Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Refonder la filière nucléaire, pas la démanteler

Après la publication en mars  des mauvais  résultats financiers  2014 d’Areva, le président de la République et le gouvernement se sont prononcés, le 3 juin,  pour un rapprochement avec EDF, à qui il est demandé de reprendre l’activité de conception, construction et maintenance des réacteurs nucléaires. Les autres activités, essentiellement relatives aux matières nucléaires, resteraient du ressort d’Areva, ou de ce qu’il en subsisterait après ce dépeçage.  Y avait-il vraiment urgence à prendre une telle décision de coin de table, et surtout, répond-elle en quoi que ce soit aux enjeux de l’industrie nucléaire française?

Quatre mille trente quatre millions d’euros, c’est le résultat négatif pour l’exercice 2014 rendu public par Areva en mars dernier. Tout un chacun s’est saisi de ce chiffre mirobolant, qui pour condamner l’EPR, qui pour enterrer la filière nucléaire française dans son ensemble. La direction d’Areva, elle, s’est empressée de l’utiliser pour justifier un renforcement de son plan de compétitivité qui vise 1 milliard d’euros d’économies à l’horizon 2017 fondé en grande partie sur des milliers de suppressions d’emplois. Pourtant, à y regarder de plus près, la situation industrielle d’Areva est loin d’être aussi désespérée que le laisserait penser son résultat financier. Justement parce qu’il ne s’agit « que » d’un résultat financier qui ne reflète pas vraiment le potentiel industriel du groupe. Les 4,8 milliards d’euros de pertes affichés dans les comptes ne sont nullement des pertes d’exploitation, mais pour l’essentiel (4,3 milliards) des provisions comptables cf. (encadré). Le résultat brut d’exploitation, lui, reste positif à hauteur de 735 millions d’euros et la trésorerie disponible avoisine 1 milliard d’euros. Certes, avec une telle succession de résultats négatifs au cours des cinq derniers exercices, les capitaux propres de l’entreprise sont désormais négatifs. Mais une telle situation n’est pas rédhibitoire, en particulier si les actionnaires remplissent leur rôle en recapitalisant l’entreprise, c’est-à-dire en réinvestissant des fonds par exemple en souscrivant une augmentation de capital. Tout au plus pénalise-t-elle l’entreprise dans ses possibilités de financement bancaire. Mais Areva dispose déjà d’une ligne de crédit confirmée de 2,1 milliards d’euros pour faire face à ses besoins de financement dans les années à venir.

Autant dire que la situation d’Areva est loin d’être aussi désespérée que certains voudraient le faire croire pour justifier des mesures de démantèlement. Le potentiel industriel du groupe reste intact avec notamment un carnet de commande de près de 47 milliards d’euros soit presque six ans d’activité assurée.

Par ailleurs Areva attend l’arbitrage sur le différend relatif à l’EPR finlandais opposant le consortium Areva Siemens au finlandais TVO. En effet, Areva et Siemens, estimant que les retards pris par la construction de la centrale d’Olkuluoto sont essentiellement dûs à des délais excessifs de certification, réclament 3,5 milliards d’euros à TVO, qui lui même réclame 2,3 milliards d’euros pour faute grave dans l’exécution du chantier.

C’est dire que la dramatisation, même si la situation est préoccupante, à laquelle se livrent certains aujourd’hui vise plus à servir de prétexte à des arrière-pensées moins avouables.

Pour les uns, l’occasion est belle d’enterrer le nucléaire, mettant au compte de la technologie les retards pris sur les constructions de l’EPR en Finlande ou à Flamanville.

La réalité est tout autre.

Des obstacles majeurs ont entravé gravement les premières réalisations de l’EPR. La sous-estimation délibérée des délais et des coûts dès le démarrage des projets, en vue de l’ouverture du capital d’Areva puis d’EDF, ne sont pas les seules raisons.

Le choix politique d’associer Siemens pour construire un nouveau modèle a conduit a complexifier l’architecture et rajouter des interfaces.

