Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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1 - Une autre création monétaire : ça veut dire quoi ?

La prise de conscience de la profondeur de la crise économique due à la domination des marchés financiers met en avant comme jamais l’enjeu, pratique et théorique, de maîtriser la création monétaire. Historiquement, les issues des crises systémiques du capitalisme sont d’ailleurs marquées à chaque fois de transformations profondes de la création monétaire, de ses règles, de ses institutions (banques centrales, banques de second rang, monnaie, institutions monétaires internationales), et de son lien au reste de l’activité économique. Ces transformations interviennent généralement après des envenimements de croissance financière qui prétendent être une issue aux difficultés.

Nous traiterons tout d’abord des enjeux pratiques : faut-il un financement des dépenses publiques, comment, et à quelles conditions peut-il être efficace ? Ensuite, nous évoquerons quelques implications théoriques de remise en cause d’idées et principes dominants pour conclure, enfin, sur les indicateurs et la régulation nouvelle de la création monétaire.

Enjeux pratiques du financement monétaire des dettes et des dépenses publiques

Cinq enjeux majeurs déterminent le financement monétaire des dettes et des dépenses publiques : s’émanciper des marchés financiers, développer les capacités humaines, financer les avances pour l’activité productive des entreprises, maîtriser ses critères de sélectivité, aller vers une autre monnaie commune mondiale que le dollar. Il s’agit de le faire en Europe dans les conditions particulières de la crise profonde, systémique, actuelle et de deux révolutions majeures que sont la révolution technologique informationnelle et la révolution monétaire, de décrochage des monnaies par rapport à l’or.

S’émanciper de la domination des marchés financiers

Tout d’abord sortir de la domination des marchés financiers est au cœur des issues à la crise actuelle, comme l’exprime tout particulièrement le Manifeste des économistes atterrés. Les marchés financiers détiennent aujourd’hui l’essentiel de la dette publique, émise pour l’essentiel sous forme de titres financiers négociables. Elle est ainsi détenue à 90 % sous cette forme pour la France, contre presque rien à la fin des années 1960 et environ 60 % au début des années 1980, avec l’impulsion donnée au fur et à mesure à la marchéisation et à la dérégulation financière, et pour les deux tiers elle est détenue par des non-résidents. Ce poids des marchés financiers a pour conséquences, en premier lieu un coût exorbitant en charges d’intérêt. Actuellement, par exemple, le budget de l’état consacre 48 Mds d’euros de ses dépenses au paiement des intérêts bruts d’emprunts de ses administrations publiques. Les marchés financiers imposent leurs propres conditions, qui sont que les dépenses publiques doivent répondre à leurs exigences de rentabilité financière. Ce qui est très différent de leur efficience économique et sociale. Cela revient en particulier à ce que l’on exige des salaires des enseignants ou des personnels soignants qu’ils contribuent au profit. Enfin, cela soumet à la spéculation ces dépenses et le coût de leur financement, à travers la marchandisation des titres qui la portent, avec sa volatilité, sa brutalité de l’instant.

En matière de financement, la seule véritable alternative aux marchés financiers, c’est soit la création monétaire, soit les impôts (2).

Or, l’ampleur des besoins est trop importante pour que les impôts puissent y répondre seuls : le stock des dettes publiques détenues sous forme de titres financiers est supérieur aux dépenses de l’État et les besoins de dépenses de développement viennent s’y ajouter. Le recours au crédit s’impose donc nécessairement.

La monétisation constitue la forme de créance qui sort immédiatement des marchés financiers la dette et le financement des déficits. En contrepartie de titres émis par les États, la BCE viendrait alimenter par sa création monétaire un Fonds européen de développement social et écologique, si ces titres financent le développement des services publics et de l’emploi public (en quantité et en qualité, y compris avec de meilleurs salaires), tout en respectant en outre des critères écologiques. Les traités européens, déjà largement contournés, ne s’y opposent pas formellement. Bien entendu, cela implique que l’institution ainsi créée, ce Fonds, ne soit pas uniquement « technique » et technocratique, mais ait une gouvernance démocratique, avec des représentants des élus (membres des parlements nationaux, du Parlement européen, représentants des syndicats…) et que sur la base de critères explicites, précis et chiffrés, il y ait ainsi une dimension de contrôle et de responsabilité sociale et politique. C’est-à-dire que l’on redonne à la politique monétaire son rôle effectivement politique mais dans une combinaison avec des critères précis, à l’opposé d’une action arbitraire et discrétionnaire qui est le mode actuel d’action de la BCE, sous couvert d’indépendance.

