjà, la part des profits des entreprises (sociétés non financières) dans  les richesses nouvelles qu’elles produisent (valeur ajoutée) avait augmenté, atteignant 31,3% contre 31,2% en 2006. Et, déjà, y avaient largement concouru les exonérations de cotisations sociales patronales d’heures  supplémentaires qui avaient  compensé le recul des gains de productivité apparente du travail engendré par l’insuffisance  des  salaires  et des  qualifications.

En 2008, la part  des  profits  augmenterait de nouveau, atteignant 31,4% de la valeur ajoutée  des sociétés non financières. Ce serait du, une fois de plus, à la baisse du taux de cotisation patronale entraînée par les exonérations d’heures supplémentaires qui contribuerait pour +0,5 point à l’augmentation de la part des profits.

Ce serait, au total (2), plus de 20 milliards  d’euros qui, dans les seules sociétés non financières, auraient été  transférés  des  salaires  vers les  profits en 2007, puis, à nouveau, plus de 57 milliards d’euros en 2008. Cette année,  les gains de productivité du travail ralentiraient à nouveau sous l’impact de la dégradation de l’activité,  mais  ils seraient compensés par  un ralentissement  encore  plus  net des  salaires  réels  du fait de la remontée du chômage.

Cette augmentation de la part des profits dans la valeur ajoutée  des sociétés ne se traduirait pas par un redressement de l’investissement en France : celui-ci ralentirait avec une croissance trimestrielle inférieure  à 0,6% en prévision.

Cela tiendrait au ralentissement de l’activité  et à la dégradation du climat des affaires tant dans l’industrie que dans les services. Cela tiendrait aussi au fort ralentissement attendu des demandes de crédit signalé par les enquêtes de la Banque de France.

Or, ces dernières années, c’est le recours accru au crédit bancaire qui a permis  aux entreprises d’accroître leurs investissements en France  (et  aussi  beaucoup à l’étranger), alors même que le taux d’autofinancement de ces investissements baissait.

Les PME et TPE sont  particulièrement exposées à de telles  évolutions. Elles sont  confrontées au durcissement  des  conditions imposées par  leurs  grands donneurs d’ordre  qui vont  jusqu’à  exiger parfois  leur délocalisation. Elles sont  confrontées aussi  au durcissement et à la sélectivité accrue des conditions de crédit dus aux pertes enregistrées par les banques sur leurs opérations spéculatives. Ainsi, dans son enquête trimestrielle sur la distribution du crédit  en France de juillet 2008, la Banque  de France  signale  que « les banques s’attendent (…)  pour la moitié  d’entre elles de durcir encore leurs critères ».

Les banques  françaises,  en effet, ont  perdu  quelque 16,60 milliards  d’euros  depuis  juin 2007 à la suite  de l’effondrement  du marché  des « subprimes » aux Etats-Unis. Simultanément, leurs  capitalisations boursières ont  fortement chuté,  rendant plus  difficile et plus coûteuse la levée par elles de fonds, sur les marchés, pour couvrir  ces pertes.

En France, ce sont  les banques du secteur mutualiste, Crédit agricole et Natixis en tête, qui, paradoxalement, sont les plus touchées. Cela traduit l’ampleur du divorce qui s’est  développé, avec  la banalisation de leurs gestions, entre  les objectifs  et les valeurs  mutualistes qu’elles sont toujours censées servir et leur enlisement, au nom de la course à la rentabilité financière, dans les opérations spéculatives.

6 - Coup de froid  sur  les productions françaises et bataille pour  baisser les coûts :

En 2008, la production de l’ensemble des branches ralentirait (+ 1,9% après + 2,5% en 2007). L’effritement de la croissance se produirait à partir du deuxième trimestre. Dans l’industrie,  la production ralentirait nettement et même reculerait d’ici la fin de l’année. Au total, la production manufacturière ne croîtrait  plus  que de 1,6% en 2008 après + 2,3% en 2007.

