Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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L’intérêt de l’Inde

La perception de l’Ind e est actuellement en train de chang er, en France comme dans le monde . Ce pays de plus d’un milliard d’habitants est de plus en plus fréquemment perçu comme l’une des grandes puissa nces potentielles du siècle à venir. Il côtoie la Chine dans l’idée de ceux qui, cherchant à se figurer le globe dans les décennies prochain es, pensent, disent ou écrivent que le continent asiatique jouera un rôle prédominant.

Dans ce cadre, la démo graph ie même de l’Inde est la plupar t du temps analysée comme un facteur de puissance , alors qu’elle app ara issa it il y a peu de temps encor e comme un élément const itut if de la misèr e indienne . Un récent numér o de la Revue de la Chambre de Commer ce et d’Industr ie de Paris (ACCOMEX) prévoit, par exem ple, que l’Inde const ituera bientôt le cinquième pôle de puissance économ ique mond iale, après les Etats Unis, l’Europe, le Japon et la Chine. Un rang que l’Inde obtiendrait grâce à sa capacité à affronter de façon efficace les défis de l’ère libéra le histor iquement précipitée par la dispar ition de l’URSS et la fin de la guerr e froide. Cette vision des choses explique d’ailleurs pour quoi l’immense population de l’Inde n’est désorma is plus cons idérée comme une entra ve au développ ement , mais un fouet pour la croissance : elle const ituera it le nerf d’une nouvelle dynamique économ ique fondée sur la consommat ion. Car ce que privilégie dans cette optique la plupar t des observateurs , pr écisément , c’est l’émer gence d’un puissant noyau de consommateurs indiens – quelque 300 millions à 350 millions de personnes – suscept ible de relancer la mach ine économ ique nat ionale indienne et de lui faire jouer un rôle nou veau dans le monde néo-libéral actue l. Sans entr er ici dans le débat – pour tant fondamenta l – qui cons istera it à critiquer les prémisses d’une telle « entrée » dans la réflexion qui se fait jour, aujour d’hui, sur la place et le rôle de l’Inde – pr émisses qui con duisent notamment à faire l’impasse sur les contra dictions internes du mode de développ ement indien et sur celle de son inser tion dans l’économ ie ca pitaliste-monde -, on se bornera à sou ligner ici quelques originalités ou spéc ificités de ce que cer tains appellent désorma is le « modè le indien», sans d’ailleurs repren dre à notr e com pte, et à la lettr e, le mot de « modè le ». Deux grands tra its de l’Inde nous semb lent pouvoir êtr e distingués , utiles à la réflexion.

