Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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RMI-RMA ou insertion véritable dans l'emploi ?

Au motif de la critique du RMI (limite de l’insertion), la réforme proposée par Fillon est dominée par l’hyper libéralism e. Il s'agit avant tout de peser pour limiter les dépenses, tandis qu'on accroît la prétendue responsabilité des RMistes dans « l'insertion », qu'on instaure des divisi ons entre différentes catégories de chômeurs, les « employables » devant se plier à la surenchère à la baiss e du coût du travail et du droit social.

 

Une réforme hyper-libérale

 

  1. La décentralisation de la gestion de l’allocation du RMI aux départements (Conse ils générau x). Les présidents de Conse il généra l se verr ont confier le pilotage de l’ensem ble RMI-RMA au lieu des Commissions locales d’inser tion (CLI). Ils pourra ient décider de la radiation comme de l’admission dans le système . Les Commissions locales d’inser tion perdent leurs com pétences concernant l’examen des situat ions individuelles, au détr iment de la proximité avec les intér essés . On risque de voir se développer une logique d’aide sociale et de clienté lisme, avec de for tes inégalités entr e les dépar tements , un renforcement de l’arbitra ire et de la bureaucrat ie.

 

La question du financement au centre

De lour des menaces pèsent sur les finances des départements avec en pers pective la réalisation d’économ ies sur le dos des allocata ires. Les dépar tements les plus pauvres vont êtr e écrasés en fonct ion du nom bre de Rmistes (l’écar t pouvant êtr e de 1 à 8). Des péré quations financières aura ient été indispensab les pour éviter le renforcement des inégalités entr e départements . Or elles ne sont pas prévues.

Contra irement à ce que pr éten d Fillon, l’insu ffisance organisée du financement contr ibuera à diminuer l’offre et les moyens de l’inser tion. Les dépar tements n’aur ont pas une obligation suffisante de financer des cré dits d’inser tion même si on a rétab li leur obligation d’y consacr er 17% qui avait disparu dans les textes précé dents mais c’est bien peu. Les inégalités risquent de s’accr oître au détr iment des publics les plus fragiles ne pouvant défendre leurs droits. La récupérat ion sur les success ions , notamment en zone rura le va exercer un effet d’éviction et de dissuasion.

La com position du Conse il dépar tementa l d’inser tion est floue et confiée au Conse il généra l au détr iment des partenar iats nécessa ires avec l’État, la région, la commune .

 

Le Contrat d’insertionRevenu minimum d’activité (CI-RMA ).

Ce sera it un contrat de tra vail d’une durée déterm inée de six mois, renou velable deux fois, proche des CES, mais avec des as pects gravement dérogatoires à la notion de salaire et du Code de la sécur ité sociale. Il s’adresse aux bénéficiaires du RMI, recevant celui-ci depuis plus de deux ans (1) (300 000 personnes) . Il sera it mis en place par une convention entr e un employeur et, non plus l’État , mais un Conse il généra l. La durée hebdoma daire du travail sera it de 20 heures et cela concernera it non seulement le secteur non marchand, comme pour les CES, mais auss i les employeurs du secteur marchand.

 

Une « aide » pour le s employeurs

L’em ployeur recevrait une aide du Conse il généra l égale au montant du RMI de base pour une personne diminué du forfait logement (326,3 eur os). Les employeurs du secteur marchand sera ient exonérés de charges patr onales, prises en charge par l’État .

 

Une zone de sous-droits

La rémunérat ion versée n’est pas vraiment un salaire. L’em ployeur versera it la différence entr e le SMIC à mitemps pour 20 heur es et le montant du RMI. Seule la par t versée par l’em ployeur au-delà du montant du RMI est cons idérée comme un salaire. Les cotisations sociales ne sont calculées que sur cette par tie. Cela const itue une ruptur e du principe d’égalité et c’est donc inconst itutionne l. Les « bénéficiaires » sont con damnés à un souscontrat , privés d’une par tie des droits liés au contrat de tra vail. En outr e, ils ont même inter diction de tra vailler pen dant leur second mi-temps . Cela met en cause les formu les d’intér essement permettant de cumu ler pour un temps le minimum social et une reprise d’activité à mitemps . auss i, c’est discriminato ire et contra dicto ire avec le principe de gain monéta ire lié à la reprise d’activité.