Or les premiers EPR sont réalisés après un moratoire de 15 ans qui a conduit à une perte de compétences dans la filière et au-delà. En Finlande, Areva se lance seul alors qu’il n’a pas les compétences d’architecte industriel. Quant à la France, la financiarisation et la désindustrialisation percutent de plein fouet la capacité à gérer les grands chantiers : malfaçons chez le bétonneur, sous-traitance poussée à l’extrême avec des droits au rabais donc des salariés précarisés. Les collectifs de travail sont déstructurés, les informations ne circulent plus, ce qui ne permet pas d’assurer la collaboration et le contrôle du travail réalisé ni d’accumuler les connaissances. Or, les compétences des salariés de la filière doivent être maillées depuis le fabricant d’ensemble de la chaudière (Areva) jusqu’au retour d’expérience de l’exploitant (EDF) en passant par un organisme de recherche (CEA) ainsi que le réseau important de sous-traitants pour la réalisation de ces grands chantiers.

L’État porte une lourde responsabilité, notamment avec son refus de donner une visibilité sur le renouvellement du parc à EDF, l’encouragement à une guerre fratricide entre les acteurs de la filière, et sa politique de captation de dividendes sans tenir compte des besoins. Bien que le chantier chinois pour les EPR de Taishan 1 et 2 ait démarré après Flamanville, il y a fort à parier que la centrale chinoise de nouvelle génération sera la première mise en route, en 2015, dans le respect du calendrier prévu.

Pour le gouvernement Valls, il s’agit surtout de donner le change et de repousser les échéances : d’un côté, il réaffirme une filière « essentielle à l’indépendance énergétique de notre pays, à la réussite de la transition énergétique et à la production d’énergie décarbonée », mais de l’autre, il se défausse de ses responsabilités d’actionnaire au détriment d’EDF, donc du consommateur d’électricité en renvoyant à plus tard une hypothétique recapitalisation « à la hauteur nécessaire ».

La solution envisagée par l’exécutif est d’imposer à EDF de « devenir actionnaire majoritaire de la filiale commune Areva NP, qui rassemble les activités industrielles de construction de réacteurs, d’assemblage de combustible et de services à la base installée » Areva conservant une participation stratégique avec un pacte d’actionnaires.

Cette proposition est-elle une réponse aux difficultés financières d’Areva ? Probablement pas, car malgré le bruit médiatique fait autour du chantier finlandais, le problème de fond réside dans la désorganisation de la filière nucléaire entamée depuis plusieurs années. Il est donc nécessaire de reconstruire les collectifs de travail nécessaires à son excellence. Cela nécessite de donner une vraie stratégie de long terme pour la filière nucléaire dans son ensemble, vision absente du communiqué de l’Élysée.

En fait, la proposition gouvernementale est surtout une réponse aux inquiétudes de l’État-actionnaire lui-même. Réponse qui pourrait conduire à fragiliser EDF s’il devait reprendre à sa charge tout ou partie du traitement des risques liés aux chantiers en cours. Et ce sera autant de moins de passif à recapitaliser pour l’État, qui fera coup double : d’abord en obtenant d’EDF le cash résultant de la vente, ensuite en effaçant les provisions pour pertes passées dans le bilan d’Areva. C’est d’ailleurs autour de cette évaluation que s’est cristallisée la négociation entre P. Varin et J.-B. Levy, bien avant la soi-disant « refondation » de la filière nucléaire. J.-B. Levy a fait une offre à 2 milliards d’euros en exigeant en outre qu’EDF soit garantie contre les risques liés aux chantiers en cours. P. Varin, lui, demande une négociation « équitable » tenant mieux compte de la valorisation actuelle d’Areva NP à environ 2,7 milliards d’euros et un partage des risques liés aux réacteurs en construction.

Mais cette reprise d’Areva NP n’est pas sans soulever des problèmes multiples. à commencer par les finances d’EDF qui pourraient pâtir de cette opération. Déjà endettée à hauteur de 35 millions d’euros, EDF a devant elle un programme d’investissement de rénovation de son parc nucléaire (« Grand Carénage ») de 5 milliards d’euros par an jusqu’en 2025. L’annonce de la prise de contrôle d’Areva NP par EDF a immédiatement été jugée comme « négative » par l’agence de notation Moody’s. Le PDG d’EDF, J.-B. Levy a donc une nouvelle fois profité de l’occasion pour solliciter du gouvernement une augmentation des tarifs de l’électricité de l’ordre de 2,5 % sur 3 ans. EDF pourrait également être tentée de céder une partie de ses actifs, tels ceux de RTE. La situation à terme pourrait justifier une privatisation rampante avec l’entrée de capitaux privés lors du renouvellement du parc nucléaire. Mais quel que soit le chiffre sur lequel les deux protagonistes pourraient s’entendre, on serait très loin des 5 à 7 milliards d’euros pour recapitaliser Areva au niveau nécessaire, selon P. Varin lui-même.

