Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Dossier Europe : Deuxième axe : Pouvoirs politiques

Contre les dominations entre pays et la centralisation anti-démocratique du fédéralisme.  Des institutions  pour développer la coopération et la démocratie

Le deuxième axe vise de  nouveaux objectifs politiques. Face aux dominations entre pays et à la centralisation anti-démocratique du fédéralisme, il propose des institutions transformées pour développer la coopération et la démocratie. Il vise des propositions de démocratisation étendue tant  pour les institutions politiques  que pour les moyens financiers, avec des  pouvoirs d’intervention des salariés, des  usagers des services publics et des citoyens.

 

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    • Coopération et démocratie opposées aux dominations entre pays et au fédéralisme

    • Une fausse alternative : fédéralisme ou nationalisme

    • Contre une Europe fondée sur les dominations et l’autoritarisme

    • La structure institutionnelle de base de l’Union européenne : 4 + 1*

    • Propositions de démocratisation étendue

    • Droits et pouvoirs nouveaux  pour les femmes

Coopération et démocratie opposées aux dominations entre pays et au fédéralisme

Au lieu des principes de dominations, renforcés d’étape en étape, et de ces quasi « coups d’État » antidémocratiques successifs commis dans les pays d’Europe, il y a besoin de tout autres principes pour refonder la construction européenne : la coopération entre les pays et la démocratie.

Nous affirmons ces principes et luttons pour leur mise en œuvre dès à présent, à partir de la situation actuelle, à partir des protestations des peuples comme des difficultés économiques et sociales qui s’amoncellent. D’autant plus que la crise n’est pas uniquement derrière nous. Avec la reprise molle, hyperfinanciarisée et antisociale que l’on observe « la (nouvelle) crise qui vient » est de plus en plus probable, avec son lot de catastrophes imminentes. Elle exige de se doter des moyens de la conjurer !

Il faut sortir de la fausse alternative « fédéralisme ou nationalisme ». Avec des principes de coopération et de démocratie participative jusqu’au plus près des gens dans une confédération d’États nationaux et de peuples européens librement associés, il s’agit de changer radicalement la perspective de la construction européenne pour la transformer profondément jusqu’à la refonder. Ces principes font système avec la refondation de ses buts sociaux : coopérer et développer la démocratie pour développer le social dans chaque pays et pour chacun. Ils font aussi système avec l’exigence de se réapproprier les moyens financiers. Il s’agit en effet de se donner les moyens institutionnels de coopérer pour sécuriser tous les moments de vie de chacun, en partageant les moyens financiers nécessaires à cela, au lieu de s’affronter en visant la concurrence hyper-libérale entre les pays et le gonflement des profits financiers.

Car il y a besoin de coopération à la fois pour mettre en commun des moyens et pour atteindre des objectifs dont certains ne peuvent qu’être communs ou doivent être atteints de façon coopérative. Typiquement, beaucoup de pollutions ne connaissent pas de frontières et exigent des coopérations très étroites : si mon voisin pollue, la situation peut empirer même si je m’efforce de diminuer la pollution chez moi. Les firmes multinationales (FMN) nécessitent aussi une approche coopérative pour maîtriser leurs effets sur les pays et les territoires. De même, la fiscalité ou la protection sociale exigent moins de concurrence entre pays et plus de coopération. C’est aussi le cas de la recherche. On peut aussi parler du besoin de partager des technologies ou encore de produire en commun entre plusieurs pays d’Europe. La coopération c’est la formulation positive de la rupture avec une Union européenne de concurrence libre et non faussée.

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Une fausse alternative : fédéralisme ou nationalisme

