Tout au long de la vie, chacun-e doit avoir la possibilité d’enchaîner, sans jamais passer par la case « chômage », les périodes où il-elle exercerait un emploi bien rémunéré et les périodes de formation avec un revenu mutualisé, de même niveau que le salaire prélevé par cotisations sur les entreprises, pour se préparer à accéder à un meilleur emploi.
Une nouvelle logique politique, sociale, économique et financière
Il faut opposer une autre logique à l’obsession de la rentabilité du capital qui anime les marchés financiers, les multinationales et les banques. Avec les technologies informationnelles, très économes en moyens, si on ne développe pas la demande, on fait du chômage. Il faut donc dépenser de façon telle que croissent ensemble demande et efficacité productive. Les dépenses de services publics (éducation, santé, recherche, environnement…) présentent cette double qualité. C’est dire s’il faut les augmenter avec de nombreux emplois publics formés et bien payés.
Mais pour financer, il faut accroître la production de richesses réelles. Cela exige de sécuriser l’emploi et la formation, dans l’industrie et les services qui lui sont liés.
Dès à présent, ouvrir des chantiers concrets
Éradiquer le chômage exige des transformations profondes dans le fonctionnement de l’économie. Cela se fera graduellement mais on peut commencer tout de suite, contre la « flexisécurité » promue par le Medef, la droite et le gouvernement, à ouvrir le chantier de sécurisation en réponse aux urgences sociales et économiques.
Recenser de façon précise et détaillée, auprès des populations et avec l’aide des services publics, dans les régions, les bassins d’emplois, les besoins d’emplois à créer ou à sécuriser, les besoins en formation ;
Sécuriser le contrat de travail, qui doit être toujours de durée indéterminée, en commençant par celui des jeunes ;
Aller vers l’établissement d’un droit universel à l’emploi et à la formation choisis grâce à la promotion d’un nouveau service public de sécurisation de l’emploi au lieu du démantèlement de Pôle emploi ;
Conquérir des pouvoirs nouveaux décisionnels pour les salariés et leurs organisations syndicales permettant non seulement de s’opposer aux suppressions d’emplois mais d’intervenir bien en amont pour imposer d’autres choix, dans le cadre de gestions prévisionnelles des emplois et des compétences démocratisées dans les entreprises et les régions ;
Imposer de nouveaux rapports entre banques et entreprises, pour un nouveau crédit avec l’appui de fonds régionaux et nationaux pour l’emploi et la formation, d’un pôle financier public et d’une nouvelle sélectivité de la création monétaire de la BCE, pour la sécurisation de l’emploi et le développement des services publics.
La lutte pour l’emploi en France passe par deux nécessités : maintenir l’emploi existant en luttant contre les licenciements et créer des emplois nouveaux en développant l’activité en France et en réduisant le temps de travail.
Mettre en œuvre une politique économique et industrielle volontariste pour développer les filières d’avenir, en particulier les filières non délocalisables comme l’économie circulaire, la transition énergétique, un nouveau modèle agricole fondé notamment sur la relocalisation des productions et le développement de circuits de proximité.
Développer la recherche et développement pour maîtriser en France les nouvelles filières industrielles et de services génératrices d’emploi qualifié : biotechnologies, nanotechnologies, robotique, fabrication par impression 3D…
Développer les services publics. Au cours des dernières années, les services publics ont été sinistrés (voir fiche n° 8). Il faut redonner des moyens humains à des secteurs en déliquescence : la justice, la santé, l’enseignement, les transports… et reprendre le contrôle public des secteurs clés tels que l’énergie, les communications, le numérique pour réorienter leur gestion vers l’emploi et le service public.
Mettre en œuvre les financements nécessaires : financer les créations d’emploi, la formation, les services publics avec un autre crédit bancaire, une autre politique de la BCE (voir fiche 9).
Redonner l’initiative aux citoyens, aux élus et aux salariés : les régions sont aujourd’hui un acteur clé du développement économique. C’est à ce premier niveau qu’il faut donner aux élus et aux salariés les moyens d’intervenir pour le maintien et le développement de l’emploi.
