Nous voulons une France qui s’engage dans la lutte contre la finance et pour une autre utilisation des richesses. Avec notamment : la création d’un grand pôle public bancaire pour financer un autre développement créateur d’emplois et écologique, l’investissement des PME, les services publics, la relance industrielle et la transition écologique ; la lutte contre l’évasion fiscale et une grande réforme de justice pour la fiscalité ; le plafonnement des salaires et des dividendes des grands patrons et l’encadrement des salaires dans une échelle de 1 à 20.
Il commance à être de plus en plus évident que la domination de l’argent sur les valeurs humaines et de vie est ce qui gangrène nos sociétés et nourrit la guerre. Cette logique de l’argent pour l’argent au mépris de tout, au mépris des vies humaines, de la nature et de la planète comme de toute morale, doit être remise en cause. C’est contre elle qu’ont buté toutes les tentatives progressistes et de gauche – même ambitieuses, comme en 1981 ou le Front populaire –, c’est en s’affrontant à elle qu’elles ont pu réussir dans le passé – notamment à la Libération. C’est la soumission à « la finance » qui révolte en France tous ceux qui souffrent et veulent que cela change, de l’ouvrier de l’automobile à l’étudiant, de l’infirmière au cadre de l’aéronautique, de l’enseignant au jeune livreur précaire, du médecin au technicien de chez Air France, du jeune chômeur d’une cité populaire au retraité en passant par l’ouvrier licencié de chez Uniroyal, le salarié d’un service public, ouvrier, employé, cadre ou chercheur. Voyons comme ce sentiment est mondial et partagé : les déclarations du pape, à ce titre, sont édifiantes !
Mais il ne suffit pas de dire « c’est la finance », « c’est l’argent ». Nous disons où saisir la finance et comment. C’est pour notre part, ce que nous voulons apporter à notre peuple, à la gauche, pour une vie meilleure.
Saisir l’argent, c’est par les banques qu’il faut le faire, ces nouveaux « tanks » apparemment pacifiques mais si meurtriers qui se sont illustrés pour mettre la Grèce à genoux. Il faut maîtriser le crédit pour qu’elles développent le bien commun avec l’argent de tous qu’elles gèrent et avec celui qu’elles créent sur cette base.
Bien sûr, dans le capitalisme, l’argent n’a pas de morale, ou plus exactement, la « morale » profonde du capitalisme, c’est que l’argent doit faire de l’argent un point c’est tout. Ce serait donc folie de croire qu’il est possible de « moraliser » le capitalisme.
Il faut en réalité une tout autre morale : une morale où les citoyens ont prise sur l’argent, où la politique se préoccupe de ce que font les banques, de ce à quoi sert l’argent. Bref une civilisation où l’argent est maîtrisé pour des buts de vie, de paix, pour développer toutes les sécurités.
Le cœur des choses, c’est la logique – la morale si l’on veut – dont est porteur l’argent : pour développer les êtres humains ou pour soutenir les profits. Il doit être utilisé pour développer les gens : l’emploi, les richesses utiles et les services publics, dont l’écologie.
Il ne suffit pas de limiter cette logique, la « moraliser » en mettant quelques garde-fous, quelques pénalités et taxes illusoires et prétendument compensatrices. Il faut maîtriser l’argent en s’appuyant sur tout le savoir social et citoyen des habitants et des travailleurs-ses, permettant transparence et démocratie. C’est créer de véritables nouvelles institutions. Cela constitue une vraie question de civilisation : face à cette morale folle née sur la base de ce que l’homme a créé – une monnaie qui en apparence est libre et peut tout, y compris détruire – mettre en œuvre une autre « morale » pour maîtriser cette création sociale.
La maîtrise des banques et de la création monétaire est une question clé qui permet de rendre cohérent et réaliste un programme de progrès, à condition de la brancher sur les autres éléments d’une politique de progrès social, écologique et citoyen qui lui donnent sens et qu’elle rend réalistes :
– des pouvoirs démocratiques qui sinon s’exercent de plus en plus dans le vide ;
– des objectifs de société : un système de sécurisation de l’emploi et de la formation, avec une maîtrise du travail et une réduction du temps de travail, une expansion des services publics pour développer chaque personne et les capacités communes ;
– un nouveau développement productif, industriel et de services, basé sur une véritable transition écologique et permettant celle-ci :
– une Europe solidaire et réorientée visant non pas la concurrence libre et non faussée mais la coopération, le progrès, la sécurisation de l’emploi et toutes les sécurités ;
– un monde de partage, de paix et de développement solidaire commun, social et écologique.
Il s’agit de conquérir les pouvoirs politiques non pas pour les exercer en soi, mais pour les utiliser en vue de maîtriser progressivement les banques, l’argent et son utilisation, tant par l’État que par les grands groupes et les multinationales, en France et en Europe.
Cela demande une toute nouvelle culture qui constitue une bataille à la fois sociale et culturelle. Elle concerne toute la gauche, et – au-delà – tous les hommes et femmes de progrès et de bonne volonté.
