Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil
 
 
 
 

Le programme de F. Fillon

I – Priorités et mesures phares :

Le candidat promet, s'il est élu président, de se donner trois priorités :

1ère priorité : LA LIBÉRATION DE L’ÉCONOMIE

2ème priorité : RESTAURER L’AUTORITÉ DE L’ÉTAT

3ème priorité : AFFIRMER NOS VALEURS

Il s’engage, notamment, sur 10 mesures phares impactant les enjeux économiques et sociaux :

1.    100 milliards d’euros d’économies en 5 ans sur les dépenses publiques.

2.    40 milliards de baisse des charges pour les entreprises et 10 milliards d’allégements sociaux et fiscaux pour les ménages.

3.    Fin des 35 heures dans le secteur privé et retour aux 39 heures dans la fonction publique.

4.    Suppression de l’ISF ,

5.    Recul de l’âge de la retraite à 65 ans et unifier tous les régimes de retraite

6.    Alignement du régime fiscal des commerçants, artisans et indépendants sur celui des auto-entrepreneurs.

7.    Instauration d’une allocation sociale unique pour que les revenus du travail soient toujours supérieurs à ceux de l’assistance.

8.    12 milliards d’euros de plus dans la sécurité, la défense et la justice, et création de 16 000 places de prison.

9.    Réduire l’immigration en créant des quotas et en ne versant des prestations qu’aux étrangers en situation régulière depuis au moins deux ans.

10.   Universalité des allocations familiales et plafond du quotient familial porté à 3000 euros par demi-part pour soutenir les familles.

II – Un « blitzkrieg » au nom des entreprises et de la souveraineté de la France:

Le programme de F. Fillon, comme celui de ses prédécesseurs, est bâti sur des hypothèses de croissance traduisant un progrès continu des performances françaises. Le PIB croîtrait de +1,3 % en 2017 jusqu'à +2,3 % en 2022. Le cadrage financier associé ne fait pas état des hypothèses retenues pour la croissance européenne et mondiale, l'évolution des taux d'intérêt, celles des prix du pétrole et du rapport dollar/euro. De quoi laisser s'accréditer l'idée que l'horizon en ce domaine ne devrait pas poser de problème, tandis que l'expansion de l'activité et de l'emploi pendant le  quinquennat Fillon ne résulterait que des transformations structurelles et de la politique économique qu'il engagerait avec détermination.

En pratique, on peut penser que, comme ses prédécesseurs, le candidat LR parie sur le maintien (voire l'amélioration) d'une croissance mondiale correcte dont il entend faire arracher les dividendes par les entreprises françaises exportatrices grâce à une compétitivité très accrue par sa politique.

Et c'est cela qui lui fait promettre, comme l'avait fait N. Sarkozy, le « retour au plein emploi » de notre pays « en l'espace de quelques années ».

C'est d'ailleurs là le cœur de la logique de F. Fillon : imposer à la France un choc de compétitivité et d'attractivité financière de bien plus grande ampleur que celui entrepris par F. Hollande et M. Valls avec leurs « mesurettes » (CICE, pacte de responsabilité…). Il s'agit, ce faisant, de rompre avec « 40 années où l'on a privilégié un traitement social du chômage plutôt que de s'attaquer au cœur du problème; 40 années où l'on n'a pas voulu comprendre que ce sont les entreprises qui créent l'emploi et non l' État ».

En baissant massivement le « coût du travail », en faisant sensiblement reculer les protections et droits des salariés et de leurs syndicats (en pratique la CGT) et en diminuant drastiquement la dépense publique sociale, il assure pouvoir rendre les entreprises beaucoup plus à même de créer des richesses nationales par la conquête de nouvelles parts de marché à l'international. Simultanément, la France pourrait réduire ses déficits et dette publics et attirer ainsi bien plus de capitaux baladeurs… qui créeront des emplois dans l'Hexagone.

C'est une véritable thérapie de choc à la Friedman que préconise F. Fillon, comme en atteste sa déclaration du 6 janvier dernier devant un parterre de patrons réuni par la fondation Concorde pour un « Grand oral » :

« Je veux qu'au 1er juillet, les deux ou trois ministres chargés des réformes, l'économie et les finances, le travail pour l'essentiel, arrivent avec des textes prêts et, dans une forme de blitzkrieg, fassent passer devant le Parlement, en utilisant d'ailleurs tous les moyens que donne la constitution de la Vème République, les ordonnances, les votes bloqués, le 49-3...tout ce qui est nécessaire pour faire passer en l'espace de deux mois, sans interruption estivale, les six ou sept réformes fondamentales qui vont changer le climat de l'économie et le climat du travail dans notre pays ».

