Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Où en est le coût du travail ?

La chronique économique de Pierre Ivorra. "De fin 2013 à fin 2014 le CAC 40 a progressé de 20,4%. Cherchez où est l'erreur."

 

Nos Tontons flingueurs du coût du travail français par comparaison avec celui de l’Allemagne sont étrangement silencieux depuis quelque temps. Que n’a-t-on entendu depuis 2011 ! Cette année-là, le Medef et l’équipe de faux-monnayeurs de la pensée réunis autour de Nicolas Sarkozy avaient engagé, avec le concours de Rexecode, un cabinet d’études patronal, une grande campagne médiatique pour persuader les Français qu’ils coûtaient trop cher à leur patron. À les croire, tout le mal viendrait de là : les pertes de marché, la montée du chômage, les délocalisations… et il fallait y porter remède au plus vite. L’ancien président de la République en avait donc rêvé mais c’est François Hollande qui l’a fait. Il nous a sorti du chapeau le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, énorme ristourne de près de 60 milliards d’euros accordée au patronat et destinée à baisser le coût du travail.

Que peut-on dire aujourd’hui sur le sujet ? Selon les données de l’organisme statistique européen Eurostat, on constate depuis 2012 une progression du coût horaire du travail bien plus faible en France. Dans l’industrie il est légèrement inférieur à celui de l’Allemagne : 37 euros de l’heure de ce côté-ci du Rhin contre 37,1 de l’autre côté. Si l’on prend en compte l’effet de la productivité, l’écart se creuse. Les coûts horaires apparents français seraient supérieurs dans la construction et les services, mais cela tient à la précarité instituée dans ces secteurs où les patrons allemands font massivement appel à une main-d’œuvre féminine et d’Europe de l’Est sous-payée et précarisée.

Il est bon de se rappeler qu’en Allemagne près d’une femme sur deux travaille à temps partiel, que 20,3 % de la population est dans une situation de risque de pauvreté et d’exclusion sociale, contre 18,1 % en France, que le taux de personnes ayant un emploi et disposant d’un revenu situé en dessous du seuil de pauvreté est de 8,6 % chez nos voisins (9,8 % chez les femmes) et de 7,9 % chez nous (7,3 % chez les femmes).

Cette évolution du coût du travail en France a-t-elle permis de faire reculer le nombre de sans-emploi ? En un an, de mars 2014 à mars 2015, il a progressé de 143 000 et de 5 %. Les exportations françaises ont diminué en 2013 et progressé de seulement 0,1 % en 2014. Le taux de marge des sociétés non financières, le profit brut rapporté à la valeur ajoutée, lui, s’est redressé, passant de 35,7 à 36,1 % en un an, de fin 2013 à fin 2014. L’indice majeur de la Bourse de Paris, le CAC 40, celui où sont cotés les grands groupes tricolores, a, de son côté, progressé de 20,4 %. Cherchez où est l’erreur.

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