Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil

Rapport au conseil national du 4 décembre 2007 - Jean-Paul Salon

le 04 décembre 2007

Cher(e)s camarades,

A quelques jours de notre assemblée générale, cette introduction est centrée sur l'évolution de la situation politique et l'ordre du jour qui nous réunit. Elle s'appuie donc sur le rapport d'Hervé Bramy au dernier Conseil national, elle renvoie aussi à l'intervention du Béarnais Olivier Dartigolles au nom du collectif d'animation qui ouvrira l'Assemblée générale. La jeune maman Marie Pierre Vieu vous fera la proposition de mandat que vous avez ou aurez sur table. Joelle Greder, présidente du Conseil national vous proposera des initiatives de ripostes immédiates.

Sommaire A droite Sarkozy lepénise la politique Sarkozy est le Président (...) Sarkozy est le Président (...) Et pourtant la gauche est (...) Un processus autour de (...)

Pour préparer cette intervention j'ai fait mon marché auprès de nombreux camarades que je remercie. Evidemment j'en assume la cuisine.

Ce qui marque la situation politique depuis notre dernier conseil national, c'est évidemment l'émergence du mouvement social. Il éclaire d'un jour nouveau les enjeux issus de l'élection présidentielle. C'est dans le rapport à cet événement que se lit l'évolution de la situation politique.

A droite

Chaque évènement, chaque jour, chaque soir, presque à chaque journal télévisé, sont utilisés pour rabâcher un seul leitmotiv de Sarkozy : « j'ai dit que je réformerais et je le ferais » censé renvoyer dans les affres du conservatisme et de la réaction toutes velléités de contestation. La présidence de la République fonctionne désormais sur le mode de la désignation de boucs émissaires et sur la provocation.

Dans les banlieues ce sont les enfants d'immigrés. Au travail ce sont les diverses catégories de fonctionnaires ou assimilées, les salariés des grandes entreprises trop protégés contre ceux des PME, des paysans contre les ouvriers…

Derrière cette méthode se cache l'objectif de jouer sur les fractures au sein des classes populaires traumatisées par le déclassement, pour politiser l'angoisse sociale sur les thèmes de l'ordre et de l'insécurité en désignant les nouveaux ennemis intérieurs ; de faire éclater le salariat en autant de situations individualisées, précarisées, et d'une volonté politique d'achever la mise en place de l'Etat libéral sur les ruines de l'Etat social tel que le pointe froidement Denis Kessler, l'ancien vice-président du MEDEF : « Il s'agit de défaire le programme du Conseil national de la Résistance ».

Ainsi chacun a son coupable et chacun est coupable d'entraver la bonne marche de la France et du monde. La réalité de la politique de Sarkozy ce sont deux choix : des cadeaux fiscaux aux riches, la chasse aux « acquis » des petits et les tests ADN pour leur faire croire qu'il y a encore plus petit qu'eux.

Pour Sarkozy il n'y a plus de problèmes sociaux. Villiers-le-Bel, « c'est un problème de voyoucratie ».

Sarkozy lepénise la politique de la droite.

Dans ce discours, pas un mot sur les amis du Fouquet's et les profits monumentaux des groupes à base française de 97 milliards d'euros en 2006.

Pas un mot sur l'explosion des gains de productivité concédés à coup de réductions du « coût du travail » et de financements publics.

Pas un mot sur l'écart entre les revenus des gros et ceux des salariés qui s'est accru, pas un mot sur les 20% de salariés payés au SMIC, etc.

Mais autant de moyens gâchés dans les opérations financières et les sorties de capitaux alors que la croissance stagne, que l'investissement des entreprises recule, que les exportations sont grippées par la flambée de l'euro.

Mais autant qui profiteront du bouclier fiscal pendant que les télés de ces soirs d'hivers nous culpabiliseront des images de sans-abri et de l'absence de logements sociaux, de celles des restos du cœur et du prix des produits alimentaires, pour que chacun sache qu'il y a plus malheureux que lui, qu'il y a toujours un fils d'immigré pour lui prendre sa place.

Sarkozy est le Président des gros contre les petits.