Nous voulons rompre avec l’enfermement dans le chantage : « le fédéralisme ou le nationalisme ! » Dans cette fausse alternative, le fédéralisme est présenté comme seule possibilité d’Union européenne, sinon il ne resterait que l’indépendance des Nations européennes dans une concurrence où chacun tire pour soi. En réalité, la perspective de coopération et de démocratie pour des partages en Europe allant jusqu’aux gens eux-mêmes porte un nom : celui de confédération. De quoi s’agit-il ? Au contraire du fédéralisme où c’est la supranationalité qui s’impose, avec « la verticale du pouvoir », c’est-à-dire des décisions essentiellement descendantes et centralisées, le fonctionnement confédéré a ses impulsions qui partent « du bas », ou tout du moins de niveaux décentralisés et horizontaux, nationaux ou infranationaux, pour aboutir à des décisions communes et où la souveraineté démocratique continue à s’exercer au lieu d’être déléguée une fois pour toutes. En clair, il s’agit d’un partage de souveraineté et non d’un dessaisissement-délégation de celle-ci. Et avec un rôle majeur aux peuples et à leurs représentants, notamment parlementaires, au lieu des États. Dans le fédéralisme, c’est le centre qui tend à être souverain et on parle de transferts de souveraineté et non de délégations de celle-ci.

Bien entendu, derrière les États des enjeux de classe se jouent. C’est pourquoi la démocratie est indispensable, jusqu’aux moyens financiers et aux gens eux-mêmes, alors que les dominants de la construction européenne évacuent les gens et la BCE, réduisant la démocratie à des votes très formels, délégataires et liés à des instances de peu de pouvoirs comme le Parlement européen (cf. encadré). Les prétendus « souverainistes » évacuent eux aussi les enjeux de classe, tant au sein de chaque État national que dans la concurrence entre pays, largement antisociale.

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Contre une Europe fondée sur les dominations et l’autoritarisme

Les institutions européennes étaient déjà caractérisées par une construction complexe avec un important déficit de démocratie et le rôle prépondérant de certains États. Ce déficit avait persisté dans le traité de Lisbonne. Il faisait déjà système avec la prépondérance financière et la domination des marchés financiers, relayée par la BCE et en quelque sorte « garantie » par elle. Mais avec la crise, on est passé à une nouvelle étape de domination des pays et d’autoritarisme antidémocratique. L’avance économique de certains pays, comme l’Allemagne, est utilisée pour la domination économique et politique au lieu de l’être pour le partage des avancées, qui pourrait tirer l’ensemble des pays de l’UE vers le haut. Les excédents allemands accumulés sont utilisés pour acheter le patrimoine de la Grèce, les grands groupes multinationaux à base française ne sont pas en reste qui, derrière le déficit national de la France, accumulent eux des excédents et tels Suez et Véolia profitent à bas prix des privatisations grecques, entre autres, de services publics. Tout ceci se fait contre l’emploi en Allemagne ou en France et en le pressurant.

Inversement d’autres différences entre pays, comme le relatif dynamisme démographique des pays d’Europe du Sud, pourraient être une chance. De même que leur jeunesse. Au contraire, les politiques d’austérité mettent à mal ce dynamisme démographique en attaquant les prestations sociales, la politique familiale, les droits des femmes et les services publics.

Certains à gauche prétendent que tout cela serait un problème de répartition, de redistribution entre pays sans voir l’énorme insuffisance de croissance si l’on veut véritablement répondre aux besoins sociaux (ou en renonçant à agir dessus !), sans voir non plus à quel point la croissance actuelle est viciée dans son contenu, social, économique et écologique !

L’illusion d’un fédéralisme de gauche

Ainsi, nous dit-on, pour intégrer les peuples à cette fuite en avant fédéraliste, il faudrait partager un budget européen plus conséquent, accepter encore plus de transferts de souveraineté et de compétences. Bref, on nous vend à nouveau le fédéralisme comme seule possibilité pour ne pas s’opposer entre pays. Il faudrait aller vers plus de fédéralisme pour espérer avoir un budget européen qui redistribue les excédents des uns en compensations sociales pour les autres ? Qui peut croire un seul instant que cela marcherait, alors que le principe même du fédéralisme est vicié ? C’est précisément au nom du fédéralisme qu’A. Merkel et N. Sarkozy ont fait passer le contrôle du budget européen par la Commission, mais en réalité par les États dominants. Car c’est la promotion des dominations de certains États sur les autres qui est recherchée. Et aussi peut-on accepter un développement aussi déséquilibré, aussi inégalitaire et inégal entre pays d’Europe ?

