Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Quelques éléments rapides sur la situation du chômage

Les chiffres du chômage ont fait l’objet d’un traitement médiatique triomphaliste. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, annonce 8,8 % de chômeurs, un taux sous la barre de 9 % pour la première fois depuis 10 ans. Ce chiffre correspond au chômage au sens du Bureau international du travail (BIT).

Pourtant ces chiffres sont contredits par les données du ministère du Travail, dont les données proviennent des comptabilisations trimestrielles par Pôle emploi des demandeurs d’emplois inscrits sur ses listes. Des chiffres que, contrairement à tous ses prédécesseurs, la ministre du Travail refuse de commenter.

Que révèlent ces différences de chiffrage statistique ?

Quelles différences entre chiffres du BIT et ceux de Pôle emploi ?

Au sens du BIT, est chômeur toute personne de plus de 15 ans qui n’a pas travaillé au moins une heure pendant une semaine de référence, est disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours et a recherché activement du travail pendant le mois précédent…

L’enquête est trimestrielle et permet de contacter 50 000 logements.

Au sens de Pôle emploi, plusieurs catégories sont prises en compte :

1. Catégorie A : personnes inscrites à Pôle emploi, sans emploi et tenues de rechercher un emploi.

C’est la catégorie la plus proche de la définition du BIT. Pourtant, l’écart est devenu considérable entre l’enquête trimestrielle du BIT et les inscriptions à Pôle emploi. Début 2009 l’écart était de 14 000 sur 2,5 millions de chômeurs. Fin 2017, cet écart est de 970 000 sur 3,47 millions (catégorie A).

2. Catégorie B : personnes ayant travaillé moins de 78 heures sur un mois (activité réduite courte) et tenues de rechercher un emploi.

Par exemple, plus de 163 000 personnes ont obtenu des contrats inférieurs à 20 heures/mois durant le 4e trimestre 2018. Plus de 750 000 personnes ont travaillé moins de 78 heures (chiffres du 4e trimestre 2018).

3. Catégorie C : personnes ayant travaillé plus de 78 heures sur le mois (activité réduite longue) et tenues de rechercher un emploi.

S’ajoutent les catégories D (par ex. maladie ou en formation) et E (par exemple bénéficiaires de contrats aidés ou créateurs d’entreprise), non tenue sde rechercher un emploi.

L’évolution réelle du chômage avec l’éclairage de la croissance

Alors que la croissance a atteint +2,3 % en 2017 (1,1 % en 2016) pour retomber à 1,5 % en 2018, on pourrait s’attendre à une amélioration sensible sur le front du chômage. Il n’en est rien.

– Sur 1 an le chômage de plus de 1 an augmente de 5 % et touche 47,7% des demandeurs d’emploi.

– Seuls 20,6 % des chômeurs sortant des catégories A, B, C reprennent un emploi (4e trim 2018).

– 51,9 % des chômeurs sont sortants des catégories A, B, C par radiation administrative ou cessation d’inscription pour défaut d’actualisation (4e trim. 2018). Cela représente 270,9 milliers de personnes tandis que 88,6 milliers de personnes ayant été radiées ou en cessation d’inscription précédemment réintègrent pôle emploi.

Plus du quart des inscriptions à Pôle emploi sont des fins de contrats (CDD) et fin de mission d’intérim. Les licenciements économiques ne représentent que 1,8 % des entrées.

Une hirondelle ne fait pas le printemps.

Les chiffres donnés pour le 4e trimestre 2018 marquent une légère régression du chômage catégories A, B, C. Mais si on prend les chiffres donnés au 3e trimestre 2018, nous avons une hausse.

– 2e trimestre 2018 : 5 627,9.

– 3e trimestre 2018 : 5 649,6 soit +0,4 %.

– Le 4e trimestre 2018 ne peut donc pas être qualifié de tendance.

La porosité entre les catégories A, B, C de Pôle emploi

Le schéma qui suit (demandeurs d’emplois en 2016) montre l’extrême porosité entre les catégories de chômeurs, particulièrement entre les catégories A, B, C.

En décembre 2016, on comptabilise 5 475 700 personnes dans la catégories A, B, C. Des millions d’entre elles sont passées dans l’année, d’une catégorie à l’autre. Ce sont donc en grande partie les mêmes gens que l’on retrouve tantôt en catégorie A, tantôt en catégorie B ou C.

 

 

Effectifs en milliers

Evolution en % sur

 

4e trim 2016 (*)

4e trim 2017 (*)

4e trim 2018

1 an

2 ans

Catégorie A

3466,3

3463,13

3418,6

- 1,2 %

- 1,3

Catégorie B

723,2

746,96

750,2

+ 0,4 %

+ 3,7

Categorie C

1280,66

1403,23

1436,2

+2,34 %

+12,14

Catégorie A, B, C

5470,76

5613,23

5605,0

- 0,14

+ 2,45

 

(*) Il s’agit de la moyenne des mois d’octobre, novembre et décembre 2017 publiées en nov., dec. 2017 et jan. 2018.

En effet, le thermomètre a été modifié : « depuis 2018, la publication commune Dares-Pôle emploi est trimestrielle […] cette refonte […] vise à mettre l’accent sur les évolutions tendantielles de ces statistiques plutôt que sur leur variations au mois le mois […] Les résultats présentés sont des moyennes trimestrielle […] correspond à la somme des effectifs […] pour les trois mois du trimestre considéré, divisée par trois. » Source définitions et méthodes Dares indicateursjanvier 2019 N° 003.

 

Pour les flux, seules sont analysées ici les transitions entre deux fins de mois successives.

Lecture : en 2016, 1 927 000 transitions ont eu lieu de la catégorie A vers la catégorie B (données brutes) et 1 644 000 de la catégorie B vers la catégorie A ; 1 111 000 de la catégorie A à la catégorie C et 1 377 000 de C vers A, etc.

Novembre 2016, 3 467 000 personnes étaient inscrites en catégorie A (données CVS-CJO).

Champ : demandeurs d’emploi en catégories A, B, C, D et E ; France métropolitaine.

Sources : Pôle emploi, fichier historique statistique (1/10e) du T1 2017 pour les flux (calculs Dares) et Dares-Pôle emploi, STMT pour les effectifs (Dares).

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