La question des critères de ce financement (pour les dépenses publiques, ce sont le développement des services publics et de l’emploi) est essentielle et décisive. C’est celle qui est omise par de nombreuses autres propositions, ou dans les expériences passées (3). Elle s’oppose frontalement à la conditionnalité imposée par le Fonds européen de stabilité financière, puis par le Mécanisme européen de stabilité (baisse des retraites, baisse des salaires, des emplois de fonctionnaires, privatisations, etc.), qui entraîne immédiatement la spirale de la dépression, voire déflationniste, qu’Atterrés nous dénonçons depuis notre Manifeste. Mais c’est sur le fond qu’elle est essentielle, parce qu’elle traite d’emblée et directement le développement du potentiel d’activité et d’efficacité.

En parallèle, la BCE rachèterait systématiquement et massivement les dettes publiques (4). Elle pourrait même rétrocéder aux États tout ou partie des intérêts de ces titres de dette existants, au lieu de percevoir les taux spéculatifs dont elle bénéficierait sinon (et on pourrait imaginer une conditionnalité « positive, sociale » de cette rétrocession [5]).

Du point de vue économique, cette émission massive de monnaie aurait pour effet immédiat de fournir un ballon d’oxygène aux dépenses publiques. Elle aurait aussi pour effet de soutenir massivement la demande, à travers l’emploi salarié public – outre les effets sociaux et sociétaux du développement des services publics et de l’emploi. Enfin, à moyen terme, sa sélectivité aurait pour effet le développement du potentiel d’efficacité des économies des pays d’Europe, à travers la stimulation des dépenses pour les capacités humaines (formation, santé, recherche…). C’est ce dernier point qui assure la soutenabilité au-delà des possibilités transitoires d’inflation du prix des biens (bien inférieure cependant à l’inflation du prix des actifs que l’on a enregistrée), et à condition qu’il y ait aussi une expansion de l’activité des entreprises et de leur emploi.

L’enjeu de nouveaux critères de sélectivité, soutenabilité et inflation

En réalité l’enjeu de nouveaux critères de sélectivité est posé à la fois pour la monétisation des dépenses publiques et pour le crédit aux entreprises.

La question qui se pose est la soutenabilité, et donc l’efficacité, d’une monétisation des dettes. Est-ce qu’un surcroît de monnaie dans l’économie va être suivi d’une croissance du revenu global ou de la production, et donc du PIB réel ? Est-ce qu’il va permettre un développement de l’emploi et du revenu réel ? Et à quelles conditions cela peut-il être le cas ?

Sur le fond, cela revient à s’interroger sur le lien entre PIB réel et masse monétaire (plus exactement revenu monétaire). On peut d’abord dire qu’actuellement, avec la prédominance des marchés financiers dans le financement et des critères de la rentabilité, on ne se donne pas de moyens directs que l’accroissement du revenu monétaire entraîne un accroissement du PIB. On fait même le contraire. En effet, les objectifs qui prédominent concrètement, de façon opératoire, dans la création monétaire du côté de ses deux acteurs principaux, à savoir la banque centrale et les banques de second rang (ou ordinaires), ce sont : limiter la quantité de monnaie émise et accroître la rentabilité du capital. C’est-à-dire d’une part une certaine stagnation du PIB, d’autre part accroître une petite partie du PIB (le profit) voire l’inflation financière (en favorisant notamment les crédits porteurs de plus-value du stock de capital). Or en faisant progresser le profit on n’augmente pas nécessairement la valeur ajoutée globale (le PIB) ou en tout cas pas nécessairement d’autant que le nécessite la masse de crédits supplémentaires déversés. Surtout si dans le même temps on pèse sur les dépenses publiques qui en représentent une part importante. En outre, plus de profit ici (en Europe ou en France) ne signifie pas nécessairement plus de production ou de valeur ajoutée ici, car les usages spéculatifs de ces crédits sont encouragés ainsi que les exportations de capitaux et les délocalisations.

Enfin, en ne se préoccupant pas de l’inflation du prix des actifs financiers (et même en favorisant sa hausse, car elle est porteuse de profit), on renforce encore l’exigence de profit en niveau à prélever sur la valeur ajoutée pour atteindre un même taux de rentabilité.

Une première réponse est que sont mises explicitement de tout autres conditions à l’apport de crédits supplémentaires et à leur refinancement. Ainsi, P. Boccara et l’équipe de la revue Économie et Politique (voir aussi Durand, 2005) proposent dans leurs travaux de conditionner le crédit à deux ensembles principaux de critères, et ces idées sont reprises par les propositions du Front de gauche :

- Pour les dépenses publiques, les créances aux dépenses publiques seraient conditionnées au développement de l’emploi public et à celui des services publics, ainsi qu’à des économies de matières avancées et consommées ;

- Pour l’investissement des entreprises, le crédit à leurs investissements serait conditionné au développement de l’emploi en qualité et en quantité et à l’augmentation de la valeur ajoutée (directement par un pôle public bancaire, indirectement par une aide publique à la bonification, indirectement par un refinancement sélectif du crédit bancaire), ainsi qu’à des économies de capital matériel fixe et circulant (donc des économies de matières).

