Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Les marchés à terme indicateurs ou amplificateurs ?

Alain Vigier

 

La période pendant laquelle l’OPEP était considérée comme la seule responsabl e de l’augm entation des prix en raison de ses efforts pour réguler sa production a été suivi e par celle l’augm entation de la consommation énergétique en Inde et en Chine a dominé le débat. Aujourd’hui nombre d’économistes admettent que les grands pétroliers qui ont tiré d’énormes profits du renchérissement du pétrole brut ont, a de rares exceptions près investi très peu pour augm enter leurs capacités de production et de raffinage afin d’assurer à leurs actionnaires des revenus immédiats et importants. Ils ont de ce fait contribué à la tension qui règne sur les marches pétroliers.

Un autr e élément commence à les inter peller. Il s’agit de la spécu lation. On pense toujours à ce qui s’était passé lors des différentes crises pétrolières l’on voyait des cargaisons changer plusieurs fois de mains. Mais le nom bre et l’influence des négociants spécu lateurs a cons idéra blement diminué, La spécu lation est devenue a la fois plus subt ile, plus constante , plus organique. Elle trouve un cadre propice à son développement dans les marchés à terme pétroliers de New York ( NYMEX) et de Londres (IPE).

Les marchés à terme des différentes «commodities» (marchandises répondant à des besoins mond iaux permanents et vendues sur base de spéc ificat ions internat ionales comme les céréa les, le café, le cacao , les agrumes ou les métau x) ont connu un essor remarquable dès la fin de la première guerr e mond iale. Ils permetta ient aux négociants de s’engager à «découvert» c’est à dire de vendre même à des prix fixes des quant ités dont ils ne disposera ient pas à l’instant «t» en promettant de les livrer à l’instant «t+1». L’opérat ion de couverture cons istant alors à acheter en Bourse , simultanément à la vente , des «droits à produits» équivalents en quant ité. Lors que le négociant achètera les marchandises nécessa ires à la livraison, si leur prix est en hausse par rappor t à celui de la période de son engagement vis à vis de son client , il est probable que le prix en Bourse aura suivi la même tendance . Ainsi il sera couvert dans la mesur e sa perte dans l’opérat ion physique aura été com pensée , par son bénéfice en Bourse lors de la revente de ses «droits».

Il aura donc rédu it le risque à la différence marginale éventue lle entr e l’évolution du mar ché physique et celle du marché à terme . Toutefois pour que le dénouement se fasse dans de bonnes con ditions il faut qu’il y ait, à l’instant voulu, suffisamment d’acheteurs dispon ibles qui puissent assur er la fluidité nécessa ire. Cette fluidité est donc assurée par des inter venants de toute sor te non nécessa irement liés commer cialement aux produits cons idérés .

Aujour d’hui on voit opérer sur les marchés à termes pétroliers les fonds de pension et les fonds de placement qui inter venaient déjà activement sur les marchés à termes des «commodities» et qui sont att irés par les fluctuat ions du pétrole. Ce dernier est cons idéré de plus en plus comme une «commodity».Par ailleurs l’act ivité sur les marchés à terme pétroliers se développe auss i, de plus en plus, en raison de la plus grande propension des petits producteurs ou des grands transpor teurs à fixer leur prix de vente ou leur prix d’achat dès qu’ils jugent le niveau de prix favora ble. Le jeu des marchés à terme leur permet d’obtenir ce résu ltat à la différence près d’ évolution physique/Bourse , en vendant ou achetant en Bourse des «droits» préalablement aux ventes ou achats physiques.

Les grands pétroliers paraissaient, au début, indifférents à la créat ion des marchés à terme pétroliers . Ils y ont trouvé rapidement un intérêt cer tain dans la mesur e leur extens ion a permis de faire de leurs cotat ions une véritable référence de prix sur laquelle de surcroît ils pouvaient inter venir. Aujour d’hui les prix que l’on nous donne sont uniquement ceux de la Bourse et ils ser vent bel et bien à «former» le prix de l’essence et du gaso il vendus à la pompe. Le quotidien italien la STAMPA indiquait le 9 Juillet dernier que le panier OPEP, c’est à dire la moyenne des prix des 11 qualités de pétrole brut livrées par les grands pays producteurs , qui reflète mieux le prix des fourn itur es réelles se situait à 54,82 dollars le baril alors que le niveau de la Bourse était à 61,90 dollars .

On com prend mieux à la lumière de ces mécan ismes la ner vosité de ce marché et ses réact ions face aux aléas politiques, aux relations de l’Iran avec l‘Inde et la Chine qui recherchent une cer taine coo pérat ion, aux initiatives russes concernant le statut de leur production ou dans leurs relations avec cet énorme nouveau marché consommateur ou enfin face aux tentat ives du Venezuela de créer une marché des Caraïbes qui privilégie les pays de cette région du monde en y intr oduisant de nouveaux critèr es dans les échanges énergétiques et en le protégeant des habituelles relations avec les multinationales pétrolières.

La créat ion récente à Paris d’un marché à terme de l’électricité «le powe rnext» laisse envisager, comme pour le pétrole, une évolution spécu lative dans la distr ibution de cette ressour ce marquée, jusqu’à ce jour, par la stab ilité.

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