Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Le Fonds régional : un outil de sécurisation et de promotion de l’emploi et des qualifications (1)

La mise en plac e des Fonds régionaux pour la promotion de l'emploi et de la formation est maintenant à l'ordre du jour des conseils régionaux (2).

Ils pourraient être dotés, pour commencer, grâce à l'augm entation et au redéploiement, par chaqu e conseil régional nouvellement élu, d'une partie des sommes affectées dans son budget au développement et à l'action économiqu es.

Le Fonds régional, disposant de moyens financ iers et donnant des pouvoirs aux salariés et aux citoyens doit peser sur les décisions d’invest issement des

entr eprises, des PME comme des grands groupes, à tra vers leur mode de financement .

Cette inst itut ion renforcera it un grand mou vement national qui inter viendrait à tous les stades des décisions :

  • recensement des besoins d’emplois et de format ion dans les bass ins d’emplois ou les régions,

  • saisine des organes de direction des Fonds régionau x,

  • par ticipation des représentants des salariés et des citoyens à la décision de souten ir ou non un projet,

  • contrô le de l’utilisat ion des fonds.

Un Fonds régional pour quoi faire ?

Le but des Fonds régionau x sera it d’inciter les entr eprises et leurs banques à financer — par des prêts à moyen et long terme — des invest issements développ ant l’emploi stab le, les qualifications et la valeur ajoutée avec :

La bon ification d’intérêt (3) : Lors qu’une entr eprise empruntera it à une banque l’argent nécessa ire au finance ment d’un investissement (ac hat de bâtiments , de mach ines, de logiciels…), le Fonds régional pourra it décider de lui attr ibuer une sub vention ser vant à rédu ire le taux des intérêts qu’elle aura it à verser à la banque, mais à une con dition : que l’investissement réponde à des critères précis d’efficacité sociale et économ ique (créat ions d’emplois, mises en format ion de salariés, augmentat ion de la valeur ajoutée dispon ible pour les salariés et la population, économ ies de capital matér iel et financ ier) . La réduct ion des intérêts pourra it êtr e d’autant plus for te que l’invest issement développerait davanta ge l’emploi stab le, les qualificat ions et la valeur ajoutée .

La garantie d’emprunts, qui est par ticulièrement appr opriée au cas des relations entr e banques et PME manquant de « surface financ ière ».

Ainsi, un investissement imposs ible à financer au taux du mar ché pourra it devenir financ ièrement équilibr é si le montant des intérêts est rédu it. Auss i les luttes sociales pourra ient-elles s’app uyer sur le caractèr e incitat if des fonds publics, mob ilisés par les Fonds régionau x, pour imposer des choix d’invest issements obéissant à d’autr es critèr es que ceux de la renta bilité capitaliste (4).

L’avanta ge de techn iques telles que les bonifications d’intérêt et des garant ies d’emprunt est :

  • d’agir sur des montants élevés de financements avec un montant modeste de sub ventions (5).

  • de ser vir de cata lyseur à l’octr oi d’autr es prêts par d’autr es banques (6).

  • d’avoir, dans des con ditions d’utilisat ion précises, une efficacité de l’aide publique bien plus grande que les autr es aides dites pour l’emploi (7). Pour cela, il faut que les financements soient bien orientés en fonct ion de critèr es d’efficacité sociale et économ ique rigour eux.                                                                                                                                                                              

Démocratiser les pouvoirs de saisir le Fonds, de décider et de contrôler

Un droit de saisir le Fonds largement ouvert :

Les syndicats , les comités d’entr eprises, les assoc iations de chômeurs et de lutte contr e l’exclusion, les élus locau x et nationau x aura ient le pouvoir de saisir les organes de direction des Fonds régionau x pour leur deman der de souten ir des projets contr ibuant au développ ement de l’emploi et de la format ion.

Dans un premier temps , on pourra it inscr ire cette procé dure dans le fonct ionnement de dispos itifs existants (PLIE, législation sur les licenc iements , voire CODEF).

Ce droit de saisine pourra it êtr e élargi à un objectif de lutte contr e la précar ité de la jeunesse , à par tir de conse ils d’aler te et d’inter vention représentant les jeunes et les inst itut ions concernées .

Un fonctionne ment démocratique :

le pilotage du Fonds : L’organisme directeur des Fonds (leur conse il d’administrat ion) devrait êtr e ouver t à tous les acteurs sociaux suscept ibles d’êtr e concernés : syndicats , assoc iations de chômeurs , agences de développ ement , dépar tementa les ou régionales, et aux élus terr itor iaux eux-mêmes , ainsi que les acteurs économ iques et les banques.

