Nos travaux de ce week-end sur les questions de l’industrie sont importants à plus d’un titre.
En premier lieu, nous devons constater qu’il y avait très longtemps que notre Parti ne s’était pas placé en situation de réfléchir à ces problématiques au niveau nécessaire et de mettre en place un processus de travail ainsi qu’un dispositif d’intervention adaptés.
Sur le fond, nous devons actualiser notre analyse :
Le document préparatoire diffusé avant l’été est une ébauche de cet approfondissement. Nous avons conscience qu’il est largement à améliorer. C’est ce à quoi nous nous attellerons après la convention en prenant en compte :
Nos travaux sont importants aussi parce qu’ils portent sur une question vitale pour notre pays.
Depuis quatre décennies, en effet, le grand patronat et les gouvernements qui se sont succédés en France ont choisi d’abandonner l’industrie. Cette orientation correspond à l’installation, au plan planétaire, du paradigme néolibéral et de la mondialisation financiarisée. S’appuyant sur la révolution technologique et informationnelle leur permettant de mettre en concurrence les travailleurs à l’échelle mondiale, les grands groupes et les marchés financiers, de plus en plus interpénétrés, ont arbitré la localisation de leurs investissements en fonction de la rentabilité la plus élevée des capitaux. Dumping social, fiscal ou environnemental, telle a été leur boussole.
Dans le même mouvement, une bataille d’idées intense a été développée pour légitimer cet abandon. Nous étions parait-il entrés dans l’ère de la société « post-industrielle ». Loin d’être une calamité, le dépérissement industriel était un signe de modernité. Les services devaient prendre le relais. Ceux qui disaient autre chose et se battaient n’étaient que des passéistes bornés. Aujourd’hui cette argumentation a explosé en vol et il est devenu manifeste qu’un pays qui n’est plus capable de subvenir à une part suffisamment significative de ses besoins est un pays qui s’appauvrit et qui décline.
Malheureusement, les dégâts sont graves. Malgré les discours sur la nécessité de la réindustrialisation, l’effondrement se poursuit. En 2012, la part de l’industrie dans la valeur ajoutée du pays était inférieure à 10%. Entre 2000 et 2012, plus d’un million d’emplois industriels ont été supprimés. La crise de 2007-2008 a joué comme un accélérateur du déclin, la production industrielle ayant chuté de 18% depuis 2007. L’an dernier, en 2013, l’investissement des entreprises poursuivait sa régression à - 5%. Sur les douze dernières années, l’investissement dans l’industrie a diminué de 44 milliards d’euros.
Il faut absolument stopper cette spirale et s’engager dans une nouvelle industrialisation du pays.
Les enjeux sont impérieux ! Allons-nous lutter enfin efficacement contre le cancer du chômage en créant les centaines de milliers d’emplois nécessaires grâce à l’investissement dans les activités répondant aux besoins ? Allons nous ainsi sortir de l’enlisement dans la stagnation voire dans la quasi récession que connaît notre pays depuis des années ? Allons-nous construire un avenir et des perspectives à notre jeunesse, ainsi qu’à des millions d’ouvriers, de salariés de toutes catégories, de chômeurs, de petits entrepreneurs, d’agriculteurs ou allons-nous continuer à alimenter la désespérance et le repli sur soi qui sont, tout à la fois, le fondement de la résignation ambiante et le terreau de l’expansion de l’extrême-droite ?
Cela implique évidemment une forte volonté politique en rupture avec l’orientation, du pouvoir actuel, de soumission au Medef et aux grands groupes.
Il faut cesser d’alimenter leur boulimie de profit – au détriment du pays – à coup de CICE et d’exonérations de cotisations patronales, sans résultat tangible sur l’emploi et l'investissement.Pire même c’est au moment où se multiplient les cadeaux que se multiplient aussi les articles dans la presse sur « l’exode des patrons du CAC 40 ». Certains s’installent à Hong-Kong d’autres à Londres ou à Boston. Amsterdam ou Zurich sont particulièrement prisés pour l’émigration des sièges sociaux. D’après la Banque de France, la moitié des groupes du Cac 40 sont détenus majoritairement par des non résidents. Pour l’ensemble du Cac, le chiffre est de 47% en moyenne.