Il s’agit de pratiquer ces critères de façon souple, par une bonification du taux du crédit et non par une obligation absolue de ne faire que certains investissements, et de suivre l’utilisation des crédits. Mais économiquement, la question des critères est décisive, et il faut la croiser avec celle des secteurs du point de vue social et de l’intervention des acteurs. Dans le court terme ces critères assurent de façon tautologique la croissance du PIB, mais du PIB nominal. À moyen terme, la question reste apparemment entière : ce crédit n’est-il pas inflationniste ? Et donc dans ce cas la production supplémentaire ne serait que transitoire, comme le soutiennent les monétaristes. Ceci d’autant plus que la révolution monétaire, de dé-liaison de la monnaie et de l’or, peut poser la question d’une ancre réelle.

Dans une optique keynésienne, si on est en sous-emploi et si le surcroît de monnaie amène un investissement supplémentaire, alors on peut avoir une augmentation durable du PIB réel. Mais ce n’est qu’une possibilité : on a bien eu des épisodes d’investissement inflationnistes, et même de surinvestissement (pour prendre le terme keynésien) ou de suraccumulation (pour prendre la notion marxiste). Ceci en particulier parce que, dans une perspective keynésienne, il n’est pas facile de savoir si l’on est en sous-emploi. Et dans une perspective marxiste c’est la question de l’efficacité du capital qui est sous-jacente à ce type de tensions inflationnistes. En outre, l’analyse de la révolution technologique informationnelle montre les exigences décisives d’un nouveau type d’efficacité économique, s’appuyant sur le développement des capacités humaines et sur le partage des ressources.

Plus profondément, il faut que l’offre soit effectivement accrue. Il faut aussi qu’elle le soit de façon efficace, c’est-à-dire que l’on produise à des conditions de productivité totale au moins équivalentes à la production existante, voire meilleures, et à un coût inférieur ou égal à celui de la concurrence. Et enfin, il faut qu’elle s’accompagne d’une demande effective supplémentaire. Il s’agit d’adapter ce raisonnement aux dépenses publiques.

Deux types de fonctionnement

Du côté des dépenses publiques, les services publics qu’il s’agirait de financer prioritairement et à un coût très faible représentent une offre principalement constituée d’emploi (plus exactement une offre qui ne se développe bien, aujourd’hui, que si l’on accroît l’emploi en quantité et en qualité). En outre, les services publics développent eux-mêmes les capacités humaines (formation initiale et continue, santé, recherche…) qui, dans les conditions actuelles des nouvelles technologies, sont un facteur clé d’efficacité.

Ils peuvent ainsi conditionner des gains potentiels d’efficacité très importants pour les entreprises (recherche, énergie, écologie…), à condition que celles-ci elles-mêmes développent leur offre. Le développement des services publics, s’il est centré sur celui de l’emploi (en quantité et en qualité), développe donc immédiatement une demande (emploi avec de bons salaires) et une offre additionnelle de qualité. Les conditions (1) et (3) sont donc vérifiées, la condition (2) met en jeu l’interaction avec l’activité des entreprises et leurs coûts. L’efficacité du financement monétaire des dépenses publiques dépendrait donc de trois enjeux :

‒ Que celles-ci aillent vraiment aux services publics, par opposition à d’autres dépenses publiques ;

‒ Qu’elles développent l’emploi en qualité.

‒ Que l’on puisse suivre la performance d’efficience finale des services publics avec des critères complémentaires.

Ces enjeux sont ceux d’un fonctionnement nouveau du crédit aux services publics, institutionnalisant le suivi de son affectation. Ce sont aussi les enjeux de développement de nouveaux indicateurs d’efficience des services publics, à la fois efficience directe (contribution aux capacités humaines des gens, gain de temps, économie de matières) et efficience indirecte (contribution à l’efficacité des entreprises).

Ils constituent des chantiers extrêmement novateurs, tant en matière économique que d’indicateurs ou de créativité institutionnelle (de la banque centrale notamment), comme il a fallu en ouvrir dans l’histoire pour chaque issue de crise systémique. Car les banques centrales et les banques de second rang n’ont pas toujours fait dans l’histoire ce qu’elles font actuellement, et n’ont pas toujours eu les mêmes pouvoirs (6). On a eu, en particulier, une tendance pluriséculaire à la dé-privatisation, voire à la nationalisation-socialisation, des banques centrales et du crédit, tendance de très long terme n’excluant pas de longs épisodes contradictoires de « re-privatisation » de leurs objectifs et de leur fonctionnement, dont la période actuelle fait partie. Malgré cette période de contre tendance massive à la « re-privatisation » au service des grands groupes multinationaux et des marchés financiers, la BCE reste une institution publique, composante de l’exécutif de l’UE, et les conditions d’un tournant historique s’ouvrent depuis 2008.