Quand il concède l'idée de la nécessité de se préoccuper du pouvoir d'achat, il évite de poser la question clé : celle de l'augmentation effective des salaires pour vraiment « valoriser le travail » et choisit de maintenir le cap sur le « travailler plus pour gagner plus », pour avancer dans la casse du Code du travail dans le sens d'une individualisation de ses rapports, basée sur la mise en cause des 35 heures et la monétisation du temps libre.

Pour Sarkozy, la loi du fric et de profits est la seule finalité du travail, au détriment de l'épanouissement humain.

Avec Sarkozy la politique intérieure va avec la politique internationale. Le peuple français refuse majoritairement la guerre, la nation même l'a exprimé au travers de son président. Qu'à cela ne tienne, Sarkozy porte allégeance à Bush et s'aligne sur ses visées. B. Kouchner nous a prévenus, « il faut éviter le pire, la guerre ». Fini donc le refus de la guerre, finie la logique de paix. Voilà l'ennemi, le même que Bush, les peuples, en priorité ceux du Moyen-Orient et leur souveraineté.

En Europe, alors que la France, forte du mandat de son peuple, aurait pu œuvrer à dénouer la crise européenne, contribuer à des réponses face à la globalisation, ouvrir la perspective d'une Europe de paix au service du progrès social, Sarkozy bafoue le NON à la Constitution du 29 mai 2005 et impose, au dire même de Giscard, le même traité, sans référendum.

Ainsi la politique de l'Europe continuera d'être celle de la mise en forme et de l'accompagnement des politiques ultra-libérales sous la houlette de la BCE et des besoins du capitalisme productiviste et financier.

Sarkozy est le Président des puissants contre les peuples.

La confrontation entre ses discours de campagne sur la souveraineté nationale, la nation, la République, commence à susciter bien des interrogations sur la place et le rôle de la France. Elle entame le crédit de Sarkozy, y compris dans ses propres rangs où son activisme inquiète parce qu'il déstructure les cohérences et les symboliques de l'Etat et de la Nation, transforme la fonction de Président de la République, la rabaisse à l'image de ses voyages, à celle de VRP de la puissance américaine certes, mais aussi et surtout des profits financiers des multinationales, par essence apatrides, au détriment des relations historiques et des coopérations possibles avec les peuples et les pays, bradant le potentiel industriel et humain national pour le compte du chiffre d'affaires des grands groupes, dans une logique qui prépare et accepte de futures délocalisations. Il laisse ainsi mal augurer de la réforme institutionnelle qui du coup apparaît pour ce qu'elle est, non seulement une présidentialisation absolue, mais une soumission des institutions à l'autoritarisme partisan.

Sarkozy est le président de l'anti-France contre la France de Jean Ferrat. Disons-le franchement, les débauchages de personnalités socialistes, les tentatives d'ouverture d'une partie de la gauche au centre droit pendant l'élection présidentielle et après contribuent à crédibiliser cette politique, à masquer la portée destructrice et à installer le discours libéral comme une évidence.

Et pourtant la gauche est en crise.

Les prises de positions dispersées de dirigeants socialistes qui, comme François Hollande à l'Assemblée nationale, déclarent « que ce n'est pas l'idée de réforme qui est en cause, mais la méthode », les refus persistants de la direction du Parti socialiste de s'inscrire franchement dans une riposte commune de la gauche comme le proposent les communistes, S. Royal qui continue d'espérer amener le Parti socialiste au centre. Bayrou qui joue son avenir sur le délitement de la gauche et veut disputer à Royal le leadership d'un grand parti démocrate. La gauche est en crise, politiquement divisée et éclatée, entre le refus d'analyser l'échec d'années d'enlisement social-libéral et le repli sectaire, entre l'engagement dans la recomposition politique et la posture contestataire stérile, laissant à la droite une liberté de manœuvre inespérée.

C'est dans ce contexte que le mouvement social grandit.

Il est fondé sur une montée des mécontentements et des inquiétudes face à une dégradation des conditions de vie avec des prix qui s'envolent et des salaires bloqués, des conditions de travail toujours plus difficiles, un chômage qui malgré les tripatouillages statistiques reste massif, un accès au logement particulièrement difficile pour les catégories les plus modestes et pour les jeunes, une précarité galopante dont sont victimes des millions de salariés, notamment les femmes, un accès à la santé rendu de plus en plus ségrégatif, etc.

