La Grèce a perdu 120 Md€ de recettes fiscales depuis 2000 causées par la corruption et l’évasion fiscale. En Grèce, en France, comme dans toute l’Europe, la question de la fiscalité et plus particulièrement de l’évasion fiscale européenne doit effectivement venir dans le débat public et produire des actes.
Le think-tank américain Global Financial Integrity évalue pour la Grèce à 120 milliards d’euros la perte causée par des activités illicites comme la corruption et l’évasion fiscales durant la décennie 2000. Plus de 24 % de l’activité est réalisée en économie souterraine.
À titre comparatif, la dette grecque se chiffrait en 2014 à 319 Md€ d’euros soit 175 % du PIB, de ce pays. Cette évasion fiscale ne tombe pas du ciel. Elle est le résultat direct des politiques impulsées depuis le niveau européen visant à une libéralisation des capitaux et à un allégement des prélèvements fiscaux sur le capital, la fortune et les entreprises dont un exemple caractéristique est le CICE en France. Mais on peut aussi parler des attaques portées contre l’ISF, contre le financement de la protection sociale (fin du financement de la branche famille par les entreprises) et du transfert des prélèvements sécurité sociale vers la fiscalité, notamment sur les revenus les modestes, d’où le projet de prélèvement à la source comme instrument de cette mécanique.
Face à cela au lieu d’augmenter la TVA qui pèse directement sur le revenu des ménages et qui les frappe indifféremment sans distinction de niveau de revenu, en Grèce comme en France ou dans beaucoup d’autres pays de l’Union Européenne, il s’agit de promouvoir une réforme fiscale orientée prioritairement vers une réforme de la fiscalité des entreprises et du capital, une réforme fiscale qui pousse par une modulation incitative à une utilisation des bénéfices soutenant des investissements générateurs d’emplois et de formation, combattant l’accumulation du capital et les gâchis qui en découlent.
Il s’agit également d’instaurer une fiscalité des personnes et de la fortune qui soit empreinte d’une réelle progressivité.
L’évolution vers une telle mécanique fiscale renvoie pour la Grèce comme pour tout autre pays européen au besoin de coopération fiscale en Europe. Une coopération qui pourrait se présenter sous la forme d’un serpent fiscal européen dont le fonctionnement reposerait sur l’existence de taux d’imposition plancher pour les catégories d’impôts directs et progressifs et de taux plafonds pour les impôts à taux proportionnels qui dans la plupart des cas, taxent la consommation et dont le plus emblématique est la TVA.
Le contrôle de ce système s’effectuerait dans le cadre d’une commission de la coopération et de la convergence fiscale installée dans chaque État et au niveau européen. Le travail de ces commissions serait placé sous le contrôle des parlements nationaux et européen. Il se matérialiserait par des actions de mise en cohérence des éléments constitutifs de l’assiette des impôts directs et progressifs tels que l’impôt sur les sociétés, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur la fortune. Il serait complété par un dispositif consistant à établir et à faire respecter une convention solidaire ratifiée par tous les pays de l’Union. Cette convention préciserait que les contribuables (personne physique ou personne morale) dont il serait avéré que l’exil fiscal est guidé par une volonté de défiscalisation, se verraient taxer sur le territoire du pays de destination au même taux que dans le pays d’origine. La recette fiscale ainsi obtenue serait répartie entre ces deux pays respectivement à hauteur d’un tiers et deux tiers du montant collecté.
Jusqu’alors nous avons entendu beaucoup de discours, nous avons assisté à beaucoup de déclarations mais jamais suivies de réels effets.
Le dernier souvenir en date est l’épisode Jérôme Cahuzac. L’émoi provoqué avait remis sur la sellette la question de la fiscalité et de son contrôle. Le gouvernement français et le Président de la République alors placés en première ligne en avaient profité pour brandir un énième plan de lutte européen contre la fraude et l’évasion fiscale. Derrière la part de bluff, il y avait aussi des accents de sincérité dictés notamment par le constat d’une dure réalité : en Europe alors que les marges budgétaires des États se réduisent comme peau de chagrin, l’évasion fiscale est évaluée à 1 000 milliards d’euros.
Il est temps que la question de la fiscalité et plus particulièrement de l’évasion fiscale européenne vienne effectivement en débat et produise des actes. À condition que celui-ci débouche sur autre chose que sur ce qu’il a généré depuis 1957 (Traité de Rome). Depuis cette date, toutes les tentatives en la matière n’ont connu que l’échec et cela, bien qu’au départ, seul la TVA était concernée. A ce stade, il est intéressant de relever que cette situation avait été évaluée négativement lors de l’installation du Grand Marché en 2012 sans pour autant représenter aux yeux des technocrates de l’époque un handicap rédhibitoire. Il est vrai que ce grand marché était d’un enjeu bien supérieur pour le monde de la finance et l’extension de son emprise sur les peuples. Maastricht et Lisbonne nous en en montré depuis les multiples facettes.
Depuis, la situation n’a cessé de se dégrader en arrivant même à ce que les échanges d’informations fiscales soient rendus très difficiles sur le territoire de l’Union. En 2003 une directive a certes instauré un échange automatique en la matière, mais des pays comme le Luxembourg, la Belgique, l’Autriche ont bénéficié d’une période de transition dont on tarde à voir la fin.
Ainsi, les candidats à l’exil fiscal n’ont pas vraiment lieu d’être inquiets sur les possibilités qui leur sont offertes d’utiliser sans risques les différentiels de fiscalité, le tout sous la bannière de la liberté de circulation des hommes et des services au sein du Marché unique. Et si l’exil fiscal des particuliers est une question, celui pratiqué par les entreprises et les grands groupes sous couvert « d’optimisation » en est une autre. Leur génie financier trouve sa quintessence dans la pratique des prix de transferts qui consiste à faire surfacturer par des filiales implantées dans des pays à fiscalité privilégiée les services qu’elles rendent à celles implantées dans les autres pays ; ce qui réduit d’autant la charge fiscale globale du groupe et obère d’autant le montant des rentrées fiscales.
Quelques chiffres sur la fiscalité en GrèceRevenu annuel déclaré en 2008 pour : - les professions libérales (médecins, avocats, architectes) : 10 493 euros - les hommes d’affaires et les traders : 13 236 euros - les salariés et les retraités : 16 123 euros. Le taux maximum d’imposition à l’impôt sur le revenu est de 46%. Pour le fisc grec, les plus riches sont les ouvriers, les employés et les retraités. Au 30 décembre 2009, seulement 7,5 % des membres des professions libérales et 13 % des chefs d’entreprise et commerçants ont déclaré plus de 30 000 euros. Fiscalité des entreprises : L’imposition des revenus des entreprises est passée d’un taux de 40% en 2009 à un taux de 26% en 2013. TVA : Le taux maximum est passé de 18% à 23% de 2000 à 2013 Impôts locaux : Pas d’existence de cadastre donc aucun impôt foncier prélevé notamment sur le patrimoine foncier de l’église, très important, et sur celui des armateurs. De nombreux terrains sont officiellement ans propriétaires ... Impôt sur la fortune : La Grèce a supprimé son impôt sur la fortune depuis 2009. |
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