Trois secteurs industriels souffrent  particulièrement :

  • Lindustrie automobile continue  sa chute : -3% en juin 2008 après avoir déjà baissé de 7,9% en mai. Il faut y voir, outre  l’insuffisance  de pouvoir  d’achat  en France,  la conséquence des politiques de délocalisation très agres sives de Renault et PSA.
  •  L’industrie  des  biens  intermédiaires  (chimie,  bois, papier,  carton,  produits minéraux…)  a vu ses productions  reculer  de 0,4% en juin et de 1,9% sur  le 2ème trimestre. C’est un mauvais signal pour les mois à venir, puisque ces produits sont situés en amont de la chaîne de production.
  • L’industrie agroalimentaire  affiche aussi  des performances médiocres. La production y a baissé de 0,9% enjuin et de 1,6% sur le 2ème    trimestre, la demande ayant sensiblement faibli du fait de la flambée des prix alimentaires depuis  la fin 2007.

Il paraît  bien difficile pour  le patronat de mettre  en avant le manque de compétitivité de la France, laquelle ,se mesure, selon eux, par les coûts salariaux avant tout. Selon Eurostat, en effet, les coûts  salariaux  horaires français dans le secteur marchand auraient augmenté de 2,5% entre le 1er trimestre 2007 et le 1er trimestre 2008, au lieu d’un rythme  moyen de + 3,3% au cours  de l’année écoulée. Notons, parallèlement, que la progression des coûts  horaires dans la zone euro atteint 3,3% au début de 2008 en regard d’une moyenne de 2,6% en 2007. L’accélération est  sensible  en Allemagne et en Espagne.

En réalité  si des coûts excessifs  grèvent l’efficacité des productions nationales, il faut les chercher  ailleurs  :

  •  L’insuffisance de formation et de qualification  des salariés, en liaison avec les politiques de bas salaires et d’emplois précaires des patrons fortement encouragées par  le gouvernement (exonérations de cotisations sociales patronales). Le taux de participation financière des  entreprises à la formation  continue  ne cesse  de reculer  depuis  le début  des  années  2000. Et cela en contradiction violente  avec  les besoins  énormes de qualification engendrés par les débuts de la révolution informationnelle.
  • Linsuffisance de demande engendrée par le chômage, la précarité, les bas  salaires  et les besoins  excessifs d’épargne de précaution des salariés et qui pousse  à une sous-utilisation des capacités de production.
  •  L’insuffisance  de l’effort de recherche-développement des entreprises  en France L’intensité de l’effort de R&D fourni par les entreprises (1,34% en 2005 après 1,46% en 2004) place  notre  pays très  loin derrière l’Allemagne (1,71%) et au douzième rang seulement des pays de l’OCDE nettement distancé par  le Japon  (2,54%) et les Etats-Unis (1,82%). Sur la période 1998-2004, le taux de croissance annuel moyen de la DIRDE ( dépense intérieure de R&D des  entreprises) en France (+3,3%) nous  situe  en dessous de la moyenne  de l’UE à 15 (+6,3%).
  • Lexcès considérable des prélèvements financiers contre les prélèvements sociaux :
    Il y a un consensus Droite-P.S. pour baisser les « charges sociales  » des  entreprises (cotisations sociales  patronales).  Les uns et les autres  prétendent plus ou moins que ces charges sont trop lourdes et qu’elles sont le principal handicap pour la compétitivité des entreprises. Au bout  du compte, ce serait  ces charges  excessives qui expliqueraient les mauvais résultats de la France sur le front de l’emploi.

 

Or ces « charges  sociales  » sont des charges  utiles pour le développement du pays.  Les baisser, y compris de façon prétendument  conditionnelle comme le propose le PS et l’envisage la droite, revient au contraire à déresponsabiliser toujours plus les entreprises au plan social, territorial et national. Cela permet  d’accroître les profits disponibles qui sont  immédiatement utilisés  pour  les opérations financières.

Les baisses  de «  charges  sociales  »  des  entreprises accentuent l’insuffisance de salaires et de qualifications. Elles accentuent le déficit de la protection sociale.  En tirant  tous les salaires  vers le bas, elles handicapent la progression des  dépôts des  salariés sur  les comptes courants bancaires, alors  que  c’est  là la principale ressource gratuite des banques. Celles-ci doivent alors, pour compenser, aller emprunter sur les marchés financiers,  ce qui augmente le coût  de leurs  ressources et pousse, alors,  à la hausse les taux d’intérêt  du crédit. Il faut arrêter de baisser ces « charges sociales  ». Par contre,  on peut  et il faut baisser les « charges  financières » (intérêts payés aux créanciers, dividendes versés aux actionnaires) pesant  sur  les entreprises, notamment les PME.