Après le 18 octobre, apprécié comme une mobilisation historique à la SNCF, la RATP, EDF, GDF, la grève des cheminots et de la RATP a duré 9 jours. Le climat reste à la vigilance, la grève est suspendue, les modalités d'actions prévues installent le mouvement dans la continuité. D'autres secteurs sont mobilisés. On l'a vu le 20 novembre avec les fonctionnaires.

La mobilisation étudiante démontre qu'une prise de conscience est en train de s'opérer quant au caractère néfaste de la réforme des universités.

Le malaise des magistrats et des professions de justice témoigne du refus de l'indigence dans laquelle se débat le système judiciaire français ; indigence encore aggravée par la réforme, à la hussarde, de la carte judiciaire.

La mobilisation contre les scandaleuses franchises médicales reste toujours aussi déterminée.

La question du pouvoir d'achat est au premier rang de l'actualité. Les actions sur les salaires sont de plus en plus nombreuses. Les fonctionnaires plaçaient cette question dans les objectifs revendicatifs du 20 novembre comme, dans le secteur privé, les salariés du Crédit lyonnais, de la presse et de l'audiovisuel, de Yoplait ou des personnels naviguant commerciaux d'Air France.

Par son ampleur ce mouvement constitue un revers dans la marche forcée que le pouvoir voulait imposer en affirmant que la réforme était faite, qu'elle devait intervenir par décret. La mobilisation a montré qu'il était possible de mettre le schéma présidentiel, symbole même de la volonté de rupture, en échec en le faisant évoluer sur le fond et sur la forme et dans sa responsabilité en matière sociale.

Cela ne signifie pas que les illusions soient dissipées ou que les thèmes qui ont marqué la bataille politique et idéologique de la droite depuis des années, notamment dans la campagne présidentielle, aient disparu du paysage.

Mais ce mouvement remet les pendules à l'heure face à la campagne menée depuis les élections sur la droitisation de la société française en refaisant émerger quelques mois après la défaite de la gauche les aspirations progressistes qui taraudent en profondeur la société française, et il reformule de ce fait les questionnements.

La répartition des richesses, la pénibilité du travail, la place du travail dans la société, les services publics, la démocratie, les retraites, les salaires, sont mieux perçus comme des enjeux de société, dans la contradiction entre les tenants du capital et les salariés et interpellent la politique sur sa capacité.

Il réactive ainsi les clivages de classes, à partir de trois idées : la place et le rôle du travail dans la société, la répartition des richesses, le rôle de l'Etat dans les garanties sociales et la solidarité.

Ce faisant, il sort le débat politique de la dérive identitaire et sécuritaire sur lequel il était centré et qui a permis à Sarkozy de gagner.

Il met à nu les positionnements politiques en fonction de la contribution à son succès et il interpelle la gauche sur la politique sociale-libérale passée et le recentrage idéologique du Parti socialiste.

De ces interpellations et sans doute de bien d'autres s'ouvrent un champ nouveau qui vient renforcer le sens du processus engagé par les communistes.

Un processus autour de trois chantiers :

La riposte, les élections municipales, la reconstruction de la gauche et du Parti communiste.

Dans ce contexte, nous mettons en avant avec force la nécessité d'organiser une conférence nationale sur les salaires et l'emploi, l'impératif d'augmentation significative du SMIC pour amorcer le mouvement, une politique des tarifs publics assurant l'égal accès de tous les citoyens, la baisse de la TIPP... ainsi que nos propositions prenant en compte toutes les dimensions posées par l'affrontement sur le travail, qui maintenant l'est dans sa globalité, pour contribuer à renverser la tendance sur le plan idéologique.

Ce faisant, il s'agit dans tirer les initiatives dans les conditions d'un espace plus large qui nous donnent des raisons supplémentaires d'intensifier notre bataille politique et idéologique pour contribuer à l'efficacité de la riposte.