Pourtant, qu’on le veuille ou non, nous dépendons les uns des autres. Même les groupes allemands ont besoin de la surface étendue de l’UE et de la zone euro pour y réaliser leur production et commercer afin d’attaquer les marchés plus lointains d’Asie et des pays émergents, ou des états-Unis, pour y faire d’autres excédents encore. Cela a toujours été, jusqu’ici, l’argument d’A. Merkel face à sa propre droite pour justifier une certaine aide aux pays du Sud comme la Grèce : « l’emploi de millions de travailleurs allemands dépend de ce que nous pouvons exporter à la Grèce, à l’Italie ou à l’Espagne, et donc du potentiel d’absorption de ces pays », leur dit-elle en substance.

Et d’ailleurs, les déséquilibres de ce « modèle » hyperfinanciarisé et ultralibéral ne se produisent pas qu’entre pays d’Europe. Ce sont aussi des déséquilibres internes à chaque pays. Car au nord comme au sud de l’Union les dépenses sociales sont remises en cause et l’on souffre du déficit de services publics. Si l’on manque cruellement de moyens pour se soigner en Grèce, on manque cruellement de services publics pour la petite enfance en Allemagne ce qui relègue les femmes hors du travail dans une dépendance envers le travail du conjoint.

La structure institutionnelle de base de l’Union européenne : 4 + 1

Les institutions de l’Union européenne se composent de quatre organes principaux plus un, la BCE.

La Commission européenne, avec d’énormes pouvoirs, a un rôle extrêmement important, voire le plus important. Elle n’est pas une émanation parlementaire normale du Parlement européen. C’est le Conseil européen (chefs d’État et de gouvernement des pays de l’Union) qui propose le Président de la Commission (actuellement José Manuel Barroso) et, avec lui, les membres de la Commission, un par État membre. La Commission est soumise comme collège à un vote d’approbation du Parlement européen. Ce dernier peut aussi adopter une motion de censure de la Commission, à la majorité des deux tiers des voix exprimées et à la majorité des membres qui le composent. La Commission dirige un appareil d’environ 15 000 personnes, réparties en 23 Directions générales. « Gardienne des traités » européens, elle veille à leur application. Elle agit indépendamment des gouvernements des États membres. Elle joue un rôle central dans le processus législatif communautaire, avec un monopole d’initiative, c’est-à-dire du droit de proposer des lois européennes, pour de très larges domaines. Elle veille à la mise en œuvre des règlements et directives ou lois européennes. Sa défense farouche des principes des traités sur la concurrence la trouve toujours à l’avant-garde de l’orientation néolibérale de la construction européenne.

Le Parlement européen est élu au suffrage universel depuis 1979. Il participe au processus législatif, outre ses pouvoirs d’approbation et de censure de la Commission. Le nombre de parlementaires d’un pays dépend de l’importance de sa population. Le pouvoir législatif dans certains domaines, quelque peu élargis dans le traité de Lisbonne, est partagé avec un pouvoir réduit de « co-décisions » avec le Conseil de l’Union européenne. Mais dans un certain nombre de domaines, comme celui de la fiscalité, le Parlement européen n’a qu’un pouvoir consultatif. Une fois adoptées, les règles européennes doivent être « transposées » en droit national. On estime qu’environ 75 % des lois nationales en France sont des transpositions des règles européennes.

Le Conseil de l’Union européenne réunit les ministres des États membres, selon qu’ils sont concernés par la matière traitée. Ce Conseil est présidé par rotation, tous les six mois, par un pays de l’Union et les droits de vote y dépendent des populations de chaque pays.

Le Conseil européen réunit les chefs d’État et de gouvernement de l’UE, ainsi que le président de la Commission. Ce Conseil est présidé pour deux ans et demi pour un mandat renouvelable une fois (et non par rotation tous les 6 mois comme c’était le cas avant 2009 et le traité de Lisbonne). Son président actuel est Herman Van Rompuy. Les décisions s’y prennent à la majorité qualifiée, et les droits de vote y dépendent des populations de chaque pays. Il détient l’essentiel des pouvoirs de nomination. Il propose en particulier le président de la Commission. Le Conseil joue ensuite sur sa séparation formelle avec la Commission, qui procède pourtant largement de son autorité : les chefs d’État prétendent que c’est la Commission qui leur impose une décision ou des règles, alors qu’ils contribuent largement à susciter celles-ci. Le Conseil est l’instrument direct par lequel les « grands » États, comme l’Allemagne ou la France, s’assurent in fine directement du contrôle de la voie prise par l’UE et influencent la Commission.