Par ailleurs, cette reprise pourrait soulever des problèmes commerciaux, voire juridiques. En effet, l’activité maintenance, qui fait partie d’Areva NP, concerne les 58 réacteurs en France mais également 150 réacteurs dans le monde. à quel titre EDF assurerait-il la maintenance chez ses propres concurrents ? Il n’est pas sûr que ceux-ci acceptent de prolonger des contrats qui feraient la part belle à leur concurrent. Areva NP pourrait donc voir son portefeuille de contrats de maintenance sérieusement menacé, à moins de céder une partie de ce portefeuille à d’autres opérateurs. Et les candidats ne manquent pas, d’autant plus que cette activité est extrêmement lucrative. Engie, ex-GDFSuez, s’est déjà déclaré intéressé. Veolia, le japonais MHI, les Chinois China General Nuclear Power Corporation (CGN) et China National Nuclear Corporation (CNNC) dont le premier construit déjà la centrale de Taishan.

Car c’est bien là le risque principal de cette stratégie gouvernementale de dépeçage : elle ouvre la porte à un démantèlement complet, à une vente par appartement de la filière nucléaire française. Déjà EDF a annoncé qu’il ne reprendrait pas seul Areva NP, mais en partenariat avec d’autres acteurs, probablement chinois.

Enfin, cette proposition gouvernementale laisse en suspens la situation des autres activités d’Areva liées aux matières nucléaires que sont les mines, l’enrichissement et le retraitement. Ces activités connaissent aujourd’hui des difficultés structurelles, liées à la crise, à la chute de la demande de combustible, et à la chute des cours de l’uranium. Si le chiffre d’affaire global d’Areva est en recul de près de 7 %, ce sont essentiellement les branches « mines » et « aval » qui sont, relativement, les plus touchées. Ces difficultés ont un impact non seulement en termes de résultat, mais aussi en termes de bilan. Conformément aux normes IFRS, la valeur des concessions minières est évaluée à leur valeur de marché. La chute des cours de l’uranium a donc conduit Areva à déprécier constamment ses actifs miniers aux cours des derniers exercices, à hauteur de 300 millions d’euros pour le seul exercice 2014.

Pour ces autres activités, qui resteraient du ressort du groupe Areva, le gouvernement n’est là encore pas pressé de mettre la main à la poche et préfère attendre que le plan de la direction ait porté ses fruits. Car la direction d’Areva a annoncé un plan de plus d’un milliard de cessions d’actifs.

Ce plan toucherait les mines, pour une part minoritaire selon Areva afin de garder le contrôle. Certains évoquent tout de même une part de 49 %. Il pourrait concerner la filiale logistique, 1 245 salariés – 280 millions de CA qui pourrait rapporter entre 200 à 300 millions et celle du démantèlement des sites nucléaires, 1 600 salariés – 180 millions de CA qui pourrait rapporter 500 millions. Veolia s’est déjà déclaré très intéressé. Là encore, pour l’État-actionnaire, ce sera autant de moins à recapitaliser, même si c’est au prix de la perte de maîtrise par la nation de ses ressources.

Enfin, pour la direction d’Areva, la publication des mauvais résultats financiers de 2014 est l’occasion de renforcer son plan de « performance ». Comme à l’accoutumée, ce sont ceux qui ne sont pour rien dans la situation financière de l’entreprise qui vont être appelés à payer le plus lourd tribu. L’objectif de ce plan est de réduire la base de coût d’1 milliard d’euros d’ici à 2017 et il repose sur trois mesures essentielles :

‒ Une « sélectivité » (lisez « réduction » ) des investissements qui seront ramenés à moins de 3 milliards d’euros en cumul sur la période 2015-2017 alors que sur la période 2007-2012, le groupe avait investi plus de 13,5 milliards d’euros.