D'ores et déjà des millions d'hommes et de femmes se retrouvent dans le camp de l'opposition à Sarkozy et de sa politique. Cela va plus loin que le simple fait d'avoir voté contre lui. Ces hommes et ces femmes sont engagés dans un camp, mais sont dispersés, voire capables de s'opposer. Ainsi en est-il, par exemple, de ceux qui ont dit NON au traité européen et qui sont opposés aux régimes spéciaux, de ceux qui veulent l'augmentation du pouvoir d'achat et qui acceptent la casse du code du travail. Ainsi les grèves dans les transports n'ont pas eu la popularité des « grèves par procuration » de 1995. Enfin le résultat électoral de la gauche, son éclatement politique, ses divisions, et le score de notre parti, ont des conséquences sur la crédibilité de ce qu'il est possible d'obtenir.

Il nous faut trouver les voies permettant de surmonter cette difficulté. La radicalité de la mise en œuvre de la politique libérale par Sarkozy pour franchir un seuil qualitatif dans l'adaptation de notre pays annonce une période de conflits dont l'issue dépendra de l'intensité et de l'ampleur des ripostes sociales et de la capacité de la gauche de tirer les leçons de sa défaite et de riposter à son tour à la normalisation libérale du paysage politique français.

Elle doit donc nous conduire à être résolument offensifS simultanément sur plusieurs fronts. C'est une des conditions pour un élargissement et un renforcement du mouvement social et pour reformuler des références, des appartenances, un camp face à la droite, pour refonder le contenu d'une gauche d'espérance.

Il y a bien évidemment toutes les dimensions sociales dont je viens de parler, à la fois revendications, propositions et moyens. Il y a les dimensions européennes qui, à travers le traité, en font partie comme obstacle à la résolution des conflits et au renversement de la contrainte ultra-libérale sur les acquis sociaux et la satisfaction des besoins.

De même l'implication internationale dans la lutte pour la paix, particulièrement en Palestine et au Moyen-Orient pour à la fois imposer la souveraineté des peuples et desserrer l'étau idéologique que constitue le « risque du pire ».

A la globalisation économique correspond avec Sarkozy la globalisation politique et donc idéologique. Les questions internationales et européennes ne sont plus du domaine de la politique extérieure. Elles interfèrent directement dans la capacité de riposte et dans la capacité à penser la transformation sociale.

Nous devons donc agir pour développer des convergences, des coopérations, faire grandir des « fronts » d'idées et d'actions pour de nouvelles dynamiques politiques et citoyennes, jusqu'à créer des rapports de forces favorables à l'émancipation humaine.

Pour redonner à la gauche sa crédibilité et retrouver des convergences politiques pour riposter efficacement, il lui faut à la fois repousser les tentations sociales-libérales dans laquelle elle s'est engluée depuis de longues années pour une part et surmonter son retrait sectaire pour l'autre, afin d'être capable de traduire dans un débouché politique les aspirations sociales.

Les campagnes sur la question référendaire nous y aideront. Celle aussi sur les quatre axes d'initiatives que nous propose le mandat.

Les élections municipales et cantonales en portant dans les institutions le drapeau du rassemblement de toute la gauche dès le premier tour, nous aideront à construire une gauche combative, de conquête. Ainsi dans chaque commune, gagner la bataille du rassemblement à gauche, gagner un à un des élus de gauche, des adjoints, des municipalités, avec des communistes en plus grand nombre, constituera pour les tenants du bipartisme, de la recomposition, au même titre que pour la droite, un revers prolongeant celui infligé par le mouvement social. L'ensemble de ces campagnes contribuera à répondre au désespérant « mais que fait la gauche ? » entendu dans les manifs.

Mais le tous ensemble contre Sarkozy, le Medef, la droite, l'union électorale de la gauche sont-il suffisants à assurer le dynamisme et la crédibilité du rassemblement ?

Ce rassemblement trouvera sa force, sa détermination, sa durée, ses succès dans l'ambition de transformation de la société qu'il se fixera et dans la conscience qu'il aura d'être l'acteur de cette transformation. Au fond tout rassemblement dont l'objectif est de changer la société est confronté au développement de la conscience de classe. Les communistes en soulignent la nécessité pour oeuvrer à ce que le mouvement social devienne mouvement de transformation sociale. Cela nous invite à agir pour lever les obstacles de la division, de l'éclatement de la gauche, à réfléchir à la question du rassemblement sans la réduire à celle des alliances, à les replacer dans le contexte politique où elles sont nécessaires en fonction de la traduction à un moment donné du rassemblement dans le champ institutionnel. Ce qui est au cœur du débat des communistes, c'est le refus du renoncement à la gauche et la volonté de reconstruire une gauche de transformation sociale.