Le Fonds européen de développement social et écologique proposé par le Front de gauche est un élément majeur, et novateur, d’un tel chantier.

Concernant le coût du crédit, nulle part dans notre raisonnement n’apparaît le besoin de pratiquer un taux d’intérêt, c’est-à-dire une rémunération des autorités monétaires en fonction du montant du crédit accordé, dans la mesure où les critères sont respectés. La notion traditionnelle de prime de risque, liée au risque de faillite et donc de défaut de paiement, est insuffisante ici ;le risque essentiel contre lequel il s’agit de se prémunir, c’est celui d’un emploi insuffisant ou d’une production globale (VA) insuffisante dans l’économie, ce qui renvoie à l’activité des entreprises. Ce qui ressort, c’est, certes la nécessité d’une garantie contre le risque de défaillance (provisions différenciées, etc.), mais surtout le besoin d’une rémunération des salariés occupés dans le système bancaire à gérer cette monétisation et à la gérer. Tandis qu’au contraire ressort le besoin d’intérêts très proches de zéro, dans la mesure où les intérêts payés constituent des dépenses publiques qui ne développent ni l’emploi, ni les services publics. Ils ne participent pas de l’efficacité économique de la dépense, ils peuvent donc avoir un effet inflationniste.

L’autre risque est celui de la mise en cause de la valeur internationale de la monnaie, ce qui montre l’importance « interne » d’avoir une zone monétaire étendue, comme la zone euro. Mais cela montre aussi le défi qu’il y a à traiter simultanément la question d’une monnaie commune mondiale pour une création monétaire mondiale au service du progrès social (services publics, emploi, croissance), passant notamment par des affectations aux Banques centrales nationales (7), au lieu de jouer comme actuellement sur une politique de taux de change élevé de l’euro, au service de la prédation internationale par les capitaux des grands groupes européens, et au lieu de rechercher la séduction-attraction des capitaux sur les marchés financiers.

Un nouveau crédit aux entreprises

Il s’agit en outre de s’assurer que les entreprises vont bien pouvoir bénéficier des gains d’efficacité indirects générés par les services publics, ce qui renvoie certes au besoin d’identifier et de mesurer la valeur ajoutée, directe et indirecte, générée par les services publics. Mais cela renvoie aussi au besoin incontournable d’un tout autre développement de l’activité des entreprises elles-mêmes, sinon ces gains d’efficacité restent pour une part potentiels, et les dépenses publiques sont gâchées. Ainsi par exemple, des dépenses publiques de formation sont gâchées si trop peu d’emplois sont créés, ou des emplois de mauvaise qualité.

Conditionner la bonification des crédits pour l’investissement des entreprises au développement de la valeur ajoutée et de l’emploi en qualité et en quantité répond d’emblée aux trois conditions énoncées plus haut, à savoir agir sur l’offre, sur la demande, et améliorer l’efficacité productive. Car l’emploi constitue tout à la fois une composante de l’offre et de la demande, car le développement de la valeur ajoutée relativement au montant d’investissement (ou de crédit) réalisé améliore l’efficacité de la production, efficacité elle-même favorisée par un emploi de meilleure qualité.

Cette efficacité meilleure participe de la baisse des coûts, de même que la bonification du crédit, qui baisse les charges financières et participe ainsi à la compétitivité de ces mêmes investissements. Les critères de ce crédit sont donc eux aussi fondamentaux. Par ce biais, c’est aussi l’utilisation des profits qui est ré-orientée : ils sont affectés prioritairement à l’investissement efficace, puisqu’ils doivent venir rembourser ces crédits, par opposition à être utilisés pour spéculer.

Outre l’emploi programmé, l’abaissement du coût du crédit se doit tout particulièrement d’être relatif à la proportion dans laquelle une valeur ajoutée supplémentaire est programmée et effectivement créée. Il y a là tout un chantier pour régler abaissement du taux et croissance de la valeur ajoutée, dans une créativité interpellant une fois encore théoriciens de l’économie, techniciens du crédit ou de la politique monétaire, et spécialistes des institutions.

Une solution pragmatique pour organiser et maîtriser certaines corrections pourrait être d’examiner dans des institutions économiques et sociales ad hoc la situation des entreprises lorsque les conditions ne sont pas respectées. Si les engagements en matière d’emploi ou de valeur ajoutée ne sont pas tenus, alors dans certains cas, il peut être envisagé de remonter le coût du crédit.

Le suivi est fondamental, un suivi organisé, comme déjà, en principe, les banques peuvent le faire avec le crédit intermédié par opposition aux marchés financiers, mais leur suivi est secret, bureaucratique, voire administratif. Il s’agit de pousser cette notion de suivi et de la dépasser dans une perspective de transparence et de participation sociale.

