éditorial
Cinq mois après le non des França is au projet de const itut ion eur opéenne , la situat ion sociale et politique de notr e pays confirme bien que ce vote mass if et populaire n’a pas été un vote d’humeur. Le 4 octo bre, ce sont plus d’un million de salariés qui ont rappe lé au gouvernement et au patr onat l’exas pérat ion du monde du tra vail face à la dégradat ion cont inue du pouvoir d’achat et de l’emploi. Quant à la lutte pour tant extrêmement dure des marins de la SNCM, le soutien des Marse illais comme des França is a confirmé com bien notr e vision de la société et de l’avenir étaient anta gonistes de celles des hérauts de l’idéologie libéra le.
Parallèlement , diverses étu des, je pense notamment à l’enquête comman dée à Vénissieux par André Gerin, ont confirmé la béance du fossé existant aujour d’hui entr e notr e peuple et «sa» classe politique : les par tis qui ont voté au Parlement à 85% pour le projet de Const itution eur opéenne se sont ainsi foncièrement discréd ités .
La dr oite a p arfaitement pr is la mesur e d e cette situat ion : les déclarat ions de Sarkozy font cer tes froid dans le dos… Elle cherche à récupér er de façon populiste ce mécontentement populaire. Cette récupérat ion vise à donner une légitimité politique qui fait largement défaut à ce gouvernement suite aux désastr es électorau x qu’il a connus en 2004 et 2005, mais qui reste nécessa ire pour poursu ivre l’œuvre de démolition sociale. C’est bien en cela que le jeu entr e Villepin et Sarkozy n’est rien qu’un poker menteur . Auss i, lors que l’on analyse le budget pour 2006, il semb le bien que les car tes qu’ils ont sor ties de leur jeu soient de simples valets… «valets du capital» bien sûr.
D’abord, ce budget est le premier appliquant la nouvelle loi organique relative aux lois de finances (LOLF). En 2001, cette réforme , dénoncée par les parlementa ires commun istes , fut pr ésentée comme une volonté de rééqu ilibrer les pouvoirs budgétaires en faveur du Parlement . Le ministèr e des finances n’avait alors acce pté cette per te d’influence toute théor ique qu’en contr epar tie de l’inst itutionna lisat ion d’une logique de «performance », intr oduisant dans la gest ion publique des critèr es et méthodes du privé, et de nou veaux rationnements de la dépense publique.
La LOLF app araît bien pour ce qu'elle est : un levier pour l'austér ité budgétaire avec l'annonce dores et déjà de la suppr ess ion de plus de 5000 postes de fonct ionnaires pour 2006. En revanc he, on a bien du mal à percevoir les progrès en matière de transpar ence et d’accroissement du pouvoir du Parlement : la sincér ité de ce budget est nulle, tant les prévisions de croissance choisies par Thierr y Breton (2,25%) sont irréa listes . Mais plus fondamenta lement , on ne voit pas en quoi les pouvoirs du parlementa ire ont augmenté : la procé dure budgétaire reste sous le contrô le unique du ministèr e des finances . Et son exécut ion relève de la seule res ponsa bilité de l’appareil d’Etat, qui sera en permanence incité à rédu ire les dépenses salariales.
Mais c’est évidemment le contenu de ce budget qui prête le plus de flanc à la critique : la droite a encor e rédu it l’ass iette de l’impôt de solidarité sur la fortune . La fisca lité sur les entr eprises (Taxe profess ionne lle, impôt sur les sociétés) comme la progress ivité de l’impôt sur le revenu ont encor e été rédu ites . En outr e, le gouvernement fait le choix d’entr eten ir le poujadisme latent d’une par tie de l’opinion pour just ifier de nou velles défiscalisations des hauts revenus financiers, immob iliers et fonciers en créant ce fameu x bouc lier fisca l, limitant le taux d’impos ition maximal d’un ména ge à 60% de son revenu. Enfin, en rédu isant les ressour ces de l’Etat, le gouvernement contr ibue à accentuer les facteurs de déficits publics. … Et c’est au nom de la réduct ion de ces déficits, sour ce d'endettements supp lémenta ires dont se repaissent les mar chés financ iers , qu'il just ifie de nou veaux freinages de la dépense publique.
Cette politique ne répond évidemment pas aux problèmes que nous rencontr ons sur le terra in. Ainsi, la dégradat ion cont inue des prestat ions de ser vice public est de plus en dénoncée par nos conc itoyens : la Poste , les hôpitaux de proximité, la DDE, EDF, cont inuent de déména ger des terr itoires les plus fragiles, entr etenant un colère extrêmement forte dans nos cam pagnes. C’est dans ces mêmes terr itoires, loin des regards des médias, que dispara issent 25000 exploitations agricoles chaque année : com bien de paysans n’ont aucun successeur , voire même sont contra ints de mettr e la clé sous la por te et de rejoindre les bata illons des chômeurs ?