Dans ces conditions, comment penser qu’un appel « à la responsabilité » (puisque tel est le nom du pacte) vis-à-vis de la France, même assorti d’un soutien à leurs profits – soutien qu’ils empochent sans vergogne – pourrait inverser la tendance ? Alors qu’il faudrait faire baisser le coût du capital, le gouvernement n’a les yeux rivés que sur la baisse du coût du travail. Absurde quand le même jour toute la presse nous dit tout à la fois que « 2014 sera une année record pour les bénéfices » et que « les revenus les plus modestes ont baissé de 6% en cinq ans »
Le constat est d’autant plus amer que la France a de nombreux atouts. Nous avons des salariés, des ingénieurs, des chercheurs, hommes et femmes, de très grande compétence.
Parmi les plus jeunes, en particulier, existent des porteurs de projets dans les technologies les plus avancées avec des entreprises de pointe dans la robotique, dans le numérique, dans la santé avec le cœur artificiel etc. Nous avons des milliers de vrais entrepreneurs qui veulent développer des activités utiles, voire innovantes, bénéfiques pour l’emploi et la vie des territoires. Nous avons de nombreux citoyens qui voudraient mettre en place des structures de l’économie sociale, ou un Fab Lab, des salariés qui voudraient monter des coopératives. Or, cette énergie créatrice se heurte trop souvent à des stratégies bancaires et financières qui font passer la rentabilité à court terme avant l’irrigation du champ économique.
L’urgence acteurs : responsables économiques bien sûr, mais aussi syndicats, élus, associations, experts etc. une politique industrielle adaptée aux réalités d’aujourd’hui. Voila pourquoi nous nous battons pour la réunion d’une conférence nationale pour un développement productif social et écologique. politique est donc de définir, avec la participation de tous les acteurs : responsables économiques bien sûr, mais aussi syndicats, élus, associations, experts etc. une politique industrielle adaptée aux réalités d’aujourd’hui. Voila pourquoi nous nous battons pour la réunion d’une conférence nationale pour un développement productif social et écologique.
Comme chacun le comprend, l’intervention des salariés, leurs luttes et celles des populations concernées jouent un rôle déterminant.
En se battant pour le maintient des sites, la sauvegarde des emplois, le développement des activités, la définition de perspectives d’avenir, les salariés de Sanofi, d’Asco Métal, de Kem One, de Veolia, de PétroPlus, d’Alcatel, de PSA – et de bien d’autres entreprises que je ne peux toutes citer – défendent après ceux d’Arcelor Mittal, de Goodyear ou de Continental –les intérêts du pays. C’est devant eux et pas devant le Medef qu’il faut crier haut et fort « nous aimons l’entreprise » parce que ce sont eux qui la défendent en tant que collectif de travail produisant des richesses pour répondre aux besoins et non comme une société d’actionnaires d’abord attentifs à leurs dividendes. Ces salariés qui luttent convergent, encela, avec les travailleurs des services publics qui se sont battus ou se battent pour cette dimension si essentielle du vivre ensemble : cheminots, hospitaliers, salariés des transports
ou de l’énergie, marins de la SNCM et tous les autres. Il en va de même des salariés des services qui sont entrés dans l’action : femmes de ménages des grands hôtels parisiens, coiffeuses et manucures, salariés du commerce qui veulent défendre leurs dimanches.
Dans ces luttes, toutes et tous, peuvent, compter sur les communistes, sur les militants, sur les élus. Nous sommes avec eux, nous sommes parmi eux, nous sommes de leurs combats !
Au total, en effet, l’intervention des salariés, leur mise en mouvement est un élément décisif pour tout pas en avant, pour toute avancée transformatrice concernant le potentiel productif de la France.
Alors, une nouvelle industrialisation, qu’est-ce que ça signifie ? Qu’est-ce que cela suppose ?
Pour ne pas être trop long, je ne vais évidemment pas reprendre tous les sujets traités dans le document préparatoire. Je n’entrerai pas non plus dans des développements que vous pouvez retrouver par ailleurs.Je tenterai, en revanche, de présenter la cohérence de la démarche que propose le collectif de préparation de nos travaux et expliciter pourquoi nous parlons de nouvelle industrialisation et pas seulement de redressement productif.
1- Insistons tout d’abord sur les relations nouvelles existant entre l’industrie et les services en incluant dans ces derniers les services publics.
