Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Chômage : la douche froide de novembre

Contrairement aux annonces, l’inversion de la courbe du chômage ce ne sera pas pour ce mois de novembre. Avec 4 876 100 chômeurs inscrits à Pôle-emploi (5 174 300 Dom inclus), le nombre total de chômeurs a continué d’augmenter, effaçant le ralentissement d’octobre.

Le nombre de chômeurs en catégorie A est passé de 3 275 000 en octobre à 3 293 000 en novembre, soit 17 800 inscrits supplémentaires. Sur un an, la hausse est de 5,8 %.

Pour ce mois de novembre, même les jeunes de moins de 25 ans sont touchés : +0,4 %. Quant aux chômeurs de plus de 50 ans (+1,3 %) et ceux de longue durée, ils boiront le calice jusqu’à la lie. Les premiers augmentent de 1,3 % et les seconds de 0,3 % au total, mais de 1,2 % pour les chômeurs de 1 à 2 ans et de 1,1 % pour les chômeurs de plus de 3 ans.

Certes, le gouvernement peut jouer de la baisse du nombre de chômeurs en catégorie B et C, respectivement de 3,1 % et de 0,4 %, et prétendre ainsi réduire de 0,1 % en novembre le nombre de demandeurs d’emplois inscrits à Pôle-emploi en recherche active d’emploi (catégories A, B et C).

Mais c’est feindre d’ignorer que cette baisse s’accompagne d’une hausse du nombre d’inscrits à Pôle-emploi non tenus de recherche active d’emploi parce qu’en stage, en formation ou en contrats aidés. Le nombre d’inscrits en catégorie D a en effet augmenté en novembre de 0,9 % et celui de catégorie E de 3,1 %. La mécanique des vases communicants entre catégories de demandeurs d’emploi jouant ainsi à plein régime.

Par ailleurs, ce glissement de catégorie est appuyé en novembre encore par un niveau de radiations administratives (les punis) particulièrement élevé (43 200 en novembre). Certes, ce chiffre est inférieur à celui d’octobre (52 300), mais il reste largement supérieur à la pratique usuelle des radiations en cette période de l’année (39 300 radiés en novembre 2012).

En bref, si le gouvernement veut pratiquer la méthode Coué, il n’en reste pas moins qu’il est loin, très loin d’avoir gagné la bataille de l’emploi. N’en déplaise au ministre du Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle, le chômage continuera d’augmenter et la courbe du chômage ne s’inversera pas d’elle-même.

Pour la simple raison que, compte tenu de la politique menée par le gouvernement, il ne peut pas aujourd’hui en être autrement.

D’abord, parce que la faiblesse de la croissance estimée sur le dernier trimestre 2013 (+0,4 %) et celle prévue pour le 1er semestre 2014 (+0,2 %) ne permettent pas d’inverser la courbe du chômage et encore moins d’inscrire à la baisse dans la durée le taux de chômage. Or cette croissance atone et poussive est le résultat direct de la politique d’austérité menée par le gouvernement. Une politique qui vampirise le pouvoir d’achat des ménages et réduit de fait la demande intérieure du pays, ce qui pèse immanquablement sur l’offre, sur la croissance et donc sur les possibilités de création d’emplois.

Ensuite, parce que la bataille de l’emploi sera gagnée lorsque l’économie française créera des emplois en nombre. Ce qui n’est pas le cas. Quand le mois de novembre constate 507 900 demandeurs d’emploi supplémentaires, seules 108 500 sorties de Pôle-emploi pour reprise d’emploi déclarée sont comptabilisées ! Les employeurs préférant les logiques de rentabilisation financière immédiate pour satisfaire les actionnaires et s’acquitter des ponctions du capital plutôt que le développement des emplois et des qualifications. Une stratégie de gestion qui joue contre le développement de l’emploi.

Mais aussi, parce que la victoire dans cette bataille repose sur la création d’emplois stables et que le patronat fait tout le contraire. Armé des outils législatifs construits par et pour lui, comme par exemple la loi dite de sécurisation de l’emploi, il organise la flexibilité et la précarisation massive de l’emploi, sans créer d’emplois. Ainsi, sur les 5 424 000 déclarations d’embauche du 3e trimestre 2013, 68,3 % relevaient d’embauches de moins d’un mois et 31,6 % d’embauches de plus d’un mois dont seulement 13,8 % étaient des déclarations d’embauche en CDI ! Avec 132 500 suppressions d’emplois sur l’année 2013, il s’agit d’un mouvement continu dans toutes les régions et dans tous les secteurs d’activité du pays, qui ne pourra en aucun cas contribuer à une baisse du niveau du chômage. Car rappelons que les précaires d’aujourd’hui sont les chômeurs de demain !