Comme ailleurs , mais de façon plus aiguë dans les terr itoires rurau x, les industr ies sont con frontées à de nom breuses difficultés : com bien de chefs d’entr eprise m’inter pellent pour dénoncer la pr ess ion de leurs donneurs d’ordre ou de leurs distributeurs , qui cherchent à s’acca parer toute la valeur ajoutée créée dans ces usines ? Combien d’autr es, étran glés par l’explosion de leurs charges financ ières, sont à la recherche de modes de financement alternat ifs à ceux décou lant du choix de la domination des mar chés financ iers et des orientations actue lles de la Banque centra le européenne ? Enfin, pour cour onner le tout , ce sont des fonds spécu latifs qui rachètent des joyaux industr iels. De véritab les patr ons voyous y sont mis en place : à charge pour eux de récupérer des brevets , des mar ques, puis de provoquer la faillite des entr eprises cons idérées : pr ès de Thiers , c’est l’orfèvrerie Couzon qui fut mis cet été en liquidation judiciaire, entra înant dans sa chute presque 200 salariés, dont beaucou p, âgés, n’ont pour format ion que celle du quotidien, dans la seule entr eprise qu’ils ont connue … Avec cette faillite supp lémenta ire, c’est auss i toute l’identité et la trad ition coute lière du bassin d’emploi thierno is qui sont à l’avenir menacés . Je vais donc proposer la mise en place d’une comm ission d'enquête parlementa ire sur le dépeçage et la liquidation d'industr ies trad itionnelles par des Fon ds d'invest issement afin que ces pratiques soient révélées et des propositions législatives élaborées pour y mettr e fin.
C’est évidemment à la réso lution de ces problèmes que nous devons nous atte ler, si nous souha itons que le PCF soit identifié dans l’opinion comme une force alternative rée llement cré dible et rassemb leuse .
Nous ressentons ainsi le besoin de faire par tager devant tous les acteurs économ iques et sociaux, et au plus près de la population, nos pistes de réflexion comme nos propositions en matière économ ique.
La quest ion centra le est d’abord celle du financement de notr e économ ie et notamment de son efficac ité en matière d’emploi, de format ion, de recherche et d’aménagement du terr itoire. A ce titre, notr e proposition de créer, au plan nationa l, un pôle banca ire public autour de la Caisse des dépôts, des ser vices financ iers de la Poste , de la Caisse d’épargne,…me paraît tout à fait répondr e aux attentes des acteurs économ iques locau x. Ce pôle public sera it un atout appr éciable pour financer grâce à une nou velle mob ilisat ion du cré dit banca ire faisant reculer le rôle des marchés financ iers le développement des entr eprises, tout en privilégiant les projets les plus por teurs d’emploi dura ble et de qualificat ions. Mais sa mission ne pourra bien évidemment s’arrêter là : aujourd’hui, du fait de la prise de contrô le d’entr eprises par des fonds spécu latifs, et donc de la domination du capital financ ier sur le capital physique, les dirigeants d’entr eprise n’ont plus d’intérêt au développ ement de leur out il industr iel. Le cas de Couzon, mais auss i de la chaussur e à Romans , illustr e bien cette situat ion. De plus en plus, seuls les salariés et les habitants des régions cons idérés ont intérêt à un développ ement et une modern isation des industr ies dans les terr itoires en liaison avec de nou veau x effor ts de rec herche et de format ion. Auss i, l’objectif de ce pôle public de financement , doit auss i être de prévenir les prises de contrô le du capital de ces entr eprises, et répondr e de façon socialement efficace à leurs besoins de financement afin de mainten ir l’ancra ge terr itorial de ces industr ies. Tout de suite il est poss ible, dans chaque région gérée par la gauc he, de créer un Fonds régiona l pour l’emploi et de la format ion. Celui-ci, alimenté par des cré dits d'action et de développement économ ique du budget du Conse il régiona l prendrait en charge tout ou par tie des intérêts payés par les entr eprises sur leurs cré dits à moyen et long terme pour leurs invest issements : plus ceu x-ci programmera ient d’emploi et de format ion, plus augmentera it la prise en charge des intérêts par le Fonds.
Nous devrons auss i chercher à aller au-delà de ces problémat iques : assur er le développ ement des forces productives est une chose , mod ifier les rappor ts de production en est une autr e, tout autant incontourna ble. C’est bien pourquoi salariés comme élus locau x devraient êtr e par tie prenante des orientat ions comme des choix de financement de ce pôle financ ier public comme des fonds régionau x pour l’emploi. Au sein même des entr eprises, les salariés comme les élus devraient avoir leur mot à dire dans la définition des orientat ions straté giques des entr eprises, dans l’évaluation de l’impact de cette activité sur son environnement externe … C’est auss i dans ce cadre que pourr ont s’inscr ire nos propositions en matière de sécur ité emploi format ion.
Nous avons là un cer tain nom bre de propositions alternatives et cré dibles. A nous d’en tra vailler d’autr es, je pense notamment à la quest ion des rappor ts entr e sous-traitants et donneurs d’ordre ou entr e les PME et la grande distr ibution, que nous n’avons malheur euse ment pu qu’effleur er durant la discuss ion de la loi PME l’été dernier. De même , je me félicite de la mise en place du Réseau nat iona l d’act ions pour l’em ploi (RAPE) annoncé le 22 octo bre dernier lors du forum national des salariés en lutte à Paris et m’engagerai dans son animation. Nous ser ons ainsi prêts à par tir à la bata ille politique pour offrir à notr e peu ple d’autr es pers pectives d’avenir, pour changer vraiment la vie !
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