En France, selon les Comptes  de la Nation,  le total des « charges sociales  » payées effectivement par les sociétés  non financières  est passé de 116,6 milliards d’euros en 2002 à 142,1 milliards d’euros en 2007. Mais le total des charges  financières  supportées  par ces sociétés  est passé, lui, de 182,5 milliards d’euros en 2002 à 314,7 milliards d’euros en 2007 !

Ce sont ces prélèvements financiers étouffants pour les entreprises, l’emploi et les salaires  qu’il faut baisser, au lieu de faire reculer les prélèvements sociaux néces saires,  eux, au financement de la protection sociale. Les communistes  proposent  de supprimer  les exonérations de cotisations sociales des entreprises et d’utiliser l’argent qui leur est alloué à alimenter un Fonds national pour  l’emploi et les  qualifications : les 27 milliards d’euros de compensations  de ces exonérations  payées par l’Etat en 2007 serviraient, dans ce Fonds, à prendre en charge tout ou partie des intérêts versés aux banques par les entreprises pour leurs crédits à l’investissement.  Plus leurs investissements programmeraient  d’emplois et de formations et plus serait abaissé, par bonification sélective, le taux d’intérêt des crédits pour les financer. Ainsi l’argent public utilisé, contre l’emploi et les salaires, à « alléger les charges sociales des entreprises », servirait-il à créer des emplois  par un allègement  sélectif de leurs « charges financières ». Tout de suite, on peut engager la bataille dans les régions pour construire, à l’appui des luttes, les fondations de cette nouvelle institution financière. Il s’agit de la bataille pour imposer la création de Fonds régionaux  pour  l’emploi et la formation qui pourraient être alimentés tout de suite par un redéploiement des lignes de crédits d’action et de développement économiques  du budget de chaque conseil régional où la gauche est majoritaire.

Ce serait là un moyen pour obliger les banques, à partir des luttes,  à accroître leur crédit pour des investissements qui programment effectivement des emplois et des formations dans les régions au lieu de laisser l’argent des dépôts  en banques  et du crédit servir aux placements financiers et à la spéculation.  Cela pourrait marcher  de paire avec l’exigence d’une appropriation sociale des banques (nouveau type de nationalisation) et la création d’un pôle bancaire et financier public autour de la CDC et incluant notamment, les caisses d’épargne et la Banque postale,  au lieu de laisser se banaliser le Livret « A » avec la mise en œuvre de la scandaleuse loi LME. Lutter dans ce sens  reviendrait  aussi à lutter  pour une profonde  réorientation de la politique  monétaire  de la BCE.

7 - Déficit extérieur de la France du au déficit social et aux excès  financiers en France :

Dans ces conditions le déficit du commerce extérieur de la France est appelé  à battre de nouveaux records. Ce mauvais résultat s’inscrit dans une tendance négative amorcée dés  2002 et qui n’est pas  due qu’à la facture énergétique : entre 2002 et 2007, le solde hors énergie a reculé d’environ 25 milliards d’euros.

Sept catégories de produits sont responsables : la pharmacie,  l’aéronautique, les boissons, pour  des  raisons surtout conjoncturelles ; l’automobile,  l’électronique grand public, les métaux non ferreux, la chimie minérale et organique, les produits des industries alimentaires, pour des raisons surtout structurelles.

Cette dégradation est imputable à un renchérissement du coût des importations et aussi au recul et aux délocalisations  de productions nationales dont, particulièrement, les véhicules automobiles.

Bien sûr,  ces  évolutions sont  liées  aussi  au taux de change élevé de « l’euro fort » par rapport au dollar. Cela renvoie à l’acceptation par les dirigeants français successifs, jusqu’à l’adoption  du projet de traité  de Lisbonne, d’une BCE, indépendante, dont  la seule  mission  est la lutte contre l’inflation à partir de la pression à la baisse des dépenses sociales et salariales, pour attirer les capitaux.  Cela, en fait, contribue gravement à détériorer nos capacités nationales, à brider durablement la croissance  réelle et à encourager les placements financiers, à l’étranger  notamment.

8 - Faire reculer le consensus de Lisbonne sur les déficits  publics pour  une relance efficace :

Avec le ralentissement de la croissance, la faiblesse  de l’emploi, l’insuffisance criante  des salaires  et des qualifications, les impôts  rentrent plus mal : On parle de 3 à 5 milliards  d’euros  en moins  au titre  de la TVA et de l’impôt sur  les sociétés. Et cela, alors  que  des  allègements d’impôts considérables ont été décidés avec le « paquet fiscal ». Simultanément, le coût de la dette grimpe sous l’effet de l’inflation et de la pression  à la hausse des taux d’intérêt.  On parle d’un surcoût de 2 à 3 milliards d’euros à ce titre pour 2008.