C'est ainsi, en faisant le ménage pour que la France retrouve avec sa compétitivité « sa crédibilité économique et sociale », que l'on engagera « le rétablissement de la puissance française » jusqu'à lui faire « reprendre la première place ». C'est ainsi que l'on redonnera à l'Allemagne la confiance « dans notre capacité à nous redresser » nécessaire pour pouvoir « relancer la zone euro » et « créer une Europe respectueuse des nations » qui soit « respectée » » par les États-Unis et la Chine.

 

II – Un « New-deal » pour la compétitivité au nom de la lutte contre le chômage:

 

ENTREPRISES PLUS COMPÉTITIVES => VENDRONT PLUS DE PRODUITS => VONT DEVOIR EMBAUCHER => PLUS D' EFFECTIFS, PLUS DE CONSOMMATION, MOINS DE PRESTATIONS SOCIALES => PLUS DE RENTRÉES FISCALES  =>  PLUS DE POSSIBILITÉS DE REDISTRIBUER DE LA CROISSANCE ET D'INVESTIR DANS L'AVENIR => ENTREPRISES PLUS COMPÉTITIVES … (Source : « Pour une vraie justice sociale », p.6)

 

C'est la base du rassemblement recherché par Fillon avec, au cœur, le souci, prétend-il, des entreprises. Il propose d' engager la France dans un « cercle vertueux » avec des enchaînements causaux se voulant plus rassembleurs que ceux du dit « théorème de Schmidt » (cf  encadré ci-dessus).

Il s'agit de réaliser une « mobilisation nationale pour la compétitivité » afin d'accomplir des « réformes structurelles que ni la gauche ni la droite n'ont eu la courage de mener à bien (..) : remobiliser massivement la force de travail des Français, redonner des marges de manœuvre aux entreprises pour regagner en compétitivité (…) et au pays pour regagner en souveraineté».

F. Fillon propose « un New-deal aux citoyens, aux entreprises, aux partenaires sociaux  pour relever le défi de la compétitivité» autour de huit axes de réformes structurelles.

1) – Lever le verrou des 35 heures dans le secteur marchand et faire passer la fonction publique à 32 heures :

            - Privé : passer de 35h à 39h par le biais d'accords d'entreprises ;

            - Public : passage à 39 heures en un an, recentrage sur les missions                                    cœur de service public, réintroduction jour de carence.

2) – Simplifier le code du travail, assouplir les conditions d'embauche et faciliter l'adaptation  des entreprises à leur environnement.

            - Refonder le code du travail sur « ce qui relève des normes sociales                                 fondamentales », renvoyer le reste à la négociation en entreprise ;

            - Introduction du motif de « réorganisation de l'entreprise » dans les procédures de licenciement collectif tout en renforçant la flexisécurité.

3) – Dialogue social : priorité à la pérennité de l'entreprise et donc de l'emploi:

            - Relever les seuils sociaux de 10 à 50 salariés et de 50 à 100 salariés ;

            - Donner la possibilité aux accord d'entreprise de fixer l 'architecture des IRP ainsi que les modalités de leur consultation ;

            - Limiter à 50 % su temps de travail le temps consacré à l'exercice du mandat de chaque élu.

4) –  Chômage : formation au rabais et incitation au retour à l'emploi :

            - Renforcer l'apprentissage pour permettre « de facto aux entreprises de   rémunérer les jeunes peu qualifiés à un niveau compatible avec leur productivité » sachant que « le SMIC entraîne pour les entreprises un coût supérieur à la productivité réelle des personnes les moins qualifiées » ;

            - Unifier l'ensemble des aides à l'apprentissage au sein d'un crédit d'impôt ;

            - Permettre aux entreprises de déduire le coût de financement des apprentis de leur budget formation ;

            - Plafonner toutes les allocations afin que le taux de remplacement net n'excède   pas 75 % ;

            - Introduire une dose de dégressivité de l'indemnisation chômage ;

            - Réforme en profondeur de la formation professionnelle pour orienter les                        demandeurs d'emplois « dans les secteurs en forte demande ».

