Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Les moyens, le chemin… l’espoir

Rendons hommage à la tradition. Toute l’équipe d’Économie et Politique vous souhaite une bonne année 2016 ! Convenons que ce souhait pour 2016 doit être plus que rituel. 2016 ne doit pas être 2015.

Commencée avec les meurtres de Charlie hebdo, achevée par les assassinats de Paris, 2015 est une année terrible pour le pays. Elle marque l’arrivée sur le territoire national de la guerre que la France prétend mener contre Daesch en Afrique et au Moyen-Orient. Et avec elle son cortège d’insécurités des personnes. Il faudra du temps pour effacer cette « angoisse de mort ».

D’autant plus que la situation a révélé la tentation d’un autoritarisme d’État qui s’affiche vengeur. En témoignent la volonté de constitutionnaliser l’état d’urgence et les débats sur la déchéance de nationalité. Mesures à l’efficacité très contestable, le gouvernement ouvre ainsi la porte à un jeu politique très dangereux. Les actes terroristes, qu’il faut absolument prévenir, empêcher et combattre, ne peuvent servir à une métamorphose de l’État de droit en état d’urgence permanent qui deviendrait un État d’exception sécuritaire lourd de reculs démocratiques. Triturer ainsi le socle de la nation française, c’est bafouer le concept d’égalité et officialiser la méfiance de l’autre. C’est clairement l’idée de la France qui est en jeu.

En outre, cette posture gouvernementale ne répond pas aux raisons de fond de ces actes de guerre commis par nos propres concitoyens. Insécurisation des personnes et réponse sécuritaire gouvernementale font l’impasse sur l’insécurité sociale développée par le capital, et ses affidés de droite et socio-libéraux !

Dans ses vœux F. Hollande a mis en avant le thème de la sécurité des Français, sécurité des biens et des personnes, et le social, avec l’emploi au cœur. Il s’est même présenté comme le « protecteur de la patrie », tant militairement que socialement, en promettant la « sécurité sociale professionnelle pour chaque travailleur  » ! Pourtant, son gouvernement reste silencieux face aux attaques contre la démocratie sociale incarnée par la condamnation des 8 syndicalistes de Goodyear. Or ces syndicalistes sont condamnés pour s’être opposés à la délocalisation de la fabrication de pneus dans un pays émergent par une multinationale dont le PDG a déclaré qu’elle pourrait y « payer moins d’un euro l’heure de salaire et exporter (vers la France) tous les pneus dont elle a besoin » ! C’est donc le « patriotisme économique » de ces salariés, en résonance avec la défense de l’emploi, que l’État Hollande-Valls sanctionne.

Cette condamnation illustre une volonté de mettre la France vivante au pas d’un ordre public et social subordonné aux objectifs du capital. Il est hors de question de l’accepter. Exigeons-la relaxe pour les Goodyear, pour tous les syndicalistes, tous les travailleurs qui se battent pour sauver leur emploi et l’emploi en France !

Et poussons cette bagarre jusque la nécessité de pouvoirs nouveaux des salariés sur les choix de gestion, d’investissement, de financement des entreprises. La situation le permet plus que jamais. Les 8 de Goodyear incarnent l’exigence d’une maîtrise sociale et démocratique des entreprises et de l’argent tiré des richesses produites, face à un patronat uniquement soucieux de faire de l’argent avec de l’argent. Or les contradictions de la crise systémique et financière s’aiguisent, la politique publique poursuivie par le gouvernement Hollande-Valls sur recommandation du patronat est en échec. Les politiques d’austérité sociale et salariale conjuguées aux politiques de soutien sur fonds publics à la baisse du coût du travail ne permettent ni le retour de la croissance, ni la baisse du chômage.