 

La Banque centrale européenne (BCE) est une composante de ce qu’on peut appeler « l’exécutif » européen. Elle agit en réalité comme une cinquième institution. Son président est nommé par le Conseil de l’UE (d’un commun accord par les chefs d’État ou de gouvernement des États de la zone euro) et après consultation du Parlement européen. On distingue l’Eurosystème (zone euro) et le SEBC (système européen de banques centrales) qui couvre aussi les États de l’UE hors zone euro. Le traité de Lisbonne énonce les règles dans lesquelles agit la BCE. Mais elle est « indépendante » et « irresponsable » juridiquement. Cela veut dire qu’elle ne peut accepter d’instruction d’une autre institution et n’a pas à rendre compte de son activité devant une instance qui aurait un pouvoir sur elle, par exemple qui pourrait sanctionner son activité. La BCE fait un rapport devant le parlement européen, mais ce dernier n’a pas de pouvoir sur elle. Les principales règles qui organisent l’activité de la BCE déterminent : d’une part son objectif, elle autorise l’émission de la monnaie européenne, l’euro, et « garantit la stabilité des prix » qui prime explicitement sur les objectifs possibles de croissance ou de réduction du chômage ; d’autre part ses moyens, fournir des euros aux agents économiques, avec l’interdiction d’acheter des titres de dette aux États lors de leur émission (art. 123.1) mais autorisation d’en acheter aux institutions financières publiques (art. 123.2) et le « refinancement » des banques de la zone euro en leur fournissant des euros à un certain taux et pour une certaine durée en contrepartie de titres que les banques donnent en garantie (titres de dette des États ou titres représentant les prêts consentis aux entreprises). Pour elle, seule compte, en réalité, la quantité de monnaie émise, pas son utilisation (spéculation versus investissement créateur d’emplois). Le vote de chaque pays est proportionnel à sa richesse monétaire (% de capital de la BCE détenu) et non à sa population. Dans sa forme actuelle, c’est typiquement une institution fédérale. Avec la perspective de l’Union bancaire, elle va s’arroger encore plus de pouvoirs supranationaux, puisqu’elle auditera directement les banques des pays et pourra ordonner directement leur démantèlement ou leur fermeture.

 

Propositions de démocratisation étendue

Institutions « politiques »

‒ La réduction des pouvoirs de la Commission et sa subordination aux pouvoirs élargis du Parlement européen ;
‒ L’élargissement des pouvoirs du Parlement ;
‒ Des pouvoirs nouveaux des parlements nationaux en articulation avec le Parlement européen.

Il faudrait une suppression des monopoles d’initiative de la Commission, un rôle d’initiative du Parlement européen, des pouvoirs d’adoption des lois dans tous les domaines, le contrôle et la sanction de la Commission à la majorité simple. Pour les parlements nationaux, il faudrait de véritables navettes de codécision, du moins pour une série de questions, dans une optique de confédération et non de fédération. Par ailleurs, les parlements nationaux devraient débattre et décider de recommandations auprès du Conseil européen et auprès du Conseil de l’Union européenne, ainsi que des orientations de ces derniers. En relation avec ces débats, les orientations et les politiques des institutions européennes devraient faire l’objet de comptes rendus réguliers obligatoires devant les citoyens des différentes populations, par le truchement des télévisions et des journaux nationaux, ainsi que de consultations notamment par référendum.

Moyens financiers

Les marchés financiers cherchent aujourd’hui à dicter leur loi aux peuples de l’UE. C’est pourquoi les pouvoirs sur les moyens financiers et les règles selon lesquelles ils sont utilisés sont décisifs pour établir de réelles souverainetés populaires effectives. Celles-ci n’existent évidemment pas au niveau européen, mais il serait faux de prétendre qu’elles existaient auparavant au niveau national, ou qu’elles pourraient s’exercer de façon effective, et non pas formelle, pour des États nationaux isolés face au dollar des États-Unis.

La BCE

Sortir le financement des dépenses publiques et des entreprises des griffes des marchés financiers.