Le premier concerne la notion d’indépendance nationale

Une notion qui, pour les Indiens, est le produit histor ique d’un très long com bat contr e le colonialisme britann ique, l’Inde const ituant l’un des pays les plus longuement colonisés du monde (1). Le bilan économ ique de la colonisation est très lour d. Son legs est catastr ophique sur le plan agricole le monde rura l indien est littéra lement exsangue, tant sur le plan humain que financ ier quan dl’Inde ac quier t enfin son indépen dance en 1947. Il est plus intér essant sur le plan industr iel. A par tir du début de la seconde moitié du 19è siècle, des trusts indiens , propriétés de quelques «grandes familles» indiennes , par viennent à la fois à coo pérer et à concurr encer le capital britann ique sur le sol même de l’Inde. Ils vont peu à peu const ituer la colonne ver tébra le de la nou velle bourgeoisie nat ionale indienne , dont l’un des objectifs majeurs devien dra, dès lors , de corr iger après l’indépendance les distors ions imposées à son développ ement par la domination britann ique. Pour schémat iser, on dira que cette bourgeoise nat ionale, en par venant à tirer profit des grandes crises ayant affaibli la force de frappe britannique (première guerr e mond iale, crise de 1929, deuxième guerr e mond iale), est arr ivée en quelque sor te à racheter son pays aux Anglais en 1947 : A cette date, la majeur e par tie des ca pitau x industr iels, financ iers et commer ciaux invest is en Inde le sont par les grou pes indiens . Ce qui signifie que, sur le plan économ ique, l’Inde se retrouve dans un cas de figure très déviant par rappor t à l’ensemb le des autr es pays colonisés de la planète : elle possè de les moyens économ iques de son am bition politique. Et celle-ci ne cons iste rien moins qu’à confor ter, désorma is sur ses propres bases , l’indépen dance politique con quise grâce au Par ti du Congrès qui a su mob iliser autour de son programme des dizaines de millions d’hommes et de femmes . Comment l’In de va-t-elle le faire ? Un économ iste aujour d’hui décé dé, S. Chakravar ty, qui fut pr ésident du conse il des exper ts économ iques au près du Premier ministr e jus qu’au début des années 1990, l’explique for t bien (2) : en donnant à l’Etat les mo yens d’inter venir dans l’économ ie. Et l’auteur de préciser que cette inter vention publique fut le produit d’une politique volontar iste dest inée à mob iliser les ressour ces du pays pour lui permettr e de «décoller» sans trop mod ifier ses grands équilibres politiques et sociaux. Notamment , injecter des capitaux dans les secteurs lour ds de l’économ ie (méta llurgie, sidérur gie, chimie lour de, nucléaire à des fins civiles…), devient le moyen de favoriser la croissance du mar ché nat ional, de le préser ver contr e la concurr ence occidenta le et, au bout du com pte, de promou voir l’indépen dance nat iona le. Pen dant au moins trois décenn ies, tout un pays se retr ouva derr ière cet objectif global que le Par ti du Congrès n’hésita pas à qualifier de «socialisant», voire même de «socialiste», et sur lequel vint se greffer la coo pérat ion soviétique. La plus grande par tie de l’électorat populaire vibra au diapason de cette straté gie animée par les Premiers ministr es J. Nehru puis I. Gan dhi, tand is que les patr ons des grands trusts privés virent dans cette inject ion mass ive de capitaux publics le moyen privilégié de «générer du capital privé» (3) dans le ca dre d’un mar ché nat ional relativement bien protégé de la concurr ence internat ionale par toute une batter ie de mesur es fiscales, douan ières et tar ifaires. Ce « modè le » de développ ement , base de la politique de non-alignement de l’Inde hérissera les capitales occidenta les durant toute la période de la guerr e froide et les con d uira à le st igmat iser comme un succédané «mar xiste» ou «bureaucrat ique» de l’économ ie soviétique.

Alors qu’en vérité, il s’agissa it d’un des plus purs produits de «capitalisme monopo liste d’Etat» que le monde ait produit au cours du 20è siècle ! Tant il est vrai qu’il s’agissa it, comme le dit Chakravar ty, de développ er le pays sans trop attenter à ses grands équilibres sociaux, en clair sans attenter rad icalement aux rappor ts de classes de l’Inde post-coloniale. Mono poles industr iels publics et grands grou pes privés trouvèrent tous leur com pte dans cette politique, qui s’effectua sur fond (impor tant) de réformes agraires dest inées à faire émer ger un solide cor ps de paysans capitalistes aisés et dans le cadre (non moins impor tant) de législations industr ielles succes sives visant à faciliter l’émergence d’une petite et moyenne entr eprise de type moderne (c’est-à-dire non ar tisana le). Tout cela n’alla, cer tes pas, sans conflits internes au sein du bloc au pouvoir const itué par les principales classes et couc hes dominantes du pays. Mais cela laissa sur le côté de la route des centa ines de millions de paysans pauvres, d’ouvriers agricoles et d’ar tisans pour les quelles cette politique n’était pas faite. Les élites dirigeantes se conten tèr ent seulement d’es pérer que «le peu ple» par vien dra un jour à bénéficier des effets d’un développement national intégré conçu comme devant tirer le pays dans son ent ier vers le haut. Et c’est bien là que le bât de la politique con gress iste blessa le pays : on le mesur e aujour d’hui dans des secteurs auss i impor tants que l’éducat ion : plus de cinquante ans après son indépendance , près de 40% de la population demeur e ana lph abète , les femmes étant plus que les hommes les grandes victimes du capitalisme d’Etat à l’indienne .