Une part essentielle des activités externalisées telles la maintenance, la logistique l’informatique, l’ingénierie, et maintenant la recherche sont en fait partie intégrantes ducycle productif. À noter que la catégorie « services aux entreprises », dont beaucoup de composantes résultent de l’externalisation, regroupe 2,4 millions de salariés pour 3,7 millions dans l’industrie stricto sensu.Mais d’autres phénomènes émergent. Tout d’abord, la simple utilisation d’un nombre croissant de produits (de haute technologie mais pas seulement) implique désormais des services associés (tutoring, après vente, conseils en ligne, etc.).
Depuis quelques années, nous assistons à un développement rapide de « l’économie de fonctionnalité », c'est-à-dire de services dont les produits industriels sont le support. (les abonnements de téléphonie mobile et d’internet, les véhicules en libre service comme Autolib ou les contrats de pneumatiques pour une durée d’utilisation donnée en sont les exemples les plus connus).
Les services publics sont totalement concernés par ces évolutions car ils sont parmi les principaux prescripteurs de la production industrielle, que ce soit dans l’énergie, les transports, la santé ou certaines administrations. Loin d’opposer industrie et services comme l’a fait pendant des décennies la pensée conformiste, il faut au contraire en voir les interdépendances multiformes.Sans oublier que la présence de nombreux salariés et de leurs familles sur un territoire permet l’existence et le développement de multiples entreprises de services. Le saccage industriel de ces dernières décennies a permis de le constater… mais malheureusement en négatif !
2- Nous devons appréhender la puissance et la rapidité de la révolution numérique dans les process de production.
Certains pourraient dire : « il y a longtemps que ça existe ! » Certes, mais il y a du nouveau et du nouveau qui change bien des choses ! La numérisation des échanges économiques et productifs est désormais poussée à l’extrême. Avec l’industrie 4.0, les machines communiquent entre elles, les machines et les produits échangent des informations qui permettent une personnalisation poussée de la fabrication. Le big data industriel révolutionne le prototypage et la modélisation. La simulation a fait des pas de géants.
La fabrication additive (qu’on appelle de manière un peu réductrice l’imprimante 3D) a généré une activité prometteuse : l’internet industriel des objets. Il est à la base des fabs labs mais devient également un enjeu majeur pour la grande industrie.
Une nouvelle génération de robots dits collaboratifs (les « cobots ») voit le jour. L’objectif est d’interagir avec les humains. On travaille sur des robots capables de s’adapter grâce à leur « intelligence » embarquée.
Arrêtons-nous quelques instants sur les réflexions politiques que ces réalités en plein mouvement peuvent nous suggérer.
Pourtant il est déjà présent dans les grands groupes qui se doivent d’être à la pointe de la technologie. De plus, malgré la vétusté globale de notre parc machine et le retard en équipement robotique de l’industrie française (la France dispose de 5 fois moins de robots que l’Allemagne et de 2 fois moins que l’Italie) nous savons que lorsque la technologie est là et que la pression de la rentabilité est forte, sa mise en place est rapide.
◦ Comment ne pas pointer l’importance, dans une telle mutation, de pouvoirs collectifs nouveaux permettant aux salariés d’intervenir effectivement sur le contenu de leur travail, sur son organisation comme sur les formations – qui ne peuvent se limiter à adapter l’humain à la technologie mais doivent au contraire lui permettre d’en prendre la maîtrise. Cela implique évidemment une conception de ces formations et de la reconnaissance des qualifications tournée vers le développement des capacités de chaque salarié y compris au plan des salaires !◦ Comment ne pas souligner aussi l’importance de notre proposition de sécurisation du parcours des salariés par l’organisation d’un couplage emploi -formation ?◦ Comment enfin ne pas percevoir l’importance, pour les jeunes, d’une mise à jour des contenus de l’enseignement ; l’importance du développement de formations
techniques de nouvelle génération. Il faut permettre à chacun, dès la formation initiale, d’avoir accès aux connaissances pour se repérer dans ce monde en plein mouvement
3- L’urgence des enjeux écologiques doit être pleinement intégrée dans le modèle productif que nous voulons promouvoir.