Enfin, parce que la révolution informationnelle qui se déploie sous nos yeux porte, comme les révolutions agricoles et industrielles qui l’ont précédée, des logiques d’économies d’emplois qui ne pourront être compensées sans un développement massif de services publics nouveaux. Or la stratégie gouvernementale, appuyée sur la politique de l’Union européenne, s’oppose frontalement à ce développement nécessaire des services publics au nom de la dette et des déficits, et désormais de la fiscalité, par des coupes sans précédent dans les dépenses publiques et sociales.

Comment dans ces conditions prétendre inverser durablement la courbe du chômage ?

La posture gouvernementale et le babille médiatique qui l’accompagne confinent à l’arnaque. En réalité, chômeurs et précaires ne sont pas près de sortir de la galère si le gouvernement ne change pas de cap. Ils y resteront tant que le gouvernement refusera de mettre en œuvre une véritable sécurisation de l’emploi et de la formation. Tant que le gouvernement refusera d’engager la bataille contre la finance pour une véritable politique de création monétaire, une véritable politique du crédit maîtrisée, orientée vers les investissements matériels développant l’emploi et les salaires. Tant que le gouvernement refusera d’appuyer le développement des services publics et sociaux, et donc de la dépense publique et sociale, pour répondre aux besoins actuels et à venir.

F. Hollande voulait être jugé sur les faits et le sérieux de son action gouvernementale. Le couperet va tomber lourdement.

Mais gare aussi aux dégâts collatéraux. Craignons en effet qu’en le jugeant incapable, les Français ne finissent par juger toute la gauche incapable de conduire le pays hors de l’impasse et qu’ils choisissent en bout de course de laisser place aux populismes !

D’où l’enjeu de la bataille des communistes contre le coût du capital et pour une nouvelle expansion sociale, aussi bien en France qu’au niveau de la construction européenne. Une rupture avec les politiques néolibérales est indispensable. Ceci exige un essor sans précédent des luttes sociales et la construction d’une alternative véritable.

 

Rien sous le sapin pour les smicards !

Pas de coup de pouce pour les smicards cet hiver. La hausse du SMIC est jugée suffisante. Une fois de plus, les choix du gouvernement entérinent les logiques de baisse du coût du travail.

Le gouvernement a osé le faire. Il n’y aura pas de coup de pouce pour les smicards cet hiver, jugeant la hausse légale du SMIC de 1,1 % suffisante puisque 2 fois supérieure à l’inflation.

Pourtant cette hausse se traduira par une augmentation réelle du Smic horaire brut de 0,10 euro, soit pour un smicard à plein temps une augmentation de son salaire brut de 15 euros par mois. Heureux smicards qui pourront donc profiter pleinement d’un salaire net mensuel de 1 113 euros !

C’est scandaleux !

Et ça l’est d’autant plus que les arguments avancés par le gouvernement reprennent directement le refrain patronal. D’un côté, la conjoncture ne serait pas favorable, la croissance serait trop faible. De l’autre, les smicards français seraient des privilégiés face à leurs concurrents occidentaux. Deux arguties qui ne tiennent pas la route. Non seulement les smicards français ne sont pas privilégiés par rapport à leurs homologues européens. Irlande, Belgique, Pays-Bas font mieux que la France, en étant moins riches ! Quant à la croissance, elle était favorable il y a 10 jours à la baisse du chômage, mais elle ne l’est plus aujourd’hui à la hausse des salaires ?

En réalité, le gouvernement est enfermé dans sa logique dévastatrice de baisse du coût du travail et de défense des profits des entreprises qu’il confond avec leur compétitivité.

Il fait semblant d’oublier que les entreprises sont exonérées de cotisations sociales patronales pour les salaires versés au SMIC et de manière dégressive jusque 1,6 SMIC.

Il refuse obstinément de comprendre que cette recherche frénétique de la baisse du coût du travail est une cause essentielle de la crise dans laquelle le pays est plongé. Qu’elle participe pleinement à l’écrasement des salaires et à l’explosion du chômage et des travailleurs pauvres en France, comme au gonflement de ses déficits publics et sociaux.

Pire, il nie que ce n’est pas le coût du travail qui plombe les entreprises françaises mais le coût du capital, qui ponctionne la richesse produite par le travail.

Ce n’est donc pas en mettant sous pression les smicards du pays que le gouvernement travaillera à une sortie de crise par le haut. Au contraire, sans attendre un hypothétique retour de la croissance tiré par d’autres, il doit œuvrer concrètement au développement des salaires et de l’emploi dans les entreprises, et de leur sécurisation réelle, en soulageant les entreprises qui développent emplois et salaires des prélèvements du capital et en pénalisant celles qui choisissent la rentabilité financière immédiate contre l’emploi et les salaires. Certes, cela suppose de mener des combats en France et en Europe pour une transformation en profondeur de l’Union européenne, de la BCE et de l’euro. Et non de s’aligner sur les décisions de Bruxelles et de Francfort.

Mais alors le gouvernement choisirait enfin le changement pour le pays et appliquerait ce pour quoi il a été élu !

 

 

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