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Giorgos Katrougalos : « Le non au référendum a été un vote de classe »

Membre de Syriza, le ministre grec de la Réforme administrative est formel : ce sont les plus modestes qui ont relevé la tête et ouvert 
une alternative en Europe, en rejetant massivement l’austérité imposée.

La victoire du non au référendum, dimanche, a été écrasante. Comment la vivez-vous ?

Giorgos Katrougalos Je ne m’attendais pas à un tel triomphe. J’espérais que le non l’emporte, mais cet écart est vraiment exceptionnel et montre que notre peuple est décidé à combattre une politique qui n’était pas viable : l’austérité, qui a été une catastrophe pour notre pays durant ces cinq dernières années.

Comment faut-il le comprendre ? Comme un ras-le-bol ? Une révolution ?

Giorgos Katrougalos Ce n’est pas une révolution, mais on peut facilement voir qu’il s’est agi d’un vote de classe. Le non est arrivé en tête dans toutes les régions grecques. À ma connaissance, il n’y a pas de précédent dans l’histoire politique grecque. Mais il y a une différence très claire entre les villes et banlieues ouvrières. Parmi les classes les plus aisées le oui l’emportait largement. Mais dans les banlieues ouvrières, la majorité pour le non était écrasante, parce que les victimes de la crise ce sont les plus pauvres et les classes moyennes. A contrario, la crise a enrichi certains de ceux qui étaient déjà les plus riches.

Que va changer ce vote dans le bras de fer avec les créanciers ?

Giorgos Katrougalos Le résultat est extrêmement important. Certains en Europe voulaient bouleverser le gouvernement grec par crainte d’une contagion politique en Europe, dans d’autres pays où se tiennent des élections cette année. Ils ont installé un vrai climat de terreur psychologique. La décision de la Banque centrale européenne de ne pas augmenter les liquidités de notre banque visait à déstabiliser et, pourquoi pas, renverser notre gouvernement. Ce coup d’État a échoué, face au peuple. Cela renforce notre position, car ce n’est pratiquement plus le gouvernement Tsipras qui négocie avec l’Europe, mais tout le peuple grec !

En Europe, les réactions sont mitigées…

Giorgos Katrougalos Jusqu’à maintenant les réactions sont très dures. Mais c’est l’intérêt de tous de trouver un compromis.

Avez-vous eu conscience de la large désinformation opérée dans les autres pays européens durant la campagne (sondages bidonnés, chiffres de manifestations truqués…) ?

Giorgos Katrougalos Il y a eu une vraie guerre psychologique, ce que je décrivais comme un coup d’État, qui ne se fait pas avec des tanks, mais à coups de fermetures de banques, avec la désinformation… C’est pour cela que la résistance du peuple grec est si spectaculaire.

Avez-vous le sentiment d’avoir ouvert une voie nouvelle pour d’autres peuples européens ?

Giorgos Katrougalos Ce qui s’est passé en Grèce, c’est le résultat d’une opposition entre deux visions différentes de l’Europe : d’un côté une Europe néolibérale, d’austérité ; de l’autre, une Europe sociale, une Europe des droits et des libertés. Il est clair que la question qui est posée ne concerne pas seulement les Grecs. Ce n’est pas pour rien que tous les médias européens et au-delà sont présents en ce moment à Athènes. C’est une bataille pour l’avenir de l’Europe qui se joue ici, en Grèce. Il va y avoir des élections en Espagne, en Irlande, au Portugal. Il est clair que les forces qui se battent contre cette orthodoxie néolibérale sauront s’appuyer sur le choix du peuple grec.

Comment faut-il comprendre la démission surprise du ministre de l’Économie, Yanis Varoufakis ?

Giorgos Katrougalos C’est un magnifique geste d’abnégation de la part de Yanis Varoufakis. Il a apporté une très grande contribution. J’ai une grande admiration personnelle pour ce geste. Il ne veut laisser aucun prétexte à nos partenaires pour dire que nous ne voudrions pas sincèrement de compromis.

Espérez-vous quelque chose de la France et de son gouvernement dans les prochains jours ?

Giorgos Katrougalos Il est dans l’intérêt de la France de ne pas s’identifier aux politiques d’austérité. Jusqu’ici, François Hollande s’est montré très tiède. J’espère qu’à l’avenir il se montrera plus actif.

 

Article paru dans le Journal l'Humanité du 8 juillet 2015

 

 

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