C’est cette straté gie de développ ement que le Par ti nationa liste hindou (le BJP (4)) reprit à son com pte quan d il arr iva au pouvoir à la fin des années 1990. Dans le nouveau conte xte de l’après guerr e froide, il lui donna une tournur e nettement plus agress ive. L’ «Inde qui brille», pour repren dre le slogan électora l du BJP des élect ions législatives de 2004, fut celle des démantè lements du secteur public, de l’ouver tur e à la concurr ence interne et externe , et du consommateur promu nouveau roi de l’économie. Grâce à lui, l’Inde allait définitivement entr er dans la 21è siècle. C’est d’ailleurs ainsi qu’elle y est entrée , avec un taux de croissance sens iblement supér ieur depuis 1991 à celui des décenn ies précé dentes( 5), et le creuse ment d’inégalités sociales de plus en plus mar quées . Les mois précé dents les élect ions de 2004 furent les témo ins d’une vague sans précé dent de suicides (plus de 20 000, peut-êtr e) de paysans ruinés dans l’Etat de l’An dhr a Pradesh dont le Chief minister – grand admirateur de l’informat ique devant l’Eterne l préten dait faire un modè le de modern ité. Et le Par ti du Congrès, que l’on disait à jamais inca pable de regagner le pouvoir, le regagna. Mais ne le regagna pas n’impor te comment : avec le sout ien électora l nécessa ire des commun istes . Le moins qu’on puisse dire est q ue l e co m e-back d u Par t i commun iste in d ien (ma rxiste ) dans la vie politique du deuxième Etat démograph iq ue de la planète n’est pas tota lement passé inaperçu à l’au be libéra le de ce 21è siècle. L’In de, décidément , toujours déviante quelque par t, a des choses à dire au monde .

Le deuxième trait de l’Inde est lié à la façon politique dont fonctionne l’Inde, qui est d’être démocratique.

L’In de est attac hée à ses élect ions libres, à la plura lité de ses par tis, à l’express ion plurielle et pacifique de ses multiples sens ibilités , à la divers ité de ses opinions et de ses religions . Nul, en Inde, ne son ge à remettr e en cause ces règles de com por tement , horm is quelques petits grou pes armés qui se réclament du maoisme mais dont le relatif regain d’act ion dans cer taines par ties de l’Inde joue un rôle marginal. Deux raisons , qu’on pourra it qualifier de trad itionne lles, expliquent l’intérêt que l’Inde por te à la démocrat ie politique. D’une par t, la démocrat ie est le produit une longue con quête du mou vement d’indépendance nationale, auss i bien d’ailleurs sur ses propres pulsions de violence que contr e la violence du Raj (règne) britann ique. D’autr e par t, elle app ara ît à la grande majorité des habitants comme le meilleur moyen de mainten ir l’unité d’un pays très divers sur tous les plans (régional, religieux, linguistique, communauta ire), cette grande divers ité risquant toujours de représenter une menace pour l’express ion d’une co hérence nat ionale légitime à supposer qu’elle ne fasse pas l’objet d’une gouverne menta lité démocrat ique. Dans la même veine, la laïcité (6) de l’Etat , sur laquelle tenta précisément de revenir le BJP, fut auss i conçue comme le meilleur garant de l’unité nationale. Il en alla également de même de la décentra lisat ion des inst itut ions et des pratiques politiques , une Union indienne trop «concentrée » autour de son Etat centra l étant (à juste titre) perçue comme un facteur d’explosion plutôt que d’intégration dans le cadre de cette diversité. Mais il est aujour d’hui une troisième raison pour laquelle l’Inde appr ofon dit – dans des con ditions contra dictoires le contenu de sa démocrat ie. Elle est liée au très vivace système des castes . Disons , pour êtr e bref et didactique, que l’Inde conna ît d’aujour d’hui une sor te de véritab le révolution sociologique dont les implications sont immenses . Le système trad itionne l des castes (dans sa vers ion brahmanique, c’est-à-dire dans la façon dont les hautes castes l’ont constru it) est en tra in d’imploser, alors que la caste elle-même se renforce. Cela n’est peutêtr e pas très facile à conce voir pour un França is qui ne garde plus que le sou venir très assour di de son ancienne société d’ancien Régime divisée en trois Ordres, cette division n’ayant au demeurant jamais été auss i com plexe et autant inst itut ionna lisée ni, sur tout , ritua lisée, qu’en Inde. Cela est pour tant relativement simple à expliquer dans son principe. De moins en moins de gens , en Inde, croient au système des castes tel qu’il a été hiérar chisé brahmaniquement autour des notions de pureté et d’impureté, les castes «pures» (les moins nom breuses) s’attr ib uant évid emment le h aut d e l’éc h elle, les caste «impur es» (les plus nom breuses) étant reléguées dans les échelons rituels et sociaux inférieurs de la société. Ce système idéologique aux implicat ions sociales imméd iates a volé en éclat, sous l’effet de la percée démocrat ique acquise grâce à l’indépen dance . Non seulement les gens votent en Inde, mais ils votent «act ivement », c’est-à-dire qu’ils n’acce pt ent plus d’êtr e les électeurs pass ifs de nota bles locau x appartenant trad itionne llement aux hautes castes , les quels mob ilisaient leurs réseau x lors de chaque élect ion. De plus en plus d’électeurs déterm inent leur vote sur la base de la façon dont, eux-mêmes , se figurent le monde dans lequel ils veulent vivre. Les femmes , par exem ple, ne votent plus systémat iquement comme leur mari ; les « basses » castes ne votent plus non plus comme « on » leur disait de voter. Au contra ire, les citoyens de « basses » castes vont voter pour ceux qui leur promettent d’améliorer leur con dition. Sous leur press ion, tous les Etats de l’Inde ont été contra ints d’adopter des mesur es législatives en leur faveur. A ce jour, elles em pr untent toutes la même voie fondamenta le, celle de la politique dite de «discrimination positive» ou de quotas . Des quotas sont déterm inés , censés refléter plus ou moins la proportion des castes les plus «basses » dans la population, et dest inés à rétab lir plus de just ice en matière d’em plois. Ainsi, chaque examen (comme les équivalents de notr e cer tificat d’étu de, de notr e brevet ou de notr e bacca lauréat ), chaque concours administrat if ou para-administrat if, fait l’objet de quotas réser vés en faveur des postu lants appartenant aux castes les plus basses . Dans cer tains Etats , ces quotas peuvent atte indre les 80%, dans d’autr es friser les 50%. La consé quence est claire : pour avoir du tra vail, quan d on est «listé» dans la caté gorie des castes les plus «basses », on a intérêt à revendiquer son statut de caste pour bénéficier des quotas . Ce qui fait que de plus en plus de gens crient haut et for t qu’ils sont de basses castes , alors même qu’ils ne croient plus au système ( br ahmanique) des castes . Dit autr ement , cela signifie que la notion de caste ne se définit plus en terme religieux ou ritue ls, mais en terme économ iques et sociaux, tant il est vrai que l’immense par tie des couc hes populaires app ar tient aux castes «inférieur es». La nomenc latur e officielle ne parle d’ailleurs pas de «castes arr iérées » pour