La question de son projet, de son orientation de classe, de son combat est en débat. Il est nécessaire, pour répondre au défi que nous impose le capitalisme, qu'il ne soit pas fermé sur nous, mais ouvert à la richesse de notre peuple, à sa diversité, ni partisan, ni partitaire, pour une construction non décrétée, mais élaborée avec les citoyens, dans la diversité du mouvement social.

Trois axes identitaires.

L'échec montre que la matrice de 1920 est dépassée. Face au capitalisme productiviste, financier et mondialisé nous devons faire ce que fit Marx au moment de la révolution industrielle : appréhender quelles sont les forces vives dont l'émancipation permettra l'émancipation de l'humanité. Pour répondre au besoin d'une organisation exprimant au plan politique la diversité des aspirations au changement, pour construire aux travers des luttes les cohérences, les solidarités, l'imaginaire commun, constitutifs d'une alternative à gauche, il y a la nécessité de reconstruire l'unité des exploités, pour cela de penser sur d'autres bases sociales les fondations de ce parti, de tirer toutes les conséquences qu'impliquent des rapports nouveaux entre parti et société. Indissociablement liées, les propositions comme les finalités de notre projet de transformation sociale sont, elles aussi, à repenser. Nous sommes au bout des logiques productivistes de développement. Au dépassement du capitalisme et à de nouvelles formes d'appropriations publiques des moyens de production et de finance, doit être associé un nouveau type de développement, éradiquant le productivisme, construit par et pour les individus dans un nouveau rapport à la nature, lié à la construction d'un nouvel Etat social démocratisé. Enfin il ne peut y avoir de cohérence idéologique sans poser clairement la question du pouvoir, de son exercice comme des formes de sa conquête. Les dernières décennies avec notre participation au gouvernement sans modification démocratique des institutions, celle à une cohabitation qui a promu le quinquennat et l'inversement du calendrier électoral, ont profondément altéré la crédibilité de notre volonté de donner le pouvoir au peuple. Pour être efficace notre réponse à l'aspiration à la démocratie doit inscrire le processus de conquête dans les luttes et dans les urnes comme un moyen d'appropriation populaire du pouvoir et des formes de son exercice, subvertissant dès maintenant celui de la bourgeoisie. De la façon dont on construit la prise de pouvoir, on l'exerce. Si elle est délégataire, l'exercice du pouvoir sera délégataire. Si nous construisons ce pouvoir avec le peuple alors il l'exercera.

Après tant de déboires unitaires les moyens de la conquête ne peuvent donc être fondés que sur un processus nouveau. Parce qu'il est impossible à un seul parti de résumer à lui seul le mouvement de la société, l'aspiration à faire front à la droite tous ensemble doit lier le respect de la diversité des courants de la gauche à l'efficacité d'une construction commune structurée. Et la nécessité d'un projet commun ne peut éluder l'apport d'un Parti communiste associant contestation du capitalisme, intervention dans les pouvoirs et transformation de la société telle que cela n'a jamais été conçu.

Ce qui marquera ce processus sera notre volonté de l'enraciner et de le placer dès maintenant sous l'élaboration et sous contrôle populaire, ce sera notre capacité à l'ouvrir dans son ensemble aux hommes et aux femmes avec qui nous voulons former une communauté de position et de destin.

C'est la force et l'utilité du Parti communiste d'agir dans cette continuité historique pour fonder une identité communiste de notre temps pour être utile à notre peuple, à la gauche, au communisme.

Ce défi que nous relevons, aucun parti communiste n'a réussi à le relever. Sa réussite relancera un nouvel internationalisme.

Cher-e-s camarades,

Les Assemblées générales de section, le débat qui s'est établi entre les communistes, entre les communistes et les progressistes attestent d'une grande richesse, d'une diversité d'analyse et de propositions qui augurent bien de la préparation du Congrès de 2008 et dans l'immédiat de nos deux jours d'Assemblée extraordinaire.