‒ Une rationalisation des achats avec un objectif de réduction de 340 millions d’euros, dont on imagine sans peine l’impact négatif qu›il aura sur les sous-traitants.

‒ Un plan de réduction des effectifs prévoyant 5 000 à 6 000 suppressions d’emplois dans le monde (14 % des effectifs) dont 3 000 à 4 000 en France. Areva compte 44 000 salariés dont 28 500 en France. Plans de cessations anticipées d’activité pour les salariés de 59 ans et plus soit environ 1 600 personnes en France. à La Hague, par exemple, il s’agit de supprimer 500 postes en cinq ans sur 3 100 salariés. Le plan envisage également la suppression de 1 500 postes en Allemagne, des départs volontaires et licenciements aux EU. Areva annonce vouloir revoir les accords sociaux et la rémunération globale des salariés. Le temps de travail serait également renégocié.

Réduction de l’investissement, sacrifice des compétences et de l’expérience des salariés sur l’autel de la rentabilité, mise en danger des sous-traitants qui seront les premiers touchés, tous les ingrédients sont réunis pour aggraver un peu plus la perte de savoir-faire de la filière nucléaire française, alors que chacun s’accorde à reconnaître que c’est cette perte de savoir-faire qui est déjà à l’origine des déboires d’Areva dans ses chantiers mal maîtrisés. Ce plan ne répond pas aux exigences de la situation du nucléaire en France. Après l’accident de Fukushima, avec la crise économique et en présence d’une concurrence accrue de la part de la Russie, de la Corée et de la Chine, l’industrie nucléaire mondiale – et donc française – connaît une période de difficultés qui nécessite des mesures appropriées. Mais ces mesures ne peuvent pas être seulement décidées dans un cercle fermé et opaque. Elles doivent faire l’objet d’un large débat public associant toutes les parties prenantes et notamment les salariés qui ne peuvent pas être réduits au statut de variable d’ajustement.

En particulier, il faut redonner une cohérence à l’ensemble de la filière, cohérence qui avait été mise à mal au cours des mandats d’A. Lauvergeon et d’H. Proglio. On peut par exemple s’interroger sur le bien-fondé de la décision d’Areva de se passer d’EDF dans le chantier d’Olkiluoto. On peut aussi s’interroger sur la logique qui a conduit EDF à confier les deux tiers de son approvisionnement en combustible au russe Rosatom contre seulement un tiers à Areva.

Cette cohérence passe par le maintien de l’intégrité d’Areva, entreprise publique, la confirmation du rôle d’architecte-ensemblier d’EDF et un rôle accru de l’État pour orienter la politique énergétique nationale, favoriser les partenariats stratégiques entre Areva et EDF en s’assurant que les objectifs d’intérêt général l’emportent sur les intérêts commerciaux de chacune des entreprises. N’oublions pas dans ce schéma le rôle du CEA et d’Alstom, dont le gouvernement a permis la vente à Général Electric. Ce besoin de cohérence souligne l’urgence d’un véritable pôle public de l’énergie tel que le préconise le Parti communiste français et le Front de gauche.

Si la cohérence est une condition à l’efficacité de la filière nucléaire française, le maintien du savoir-faire en est une autre. La plupart des experts s’accordent à reconnaître que les déboires des chantiers européens en cours résultent en grande partie d’une insuffisance de savoir-faire d’Areva dans la conduite des grands chantiers et d’une perte de savoir faire d’EDF dans ce même domaine. Rappelons qu’avant le démarrage du chantier de Flamanville, la dernière centrale construite par EDF à Civaux avait été achevée en 1997. Au cours des dix années qui ont suivi, le savoir-faire d’EDF s’est délité par le seul phénomène des départs en inactivité. C’est dire qu’en prenant des dispositions de départs anticipés à la retraite, Areva ne ferait que contribuer à une perte de savoir-faire de l’ensemble de la filière nucléaire française. Il appartient à l’État de veiller à ce qu’Areva ne prenne pas des mesures irréversibles à long terme, au nom de difficultés financières passagères sans commune mesure avec l’intérêt de la nation et son indépendance énergétique. De plus, les facteurs sociaux organisationnels et humains sont au centre de la reconstruction d’une filière industrielle du nucléaire d’excellence. Cela concerne l’organisation et les conditions de travail, et en particulier les salariés de la sous-traitance qui doivent obtenir le même niveau de garanties collectives que les salariés statutaires du secteur.

