EDITORIAL
Mener, sur tous les fronts, la bataille de l’emploi fait partie de nos responsabilités premières. Le fait que ce problème reste la préoccupation principale des Français suffirait à le justifier. Mais notre démarche va bien au-delà.
Parce qu’elle est intimement liée à celle du travail, la question de l’emploi est au cœur des contradictions de la société ; au cœur de l’affrontement, toujours aussi vivace même si il prend aujourd’hui des formes plus sophistiquées, entre le capital et le travail.
C’est tellement vrai que nous retrouvons, si j’ose dire, l’emploi à chaque « coin de rue ».
Voulons-nous parler de l’avenir des systèmes de retraites et de leur financement ? L’emploi est le cœur du sujet. Voulons-nous aborder l’avenir de la sécurité sociale, de l’assurance maladie ou plus généralement des systèmes de protection sociale ? L’emploi en est la clé.
Débattons-nous de la montée de la pauvreté ? Du désespoir vécu par un trop grand nombre de jeunes dans les cités populaires face à un avenir qu’ils perçoivent comme bouché ? Nous retrouvons encore l’emploi et la nécessité absolue d’éradiquer le chômage.
Mais ce n’est pas seulement vrai dans le domaine social. Le champ politique est profondément imprégné de cette réalité.
C’est bien sur leur incapacité à s’attaquer structurellement au chômage de masse que les gouvernements sont désormais sanctionnés à chaque consultation électorale en France et en Europe.
C’est bien sur leur bienveillance vis-à-vis des politiques patronales et sur leur acceptation de la loi des marchés financiers que leur crédibilité et celle de la politique en général se sont brisées depuis vingt ans laissant le champ libre aux aventuriers populistes de la pire espèce.
L’emploi est bien l’un des terrains stratégiques du remodelage libéral de la société qui constitue le projet commun du gouvernement et des forces du capital.
Nous pourrions multiplier les exemples à l’envi. Ils démontrent une idée-force : la bataille que les communistes doivent conduire pour l’emploi ne se limite pas à un soutien aux luttes revendicatives en tout état de cause totalement légitimes. Elle se situe au cœur de notre stratégie politique parce que son contenu et les objectifs que nous portons relèvent d’un choix de société alternatif. Nous avons décidé de faire de la démarche de Sécurité d’emploi ou de formation l’axe structurant de notre action sur l’emploi. La période électorale que nous venons de vivre, et notamment celle des élections régionales, nous a permis de mettre en avant ce thème avec une force qui a commencé à être remarquée.
C’est évidemment dans cette voie qu’il faut poursuivre et accentuer notre effort.
Mais en insistant bien sur le fait que la Sécurité d’emploi ou de formation ne relève pas de l’incantation. Elle n’est pas une formule qu’il suffirait de répéter pour se croire quitte avec le problème, ni une mesure dans notre futur programme qui viendrait s’ajouter à une bataille pour l’emploi par ailleurs traditionnelle.
Elle est une vision globale et profondément novatrice pour aborder l’ensemble des questions de l’emploi. Sans vouloir tenter, dans cet éditorial, un développement théorique, il me semble utile de rappeler que pour le capital, le travail (ou plus exactement la force de travail) est marchandisé comme instrument générateur de profit. Le souci de maximiser ce dernier dans les conditions actuelles de la révolution technologique et de la financiarisation mondialisée conduit à la mise en concurrence de la force de travail à travers la planète ; d’où le processus de précarisation en cours depuis des décennies, d’où les attaques visant à déstructurer le droit du travail (et, de ce point de vue, il existe une grande cohérence entre le plan Borloo et son contrat d’activité, les propositions du rapport de Virville et les attaques de Sarkozy sur la RTT...) d’où les licenciements de rentabilité, les délocalisations, ou le chantage aux délocalisations pratiqué par Siemens en Allemagne ou Bosch en France. (Ce numéro d’Économie et Politique permet de faire le point sur ces différentes questions). Pour nous à l’inverse, le travail doit devenir le moyen de créer les richesses au service du progrès social et humain. Il est donc précieux et l’emploi doit être sécurisé jusque dans ses évolutions. La formation doit être intégrée comme outil majeur de cette sécurisation et de l’élévation nécessaire des qualifications. Elle doit être le vecteur d’une conception civilisée et choisie de la mobilité, indispensable à l’ère de la révolution informationnelle. C’est donc un processus de dépassement du marché du travail que nous voulons enclencher en même temps qu’un processus d’éradication du chômage.
Comme on le voit, cette conception globale, cohérente, réellement transformatrice, permet de décliner et de concrétiser notre démarche sur de multiples dimensions:
Dès maintenant elle nous conduit à quelques objectifs concrets :
Avec ces différents objectifs, nous avons matière à concrétiser ce que signifie au quotidien, dans la vie, dans les luttes, un projet alternatif, un projet de transformation effective de la société.