Pour les services publics : il faut créer une nouvelle institution, chargée de contribuer à financer les dépenses publiques des États : un Fonds européen pour le développement social et écologique solidaire Son financement par la BCE est autorisé formellement par les traités existants (123.2 du traité de Lisbonne).

Le Fonds doit être doté d’une direction politique, démocratique associant le Parlement européen, des représentants des parlements nationaux, des représentants des syndicats européens ainsi qu’une possibilité de le « saisir » à partir de projets émanant du « terrain ».

Pour l’emploi des entreprises : afin d’impulser la maîtrise démocratique d’une nouvelle politique de crédit visant à transformer les relations banques-entreprises en faveur de l’emploi et de la création de richesses réellement utiles et écologiques, une transformation profonde du rôle de la BCE est nécessaire. Son fonctionnement doit être démocratisé ; sa responsabilité doit s’exercer sous contrôle partagé du Parlement européen et des parlements nationaux ; ses missions doivent comprendre la croissance, la sécurisation de l’emploi et le développement des services publics ; ses moyens d’action doivent autoriser l’achat direct des titres publics des États et une nouvelle sélectivité du refinancement des banques.

Les budgets

La suppression du pacte de stabilité (le 6 packs et le TSCG) est urgente. Ce pacte inclut notamment la surveillance supranationale des budgets nationaux, la possibilité de sanction supranationale et le respect d’un quasi-équilibre permanent des budgets nationaux (moins de 0,5 % de déficit annuel « structurel » !).

Pouvoirs d’intervention des salariés, usagers et citoyens au niveau UE

Au niveau européen, outre la BCE et le nouveau Fonds, il faut plus de pouvoirs des comités d’entreprise européens, ainsi que de tous les comités d’entreprise ou encore des élus locaux, pour des informations et des propositions au niveau des institutions européennes et du Parlement européen.

Les droits du Comité économique et social européen et ceux du Comité des régions devraient dépasser le rôle seulement consultatif actuel : droits d’initiative pour des lois et directives, pouvoirs de codécision, dans un certain nombre de domaines concernant les entreprises et les services publics.

Enfin, les actions et les relations au plan international des institutions européennes devraient faire l’objet d’informations transparentes, ainsi que de débats et contrôles nationaux démocratiques systématiques.

Concernant les salariés, il est urgent de passer de droits consultatifs à des véritables droits décisionnels dans la gestion des entreprises.

1. Cela suppose d’instituer une nouvelle définition du licenciement économique à l’échelle européenne, qui limite celui-ci aux difficultés économiques qui n’ont pu être surmontées par la réduction des coûts autres que les coûts salariaux et sociaux.

2. Droit de veto suspensif des comités d’entreprise pour toutes les suppressions d’emplois et projets de transferts d’activités. Obligation faite aux employeurs d’examiner les contre-propositions des salariés y compris pour d’autres moyens financiers, droit d’interpeller les banques, la BEI ou des fonds européens spécifiques à l’appui de leurs contre-propositions pour un financement à bas taux, baissant le coût du capital et non du travail. En cas de refus par l’employeur, saisine d’une structure indépendante de type Conseils Prud’hommes ou émanant de conférences régionales ou nationales pour l’emploi.

3. Droit de suivi des aides publiques, y compris du crédit bonifié, discussion en amont avec les salariés et leurs représentants (CE, CCE, Comité de groupe, élus territoriaux) de l’utilisation de tous les fonds publics : aides européennes, de l’État, régions, départements… etc. Suppression de toute aide aux groupes qui veulent supprimer des emplois et remboursement des aides indûment perçues.

En parallèle, les Comités d’entreprise européens (Cee) ont besoin de pouvoirs renforcés et nouveaux face aux restructurations des multinationales et pour avancer vers des solidarités internationales : accords-cadre systématiques, sécurisant les salariés de l’ensemble des établissements d’un groupe, en interdisant par exemple des négociations « locales » dans l’UE si elles font jouer la concurrence sociale et salariale ; possibilité d’extension des accords aux filiales hors UE (états-Unis, Amérique latine, Asie, Maghreb, Turquie, etc.).