Le débat est en prise direct avec les forces vives de notre parti et il contribue à en faire directement les auteurs et les acteurs de son propre développement et de toutes les décisions, renforce la souveraineté des adhérents exprimée dans les assemblées générales de section. La liberté de ton des confrontations, des auditions, de la circulation des idées, des comptes rendus, témoigne d'une authentique fécondité. Elle nous ouvre à l'idée que la forme parti n'est pas achevée. Elle est constitutive de formes politiques qui, déjà, en l'état, sollicite notre imagination pour de nouveaux développements démocratiques. Cela mérite d'être valorisé.

Cela mérite aussi d'être amplifié.

Car il est évident que ce chemin, frayé au travers des doutes, des questionnements, du choc de mai 2007, d'une situation difficile et d'incitations aux renoncements d'une part de la gauche, avec 35000 participants, n'a pas encore atteint sa plénitude.

Pour autant il n'atteste pas d'un renoncement à l'activité partisane, par ailleurs présente et active dans la préparation des élections municipales et cantonales et dans le mouvement social.

Mais ne nous tranquillisons pas à bon compte. Il reste des efforts à faire pour que l'Assemblée générale de section soit le creuset démocratique où se croisent toutes les expériences militantes, où se construit en permanence le fond commun de notre parti.

Enfin, le fait d'avoir bien souvent ouvert ces lieux à des amis a déculpabilisé et dédramatisé le débat sur la souveraineté des adhérents. Mais la force politique de ce débat réside essentiellement dans l'expression de convictions et le nombre de questions qu'elles soulèvent. Protégeons-le de la caricature et de l'impatience.

Permettons aux communistes de cheminer, de chercher, jusqu'à structurer leur propre opinion. Le temps des décisions viendra et l'acquis de ces mois qui nous en séparent leur donnera toute la force qui convient aux enjeux de la situation.

Ce débat fonctionne comme une reconstruction, comme une réappropriation de la politique. Il crée de nouveaux liens, un fonds commun d'une nouvelle qualité.

Il y a de l'intime et du vécu collectif, du drame de la vie trop dure, de l'histoire, petite ou grande, mais aussi de l'espoir et du désir, qui se croisent et s'interpellent. Impressionnante richesse qui sort, souvent enfouie dans les non-dits de longues années de discipline partisane, douloureuses vérités aussi remâchées longtemps avant de pouvoir être dites, dans des « Je » dignes qui disent la douleur d'en être là et l'envie de renaissance.

Il y a surtout le refus du ou/ou entre des options médiatisées ; trop d'expériences ont appris qu'il conduit in fine au ni/ni, immobile et inefficace.

Il y a le refus de l'impasse que serait une conclusion prématurée par des décisions qui apparaîtraient alors chicanières et politiciennes. Au total une profonde humanité. Il serait trop facile de réduire à des orthodoxes, liquidateurs, conservateurs, reconstructeurs, archaïques, modernes, ce qui est simplement un collectif humain dans sa diversité d'expression qui se confronte à la création de la voie révolutionnaire de leurs temps.

Les communistes sont conscients de la gravité de notre échec, de celui de la gauche, dont ils veulent comprendre les fondements et la part que leurs décisions y ont prise. Ils savent qu'il n'y a pas de renaissance possible sans lucidité sur cette histoire dont ils portent les victoires comme les tourments.

Ils sont aussi conscients de l'importance historique de l'enjeu pour faire face au capitalisme mondialisé, financiarisé et militarisé, pour combattre les inégalités qu'il ne cesse de creuser au sein des peuples, des fractures dangereuses qu'il provoque, des menaces qu'il fait peser sur l'écosystème, de la menace de guerre qu'il porte en lui.

Ils sont tout aussi conscients que si « nous ne pouvons pas continuer comme ça », en face la bourgeoisie, organisée, déterminée, combat pour ses intérêts de classe.

Le cours suivi par ce débat nous indique ainsi beaucoup de sens pour forger déjà du commun sur lequel nous pouvons nous appuyer pour dynamiser l'Assemblée extraordinaire.

Le Parti communiste n'a pas vocation à être un petit parti. Son ambition est tout autre. Elle est celle de rassembler notre peuple pour avancer vers de nouvelles et profondes transformations de la société. Elle est celle de redonner au peuple de France la force politique organisée, efficace, moderne, active, dont il a besoin pour continuer à exprimer ses traditions révolutionnaires. Etre le parti du peuple de France, voilà l'ambition communiste.