Partout le critère qui doit permettre de juger l’utilisation de l’argent c’est : combien d’emplois et de richesses communes créés, combien de vies sécurisées, quel vrai développement des services publics, etc. Au lieu de soutenir « l’esprit de lucre », la spéculation financière et le profit égoïste.
Au lieu que les banques, les marchés financiers et les actionnaires vampirisent l’activité économique, l’argent créé par les banques et avancé, prêté, aux entreprises pour leurs investissements matériels et de recherche le sera à un taux d’autant plus abaissé que plus d’emploi et de richesses réelles et écologiques seront programmés et effectivement créés. De même pour l’argent avancé par les banques à l’État, s’il développe effectivement les services publics et l’emploi. La réalisation de ces objectifs doit être suivie par des institutions publiques et sociales nouvelles, pas par une bureaucratie, et appuyées par les services publics.
Cela implique de s’attaquer au coût du capital pour réaliser ces nouvelles dépenses.
La fiscalité, la mobilisation de l’épargne et une nouvelle conception de la dépense publique doivent appuyer cela, de même que de nouveaux droits des salariés dans les entreprises sur les gestions (investissements, travail, production) et l’utilisation de l’argent.
Pour cela, nous proposons à notre peuple de débattre quatre mesures phares :
1. Un fonds national pour développer et sécuriser l’emploi et la formation. Il viendrait bonifier et garantir le crédit à l’investissement des entreprises si ces investissements développent l’emploi, les salaires, la formation, la R & D et la valeur ajoutée. C’est une politique de baisse de coût du capital, tout le contraire d’une politique de baisse de coût du travail. Il serait constitué de tout ou partie des quelques 30 milliards d’euros servant actuellement à compenser les exonérations de cotisations sociales. Il constituerait un levier pour aller chercher les banques afin que leur argent serve à un réel développement et pour obliger les entreprises à utiliser ainsi leurs profits à de tels investissements. Il serait doté d’une gouvernance démocratique, avec des représentants des salariés et des représentants de la population. Il se déclinerait en fonds régionaux pour l’emploi et la formation et en fonds « sectoriels », par grande filière d’activité et de production. Il aurait vocation à se constituer en réseau au niveau européen et à solliciter la BCE. Au niveau de chaque région, il serait l’outil d’une conférence nationale (avec des déclinaisons par filières) et de conférences régionales sur les financements, la production, l’emploi et la formation serait mise en place, avec des représentants des salariés des entreprises et des élus territoriaux, en lien avec l’ouverture d’une réforme ambitieuse des droits des comités d’entreprises sur les propositions d’investissements, l’appel au crédit bancaire et le suivi de son utilisation.
2. Une fiscalité pénalisant la spéculation, les revenus financiers, le capital financier et incitant au développement de l’investissement créateur d’emploi, efficace et écologique, et des revenus salariaux, avec des pénalisations et modulation spécifiques. Elle permettrait aussi une refonte de la fiscalité locale.
3. Un pôle public bancaire doit être créé pour fonctionner selon d’autres critères et avec une gouvernance réellement démocratique sur la base des institutions financières publiques existantes (la Banque postale, CDC…) en y adjoignant la nationalisation d’au moins une des grandes banques françaises actuelles. Il nécessiterait une refonte profonde de la Banque publique d’investissement (la BPI) : (1) ses critères d’intervention ne doivent plus être de suivre et accompagner le capital privé pour garantir ses profits, mais l’emploi, la valeur ajoutée réelle et l’écologie ; (2) les représentants des salariés et des habitants doivent pouvoir suivre l’utilisation par les entreprises des fonds prêtés par la BPI avec une possibilité d’incitation renforcée (bonification) ou de pénalisation selon l’accomplissement des engagements ; (3) ce fonds doit exiger d’être refinancé par la BCE et sa création monétaire, au lieu que celle-ci alimente la spéculation.
4. Un Fonds de développement économique, social et environnemental européen solidaire devrait être créé. L’état actuel de l’économie européenne et mondiale démontre en effet que ce n’est pas possible que les décisions continuent de dépendre des réactions des marchés financiers. Il existe une alternative : mobiliser la création monétaire, particulièrement celle des banques centrales nationales et de la Banque centrale européenne qui, ensemble, constituent l’Eurosystème, sous forme de prêts à long terme et à taux d’intérêt réduits (0 % voire moins pour les projets les plus efficaces au regard de critères économiques, sociaux et environnementaux). Cette mobilisation doit être réservée à des projets démocratiquement élaborés, décidés, et contrôlés dans leur réalisation, de façon décentralisée dans les différents États de l’Union européenne. Cette condition serait réalisée par la création d’un Fonds de développement économique, social et environnemental européen solidaire. Son financement serait assuré par la réorientation d’une partie des milliards d’euros que l’Eurosystème injecte actuellement sur les marchés financiers au rythme de 80 milliards par mois. Son organisation créerait les conditions d’une intervention directe des citoyens et de leurs représentants locaux, régionaux, nationaux et européens sur les décisions, dans le respect des souverainetés nationales. Intercalé entre la BCE et les États nationaux, il est formellement autorisé par les traités européens (article 123.2 du traité de Lisbonne).
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