De plus, il y aura réduct ion de l’ass iette de cotisations sociales et renforcement du démantè lement du droit du tra vail et de la sécur ité sociale.

Cela va contr ibuer à rédu ire les droits à la retra ite et au chôma ge. Ainsi un an de RMA ne permettra de valider qu’un trimestr e pour la retra ite.

On aboutit à la construct ion d’une zone de sous-droits, de sous-rémunérat ion assoc iée au contrat .

 

Une logique de Workfare

Le chômeur devra en rabattr e sur ses exigences , au fur et à mesur e que dure le chômage, finie « la norme d’emploi con vena ble ».

On entr e dans une logique de workfare visant à obliger les Rmistes à acce pter n’impor te quel em ploi, à n’impor te quelle con dition, sous menace de radiation. Avec la mise en concurr ence des salariés sur un même emploi, il y aura it subst itut ion d’une main-d’œuvre moins chère. Le RMA sera moins rémunérateur que le RMI en raison de l’inter diction de cumu l. Le Rmiste-Rmaste perdra 300 eur os par mois, alors que l’entr eprise sera aidée, y com pris par les exonérat ions sur les bas salaires et pourra utiliser une maind’œuvre au raba is, ce qui renforcera la flexibilité à la baisse de tous les salaires. On vise ainsi à mettr e en concurr ence les pauvres entr e eux, les CI-RMA concurr encer ont les emplois tenus par les CES ou autr es contrats . Le gouvernement et ses ministres parlent de réhab iliter la « valeur tra vail » alors que se multiplient les plans sociaux et qu’ils « proposent » des contrats à mi-temps pour la moitié du SMIC, quels que soient les salaires pratiqués dans la profession.

Tandis que l’employeur participera au contrô le, adressera au référent de l’allocata ire une attestat ion de son activité tenant lieu de contrat d’inser tion. C. M.

 

L'entr eprise pourra employer à temps par tiel des salars pour un coût entr e 2,7 et 3,4 eur os de lheur e, entr e 15% et 30% du prix norma l de l'heur e de tra vail.

Ct el payé par lemployeur pour lembauc he dun Rmiste-Rmaste : 183 eur os par mois. Cest la différence entr e le montant du Smic à mi-temps (pour 20 heures de tra vail) et le RMI (moins le forfait logement) que lui versera le Conse il généra

 

  1. Lors du débat à l’Assemblée nationale, il semble que cette durée ait été réduite à un an.

c h a n tier 1

 

 

Favoriser l’insertion des Rmistes dans

 

l’emploi

 

Se battre pour le retrait de cette loi scélérate. La volonté de l’État de se désengager vise à contraindre les départe ments tout particulièrement les plus pauvres à dégonfler les statistiques des Rmistes. L’effort d’insertion devient la responsabilité des pauvres eux-mêmes à partir d’une flexibilisation forcenée à la baisse du coût du travail. Alerter d’urgence sur ce texte, organiser les résistances et les rassemblements entre salariés, chômeurs, Rmistes et leurs associations, populations, élus … et travailler aux propositions alternatives.

Critique du revenu minimum d’existence, un tel projet même avec des droits relevés institutionnaliserait la pauvreté. On renoncerait définitivement à l’insertion dans l’emploi stable, rémunéré et qualifié à partir d’une formation choisie. Son financement serait conditionné à la régression de toute la protection sociale reporter sur l’accroissement de l’impôt sur les revenus des salariés considérés comme des nantis. Il ne s’attaquerait pas à la finance, au profit, aux critères des gestions des entreprises visant la rentabilité financière et non l’emploi.

 

Quelles propositions alternatives aux plans libéraux ?

 

Objectifs sociaux

Accroître le RMI et les autres minima sociaux, ce qui d’ailleurs contribuerait à stimuler la consommation et donc la croissance.

Développer l’offre d’insertion dans l’emploi, à la hauteur des besoins.

Cela passe aussi par des aides à l’insertion sociale (logement, transports gratuits, santé …).

Cela nécessite des moyens renforcés en personnel en quantité, en qualité (formation), notamment au niveau du service public de l’emploi, pour les entretiens individualisés avec les Rmistes, l’écoute de leurs propositions, un montage avec les institutions compétentes, des formations adaptées, choisies, développées et efficaces. Cela exige un essor sans précédent du rôle de la formation pour un retour véritable à un emploi stable, rémunéré, de qualité. Le volet insertion du RMI doit être effectivement considérablement développé.