Le contrôle du Fonds : Les représentants de la société aura ient le pouvoir de suivre et de contrô ler la réalisation des objectifs d’emploi, de format ion et de sécur isation (8). Ces contrô les, à échéances régulières, pourra ient donner lieu à des sanct ions telles que le remboursement des aides. À l’inverse , des résu ltats supér ieurs aux objectifs pourraient ouvrir droit à un renforcement des aides. On s’inscr it donc dans la cont inuité de la bata ille pour le contrô le des aides publiques aux entr eprises.

De la « proximité » à la dimension nationale et européenne

La force des Fonds régionau x ainsi conçus , dans le cadre d’un mou vement national, est de pouvoir s’ancr er dans d es luttes et d es rassemb lements sur d es o bject ifs précis (9).

Cependant, por tés par une logique commune de contes tation des critères de financement capitalistes , les différents Fonds régionau x pourra ient const ituer la base pour const ituer un Fonds national décentra lisé (10).

Au niveau eur opéen, une forme par ticulièrement efficace d’inter vention sur la politique de cré dit des banques cons istera it, pour la Banque centra le eur opéenne , à pratiquer une sélectivité dans les sout iens qu’elle app or te aux cré dits distr ibués par les banques (11).

L’act ion pour la const itut ion de Fonds régionau x, déjà présente dans le débat public (12), peut donner beaucou p de cré dibilité politique à un mou vement nat ional pour sécur iser l’emploi et la format ion.

 

  1. Cet article synthétise et complète l’intervention de D. Durand à la conférence nationale du PCF du 7 février 2004.

  2. Voir article de Yves Dimicoli « Des fonds régionaux pour l’emploi et la formation ». L’Humanité du 19 février 2004.

  3. Voir la simulation présentée dans le dossier.

  4. Puisqu’elle soutient l’investissement d’autant plus que celui-ci crée des emplois, l’action du Fonds pèserait à la fois sur l’utilisation des profits par le patronat et sur celle des crédits bancaires : en faveur des investissements réels et même en faveur de dépenses patronales accrues pour l’emploi, les salaires et les qualifications. Étant liés à des investissements, les emplois ainsi créés peuvent être durables. Ils le seront d’autant plus que les investissements sélectionnés contribueront à créer des emplois de qualité et à renforcer l’efficacité de l’appareil productif et le développement maîtrisé des territoires.

  5. On subventionne les intérêts, qui ne représentent eux-mêmes qu’un pourcentage du montant de l’emprunt. De la même façon, les garanties d’emprunts ne conduisent à des dépenses publiques que dans un petit nombre de cas, les critères de sélection des investissements financés faisant que sauf exception l’emprunteur est en état de rembourser lui-même les crédits qu’il a reçus. Là encore, les fonds publics effectivement dépensés ne représen- tent qu’un petit pourcentage du total des investissements garantis.

  6. Une banque qui hésiterait à financer un projet peut décider de le soutenir si elle voit que d’autres établissements ont choisi, à l’incitation du Fonds régional, de miser sur sa réalisation.

  7. L’expérience a prouvé l’efficacité de ces techniques : par exemple, les prêts bonifiés pour les PME mis en place par la Commission européenne et la Banque européenne d’Investissements après la précédente récession, celle de 1993, se sont révélé 60 fois plus efficaces, en termes d’emplois créés ou sauvegardés pour un montant donné de subvention, que les aides Aubry.

  8. Si les salariés et les citoyens obtenaient de cette façon une prise directe sur les décisions des banques en matière de sélection des bénéficiaires de leurs crédits, ce serait une très grande nouveauté : même lorsque les banques étaient nationalisées, les décisions stratégiques échappaient pour l’essentiel aux citoyens ordinaires et aux représentants du monde du travail. Cela met en lumière le caractère très original, du point de vue politique, que présenteraient ces nouvelles institutions

  9. Par exemple le développement d’une filière particulière comme l’aéronautique ou la pharmacie, la reconversion d’un bassin d’emplois ou les luttes pour l’emploi des jeunes.

  10. Ce Fonds national pourrait être adossé à un pôle public financier constitué de la Caisse des dépôts et de la Poste, en liaison avec le secteur bancaire mutualiste et coopératif, il pourrait alors recevoir, à titre de ressources nouvelles au-delà de chaque dotation régionale et d'autres fonds, les 20 milliards d'euros pour exonérations de cotisations sociales patronales accordées par l'État aujourd'hui aux entreprises sous prétexte d'encourager l'emploi. Il pourrait ainsi user de son poids pour inciter les banques privées à contribuer également à ces financements

  11. voir l’article de P. Boccara dans le dossier Europe

  12. voir la déclaration des cinq unions syndicales régionales d’Île de France CGT, FO, CGC, UNSA, FSU, accueil très favorable de l’idée au colloque sur l’aéronautique organisé en février au conseil régional d’Île-de-France…

 

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