Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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ALSTOM : Face à la vente à la découpe du groupe, l’alternative de la nationalisation

Après l’aluminium de Pechiney vendu aux Canadiens, l’acier d’Usinor aux Indiens, la chimie de Rhodia aux Belges, le ciment Lafarge aux Suisses, c’est au tour d’Alstom, un fleuron technologique et industriel, qui est dans l’œil des grandes manœuvres capitalistiques guidées par les seuls intérêts financiers.

L’offre de rachat de Général Electric (GE) sur la partie énergie du groupe Alstom et la contre-proposition de l’allemand Siemens posent la question de l’indépendance de notre pays dans les secteurs clés de l’énergie et des transports. Le devenir de l’emploi est aussi au centre de ce jeu de monopoly, avec la menace de plans sociaux de grande ampleur, afin de supprimer les doublons que comportent les fusions-acquisitions. L’enjeu est donc considérable pour notre pays et pour les salariés d’Alstom.

La vente à la découpe du groupe Alstom du secteur de l’énergie, voulue par les actionnaires, conduirait à la fragilisation de la partie transport face à la concurrence mondiale. Cette perspective aurait pour conséquence la disparition d’Alstom. Pour Siemens cette opération d’acquisition est de faire disparaître un concurrent. Pour Général Electric cette opération lui permettrait de récupérer les brevets, les savoir-faire, le carnet de commandes et les implantations industrielles.

Le Président de la République et Montebourg avancent l’idée de constituer un « airbus de l’énergie », ce qui reviendrait, ni plus ni moins, à faciliter l’absorption d’Alstom par Siemens. Rappelons que l’on est loin de l’exemple d’Airbus, qui doit sa naissance et son développement à une coopération d’entreprises sous l’impulsion d’une volonté politique inter-étatique.  Une hérésie dans l’Europe telle qu’elle fonctionne maintenant.

Alstom n’est pas une entreprise ayant raté un virage technologique majeur et engluée dans des difficultés industrielles. Au contraire c’est une entreprise qui a un carnet de commande de 50 milliards d’euros, de quoi donner du travail à ses salariés pendant 5 ans, un savoir-faire à la pointe dans le domaine des transports et de l’énergie, envié à travers le monde.

Mais le problème qui est posé n’est pas Alstom, le problème c’est Bouygues et les actionnaires qui ont lancé Alstom dans des aventures financières et ont ainsi fragilisé l’entreprise avec un endettement qui contraste avec sa réussite industrielle.

Dans notre département, Alstom Tarbes c’est plus de 700 emplois sur le site de Séméac avec un bureau d’étude au sein de l’établissement, un outil de production qui est classé centre d’excellence et de compétence en matière de traction de puissance par Alstom Transport. L’établissement de Séméac est adossé, avec d’autres industriels, à la plate-forme de recherche et d’innovation PRIMES, qui est située sur le site de l’Arsenal à Tarbes. La plate-forme est une antenne du CNRS depuis les années 2010, ce qui est un atout de premier plan pour les Hautes-Pyrénées.

Le nouveau site industriel d’Alstom, qui a été reconstruit à neuf en 2011, est une référence de niveau international pour la partie transport et représente un atout pour notre territoire départemental.

L’État doit donc prendre ses responsabilités avec la constitution d’un grand pôle public dans les secteurs de l’énergie et des transports avec Alstom, EDF, Areva, la SNCF, la RATP, soutenu par la Caisse des dépôts et consignations, la banque publique d’investissement. La constitution de ce grand pôle public permettra aussi de créer les conditions de recherches de coopérations européennes sur les domaines de l’énergie et des transports, visant à franchir des étapes nouvelles vers la transition énergétique.

La nationalisation proposée par les communistes ne devra pas être le « copier-coller » de celle de Sarkozy en 2004, qui a conduit à la situation actuelle, en ne rompant pas avec le dogme de la rentabilité financière qui marque la gestion du groupe. Dans le cadre de cette nationalisation version Sarkozy, l’État a versé 2 milliards d’euros de fonds publics, avec les résultats que l’on connaît.

Elle doit s’appuyer sur des nouveaux droits d’interventions des salariés et des comités d’entreprises sur la stratégie, la gestion et les objectifs de développement du groupe Alstom.

Il faut également un nouveau type de crédit, avec de très faibles taux d’intérêts, qui favorise l’investissement. Cela pose la question d’un nouveau rôle de la BCE (Banque centrale européenne) qui doit orienter le crédit vers l’emploi, la formation, l’investissement, plutôt que la politique de l’euro fort, soumise aux marchés financiers.  

Il est aussi nécessaire de développer une politique qui favorise la recherche-développement en appui avec les services publics, les universités et le CNRS.

Ainsi Alstom serait engagé dans un nouveau modèle de développement, avec des maîtrises publiques et écologiques, pour répondre aux besoins énergétiques et de transports de notre pays.

Philippe Barrière

(article paru dans les Nouvelles de Bigorre)

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