Cette sélectivité du crédit aux entreprises ne passerait pas uniquement par la banque centrale et une nouvelle sélectivité de son refinancement (choix préférentiel des crédits entreprises apportés par les banques au refinancement en faveur de ceux qui portent des investissements développant l’emploi et la VA, économisent le capital matériel ; refinancement de ces titres à un taux abaissé). Elle devrait aussi passer par les banques ordinaires (ou de second rang), avec dans une première étape la constitution d’un pôle public bancaire agissant de façon souple et ouverte à partir des banques publiques existantes (CDC, Oséo, Banque postale), du secteur mutualiste (avec probablement certains changements dans leur gouvernance actuellement bien trop sous contrôle des marchés financiers), et d’une nouvelle banque nationalisée au moins. Public, ce pôle n’a ainsi pas besoin d’inclure dans ses taux un niveau « actionnarial » de rémunération de ses propriétaires. Il pourrait aussi se coordonner avec les autres institutions financières et de crédit existant en Europe (8), organisant à la fois une intervention économique décentralisée et faisant partie d’un rapport de force économique avec les marchés financiers sur l’utilisation des liquidités et de l’épargne. Troisième levier, des Fonds publics, nationaux et régionaux, alimentés par la fiscalité (dont le produit d’une taxe sur les transactions financières) qui pourraient venir proposer à toutes les banques une bonification du crédit selon les critères évoqués, bonification que ces Fonds financeraient et pourraient suivre.

L’expérience du FDES français (Fonds de développement économique et social) d’après-guerre vient à l’esprit. Mais il s’agirait là que ces Fonds (1) soient porteurs de tout autres critères (2) qu’ils soient ouverts à une tout autre participation et intervention sociale, avec un principe de transparence et de saisine par les acteurs concernés (CE, élus locaux) dans un certain nombre de cas (plans de licenciements par exemple). Ce qui constitue une différence de taille sur le contenu et sur les principes économiques qui étaient ceux du FDES.

Il s’agirait ainsi d’un système à trois étages, banque centrale, banques de second rang (dont le pôle public bancaire), fonds publics de bonification (nationaux et régionaux) reprenant pour une part des éléments ayant déjà existé mais dont le type nouveau repose sur ses critères de sélectivité d’une part, et sur l’ouverture démocratique aux interventions sociales et au suivi, d’autre part, ainsi que sur la dimension européenne. Il nécessiterait un appui nouveau aux acteurs sociaux par les services publics de l’intervention sur les entreprises et de leur observation, mais aussi par les services publics de l’emploi (Banque de France, Insee, Directions régionales de l’emploi et de la formation professionnelle…).

Quelques implications théoriques

L’augmentation du potentiel de croissance et sa mobilisation effective

Si l’on va un peu plus au fond des mécanismes en jeu, l’ensemble de critères que l’on propose d’instituer pour orienter l’affectation de la création monétaire participent d’une transformation de ce qui est parfois appelé la « croissance potentielle ». C’est-à-dire que l’offre n’est pas seulement modifiée quantitativement, mais aussi en qualité. En particulier l’amélioration de l’efficacité du capital est un des critères proposés de la sélectivité du crédit pour les entreprises. De même, l’amélioration du potentiel humain, à travers le développement des capacités des gens, est une condition du côté du crédit aux services publics. C’est cette question de l’amélioration du potentiel (comment ? selon quelles voies ? quels types de dépenses ? etc.) qui doit faire l’objet d’un suivi, d’une évaluation. Elle interpelle aussi la pensée économique.

Il s’agit aussi que ce potentiel de croissance soit mobilisé effectivement, avec l’action sur les entreprises, l’activité des services publics, et l’impulsion de demande.

Au-delà de l’investissement, une monnaie active pour des avances pour la production

La monnaie supplémentaire qui est émise a, nous dit-on, pour contrepartie des marchandises (si l’on fait abstraction des autres contreparties de la masse monétaire comme les devises), et donc rien n’est créé, sauf de l’inflation. Mais on peut répondre que dans la mesure où cette somme de monnaie constitue un surcroît global, macro-économique, ce n’est que si ces marchandises permettent une production supplémentaire ultérieure effective, dans la mesure où ces marchandises constituent elles-mêmes une avance pour produire, qu’une partie de ce surcroît monétaire va représenter une production réelle supplémentaire.

Deux idées fondamentales communes à plusieurs hétérodoxies sont ici importantes. La première, c’est que pour produire il faut des avances. C’est-à-dire que, d’une part, contrairement à la théorie néoclassique d’une économie d’échanges de biens et services pré-existants (9), la production crée une valeur additionnelle qui n’existe pas auparavant, mais que d’autre part, le cycle de production nécessite des avances qui, pour certaines étant d’une durée plus longue que lui, ne pourront être remboursées que progressivement.