Création d’un fonds national et de fonds régionaux pour l’emploi et la formation gérés démocratiquement, alimentés notamment par un redéploiement des aides inefficaces du type CICE ou pacte de responsabilité en vue de faire pression sur les banques pour qu’elles financent des investissements favorables à l’emploi et à la création de richesses dans les territoires.
Soutien sélectif aux entreprises qui développent l’emploi, la formation, la recherche, notamment par le biais d’une nouvelle sélectivité du crédit.
Donner de véritables pouvoirs aux salariés et à leurs institutions représentatives pour contester les fermetures de sites, élaborer des solutions alternatives et saisir les banques, obtenir le soutien des pouvoirs publics et l’appui d’un pôle financier public et des fonds régionaux pour l’emploi et la formation, pour en assurer le financement.
Réduire le temps de travail : aller vers les 32 heures hebdomadaires.
Les gains très rapides de productivité permis par les technologies informationnelles se font, pour l’heure, au détriment de l’emploi et de la croissance réelle pour ne profiter qu’aux actionnaires. Il faut utiliser autrement ces gains de productivité, notamment pour réduire la durée du travail et augmenter corrélativement le temps disponible pour se former, former les autres, se cultiver.
C’est efficace : le rapport Romagnan, publié en 2015, a fait la démonstration de l’impact positif possible des 35 heures sur l’emploi. Pour qu’il soit très important, il faut se refuser à geler les salaires et baisser les « charges sociales » comme en 1998. Il faut encourager financièrement les entreprises, avec le crédit par exemple, à beaucoup développer la formation.
En redonnant un emploi, donc du pouvoir d’achat aux chômeurs, et en générant de nouveaux besoins liés au temps libre, on contribue en outre à la relance de la consommation donc de l’économie.
Chômage, précarité et stagnation de la création de richesses prennent leur source dans la gestion des entreprises et dans la priorité absolue donnée à la rentabilité financière, aux exigences des actionnaires.
D’où l’exigence d’autres critères fondés sur l’efficacité sociale, territoriale et environnementale ainsi que la conquête de pouvoirs d’intervention effectifs dans la gestion des entreprises pour les travailleurs. Il faut mettre en cause le monopole du pouvoir patronal sur les choix de gestion, et en particulier sur l’utilisation de l’argent des profits, des fonds publics et du crédit dont disposent les entreprises.
Responsabilisation sociale
La responsabilité sociale des entreprises doit viser le développement des capacités humaines de chacun, des salariés et de la population du bassin d’emploi jusqu’au niveau national avec :
A - Des critères d’efficacité sociale visant à économiser sur les coûts du capital, pour accroître la part des richesses créées par l’entreprise retournant :
– Aux salariés avec plus d’emplois qualifiés et de salaires, le recul des discriminations, l’insertion des jeunes, la réduction du temps de travail ;
– À la population avec une réforme des prélèvements publics et sociaux sur les entreprises et les banques les incitant à développer l’emploi, la formation et les salaires avec les investissements répondant à ces critères. Cela accroîtrait les ressources pour le financement des services publics et pour la Sécurité sociale (cotisation sur les revenus financiers des entreprises, modulation du taux de cotisation sociale patronale et de l’impôt sur les sociétés).
B - Des pouvoirs des salariés (comités d’entreprises, délégués du personnel) sur les décisions stratégiques de l’entreprise (emploi, formation, investissements, organisation du travail, alliances) et des pouvoirs pour les syndicats, élus, et population dans les bassins d’emploi doivent être conquis pour aussi peser sur les choix des entreprises. Aucun investissement ne devrait être décidé sans que lui aient été associés des objectifs délibérés en termes d’emplois (directs et indirects) et de formations.
Responsabilisation territoriale
Les stratégies des multinationales ne tiennent aucun compte des besoins de développement des territoires et de leurs populations. Leur irresponsabilité est favorisée par la promotion des pôles de compétitivité conçus pour l’écrémage et la concentration des ressources humaines et financières au détriment du reste du territoire. Une autre politique économique doit favoriser les coopérations entre les entreprises, entre les donneurs d’ordres et leurs sous-traitants, contre les délocalisations et la mise en concurrence des territoires. Il s’agit de maximiser les richesses nouvelles revenant aux travailleurs et aux populations, et de minimiser les gâchis financiers.