Cela implique évidemment une responsabilisation sociale accrue des entreprises et des administrations dans la création et le maintien de l’emploi, et dans les reclassements véritables.

Un contrôle démocratique des fonds publics dits pour l’emploi et la formation, y compris des fonds visant à l’insertion des Rmistes. Un rôle accru des Régions en matière de formation continue implique des branchements avec les autres institutions et entreprises, à tous les niveaux, sensées travailler sur l’offre d’insertion dans l’emploi, notamment à partir de la formation. Cela exige aussi de veiller aux débouchés des formations sur des emplois de qualité.

 

Droits pouvoirs institutions nouvelles partenariats à construire

Agir pour maintenir et développer les liens de proximité entre les Rmistes et les institutions de proximité, notamment au niveau de la commune, le rôle des CLI (commissions locales d’insertion). Ce niveau est plus proche des intéressés eux-mêmes, des travailleurs sociaux, des associations. Il faut travailler à ce niveau pour rassembler, renforcer les liens avec les associations de chômeurs et de précaires, travailler à l’expression et à la représentation propres des Rmistes.Exiger une péréquation entre les départements en fonction du nombre de Rmistes, accroître les financements, en particulier les moyens et les obligations de l’insertion, pour les départements, notamment les plus pauvres.

Imposer un contrôle démocratique sur la composition du CDI (Conseil départemental d’insertion). En effet celle-ci est à la discrétion du président du conseil général dans la nouvelle loi.

Imposer des critères et des objectifs sociaux et économiques afin d’éviter une sélection et une élimination des Rmistes faute de moyens de financement.

Exiger un CDI représentatif de l’ensemble des acteurs et des sensibilités, afin que les Rmistes puissent être entendus et défendus (diversité des acteurs, travailleurs sociaux, élus et responsables au service de ces publics en difficulté, associations, notamment associations de chômeurs, représentants d’administrations publiques, élus dans leur diversité, syndicats, etc, entreprises se ferait l’insertion). Dans les différentes institutions, renforcer les droits et pouvoirs des chômeurs, des Rmistes, des salariés. Partir de leurs propositions. Renforcer leurs pouvoirs, leur expression propre, la possibilité d’être défendus au sein de l’ANPE, des institutions d’indemnisation du chômage, ou de gestion des fonds du RMI et de l’insertion, dans les institutions de formation…

 

Financements

Exiger avant l’application de la loi, l’affectation des moyens de financement aux départements qui ne peuvent faire face à cette responsabilité écrasante.

Développer et renforcer les financements. Une contribution de solidarité prélevée sur une partie de cette cotisation nouvelle que nous voulons instituer sur les revenus financiers des entreprises et qui pourrait être affectée au financement du RMI et de l’insertion (notamment à partir de la formation).

Tandis que la modulation du taux de la cotisation patronale tendrait à pénaliser les entreprises qui fuient dans les licenciements, le recours excessif aux emplois précaires, la course aux placements financiers. A l’inverse il s’agit d’inciter à la création d’emplois stables et bien rémunérés, ce qui du même coup accroîtrait la rentrée de ressources nouvelles permettant de faire face à la lutte contre l’exclusion et pour une insertion dans l’emploi.

Refuser le désengagement de l’État, exiger les moyens de financement pour que les institutions concernées (région, département, commune) puissent faire face aux besoins de financement dans la lutte contre la pauvreté et pour une insertion véritable.

Cela implique aussi de nouveaux moyens des financements pour un rôle tout à fait nouveau de la formation continue, pour ces publics en difficulté. La cotisation patronale devrait être accrue pour une prise en compte beaucoup plus conséquente des besoins de financement de la formation continue avec un reversement aux institutions de formation dont le caractère public et social devrait être accru.

Cela impliquerait aussi un rôle tout à fait nouveau des crédits, avec des prêts bonifiés et des taux d’intérêt d’autant plus bas que les entreprises programment des investissements centrés sur le développement des emplois, des salaires et des formations efficaces. Des batailles devraient aussi être menées au niveau européen notamment pour exiger que la BCE, à partir d’interventions démocratisées, vise l’emploi et la formation qualifiante, avec des taux d’intérêt abaissés lorsque les entreprises programment des investissements centrés sur le développement des emplois et des formations qualifiantes. C. M.

 

Par Mills Catherine , le 30 novembre 2003

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