5) – Charges et impôts : Plus de compétitivité pour la pérennité de l 'entreprise et donc de l’emploi :

            - Baisser les charges pesant sur le travail de tous les emplois ;

            - Revoir le mécanisme de revalorisation du SMIC ;

            - Réduire le taux de l'IS et en élargir l'assiette ;

            -Supprimer 15Mds de taxes diverses pesant sur les entreprises (cotisations FNAL, Versement transport, taxes CNSA, contribution apprentissage…) ;

            -Supprimer l' ISF et les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ;

            - Prendre un engagement de stabilité fiscale de 5 ans ;

            - Renforcer l'actionnariat salarié dans toutes les entreprises.

6) – Environnement des affaires :

            Développer la signature de « contrats de partenariat » entre les entreprises et       l'administration fiscale sur le modèle britannique pour garantir la sécurité fiscale.

7) – Soutien au profit au nom de l'innovation :

            - Fusionner le CIR et le CIC ;

            - Privilégier le principe de responsabilité au principe de précaution :

            - Soutien à la création d'entreprises innovantes par les étudiants et les chercheurs et             développement d'agences de valorisation de l'innovation ;

            - Encourager le développement de pôles de compétitivité de taille critique au niveau      mondial ;

            - Généraliser le rescrit fiscal ;

            - Gratuité du premier brevet de l' INPI pour toute TPE.

 

III – Cinq engagements pour redresser les finances publiques :

1) – Réduire le poids du secteur public :

            - Temps de travail dans la fonction publique de 35 à 39 heures : mis en œuvre en un an pour les 5,2 millions de fonctionnaires, il représenterait « un gain de temps de travail de prés de 12 %, soit l'équivalent de 500 000 postes » ;

            - Jour de carence rétabli ;

            - Simplifier les conditions de recrutement des contractuels pour limiter les

            recrutements des fonctionnaires sous statut ;

            - Recentrage des missions de service public pour en réduire le périmètre à ce qui est indispensable aujourd'hui.

2) – Réforme du cadre d'action des collectivités territoriales pour réduire la dynamique de leurs dépenses :

            - Ramener de 4 à 2 le nombre d'échelons des collectivités territoriales ;

            - Limiter leurs possibilités d'augmenter les impôts locaux et fixation d'un plafond de      remplacement des départs en retraite ;

            -  Réduction des subventions de l’État aux collectivités territoriales ;

            - Réviser le partage actuel des compétences entre l’État et les collectivités. La      compétence des régions serait rendue exclusive ;

            -  Mettre un terme à la pratique française de décentralisation.

3) –  Garantir l'équilibre des régimes de protection sociale :

            - Age légal de la retraite porté à 65 ans ;

            - Abandon du système de compensation de pénibilité ;

            - Harmonisation graduelle de tous les régimes (privés, publics et spéciaux) ;

            - Mise en place d'un étage de retraites par capitalisation (PERCO/PERP) ;

            -Aller vers la mise en place d'un régime par points et la fusion des retraites de base et complémentaires.

            - Dégressivité indemnisation du chômage ;

            - Améliorer le rendement des moyens consacrés à la formation professionnelle ;

            - Aide médicale d’État : passer d'un système automatique d'accès facile à un dispositif d'exception sur demande, géré par les services déconcentrés de l’État ;

            - Veiller à l'équilibre de la branche famille.

4) –  Une politique fiscale pour la compétitivité des entreprises et l'attractivité de la France:

Engagement de garantir le maintien pendant 5 ans des mesures adoptées en début de mandature et exclusion de toute rétroactivité de la loi fiscale.

Compétitivité :

            - Priorité à la baisse des prélèvements pesant sur le coût du travail. CICE et         allègements du pacte de responsabilité intégrés dans un dispositif unique et       pérenne          d'allègement de cotisations sociales patronales.

            - Suppression des taxes pesant sur la masse salariale (FNAL, Versement    transport, taxes             CNSA…).

Attractivité :

            - Réduire le taux de l'IS pour l'aligner sur celui des pays européens comparables ;

            - Revoir la fiscalité du capital ;

            - Réorienter l'épargne vers les entreprises en réduisant les aides fiscales à « l'épargne      courte » ;

            - Renforcer les incitations à l'investissement direct dans les PME ;

            - Supprimer l'ISF et les droits de mutation à titre onéreux ;

            - Simplification du barème de l'IR et élargissement de son assiette. Abaissement              progressif             de la fiscalité des revenus des ménages si la croissance et l'emploi repartent.

