Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil
 
 
 
 

La Cour de Justice des Communautés européennes : instrument du respect des « libertés de marché »

La cellul e Dulci e September du Pcf au Ministère de l’Econo mie, des Finances et de l’Industrie, nous a fait parvenir un courrier sur l’importance de la Cour de Justice des Communau tés Européennes dans le dispositif institutionne l européen, nous la publions.

Un point, nous semb le-t-il, n’a pas été à ce jour mis en évidence et sou ligné. Il s’agit du rôle joué par la Cour de Just ice des Communautés eur opéennes (CJCE) siégeant à Luxem bourg et dont les décisions sont sans appel, aucune voie de recours n’étant prévue. Ces décisions inter venant dans les domaines les plus divers sont toutes , faut-il le préciser, ins pirées du libéra lisme le plus débridé.

La Cour de Cassat ion et le Conse il d’Etat, dans leurs domaines res pectifs, s’inclinent quant à eux imméd iatement , au nom de la suprémat ie des tra ités internat ionau x sur le droit interne . Tous deux rivalisent même de ser vilité jus qu’à devancer toute inter vention ultér ieur e de la Cour eur opéenne en lui adressant des quest ions préjudicielles.

Par delà l’application des directives, la Cour de Just ice empiète de plus en plus sur notr e législation nationale et la met à mal. Ce que l’on observe dans un domaine qui est plus par ticulièrement le nôtr e, celui de la fisca lité, est très révélateur de cette emprise croissante .

Le Traité de la Communauté eur opéenne n’offre pas, en ce qui concerne la fiscalité directe , une base juridique telle qu’on la trouve dans l’ar ticle 43, qui a favorisé un processus d’harmon isation très poussé de la fisca lité indirecte (TVA et droit d’ass ise notamment) . Pour tant , malgré cette absence de fondement juridique, la Cour de Justice ne cesse de s’ingérer dans le domaine des impôts directs .

Le rappr ochement des législations des états membr es en la matière n’a été le fait que de deux directives, relatives aux fusions de sociétés et au régime applicable aux sociétés mères et filiales, ainsi que de quelques textes ultér ieurs por tant sur des points bien précis.

Mais, comme l’écr it Casta gnède, professeur à Paris I Sorbonne dans le numér o 80 de décem bre 2002 de la Revue frança ise des finances publiques : « des restr ictions inattendues au libre exercice des choix fiscau x en matière de fisca lité directe se sont toute fois développées à l’initiative de la Cour de Just ice des Communautés eur opéennes ( sou ligné par nous) qui enten d faire assur er en tous domaines, y com pris celui de la fisca lité directe , le respect des grands principes du droit communauta ire (…) libre circulation des tra vailleurs et liber té d’éta blissement , libre circulation des marchandises, des personnes , des ser vices et des capitaux ».

La manifestat ion la plus récente , par ticulièr ement significat ive de cette intrus ion et de la ser vilité du Conse il d’Etat , est donné par l’arrêt CJCE du 11 mars 2004, en réponse à une quest ion préjudicielle posée à la Cour par ce conse il.

Cet arrêt concerne l’ar ticle 167 bis du CGI issu de l’ar ticle 24 de la loi des finances pour 1999, dont le but affiché est de lutter contr e l’évasion fiscale. A cet effet, l’ar ticle en cause soumetta it les contr ibuables qui, après avoir rés idé en France pendant un cer tain nom bre d’années , trans féra ient leur domicile fiscal à l’étran ger, à une impos ition calculée d’après le montant des « plus values latentes , constatées lors de leur départ, sur les droits sociaux com pris dans une par ticipation substant ielle au capita l d’une soc iété soum ise à l’impôt sur les société s». Répondant positivement à la question pr éjudicielle qui lui était posée , la CJCE a déclaré que l’ar ticle 167 bis du CGI éta it bien suscept ible d’entra ver l a li b er té d’éta blissement ,

« l’ar ticle 52 du traité s’opposant à ce qu’un état membr e inst itue à des fins pr évent ives d’un r isque d’évas ion fisca le, un méca nisme d’impos ition des plus values latentes , tel que prévu par l’ar ticle 167 bis ». Précisons que cet arrêt vient s’ajouter à des décisions ayant récemment jugé plusieurs autr es ar ticles du CGI, dest inés eux auss i à faire barra ge à l’évasion fiscale, comme étant incom patibles avec des décisions fondamenta les du droit communauta ire (liber té d’éta blissement , libre circulation des ser vices , libre circulation des capitaux).

Au vu de ce simple exemple, il nous paraît donc impor tant de mettr e en lumière le rôle joué par cette inst itut ion et l’appui com plaisant qu’elle obtient des hautes juridictions nationales. ■

1. Des dispositions semblables existent dans différents Etats membres.