Et pour causes. Les gains de productivité générés par la révolution informationnelle sont siphonnés par les exigences financières des marchés, des banques et des grands groupes. D’un côté les économies de travail dans le processus productif réduisent le coût du travail des entreprises. De l’autre, le coût du capital payé par les entreprises, notamment les PME et PMI, aux banques et aux marchés s’accroît, ce qui restreint leurs dépenses de développement en emplois, salaires et qualifications. Combinés aux politiques d’austérité, ces prélèvements du capital participent de la réduction des débouchés des entreprises. Moins d’emplois, moins de salaires, moins de dépenses publique et sociale, c’est moins de demande de consommation et d’investissement. D’où la guerre économique que les entreprises se livrent par des stratégies de baisse des coûts (salariaux et fiscaux) qui nourrit le chômage et le cercle vicieux de la croissance atone.

Une dynamique régressive que la politique du tandem Hollande-Valls alimente constamment. C’est les contrats compétitivité-emploi de la loi dite de sécurisation de l’emploi qui flexibilise l’emploi et les salaires. C’est le Pacte de responsabilité et ses 40 milliards de baisse de coûts des entreprises (CICE et autres). C’est la baisse des coûts de gestion de l’emploi inscrite dans les lois Macron et Rebsamen. Et c’est la réforme du Code du travail par l’inversion de la hiérarchie des normes et la recherche de flexibilité sans sécurité via les réformes du contrat de travail, du temps de travail, des conventions collectives… Toutes ces régressions travaillent à sécuriser les profits financiers des entreprises, notamment des grands groupes, contre le développement de l’emploi et sa sécurisation.

Une stratégie dont les salariés paient le prix fort. Si début 2015 certains invoquaient « la conjonction favorable des planètes » avec les baisses des taux d’intérêt, du prix du pétrole brut…, l’année s’est terminée avec 3,6 millions de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en catégorie A (ceux qui ne travaillent pas du tout). Tous les records ont été battus : c’est 90 000 de plus en 2015 et 700 000 de plus qu’en 2012 pour cette catégorie de demandeurs d’emploi. Quant à la croissance, la dernière livraison de l’INSEE nous informe qu’elle n’a pas dépassé 1,1 % en 2015 ! Très loin d’une relance… Les Nostradamus en cravate peuvent se recoucher.

Tout cela alimente évidemment la peur du déclassement social et la crise de confiance dans les politiques publiques.

Pour autant, tout est là aujourd’hui pour désigner les modalités d’une alternative concrète et immédiate qui réponde à « l’impératif de vie » réclamé par tous nos concitoyens et tous les travailleurs, en ouvrant la voie d’une sécurisation individuelle et collective de tous les moments de la vie. Cela nécessite de faire émerger un nouveau consensus politique de progrès social et écologique montrant qu’une nouvelle logique de sécurisation et de promotion des capacités humaines est possible.

Certes la démarche n’est pas simple. Certains à gauche voudraient réduire l’élaboration de ce nouveau consensus à un processus de primaire soluble dans l’élection présidentielle. D’autres en réfutent l’idée et incarnent la posture du « tout ou rien ». En vérité, nous ne pourrons éviter ce piège qu’en étant ce que nous sommes : porteurs d’un large rassemblement bâti sur des contenus de transformation sociale.

La campagne pour l’emploi lancée par le Conseil national du PCF est un moyen de répondre à cet objectif. Car l’emploi, priorité numéro 1 des Français, est décisif comme bataille politique et de transformation sociale. L’emploi peut constituer, à l’appui des luttes et en lien avec les territoires, le socle d’une contre-cohérence, afin de responsabiliser socialement les entreprises et les banques, et d’ouvrir sur une nouvelle efficacité sociale garante des sécurités individuelles et collectives tout au long de la vie.

Il s’agit ainsi de faire vivre concrètement les grands principes républicains aujourd’hui bafoués, avec des propositions porteuses d’une cohérence entre objectifs sociaux, moyens financiers et pouvoirs nouveaux, afin de conditionner autrement la bataille pour les luttes et pour la présidentielle de 2017. zzz

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