Ces avances monétaires pour la production ne sont pas qu’une question de circulation, dans la mesure où une partie est « immobilisée » pendant un certain temps, d’où la question du « stock ». En outre, ces avances qui étaient hier constituées pour une part écrasante de machines et d’équipements matériels, sont amenées, avec la révolution technologique informationnelle qui se développe, à être de plus en plus constituées d’avances non matérielles : salaires des chercheurs, dépenses de formation initiale et continue, dépenses pour élaborer des processus et pour les mettre au point à verser avant d’avoir produit. Ce n’est pas le besoin d’avances pour la production qui explique en soi la nécessité de faire appel à de la création monétaire car individuellement ces avances peuvent aussi être financées par prélèvement sur la production existante (épargne, impôts) (10). Mais c’est l’ampleur du besoin global, lié au sous-emploi massif qui explique le besoin de création monétaire macro-économique nette.

Seconde idée, les avances monétaires sont certes dépensées dans des marchandises, et ont donc certes une contrepartie immédiate dans des marchandises existantes, mais il y a une différence fondamentale si ces marchandises sont destinées à être consommées « sans lendemain » ou si elles sont productives, ou encore si elles « tirent » la production. C’est par exemple l’insistance de Keynes sur l’investissement qui, dit-il, doit se faire même s’il n’est pas rentable. Mais en réalité, au-delà de l’investissement, le raisonnement est valable pour toutes les dépenses de développement du potentiel, qui vont aujourd’hui bien au-delà de l’investissement matériel à la Keynes, et l’orientation des dépenses exige des critères positifs et non pas seulement de minorer ou de limiter les exigences de rentabilité (solution de l’après-guerre). Par critères positifs, on entend fondamentalement l’efficacité du capital (VA/C) au lieu de la rentabilité, et la valeur ajoutée disponible pour une population ou pour une région (VAd) au lieu de la masse de profit, ainsi que des critères complémentaires incitant aux coopérations et aux partages des dépenses, informationnelles notamment, ainsi qu’aux économies de matières et ressources naturelles. Ce cantonnement à la minoration de la rentabilité dans le secteur public et ce centrage sur l’investissement matériel sont au cœur de la crise de suraccumulation systémique de longue période qui éclate au tournant des années 1960-1970. Tout particulièrement parce que cela a conduit à sur-investir et à une sur-exploitation grandissante des travailleurs et de la nature ainsi qu’à minorer les exigences de développement des capacités humaines pour l’efficacité économique et sociale. Bref, cela a conduit à une crise d’efficacité globale accompagnée d’avancées d’efficacité perverses avec le développement de la révolution informationnelle, la baisse des coûts sans demande réelle suffisante et sans un développement suffisant des services publics entraînant la croissance du chômage.

En revanche, la période de temps pose une question importante dans la mesure où la temporalité du crédit et de la création monétaire peut être très différente de celle de l’offre et de sa modification. Précisément pour les services publics, le développement de l’offre peut être assez rapide dans la mesure où une part très importante est constituée d’emploi, pour autant qu’il y ait une disponibilité en main-d’œuvre avec les bonnes qualifications et compétences. En revanche pour la transformation de l’offre des entreprises les délais peuvent être plus longs. Ces décalages peuvent générer des manifestations inflationnistes qui sont transitoires (qui au demeurant font fondre certaines dettes anciennes), à condition qu’elles ne génèrent pas un phénomène cumulatif d’emballement vers un manque de confiance dans la monnaie. D’où l’intérêt de procéder au niveau d’une grande zone économique et monétaire comme la zone euro, mutualisant ainsi les forces et pouvant en faire aussi profiter les parties faibles de la zone.

Les titres, une forme très particulière

Arrêtons-nous un instant sur le cas où la monnaie a pour contrepartie une marchandise particulière que sont les titres. Un titre est une marchandise particulière qui d’une part représente d’autres marchandises ou d’autres biens, mais ne constitue pas ces biens, et d’autre part qui donne droit à un revenu régulier. Un titre de propriété d’une entreprise représente en effet une part de ses capitaux et correspond donc à une part des moyens mis en œuvre dans cette entreprise, dont ses équipements (« l’entreprise » est dans ce cas la société de capitaux). Mais, lorsque la valeur à laquelle des titres sont échangés augmente, les équipements sous-jacents peuvent rester les mêmes. Tandis que le revenu que l’on attend des titres, et qu’il va donc falloir tirer de l’utilisation des équipements sous-jacents, va changer au prorata de l’augmentation de la valeur du titre pour rapporter le même taux de rentabilité. C’est ce qui fait du titre une marchandise particulière, ni tout à fait monnaie car il n’est pas acceptable partout en paiement sans frais et sans être converti (liquidité), ni tout à fait une marchandise comme les autres car il n’est que représentatif d’autres biens, il n’est pas produit, et est porteur de droit à revenu. Lorsqu’on possède les titres d’une entreprise, on n’est d’ailleurs pas propriétaire des équipements sous-jacents qui peuvent être cédés, indépendamment du titre. La valeur des titres peut donc changer de façon assez fortement autonome par rapport à la réalité des marchandises sous-jacentes, sur des intervalles de temps assez long. Tandis que la monnaie est un étalon de la valeur, elle est acceptée partout comme moyen de paiement sur le territoire, et sert de réserve de valeur universelle sur ce même territoire (11).