Le financement des entreprises doit y contribuer, avec une nouvelle sélectivité du crédit en faveur de l’emploi, de la formation et de la création de valeur ajoutée dans les territoires. L’impôt sur les sociétés doit être renforcé et modulé selon ces principes, et un nouvel impôt territorial, assis sur leur capital matériel et financier, doit être créé.
Responsabilisation écologique
Les gâchis de ressources et la protection de l’environnement appellent aussi d’autres critères de gestion qui doivent favoriser l’économie systématique de matières avec les nouvelles technologies, le développement de la recherche et l’emploi qualifié.
Le développement de pôles publics d’impulsion et de coopération
La promotion de nouveaux critères de gestion, la conquête de nouveaux pouvoirs pour les travailleurs, l’essor des entreprises de l’économie sociale, une autre utilisation des pouvoirs de l’État et des régions participant au capital d’entreprises, ainsi qu’une nationalisation de grandes banques et de grandes entreprises stratégiques doivent viser une appropriation sociale des objectifs et des gestions.
Les services publics existants subissent la privatisation, l’ouverture à la concurrence coupe-gorge, l’emprise de la rentabilité financière sur les gestions, les pressions contre les dépenses sociales et de développement, la dégradation des conditions de travail, le démantèlement des garanties statutaires.
Missions fragilisées et personnels précarisés produisent une offre de service public réduite. Le maillage du territoire se rétrécit : services fermés ou concentrés (lignes SNCF, hôpitaux, trésoreries et recettes des impôts). Face à la pénurie de personnels dégradant les conditions d’informations et d’accueil du public, le fonctionnement en front office et back office sert à masquer l’allongement des délais de réponse. Et partout les files d’attente s’allongent et les serveurs vocaux exaspèrent.
Il est urgent de passer à une nouvelle ère des services et de la Fonction publique, faite d’expansion, de démocratisation (nouveaux droits et pouvoirs des usagers et des personnels), de sécurisation des carrières pour tous les agents publics permettant une mobilité choisie.
Une issue positive à la crise exige une relance de la demande en même temps qu’une nouvelle efficacité de la croissance à partir de critères sociaux et environnementaux permettant le développement de tous les potentiels humains. Avec les nouvelles technologies, très économes en moyens (travail direct et travail indirect contenu dans les équipements), si on ne développe pas la demande, on fait du chômage. Il faut donc dépenser de façon telle que croissent ensemble demande et efficacité productive. Les dépenses de services publics (éducation, santé, recherche, environnement…) présentent cette double qualité. C’est dire s’il faut les augmenter avec de nombreux emplois publics formés et bien payés, au lieu du « pacte de stabilité ».
Pour une expansion des services publics qui créerait de nouveaux emplois
Menons des luttes pour leur défense et pour une nouvelle progression de ceux-ci, depuis le plan local, régional et national et jusqu’aux niveaux européen et même mondial avec les biens communs de l’humanité.
La révolution technologique informationnelle, les exigences écologiques et de développement durable, l’évolution démographique, l’aide à la petite enfance, l’allongement des années d’étude, le vieillissement, les migrations nous mettent devant de nouveaux défis.
Conserver les principes fondamentaux et relever ces nouveaux défis
La notion de service public est le point de rencontre d’aspirations fondamentales :
L’égalité en termes de droit d’accès pour chacun-e à un certain nombre de biens et services jugés essentiels, indépendamment du niveau de revenus ;
La solidarité avec l’objectif de cohésion sociale et territoriale ;
La maîtrise citoyenne avec l’idée que les secteurs d’activité relevant de l’intérêt général doivent faire l’objet de politiques publiques.
L’éducation, la santé, la protection sociale, la recherche, l’énergie, le traitement des déchets, l’eau, les transports, les télécommunications, le crédit, le logement, la Poste, les trésoreries et recettes des impôts, la sécurité et la justice doivent être protégés et préservés de toute soumission à des intérêts privés et leur financement doit être émancipé des marchés financiers. En effet, ils assurent les conditions de l’égalité et de la citoyenneté dans la satisfaction des besoins et l’intérêt général.