Les Cee pourraient être un outil de négociations transnationales dans les groupes, avec des droits d’information étendus, non seulement sur les salaires, l’emploi et la formation, mais aussi les investissements, l’utilisation des résultats, les règles de paiements des brevets et la circulation des capitaux, revenus et paiements au sein des groupes, notamment dans les paradis fiscaux et légaux, à commencer par l’Europe.

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Droits et pouvoirs nouveaux  pour les femmes

Si l’égalité hommes-femmes est inscrite dans certains textes fondateurs de l’UE, on assiste à une évolution très contradictoire.

Ainsi malgré certaines avancées comme la référence à l’égalité femmes-hommes concernant l’emploi et la rémunération. Il faut noter que le Parlement européen dans sa séance du 14 mars a refusé de voter (certes à une courte majorité) une clause allant dans ce sens.

Certains textes européens, comme la façon dont se construit l’Union européenne, sont souvent contraires aux droits des femmes.

Certains textes sont même carrément régressifs. C’est le cas de l’idée de « droit à la vie », contenue dans le TCE, sans référence au droit des femmes à disposer librement de leur corps, qui s’aligne ainsi sur l’expression phare de tous les opposants déclarés à l’IVG comme en Pologne, et dans les nouveaux entrants des pays de l’est, mais aussi au Portugal, à Malte ou en Irlande. Elle constitue une porte ouverte à la remise en cause du droit à l’IVG, comme c’est le cas avec le gouvernement de droite en Espagne. Pour notre part nous militerons partout au contraire pour faire avancer ce droit.

L’évocation de la conciliation vie familiale-vie professionnelle repose le plus souvent sur les mères, à partir de l’incitation à se retirer du marché du travail. Les femmes sont en première ligne du temps partiel subi. Les bas salaires sont le plus souvent féminins.

Des pistes alternatives. Pour que les femmes se mettent en mouvement pour une autre Europe avec de nouveaux droits pour les femmes afin de sortir des dominations et exploitations.

  • Une réalisation effective de l’égalité hommes-femmes exigerait, concernant la formation initiale, l’abolition de la division sexuelle des filières scolaires et universitaires. En matière de formation continue, cela impliquerait un accès largement accru des femmes, reconnu et garanti, pour une mobilité voulue et de promotion.
  • Cela exigerait la promotion de l’accès des femmes à l’emploi de qualité ainsi qu’une lutte résolue contre la discrimination dans les emplois.
  • La réalisation de l’égalité salariale hommes- femmes et l’accroissement des salaires des femmes exigeraient l’application garantie de la clause : à travail égal salaire égal, avec un contrôle et des sanctions systématiques en cas de non-respect.
  •  Il s’agirait aussi de viser la promotion des femmes et la reconnaissance effective de leur qualification à partir d’une revalorisation de leurs salaires et d’un accès aux postes de responsabilités.
  • Une réelle conciliation vie professionnelle-vie familiale serait à développer et à garantir. Elle devrait aussi impliquer les hommes. Cela exige un développement des formules de garde, notamment les crèches, la création d’un service public de la petite enfance, un aménagement et une réduction du temps de travail.
  • Pour une nouvelle politique familiale en Europe, il s’agirait de réaffirmer l’importance des dispositifs démographiques, permettant notamment d’augmenter la population active (réellement employée). L’augmentation du taux d’activité des femmes impliquerait une augmentation de l’offre accessible aux familles de formules de garde des enfants, particulièrement des crèches. À ce sujet, on pourrait généraliser certaines expériences des pays de l’Europe du Nord.
  • Une sécurisation et un développement de l’emploi et de la formation, correctement rémunérés, concerneraient en premier lieu les femmes. Cela exigerait une continuité de droits et revenus relevés, un essor formidable de la formation continue.
  • Le financement de la protection sociale et notamment des retraites à revaloriser, doit être accru. Il faut sortir des réformes libérales qui cassent les retraites solidaires et favorisent la montée des aventures spéculatives à partir des fonds de pension, de la capitalisation, contre les droits des retraités(es).
  • Pour un droit explicite et effectif à la protection sociale, à la santé.
  • Une lutte résolue contre les difficultés des familles monoparentales et la pauvreté des enfants.
  •  On pourrait, comme cela a été proposé, appliquer la clause de l’européenne la plus favorisée en matière de droits des femmes.

 

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