La question alarmante des émissions de gaz à effet de serre est d’une importance capitale. Les rapports du GIEC sur le changement climatique se font de plus en plus pressants ce qui donne une responsabilité accrue à la Conférence internationale Paris 2015 qui devra prendre des engagements en la matière. Optimiser en toute circonstances l’efficacité énergétique, réduire drastiquement les émissions de CO2 en diminuant la part des énergies carbonées dans la production électrique, le chauffage, les transports et l’industrie sont des priorités incontournables. Par parenthèse, l’existence en France d’un mix électrique avec une forte composante de nucléaire est un atout pour la réduction des émissions de CO2 et une base pour le développement des énergies renouvelables. Les ressources fossiles ne sont pas illimitées. Leur gestion responsable est devenue un impératif absolu. Toutes les voies pourleur substituer des ressources renouvelables doivent être explorées dès lors qu’elles débouchent sur des solutions efficientes. La préservation des écosystèmes doit désormaisêtre considérée comme une dimension à intégrer dans les différents projets de développement sans jamais oublier que les humains sont partie intégrantes des écosystèmes.
Ainsi, tout démontre l’urgence de transformer en profondeur les modèles de production comme de consommation.
Les deux sont en effet liés. Le consumérisme et le productivisme sont les deux faces d’une même médaille : celle de la sur-accumulation financière en crise structurelle aujourd’hui. Le modèle consumériste est fondé sur la recherche d’un turnover aussi rapide que possible des produits pour soutenir les ventes et les profits. Ainsi, dans la logique consumériste-productiviste, le moteur n’est pas la satisfaction des besoins mais la maximisation des profits. Revendiquer comme nous le faisons de sortir du productivisme ne signifie en rienêtre hostile à la production. C’est en revanche mener bataille pour que la production soit tirée par la satisfaction des besoins humains et non soumise aux lois court-termistes et irresponsables du dieu profit.
Un renouvellement de l’approche productive est donc nécessaire tout au long de la chaîne de valeur. Évidemment, ce renouvellement ne surgira pas sur un coup de baguette magique.
Nous le concevons comme un processus ; mais un processus impliquant de l’ambition et de la volonté pour que ses délais soient les plus réduits possibles.
Car les réflexions, les technologies et les exemples concrets ne manquent pas.
Il faut rompre avec « l’obsolescence programmée » qui prospère au détriment de notre pouvoir d’achat et qui pousse au gâchis de matière et de matières premières.
L’écoconception doit devenir la règle générale pour orienter la production vers les objectifs de qualité, de durabilité et de modularité (permettant donc d’intégrer des améliorations technologiques sans être obligés d’acheter un nouveau produit). Des dispositifs législatifs et réglementaires doivent pousser en ce sens comme ils doivent impulser la gestion économe des matières premières, des matériaux et des ressources naturelles ainsi que leur substituabilité pour éviter les ruptures écologiques. (exemple de la chimie végétale).
L’Europe doit également prendre des initiatives fortes pour favoriser ce processus.
Bien évidemment, la lutte contre les pollutions de toutes sortes, la gestion et le recyclage des matériaux, des composants et des déchets doivent être conçus dès l’origine du produit.
La création de filières de réparation et de maintenance doit être accélérée. Elle constitue l’une des caractéristiques novatrices de cette nouvelle approche.
Dans une logique d’« économie circulaire », conçue de manière ouverte et réaliste, à l’opposé de toute conception dogmatique, il faut développer les mises en réseaux pour organiser la complémentarité des besoins et les coopérations mutuellement profitables. Car les déchets des uns peuvent et doivent devenir les matières premières des autres. De même, la création d’écosystèmes industriels – rapprochant sur un même site, ou sur des sites proches, des entreprises intégrées à un tel cycle – permet de minimiser les contraintes de transports et de créer des synergies en matière énergétique ou dans les consommations de fluides.
À l’évidence, ces orientations novatrices – on parle même de nouveau paradigme industriel – impliquent une évaluation de la performance globale des entreprises qui ne peut se limiter aux critères de rentabilité et aux objectifs de compétitivité-coûts aujourd’hui prédominants. Les externalités (impact de l’activité sur son environnement) négatives ou positives doivent être systématiquement prises en compte. C’est une bataille politique de très grande importance car pour s’imposer vraiment dans l’activité productive, ces critères alternatifs doivent, pour une part conséquente, faire l’objet de normes d’ordre public.