C’est pour cette raison que la réduction du modèle IS-LM à seulement trois marchés, le marché de la monnaie, celui des biens et celui du travail (équilibré par construction, et donc on n’en conserve que deux), est défaillante car il manque le marché des titres. C’est ce que lui reprochent aussi un certain nombre de keynésiens authentiques, dans la lignée notamment des travaux de Gurley et Shaw (12). Une quantité supplémentaire de monnaie ne représente pas nécessairement un volume de biens supplémentaires (bien d’équipement ou pas) : si celle-ci a pour contrepartie des titres et fonctionne sur le marché des titres, sa contrepartie en marchandises est indéterminée. C’est pourquoi nous insistons sur l’émancipation vis-à-vis des marchés financiers (titres qui s’échangent) et sur les critères d’utilisation « productive » de la monnaie obtenue par les titres publics (non négociables, détenus par le Fonds européen social et écologique) pour le progrès social mais aussi pour la croissance réelle.

Conclusion : face aux dogmes, des besoins de créativité pour une expansion sociale et du social

Derrière les enjeux pratiques d’une nouvelle création monétaire, se situent ainsi des enjeux importants du débat d’idées, en quelque sorte des dogmes à mettre en cause, sous-jacents aux « fausses évidences » de la pensée dominante dénoncées dans le Manifeste des économistes atterrés.

1. La rentabilité des capitaux ne constitue pas un critère d’efficacité adapté aux enjeux et aux exigences actuelles de développement et d’emploi.

2. L’indépendance de la banque centrale que l’on peut comprendre à la limite, si seule comptait la quantité de monnaie (approche « quantitativiste »), n’a plus lieu d’être si c’est le type d’utilisation de la monnaie qui est décisif, donc en quelque sorte son « contenu » qualitatif et son orientation. Cette idée d’indépendance doit être profondément remise en cause, jusqu’à aller vers de nouvelles institutions publiques du crédit, et une nouvelle organisation des pouvoirs autour de celui-ci.

3. Le développement des services publics et des dépenses sociales ne peut être mis en dehors de l’économie, hors des enjeux d’efficacité économique.

Trois dogmes, autant d’enjeux de travail et d’apport dans les débats économiques par les différentes hétérodoxies.

Pour que la création monétaire soit efficace face à la crise profonde, systémique, actuelle il s’agit ainsi de répondre à plusieurs enjeux. Tout d’abord, que cette création monétaire s’oppose à la domination des marchés financiers. Ensuite, il faut mettre en œuvre d’autres critères et indicateurs (agrégés mais aussi décentralisés) pour guider cette création monétaire, des critères rigoureux et d’efficacité, rapportant un résultat à une avance, et pas seulement de considérer que l’efficacité, l’emploi viendront de surcroît et « naturellement ».

Cela renvoie au jeu des acteurs sociaux et au besoin de nouveaux pouvoirs, non seulement dans les institutions bancaires et financières et sur elles, mais aussi dans les entreprises et les services publics. En particulier, des pouvoirs sur le suivi des investissements, des emplois, de leur « qualité » (taux de CDD, niveau de formation…), des pouvoirs sur les licenciements, avec des droits d’alerte voire de saisine des institutions de crédit, en particulier par les comités d’entreprises (CE) ou les délégués du personnel, mais aussi des pouvoirs dans les services publics, à l’opposé d’un fonctionnement administratif ou bureaucratique. Le suivi par des indicateurs précis pose aussi la question du rôle d’appui des services publics aux acteurs et intervenant sociaux, par exemple les services statistiques tels que la Banque de France, l’Insee, la Dares, ou encore ceux du ministère de l’écologie. Se pose aussi la question des normes comptables, monétaires et non-monétaires (comptabilité des consommations de matières, temps de travail…).

Il y a enfin un enjeu de créativité institutionnelle, dont des éléments sont décrits ici (Fonds européen social et écologique, Pôle public bancaire, de nouveaux titres publics pris par la BCE sans circuler sur les marchés financiers, mise en réseau des banques publiques en Europe, Fonds nationaux et régionaux de bonification, avec éventuellement des spécialisations sectorielles se combinant avec les critères fondamentaux), un enjeu de créer des institutions ayant de tout autres liens avec les acteurs sociaux pour maîtriser, suivre et guider, en quelque sorte, la connexion aux activités réelles et aux territoires.

Dans ce sens, les services publics sont fortement interpellés pour changer.

