Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Réflexions sur l’avenir des retraites

Les français s’inquiètent beaucoup pour leurs retraites : 92 % des salariés estiment leur réforme urgente. Va-t-on voir s’effondrer l’une des plus belles réalisations sociales du xx° siècle ?

La Commission sociale des évêques de France, en rendant publiques ses “Réflexions sur l’avenir des retraites”, a désiré apporter sa contribution au débat en cours, en décrivant l’état des lieux, en soulignant les enjeux essentiels, spécialement au point de vue éthique, en proposant modestement quelques orientations possibles.

 

L’état des lieux – Deux éléments principaux sont à prendre en compte.

 

Tout d’abord, les données de la démograph ie.

L‘équilibre financ ier des régimes de retra ites par répar tition dépend directement du rappor t entr e le nom bre des cotisants et le nom bre des retra ités : ce que l’on appelle le taux de dépendance . Ce taux est actue llement de 2,2 cotisants pour un retra ité : il sera de 1,2 en l’an 2040.

Cette situat ion s’explique par l’allongement de l’es pérance de vie et sur tout par l’arr ivée à la retra ite, à par tir de 2005, des générat ions du baby-boom

La nata lité, elle, est en baisse depuis 1965, malgré la légère remontée des deux dernières années . Si bien qu’en 2040, un frança is sur 3 aura plus de 60 ans contr e 1 sur 5 aujour d’hui. Pourra -t-on raisonnab lement laisser à la charge d’une génération d’actifs moins nom breux, des retra ités de plus en plus nom breux et de plus en plus âgés ? Faut-il alors diminuer les retra ites ? Augmenter le nom bre d’années de cotisations ? Augmenter les cotisations ? Autr ement dit : tra vailler plus ? Payer plus ? Touc her moins ?

Le problème de la réforme des retra ites est non seulement un débat financ ier, mais à tra vers lui, un débat sur l’organisation des temps de vie tout au long de l’existence .

Les jeunes de 18 à 25 ans entr ent plus tar d au tra vail et conna issent pour beaucou p une période de précar ité. Les 2555 ans vivent une période très intens ive en volume de tra vail et très sélective du point de vue de la com pétitivité. Entr e 55 et 70 ans , soit entr e la fin de la vie profess ionne lle et la “vieillesse ” (le temps des “séniors ”), s’éten d une longue période aux contours très divers , cependant que le temps de la “vieillesse ” app ara ît de plus en plus tar divement et est progress ivement mar qué par la dépendance .

Il impor te de repenser l’emploi et les systèmes de protection sociale en fonct ion de ce cycle de vie plus long et plus différencié.

Quels sont les enjeux ?

Il s’agit avant tout de sauv egarder la solidarité entre les générations – la guerr e des générat ions aura-t-elle lieu ? Les jeunes cra ignent d’êtr e victimes de la situat ion. Les 50 ans et plus dépasser ont, dans quelques années les 2/3 des votants : verr ons-nous la créat ion d’un lobby des retra ités ?

Il ne semb le pas car il existe une large communauté de dest in résu ltant de la longue cohabitation entr e les généra tions . Mais un nouveau pacte inter générat ionne l n’en est pas moins nécessa ire : ce pacte existe actue llement mais de manière implicite. Il doit se fonder sur le désir de personnes d’âges différents de “vivre ensem ble”.

 

Ensuite, choisir entre répartition et capitalisation.

Dans la répar tition, les actifs d’aujourd’hui cotisent non pas pour eux-mêmes mais pour les retra ités d’aujour d’hui. Dans la ca pitalisat ion, chaque individu cot ise pour sa propre retra ite, sans atten dre des autr es le versement de celle-ci. Il impor te de bien peser les risques de la capitalisation (accentuat ion des inégalités entr e les retra ités , risques venant de l’insta bilité des marchés).

Les injustices actue lles de la répar tition nécess itent une profonde réforme du système . Le système actue l favorise les caté gories socioprofess ionne lles supér ieur es en raison de leur plus grande longévité et pénalise les personnes dont les carr ières sont incom plètes .

l’ins piration évangélique semb le inciter à privilégier la solidarité organisée entr e les générat ions et donc à sauvegarder la répar tition, la capitalisation pouvant venir comme com plément .

Repenser la fin de carr ière active et les formes d’activités ouver tes aux retra ités .

L’âge du départ à la retra ite, en france , se situe aux environs de 58 ans . Il impor te d’organiser une plus grande soup lesse pour la période de la fin de la vie active et de faciliter le développement d’une “retra ite choisie” ou “retra ite à la car te”, permettant aux salariés volonta ires de toucher plus en travaillant plus tar d.

susc iter un débat national – la quest ion de l’avenir des retra ites est difficile, pass ionnée . Elle n’a pas de solution unique. Aussi nécess ite-t-elle lucidité, imaginat ion, coura ge et dialogue social.

· Quelques propositions prudentielles

Rechercher justice et équité dans tous les domaines, spécialement en ce qui concerne les dispar ités entr e les salariés du secteur privé et les agents publics en ce qui concerne le nom bre d’années de cotisations (40 ans pour le privé, 37,5 pour le public), le taux d’impos ition ( 9,55 % et 7,85). De plus en plus de citoyens, tant à gauc he à droite, reconna issent que ce problème doit êtr e tra ité dans la concer tat ion et par des mesur es progress ives.

Augmenter le nombre des années de cotisations ? Cette mesur e apparaît inévitable. Non seulement elle sera difficile à faire adopter, mais elle peut avoir des effets per vers , (en par ticulier le développement du chômage de longue durée chez les tra vailleurs âgés). En tout cas, elle devra se mettr e en place progress ivement .

Rechercher la cohérence entre discours et pratiques au sujet des pré-retraites : on ne peut deman der l’allongement de l’act ivité pour diminuer le poids des retra ites et en même temps mettr e les actifs à la retra ite à par tir de 55 ans en vue d’améliorer la com pétitivité.

Organiser une gestion du temps tout au long de la vie.Des moda lités plus inventives d’aména gement du temps pourraient faciliter une évolution plus harmon ieuse des formes de tra vail et d’activité au cours de la vie.

Prendre en compte la famill e. Mais le renou vellement des générat ions plaide en faveur d’une politique familiale plus audacieuse .

Faire appel à nouveau à la main d’œuvre étrangère pour faire marcher notre économie et payer nos retraites ?Des tens ions exister ont, à par tir de 2010 sur le marché du travail. S’il est envisagé de faire appel à une main d’œuvre étran gère, des négociations s’imposent entr e pays d’accueil et pays d’origine.

donn er sens et valeur aux différents âges de la vie.L’utilité d’une personne se mesur e-t-elle d’abord en fonct ion de son appor t en tra vail et en argent ? La société humaine est toujours à constru ire et toute personne a une fécon dité sociale!

 

Par Le Douarin Damien , le 31 January 2002

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