5) –  Renforcer le pilotage et l'évaluation des dépenses publiques :

            - Inscrire l'équilibre des finances publiques et sociales dans la Constitution ;

            - Réserver la création et la modification des prélèvements fiscaux obligatoires aux lois de           finance (PLF et PLFSS) ;

- Mise en place d'une évaluation récurrente des principales politiques publiques    prise en compte à minima tous les trois ans.

 

IV – Une France souveraine dans une Europe respectueuse des nations (sic) :

A) - « L’Europe doit être un instrument et non pas une religion(..) Il faut une France souveraine dans une Europe des Nations qui partage des valeurs communes et un objectif commun : celui de notre souveraineté vis à vis de nos autres partenaires (..) La France doit être le moteur de ce renouveau. Elle doit proposer une stratégie d'indépendance que nos partenaires sont susceptibles d'accepter(..) mais il convient que la France retrouve sa crédibilité économique et sociale ».

B) - « Depuis des années, les États-Unis manient contre nous l'arme du dollar. Nous ne sommes pas obligés de subir les règles du jeu américaines.(..) Face à l'« OTAN obsolète » de Trump et le djihadisme il faut, non pas une défense européenne intégrée, mais une alliance européenne de défense : bâtir une industrie européenne de défense ; ne pas sortir les dépenses de défense du pacte de stabilité, mais créer un fonds qui mutualise et finance les dépenses d'intervention extérieure ».

C) - Nouveau partenariat économique  et conférence de sécurité avec la Russie.

D)France–Allemagne : « Il y a un préalable, le rétablissement de la puissance française. Les Allemands n'ont pas confiance dans notre capacité à nous redresser (..) la seule chose qui les convaincra, ce sont les décisions puissantes que l’on prendra cet été. Le reste, c'est de la littérature.(..) Je ne crois pas à la possibilité de refonder les institutions européennes et les traités qui seront forcément des compromis bâtards qui susciteront beaucoup d'animosité de la part des peuples ».

E)Une Europe économiquement souveraine :

1 - Une réforme de la gouvernance de la zone euro pour en faire un vrai outil de souveraineté :

« D'ici dix ans, l'Euro devra devenir une monnaie de réserve et de règlement à l'égal du dollar américain (..) Pour y parvenir, il faut que les investisseurs aient confiance dans l'euro, sa stabilité et ses institutions ».

            - Faire de l'euro une monnaie de réserve et de règlement à égalité avec le Dollar américain :

            - En l'espace d'une dizaine d'années, rapprocher la fiscalité sur les entreprises                            au sein des 19 États membres de la zone Euro ;

            - Doter la France et l'Allemagne, d'ici trois ans, d'un impôt sur les sociétés à taux                      unique, de taux de TVA et d'une fiscalité sur le capital harmonisés ;

            - Doter la zone euro d'un directoire politique composé des chefs de gouvernement,        présidé par l'un deux. Il devra pouvoir conduire la politique monétaire de l'Euro avec la            BCE. Celle-ci doit être aussi une arme pour la croissance et l'emploi. Des  parlementaires           représenteront chaque nation dans ce directoire politique ;

            - Créer un véritable gouvernement économique de la zone Euro, d'abord au niveau des             Ministres des finances, mais aussi de celui des Chefs d’État et de Gouvernement. Le réunir       tous les trois mois. Associer les Parlement nationaux au contrôle de ces politiques plus                 systématiquement. Créer un secrétariat général de la zone Euro.

            - Coordonner la politique accommodante de la BCE avec une stratégie économique     globale ; Créer, une fois la convergence fiscale achevée, un Trésor européen avec une mise        en commun des dettes.

2 – Une Europe avec une politique commerciale souveraine protectrice de nos intérêts :

«  L’Europe ne défend pas assez ses intérêts il est plus que jamais temps de lui donner les moyens d'inverser cette tendance ».

            - Le résultat des négociations sur le traité transatlantique, actuellement trop déséquilibré,         devra être soumis au référendum ;

            - Être plus à l'offensive sur le respect des normes environnementales et sociales sur les    produits importés pour que nos industries ne subissent plus une concurrence déloyale ;

            - Redoubler d'effort quant au respect des réglementations anti-dumping ;

            - L’Europe doit- exiger la réciprocité concernant l'ouverture des marchés publics ;

            - La France ne peut plus accepter que des décisions soient prises à l'encontre de ses intérêts             économiques comme les sanctions à l'égard de la Russie (…) Refonder nos relations avec          celle-ci, allié historique de la France, afin de lui proposer un nouveau partenariat   commercial UE/Russie ;

            - Refuser d’accorder le statut d'économie de marché à la Chine.

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.