C’est dans cette logique d’ensemble que s’intègre l’objectif de relocalisation en coopération des productions qui est de plus en plus présent dans les débats. Cette démarche pourrait s’appuyer sur la prise en compte de ces externalités ainsi que sur le respect de normes sociales et environnementales. Elle ouvrirait des perspectives nouvelles pour un modèle productif rapprochant les lieux de production des lieux de consommation au plus grand bénéfice des salariés, des territoires et des populations concernés. Elle permettrait aussi de donner un véritable contenu à la notion de responsabilité sociale des entreprises, aussi bien à l’égard des territoires que dans les relations donneurs d’ordres-sous traitants.Pour résumer toute cette partie, on peut affirmer que, contrairement à certaines visions étroites et passéistes, industrie et écologie ne sont pas antagonistes mais qu’elles peuvent être l’objet d’un même combat !
4- Quels sont les principaux axes permettant de définir une politique industrielle répondant aux ambitions nécessaires pour le pays ?
Nous avons besoin de mettre en place des structures de prospective et de planification rénovée et démocratique. Il faut revaloriser le long terme, être capable de porter des projets pour préparer l’avenir et contribuer au processus d’émancipation des générations futures. Ces structures doivent permettre à toutes les composantes de la société – responsables économiques, syndicats, élus, associations, experts etc. – de participer à l’élaboration des décisions.
Ainsi pourraient être définies quelques priorités dans les filières à développer et dans les systèmes productifs (c'est-à-dire l’articulation d’acteurs appartenant à des filières différentes) à mettre en place. Au-delà de l’aspect institutionnel des comités de filières existants dans le cadre du Conseil national de l’industrie et en articulation avec eux, il est nécessaire de croiser les réflexions en s’appuyant sur les nœuds technologiques porteurs de développement (le numérique avec notamment le big data et les objets connectés, nanotechnologies, biotechnologies agrotechnologies, nouveaux matériaux, technologies énergétiques, chimie végétale, biomimétisme, production additive, etc.).
La recherche joue évidemment un rôle capital dans l’effort nécessaire. Malgré le Crédit d’impôt recherche et ses effets d’aubaine, l’insuffisance globale de la R&D des entreprises constitue un handicap majeur pour notre pays. La création d’un pôle public de la recherche, dont les objectifs seraient de définir de grandes priorités pour l’effort de recherche et d’infléchir la recherche des entreprises vers des objectifs d’intérêt national, permettrait d’agir pour redresser la barre. Par la conception de son organisation, ce pôle public devrait favoriser la participation de tous les acteurs à l’élaboration des décisions.
Par ailleurs, les pôles de compétitivité devraient être profondément transformés. Nous parlons de « pôles technologiques de coopération » intégrant, comme des objectifs prioritaires, la production et la valorisation des recherches sur notre territoire.
Il faut pouvoir intervenir aussi sur les priorités des financements bancaires à l’économie. La création, au travers d’une loi bancaire ambitieuse, d’un pôle public financier articulant l’action de grands acteurs publics (BPI, Banque postale, Caisse des dépôts), des banques mutualistes et d’une ou plusieurs grandes banques à nationaliser donnerait une assise forte à la capacité d’action de la puissance publique. De nouvelles règles de crédits sélectifs favoriseraient les investissements utiles, générateurs d’emplois et d’avancées écologiques.
La création de fonds de développement soutenant le crédit sélectif, aux niveaux des régions comme au niveau national, favoriserait l’essor de l’intervention démocratique et citoyenne dans la promotion des projets industriels. Cette bataille devrait être relayée au niveau de l’Europe pour un Fonds de développement social et écologique.
Nous le voyons bien, pour exprimer tout son potentiel, le renouveau industriel doit s’intégrer dans un processus d’épanouissement démocratique à tous les niveaux. Celui-ci suppose des pouvoirs nouveaux d’intervention et de décisions des salariés : avis obligatoire du CE pour les décisions stratégiques, participation de représentants des salariés dans les conseils d’administration, droit de veto suspensif des élus du personnel en cas de fermeture de sites ou de délocalisation avec l’obligation d'examiner les propositions des salariés, droit prioritaire de reprise de l'activité par les salariés en coopérative s’ils le souhaitent font partie des avancées indispensables.