«lister» les caté gories de personnes app ar tenant à cette caté gorie quan d ces dern ièr es doivent béné ficier de quotas , mais de «classes arr iérées ». Quant à ceux de fin bout de l’éc helle, ceux qu’on app elait encor e il y a une quinzaine d’années les «intouc hables» (ils éta ient censés êtr e tellement «impurs » qu’on ne devait pas se laisser toucher par eux), plus personne ne les app elle ainsi : on les nomme – ils se sont nomm és eux-mêmes – «dalits», ce qui signifie littéra lement les «hommes brisés», les «hommes exploités». On peut com pren dre sans peine que cette nouvelle donne induit d’amples effets politiques . Bornons nous à l’un d’entr e eux : les pauvres (le lot commun des basses castes , des castes arr iérées , des dalits) ont désor mais intérêt à voter pour promou voir leurs intérêts . C’est d’ailleurs exactement ce qui se passe : l’Inde offre ce visage, encor e une fois déviant, d’un pays où les pauvres ont propor tionne llement tendance à voter plus que les r ic h es , le vote const ituant p our eu x un facteur d e confiance plus que de défiance dans l’avenir.

Certes, il serait totalement erroné de croire que, sur la base de ce qui vient être dit, un avenir radieux s’ouvre à l’Ind e.

