Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Création d’une « coordination anti-privatisation pour une alternative de progrès »

Depuis son arrivée au gouvernement, la droite n’a guère attendu pour dévoiler son programme de régression sociale : blocage du SMIC, remise en cause des 35 heures, annonc e de plusi eurs milli ers de suppression d’emplois dans l’Education nationale, remise en cause de l’allocation personnalis ée d’autonomie, allègement des charges sociales des entreprises, abandon du programme de grands travaux publics à l’instar des projets de ferroutage, etc.

Les projets de privatisation tiennent évidemment une place impor tante au sein de ce programme . On peut même aller jus qu’à dire qu’ils sont au cœur de la dynamique de régress ion sociale que le gouvernement s’appr ête à engager.

Ces projets concernent des secteurs clés de l’économ ie (les transpor ts, l’électr icité, les télécommun icat ions , etc , pour citer les plus mar quants) . Des grandes entr eprises de ser vices publics, comme EDF et GDF semb lent êtr e les premières concernées . Personne ne peut nier le rôle qu’ont pu jouer les ser vices publics en matière d’intégration sociale, d’aména gement terr itor ial, de corr ection des inégalités sociales et de production de lien social. Eléments de maîtrise du mar ché, vecteurs de développ ement , leur exem ple est devenu insu pp or tab le pour le système capitaliste. La qualité de leur inter vention, la capacité des salariés à s’y faire enten dre, même si la situat ion s’est dégradée , sont des points d’app ui inacce pt ables pour le MEDEF.

Ces projets gouvernementau x const ituent donc une avancée supplémenta ire dans le mou vement de « réappr opriation » par le marché de secteurs de l’économ ie qui, parce qu’ils const ituaient des biens collectifs avaient été placés sous la tute lle de la puissance publique.

Plus globalement , ils par ticipent évidemment au développement , pour ne pas dire à la conso lidation du capitalisme actionnar ial ou patr imonial. Pour tant , la domination des marchés financ iers , la place grand issante des fonds de pension ont montré leurs limites et leur nocivité. A tra vers ce programme qui n’épargne aucun des secteurs clé de l’économ ie, c’est donc toute la quest ion de la propriété sociale et de la trans format ion des gest ions , bref de l’appr opriation sociale et des nou velles formes qu’elle pourra it prendre dans le conte xte actue l de mondialisation capitaliste et de déréglementat ion eur opéenne qui est reposée .

C’est donc face aux dangers que représente un tel programme que les militants communis tes, réunis le 27 août dernier au siège du PCF, ont décidé la création d’une « coordination anti-privatisation pour une alternative de progrès ».

Il s’agit de se donner rap idement les moyens d’une riposte , d’une rés istance aux projets gouvernementau x de privatisations.

Il s’agit, insé para blement , d’engager une contr e-offensive politique pour une véritab le alternat ive de progrès social.

Ouvrir un chantier de réflexion sur la quest ion de l’appropriation sociale semb le bien const ituer l’un des points d’entrée incontourna ble de toute réflexion sur un projet alternat if. Redéfinir les finalités les entr eprises publiques et à vocat ion de ser vice public, ce qui suppose de déterminer le niveau de réponse que la société décide d’appor ter aux besoins des usagers , avec leur par ticipation, est un autr e défi à relever dans cette réflexion.

Réorienter la construct ion eur opéenne , répondr e en terme de coo pérat ion internat ionale à la mond ialisation est un autr e défi auquel nous devons nous atte ler. La conférence de Johannes burg ne peut que nous inciter à accé lérer le tra vail dans cette voie.

Un autr e défi doit êtr e intégré dans cette réflexion, c’est celui de la démocrat isation, de l’inter vention des salariés et des usagers sur les choix de gest ion et d’orientat ion des entr eprises et ser vices publics avec de nou veaux critèr es d’efficacité sociale et de nou veaux pouvoirs.

Ce que nous proposons au tra vers de cette coor dination, c’est à la fois les moyens d’une action imméd iate et une réflexion ouvrant des pers pectives pour constru ire une nou velle conce ption des entr eprises publiques, des entr eprises nationalisées (en recherchant probablement un terme qui évitera it à cer tains de croire que nous voulons refaire les nationalisations de la libérat ion).

Aujour d’hui, il faut que les ense ignements soient tirés de l’échec électora l de la présidentielle et des législatives. Nous ressentons tous l’impér ieuse nécess ité de « réinventer le social », de s’atta quer à la quest ion des nou velles formes de solidarité, à la problémat ique autour des nouvelles entr eprises publiques après l’éc hec des choix sociaux-libérau x de privatisation du gouvernement Jos pin. C’est ainsi que nous pouvons constru ire un projet politique alternat if à gauc he et ouvrir une pers pective nou velle à ceux qui n’ont connu que l’adaptation du système capitaliste et pensent qu’il n’existe pas d’autr e voie.C’est soulever la quest ion des rappor ts entr e le privé et le public, reposer celle des nationalisations sans la figer dans les termes du débat des années trente et de l’après seconde guerr e mond iale, peu suscept ible de débouc her sur la réno vation des formes d’appr opriation sociale ; réfléchir à un nou veau type de nationalisation pour des entr eprises publiques très en prise sur les enjeux de coo pérat ion et de par tage en France , en Europe et dans le monde .