C’est dans un dialogue exigeant et rigoureux, émancipé autant que faire se peut des dogmes dominants, entre économistes et citoyens, en lien avec l’évolution des pratiques sociales et institutionnelles que le progrès pourra se faire. Surtout si apparaissent des débuts d’expérimentation pratiques dans les conditions de la recherche d’issues à la crise européenne actuelle.

L’impérieuse exigence d’une expansion d’un nouveau type, une expansion sociale et du social, avec une nouvelle construction européenne solidaire et apportant une autre contribution au monde, nécessite en effet d’être nourrie de débats théoriques et pratiques sur la création monétaire, son contenu, ses buts et sa maîtrise. Elle n’est pas qu’une question technique mais renvoie à des enjeux de société, voire de civilisation. Avec la révolution de décrochage de l’or, cette « relique barbare » comme disait Keynes, il s’agit par une nouvelle régulation de faire en sorte que, graduellement et radicalement, la véritable barrière à la création monétaire devienne les besoins sociaux humains et les capacités à y répondre, et non le capital et son rendement - le profit. Il n’est que de se rappeler qu’à l’aube du capitalisme en plein Moyen âge, la Sorbonne entre autres a été le lieu de débats théologiques et casuistiques intenses pour « justifier » l’intérêt du capital et pour distinguer usure et prêt à intérêt. Un enjeu culturel et de civilisation comparable est peut-être devant nous, mais en quelque sorte « à l’envers », pour maîtriser la création monétaire et se libérer des dogmes qui pèsent sur elle, y compris sur la façon d’en penser le coût et les critères, élément majeur d’une régulation nouvelle.

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(1) Conférence prononcée lors de la Journée des Économistes atterrés à l’Université de Paris 1, mars 2012.

(2) Il ne faut pas confondre financement par des titres financiers, qui eux-mêmes auraient été achetés par des fonds obtenus à crédit, avec financement direct par le crédit. Ce n’est pas du tout le même fonctionnement du financement ni les mêmes facteurs d’évolution de son coût.

(3) Par exemple, dans l’après-guerre, où c’était des secteurs qui étaient favorisés, ou encore dans l’Allemagne nazie où la production correspondant à la création monétaire était une production d’armements… n’étant « productifs » que si l’on fait la guerre…

(4) Aujourd’hui environ 200 Mds d’euros de dettes publiques sont rachetées par la BCE, soit à peine 0,8 % du PIB de la zone euro. C'est dix fois moins qu’aux États-Unis par exemple, ou à comparer aux 1.018 Mds€ prêtés par la BCE aux banques de second rang, soit 3,8 % du PIB de l’UE, depuis décembre, à un taux de 1 %, sans contrepartie d’utilisation et pour 3 ans)

(5) Elle pourrait rétrocéder systématiquement l’écart entre son principal taux de refinancement et le taux facial de marché de ces titres. Et pour aller au-delà, elle pourrait conditionner la rétrocession des intérêts au développement des services publics et de l’emploi public (en quantité et en qualité).

(6) Et d’ailleurs la BCE n’a pas le même statut ni les mêmes missions que la Fed qui elle n’est pas indépendante.

(7) Mais la BCE pourrait déjà impulser d’elle-même une création monétaire massive en faveur des pays du Sud (Méditerranée, Amérique latine, Est, Afrique sub-saharienne…) conditionnée à un progrès vers des normes sociales communes avec l’Europe, ce qui, en complément de taxations dissuasives, entraînerait la possibilité d’une émulation Nord-Sud vers un progrès des normes sociales, au lieu de la concurrence actuelle vers le moins-disant social.

(8) Cf. Les propositions décrites dans « Pour un système de financement émancipé des marchés financiers », F. Boccara, E. Le Héron, D. Plihon, ch10 Changer d’économie, 2012, éd. Les liens qui libèrent.

(9) Pour la théorie néoclassique, la production se réduit à un échange de services dont la valeur pré-existe et ces services sont confondus avec les facteurs eux-mêmes. Les services rendus (« travail » et « capital ») ont une valeur égale à celle du produit qu’ils engendrent. Il n’y a en quelque sorte pas de transformation, pas de valeur ajoutée, mais simple combinaison, ou « assemblage », de valeurs pré-existantes.

(10) Et l’on a aussi besoin d’utiliser l’épargne (par autofinancement, par crédit ou par appel au public hors marchés financiers).

(11) Sauf dans des cas totalement pathologiques d’hyper-inflation, mais alors c’est que ce ne sont plus les signes monétaires habituels qui jouent le rôle de monnaie.

(12) Dans la Théorie générale de Keynes, on a une double détermination de l’investissement – par le taux d’intérêt et par l’efficacité marginale du capital (liée à la production et au rendement qu’on en escompte), qui sont deux variables indépendantes, comme il le précise, notamment chapitre 11 et chapitre 13).

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