Pour une appropriation citoyenne et démocratique des services publics et de nouveaux modes de financement
Substituer aux critères de gestion actuels des critères d’efficacité sociale permettant de réaliser des objectifs sociaux délibérés démocratiquement.
Promouvoir une culture de partage et une éthique de participation créative depuis les solidarités de proximité jusqu’à toute l’humanité, dans une autre civilisation.
Création d’un fonds de développement européen écologique et social financé par la Banque centrale européenne qui achèterait les titres publics des états nationaux servant à financer des dépenses nouvelles de services publics, pour répondre aux besoins actuels et pour de nouveaux besoins
Les banques, coupables du chômage et de la précarité
Fin 2015, le total cumulé du bilan de toutes les banques françaises atteignait 8 416 milliards d’euros, dont seulement un quart (2 127 milliards) étaient consacrés à des crédits à des entreprises ou des particuliers.
Depuis trente ans, les banques préfèrent financer les OPA, les délocalisations, l’évasion fiscale, la spéculation immobilière, les placements financiers, plutôt que les investissements créateurs d’emplois et de richesses.
Les banques centrales, et en particulier la BCE dont les banques dépendent pour refinancer leurs crédits, sont complices. Elles injectent sur les marchés des milliers de milliards d’euros en laissant les financiers décider de l’usage qu’ils feront de cet argent !
Résultat, les États sont dans la dépendance des marchés financiers pour financer leurs investissements, les groupes industriels deviennent de plus en plus financiers, les PME et les collectivités territoriales n’osent même plus réclamer des crédits à leur banque faute d’afficher des garanties ou des promesses de rentabilité suffisantes !
Tout cela prépare une crise financière, économique, sociale encore pire que celle de 2007-2012.
Des solutions concrètes, des leviers pour réorienter le crédit
Les euros créés par les banques et par la BCE, c’est l’argent des Européens. Ils doivent servir à l’emploi, à la formation, à l’essor des services publics. Il faut de nouveaux pouvoirs des citoyens :
dans les entreprises : les représentants des salariés doivent pouvoir disposer de pouvoirs d’intervention pour stopper les suppressions d’emplois (moratoires) et pour faire prendre en compte des projets industriels économiquement efficaces, créateurs d’emplois qualifiés, avec un coût du capital fortement réduit et avec un droit de tirage sur les crédits bancaires pour les financer (Fonds régionaux pour l’emploi et la formation).
dans les quartiers : que font les banques pour financer les PME, les services publics ? Les citoyens ont droit à ces informations, comme c’est le cas aux États-Unis ! L’argent des banques, c’est les salaires, pensions, retraites, allocations diverses qui, chaque mois, sont virés gratuitement sur les comptes courants bancaires, c’est l’argent de la société et non celui des banquiers ! Ils doivent rendre des comptes.
dans les régions : ça suffit de gaspiller l’argent public en cadeaux aux entreprises ! À la place, mettons en place des fonds régionaux et un fonds national pour l’emploi et la formation, pour que les outils d’intervention économique des régions (bonifications d’intérêts, garanties d’emprunts…) poussent les banques à financer l’emploi et la création de richesses dans les territoires ! Une nouvelle règle devrait s’imposer : plus les investissements des entreprises programmeraient de créations d’emploi et de formations et plus le taux d’intérêt des crédits pour les financer seraient abaissés, jusqu’à zéro voire moins (non-remboursement d’une partie du prêt).
au niveau national pour mettre en œuvre cette nouvelle règle, avec un pôle financier public pour que les citoyens aient le pouvoir de contrôler et de réorienter les crédits distribués par toutes les banques.
dans un Fonds de développement économique, social et écologique européen financé – comme y autorise déjà l’article 123-2 des traités européens actuels – par la « planche à billets » de la BCE pour développer les services publics et instaurer une nouvelle sélectivité du crédit, pour l’emploi et contre les marchés financiers, dans toute l’Europe.
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