Parmi les mesures à prendre, l’État-actionnaire a un rôle essentiel à jouer pour recapitaliser l’entreprise. Lorsqu’Areva était bénéficiaire, de 2001 à 2010, elle a versé plus de 3 milliards d’euros de dividendes à l’État, directement ou indirectement. Il n’y aurait donc rien que de plus normal à ce que l’État consacre quelques milliards au redressement d’une entreprise essentielle pour l’indépendance nationale. Par ailleurs, la CDC et la BPI peuvent participer au refinancement soit en prenant des participations, soit en tant que prêteurs. Le secteur bancaire doit être mis à contribution.

Même si elle émane du plus haut niveau de l’État, la proposition du gouvernement n’en reste pas moins une proposition précipitée, sans légitimité démocratique, qui ne saurait être adoptée sans débat approfondi avec toutes les parties prenantes, dont les élus de la nation. n 

 

Des provisions pour l’hiver

Dans les années 1990, Emmanuel Hau, alors directeur financier d’EDF, se plaisait à dire qu’il pouvait établir le résultat d’EDF à plus ou moins 2 milliards, tant les charges calculées, provisions et autres réserves étaient importantes. Tel est un peu le cas d’Areva aujourd’hui.

Le résultat de l’exercice 2014 se solde par une perte de 4,8 milliards d’euros. Pour autant, cela ne signifie pas  qu’Areva  a dépensé 4,8 milliards d'euros de plus que le chiffre d’affaire qu’elle a réalisé. Ce chiffre est principalement la résultante  de trois composantes, le résultat opérationnel, qui traduit l’efficacité de l’exploitation, le résultat financier qui est grosso-modo  la différence entre les charges d’emprunt et les produits de placement et les impôts payés par l’entreprise.

Le résultat opérationnel retraité du groupe s’élève à -2 624 millions d’euros en 2014. Pourtant, l’activité courante d’Areva a bel et bien dégagé un excédent. En 2014, cet excédent (EBE) s’est élevé à 711 millions d'euros. Mais cet excédent s’est vu amputé de dotations aux provisions, c’est-à-dire de charges fictives supposées représenter  une charge réelle probable mais non encore avérée.

Ainsi, en 2014, il comprend notamment :

– des provisions pour pertes de valeur d’actifs des activités nucléaires dans les quatre Business Groups (1 460 millions d’euros). Areva évalue la valeur de ses actifs de production, notamment les actifs miniers, sur la base soit de leur valeur de marché («fair-value ») soit des flux financiers que leur exploitation rapporterait. On voit immédiatement que la valeur estimée de ces actifs est très dépendante de la valeur de marché des matières nucléaires, que ce soit le minerai ou l’uranium enrichi. Or ce prix de marché est aujourd’hui au plus bas, ce qui explique l’ampleur de la provision. Mais rien n’exclut que dans les années à venir ce prix évolue à la hausse et dans ce cas, Areva devrait « reprendre » ces provisions, c’est à dire enregistrer des produits tout aussi fictifs que les charges comptabilisées en 2014 ;

– des pertes additionnelles et provisions pour pertes à terminaison sur trois grands projets nucléaires de la branche  Réacteurs et Services (1 097 millions d’euros, dont 720 millions d’euros au titre du projet EPR OL3) . Là encore, il ne s’agit que de charges fictives dont une grande partie dépend grandement de  l’arbitrage en cours pour résoudre  le différend relatif à l’EPR finlandais opposant  le consortium Areva Siemens au finlandais TVO. En effet, Areva et Siemens, estimant que les retards pris par la construction de la centrale d’Olkuluoto sont essentiellement dus  à des délais excessifs de certification, réclament 3,5 milliards d’euros à TVO. L’arbitrage devrait être rendu, au moins partiellement en fin 2015.

 

M.-C. C. et A. T.

 

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