Sarkozy et le gouvernement maintiennent cependant le cap promis  à la Commission  européenne : ramener le déficit public  à 2% du PIB en 2009, après 2,5% promis pour 2008 et 2,7% réalisés en 2007.

Dans ce but,  des  milliers  de suppression d’emplois publics sont prévues,  notamment dans l’enseignement, tandis  que sont  annulés  pour  7 milliards  d’euros  de crédits  budgétaires gelés  depuis  le début  de l’année, alors  que les besoins  explosent à l’hôpital,  à l’école, dans la recherche, pour le logement social et la réhabilitation  des quartiers défavorisés, pour  les transports collectifs,  pour  la culture…sans parler  des besoins de dépenses sociales  d’accompagnement.

Pire, le principe  de « rigueur  budgétaire » à la sauce Lisbonne est acté : Pour la première fois, la loi de finances pour 2009 fixera une progression « zéro valeur » pour le budget  de l’Etat, c’est à dire une  baisse  des  crédits hors inflation !

D’un autre  côté,  au nom de l’écologie et du « développement durable », une « fiscalité verte » est envisagée qui viendrait, en réalité, grever un peu plus la consommation populaire. Il est  question d’étendre les principes du « bonus-malus » à une vingtaine de produits  au-delà de l’automobile : taxation accrue sur  les produits dits « polluants » et détaxation des « produits écologiques »…de quoi solvabiliser de nouveaux segments de marché  au prix, en réalité, de prélèvements plus importants sur les budgets modestes et moyens.

En fait le projet de loi de finances pour 2009 s’annonce comme une agression sans précédent contre les services publics et au détriment des consommations populaires. De concert avec les politiques salariales  régressives des  entreprises il peut enfoncer  la France dans une récession technique  immédiatement  et la mettre en situation d’extrême vulnérabilité  pour les années 2010-2012  au cours desquelles se produirait une grave récession  mondiale.

C’est dire si, à la rentrée, la contradiction va s’aiguiser entre  les besoins  sociaux  et culturels  de développement et de protection des salariés  et de leurs familles et la politique de Sarkozy au service des capitaux financiers dont  l’accentuation est  permise par  le consensus PSdroite sur l’Europe et la compétitivité.

La responsabilité du PCF n’en est que plus grande pour aider aux mobilisations nécessaires en mettant en avant, à l’appui des luttes qui vont se développer, des propositions  alternatives  que la LCR, même  transmutée  en NPA, est incapable  de (et ne veut  pas) produire.

Il serait  indispensable, en effet, de mettre  en cause  le pacte de stabilité  européen  pour  une relance  des dépenses publiques utiles, sous le contrôle décentralisé des citoyens et de leurs élus. Il s’agit des dépenses de santé, d’éducation, de recherche, de logement, de transport,  de culture…dont la France  devrait  prendre l’initiative  d’une relance  en vue d’une concertation ultérieure  avec  les  autres  pays  européens. C’est le rationnement de ces dépenses qui cassent la croissance réelle,  ce qui ralentit  les recettes d’impôts,  enfonce dans  les déficits  perpétuels et accroissent l’endettement public.

Cette  relance  devrait  s’accompagner d’une prise  en main régionale  et nationale de la politique de crédit, pour un essor des investissements dans la mesure où ils programment des emplois  et des formations, avec les bonifications sélectives de taux d’intérêt  nécessitant une nouvelle utilisation des 65 milliards d’euros (chiffrage 2005) d’aides publiques  aux entreprises.

Cette démarche permettrait de poser en grand la nécessité  d’une réorientation en profondeur du statut, des missions et de la politique  monétaire  de la BCE.

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(1) Insee. Note de conjoncture. Juin 2008.

(2) La valeur ajoutée brute des sociétés non financières se chiffrait à 895,6 milliards d’euros en 2006 et 957,1 milliards d’euros en 2007 (Comptes de la Nation). Avec un taux de croissance prévu de 1,6% pour 2008, cette valeur ajoutée atteindrait, par hypothèse, 972,4 milliards d’euros.

 

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