C’est donc auss i réfléchir aux thèmes de la démocrat ie sociale, à celui des formes inno vantes de droits et d’inter vention des salariés face aux nou velles formes d’organisation de la production et de gest ion de la maind’œuvre.

C’est s’interr oger sur la façon dont les usagers peuvent prendre leur place dans la définition des objectifs de ces nou velles entr eprises publiques et parmi eux les élus locau x. C’est donc à l’échelle eur opéenne qu’il faut également promou voir l’idée d’entr eprise socialement et environnementa lement res ponsa ble avec des critèr es de gestion d’efficacité sociale et des financements nou veaux faisant reculer la press ion des marchés financ iers . Les entr eprises de ser vices publics de par les missions qu’elles assument , de par le système de péré quation tar ifaire qui les distingue, occu pent évidemment une place toute particulière au sein de cette réflexion.

La mobilisation pourrait prendre la forme de rencontres entre salariés...

En quoi ces entr eprises contr ibuent -elles à une meilleur e satisfaction des usagers ? Dans quelle mesur e agissent -elles sur l’ensem ble de la société (quest ion des statuts , de la qualification, des critèr es de gest ion, du contrô le social…). Les expériences de privatisation des transpor ts privés en Angleterr e peuvent nous donner des éléments de com paraison entr e une société nationale de chemin de fer, comme la SNCF, et un éclatement en plusieurs sociétés privées en Grande Bretagne. Les sociétés ont privilégié, une fois de plus, leur renta bilité imméd iate . Le réseau s’est dégradé , mettant en cause la sécur ité des usagers , détér iorant l’image du transpor t ferré , mais auss i sa capacité à répondr e aux besoins.

Au moment où s’élabore une directive cadre sur les services publics, c’est un axe essent iel à faire figurer au cœur du débat sur la natur e de la construct ion eur opéenne . Dans une cer taine mesur e, de telles entr eprises intr oduiraient concrètement un contenu social dans la dynamique eur opéenne . C’est donc sur ce terra in là auss i que peut êtr e menée l’offens ive visant la réar ticulation du social et de l’économ ique.

Cette démar che autour de la quest ion de nou velles entr eprises publiques est d’autant plus opp or tune que la récurr ence des crises financ ières et bours ières, le développement des scanda les et malversat ions financ ières, les dérives affairistes jettent de sérieux doutes quant à la capacité du capitalisme actionnar ial et d’Etat à son service à réguler l’économ ie. Le développement des sociétés spéc ialisées dans « l’invest issement socialement et éthiquement res ponsa bles », soumettant les entr eprises à ces critèr es éthiques et exigeant d’elles plus de transpar ence , par viendrait-il à mettr e un terme à l’insta bilité inhérente au fonct ionnement des marchés financ iers et à la pression des exigences de la renta bilité financ ière ? Malheureusement , on peut en douter.

De telles secousses financ ières fragilisent , en effet, l’ensemb le de la sphèr e économ ique, en même temps qu’elles génèr ent des inégalités sociales. C’est donc toute la question du financement de l’économ ie, du rôle des banques et du cré dit, pour sécur iser l’emploi et de la format ion , qu’il con vient à nou veau de reposer et de mettr e en débat.

Dans la pratique, cette coordination serait organisée sous la forme d’un réseau

Permettant la mob ilisat ion de toutes les forces autour de la bata ille à mener sur le secteur et les ser vices publics. Elle vise à rassemb ler le plus largement poss ible, à mob iliser des élus, des citoyens, des syndicalistes , des membr es de mou vements assoc iatifs et sur le plan eur opéen, à multiplier les contacts au sein des entr eprises étran gères.

Un tel réseau devrait permettr e de dresser un bilan des privatisations, de lancer un tra vail de masse et d’enquête (fiches d’inter vention militante sur l’emploi et ses formes précaires, les qualifications , les salaires, l’aména gement du terr itoire, les coo pérat ions internat ionales…).

Dans l’imméd iat, la mob ilisat ion pourra it prendre la forme de rencontr es entr e les salariés des banques chargées des privatisations et ceux des entr eprises concer nées , afin de relancer le débat autour d’une réor ientat ion de la politique de cré dit en faveur du développement de l’emploi, de la format ion, d’une meilleur e utilisation des richesses produites au profit des salaires…

La fête de l’Human ité sera l’occas ion de mettr e en discuss ion l’ensem ble de ces propositions à tra vers un débat qui aura lieu le dimanche 15 septembr e au stand du CN. Ÿ

* Sénatrice d’Indre et Loire, maire de St Pierre des Corps.