Soulignons que les outils de maîtrise sociale de l’activité économique applicables à l’industrie vont plus loin encore. J’ai parlé des pôles publics financiers et de la recherche, précisons que des pôles publics doivent être constitués dans les filières stratégiques pour orienter les politiques d’investissement, de développement et de recherche. Ces pôles publics sont obligatoirement différents selon les activités concernées. Ils peuvent s’appuyer sur toute une palette d’outils de maîtrise collective. Nationalisations (tout particulièrement dans les services publics et certains grands secteurs stratégiques par exemple le médicament ou l’énergie), prises de participations décisives, voire majoritaires, golden share (action avec droit de veto) dans des entreprises sensibles, créations de groupements d’intérêt économique (GIE) permettant aux entreprises de coopérer sur des projets ambitieux. Citons enfin deux outils dont j’ai déjà parlé : la constitution de coopératives par les salariés, la mobilisation de crédits bonifiés toujours conditionnés à la définition d’objectifs sociaux et environnementaux, etc.
La dimension européenne du renouveau industriel est essentielle. Une rupture doit être opérée avec le dogme qui prévaut depuis plus de 25 ans selon lequel la meilleure allocationdes ressources productives résulte de la concurrence libre et non faussée. Cette affirmation péremptoire a été largement démentie par les faits. C’est en son nom que Bruxelles a interdit les coopérations sur des projets structurants, assimilées à des distorsions de concurrence ou qu’elle a mené l’offensive à l’encontre des services publics. C’est encore en son nom que se négocie dans notre dos un traité transatlantique de libre échange qui, s’il aboutissait, consacrerait la domination absolue des normes américaines et des prétentions des multinationales. Il faut absolument se battre pour écarter ce péril.L’Europe a donc besoin d’une politique industrielle affirmée pour faire face aux grands défis de la transitions écologique, de l’irruption du numérique de nouvelle génération, du niveau de son effort de recherche, du caractère impératif de construire des coopérations entre grandes entreprises mais aussi de favoriser les coopérations entre ces dernières et les PME ou ETI qui constituent la vascularisation des territoires. L’Europe a besoin aussi d’une politique de l’énergie alors qu’elle est loin de subvenir à ses besoins et que les émissions de CO2 doivent être drastiquement réduites.
Chers amis et camarades,
Je viens d’exposer les principales analyses et propositions que nous soumettons à notre débat. Mais je veux les assortir d’un commentaire qui me semble important. Notre démarche n’est surtout pas de réfléchir en vase clos, repliés sur nous même. Nous avançons des idées, une vision, nous les avons travaillées mais leur fonction est avant tout de participer à une construction collective qui nous dépasse largement. L’objectif, c’est d’ouvrir une perspective de développement profondément renouvelé, profondément transformé pour notre pays. C’est d’ancrer la conviction qu’une voie de progrès économique, social, écologique, démocratique existe en rupture avec l’avenir de régression qu’on nous prédit de toutes parts. C’est de travailler à un rassemblement majoritaire pour des politiques alternatives en rupture avec l’austérité.
Nous voulons donc réfléchir et travailler avec tous les acteurs concernés : les salariés, les organisations syndicales, les experts et chercheurs, les associations, les élus, les forces
politiques, les responsables de PME et, je le dis, les entrepreneurs porteurs de projets et soucieux du développement du pays. Nous voulons le faire à tous les niveaux et sous les formes les plus diversifiées. Avec votre participation, cette volonté partagée, j’en suis certain, s’exprimera dans la suite de nos travaux.
Nous devrons aussi débattre de la bataille politique que nous menons en tant que Parti communiste français, ou dans le cadre du Front de gauche, pour faire progresser les objectifs dont je viens de parler. Nous consacrerons à cela la plus grande partie de la matinée de demain à partir d’une introduction présentée par Nicolas Marchand. Dans ce cadre, nous devrons concrétiser la mise en place d’une commission de travail sur la politique industrielle qui devra fonctionner en interaction étroite avec la commission « entreprises et lieux de travail » et en liaison avec les différentes commissions concernées. La convention nous permettra également d’aller plus loin sur la mise en œuvre de nos décisions de congrès en ce qui concerne le développement d’un véritable réseau militant au sein des entreprises et sur les lieux de travail.
Nous avons donc un programme chargé.
Nous avons conscience que cette convention ne dira pas le dernier mot sur tout. Loin de là. En ce sens, elle n’est pas la fin mais plutôt le commencement d’un processus d’intervention,de propositions et de luttes sur des enjeux déterminants pour notre avenir.
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