Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Le CAC 40, un vrai « bouffe-tout »

La chronique économique de Pierre Ivorra Le coût accru du capital étouffe la croissance et la pervertit

Depuis sa création au 1er janvier 1988, l’indice vedette de la Bourse de Paris, le CAC 40, qui mesure l’évolution de la valeur des actions des 40 groupes les plus importants implantés en France, est passé de 1 000 points à près de 5 000. Il a été multiplié par cinq. Hausse des prix déduite, il a été multiplié par 3,27. De 1988 à 2013 (les données 2014 ne sont pas encore connues), le PIB par habitant, hors inflation, n’a, lui, été multiplié que par 1,34. C’est dire l’importance du gonflement spéculatif.

L’impact de cette inflation financière sur la croissance, l’emploi, les conditions de vie et de travail de la population est désastreux. En effet, car ce qui intéresse les investisseurs financiers dans leurs activités boursières, c’est la rentabilité de leurs investissements. « Si j’achète une action 100 euros, combien va-t-elle me rapporter », se demandent-ils. Si c’est par exemple 10 euros de rémunération en dividendes, cela donne une rentabilité de 10 %. Mais si l’action d’une valeur de 100 euros est portée à 110 euros, parce qu’elle est très demandée, et qu’elle ne rapporte toujours que 10 euros en dividendes, sa rentabilité ne sera plus que de 9,09 %.

Par crainte d’une fuite des actionnaires vers des horizons plus profitables, la direction de l’entreprise concernée va tout faire pour les conserver et, particulièrement dans des périodes de croissance économique poussive, va tenter de relever la rentabilité de son exploitation en écrasant ses coûts, notamment ceux dits du travail, en réduisant l’emploi, en aggravant les conditions de travail, en faisant pression sur les salaires. Elle va s’efforcer d’augmenter le résultat financier de l’entreprise afin de verser à ses actionnaires un dividende d’au moins 11 euros et ainsi préserver le taux de rentabilité de 10 %. On devine le cercle vicieux ainsi dessiné : le « coup d’éclat » des dirigeants de l’entreprise va porter le titre à 115 euros, ce qui va exercer une nouvelle pression sur les choix de gestion de l’entreprise au détriment des salariés.

Revenons au CAC 40. La montée de cet indice est le signe d’une forte hausse de la valeur des titres des groupes cotés, une augmentation qui à la fois induit une forte progression des dividendes versés et qui est également portée par elle. Si l’on élargit notre analyse à l’ensemble des sociétés non financières françaises, on peut constater que leurs versements de dividendes sont passés de 6 % de leur valeur ajoutée en 1988 à 18,8 % en 2013. Ce coût accru du capital étouffe la croissance et la pervertit. On ne s’étonnera pas que le taux de chômage soit passé, durant cette période, de 8,6 à 9,7 %.

 

Mercredi, 13 Mai, 2015
L'Humanité

 

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