Le rappor t entr e castes et classes n’a, dans ce pays, rien de simple. Tout est contra dictions, au contra ire. Ainsi, cer tains des conflits les plus violents qui montent dans le pays mettent aux prises les castes dites «moyennes » (elles ne font pas partie des trois «hautes » castes) aux castes dites «basses », les quelles se heur tent auss i durement aux dalits. Chaque groupe, dans sa volonté d’ascens ion sociale, est suscept ible d’écouter les voix de ceu x qui, promus au rang d’élites de chacun de ses groupes (ce s élites app artiennent sou vent à des familles dotées de propriétés foncières consé quentes) , jouent sur les différences des uns et des autr es pour tirer leur propre épingle du jeu. Le vote de caste ne saura it donc se confondre avec un vote de classe . Au demeurant , pres que tous les par tis politiques essa yent de se positionner pour, dans chaque circons cription, app ara ître les meilleurs défenseurs des castes const ituant l’électorat majoritaire de cette circonscr iption. Ce qui, parfois, donne lieu à de bien étran ges alliances électora les. Il n’empêche que, vus à l’éc helle de tout un pays, des centa ines de millions de personnes se sont mis en mou vement pour exiger un futur meilleur. L’id ée du dest in, d’un dest in qu’on ne saura it secouer car il sera it trop lour d, recule en Inde. Plus que jamais au para vant dans son histoire, l’Inde est devenue le lieu d’une citoyenneté – évidemment définie dans des termes indiens – act ive. Dans ce conte xte, voir un pays de plus de 600 millions d’électeurs renverser une majorité de droite et d’extrême droite éminemment favora ble au néo-libéralisme, qui plus est host ile à la laïcité, comme cela a été le cas lors des élect ions de juin 2004, est encor e plus significat if et digne d’intérêt . Tout comme il est très intér essant de noter que, parmi les grands vainqueurs de ces élections, figurent les commun istes , et singulièrement ceux du Par ti commun iste indien (Marxiste ) (7). Sans l’app ui du PCM, devenu la troisième force parlementa ire du pays (8), l’actuel gouvernement dirigé par le Premier ministre congressiste Manmo han Singh, ne pourra it avoir la majorité néces saire pour gouverner. Prudent , le PCM a refusé d’entr er au gouvernement , mais a pesé de tout son poids dans la définition d’un programme minimum de gouvernement qui est devenu la base référent ielle du tra vail de l’actue lle équipe au pouvoir. Sa logique, par exemple en matière de politique de sécur ité de l’emploi, contr edit explicitement celle du néo libéra lisme. Il n’est pas écr it d’avance qu’elle sera appliquée, mais il est clair que des dizaines de millions de gens, en Inde, aimera ient bien qu’elle le soit… L’Inde, en un mot, aborde ce nou veau siècle avec des armes qui font d’elle un pays à suivre de près. Ÿ

 

(*) Chercheur CNRS au CERI

  1. L’Inde devient officiellement une colonie de la Couronne britannique en

1857. Mais, économiquement, elle tombe concrètement sous la domination coloniale britannique bien avant cette date. Rappelons pour mémoire que la Compagnie britanniques des Indes – l’agent essentiel de la colonisation britannique est fondée à Londres par une poignée d’actionnaires en 1600.

  1. S. Chakravarty, Development Planning. The Indian Experience, Oxford, Clarendon Press, 1987.

  2. Comme le déclara à la fin des années 1950, devant la puissante Fédération des Chambres Indiennes de Commerce et d’Industrie, le propriétaire du deuxième plus grand groupe industriel privé de l’Inde, GDR Birla.

  3. Bharatya Janata Party (Parti du Peuple Indien).

  4. On ne saurait trop se garder des chiffres exorbitants souvent cités. La croissance du PNB indien a frisé les 8% en 2003-4 ; mais sur la période 1991 (année du lancement de la politique libérale) – 2004, la croissance annuelle se situe entre 4% et 5%, soit un peu plus qu’avant (3% de moyenne depuis le début des années 1950), mais quand même nettement moins que ce que l’on affirme parfois complaisamment.

  5. La laïcité à l’indienne (le sécularisme) suppose que l’Etat traite avec une égale bienveillance toutes les religions. En pratique, cela signifie que l’hindouisme majoritaire (85% de la population) ne peut être une religion officielle. Les musulmans, principale minorité religieuse, représentent quelque 12% de la population.

  6. L ’Inde compte deux Partis communistes, le PCI et le PCI(M), le PCI s’étant scindé en 1964. Avec le temps, le PCM s’est imposé comme la grande force communiste du pays.

  7. L’ Assemblée nationale indienne a 545 membres. Le PCM y compte 44 élus, le Parti du Congrès 145 sièges et le BJP 137 sièges. Le BJP et le Congrès (respectivement 21% et 26% des voix) ont en 2004 perdu chacun quelque 2% des voix par rapport à leur score des élections précédentes (1999). Le PCM, en revanche, s’est particulièrement bien tenu dans ses « bastions » du Bengale occidental et du Kérala, où ses candidats l’ont très souvent systématiquement emporté contre ceux du Parti du Congrès. Ce phénomène a été interprété en Inde comme le signe tangible d’une poussée à gauche dans le pays. Ajoutons que le PCM, surtout puissant dans ces deux Etats qu’il dirige (il est au pouvoir au Bengale sans interruption depuis 1977, ce qui fait de cet Etat le plus stable de l’Inde), est depuis longtemps favorable à l’expression d’une politique nationale décentralisatrice, ce qui le met en situation de jouer un rôle stratégique dans l’articulation des alliances avec les partis régionalistes de l’Inde, sans lesquels aucun gouvernement ne saurait aujourd’hui disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale.

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