Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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La viticulture au bord de l'explosion.

le 13 février 2006

La crise touche l'ensemble des régions viticoles et tous les types de production.

La gravité de la crise peut se mesurer à partir des données chiffrées permettant de voir l'évolution des prix ; le bilan de la campagne 2004-2005, qui couvre la période allant du 1er Août 2004 au 31 juillet 2005, laisse apparaître des baisses de 12% à 18% pour les vins de table et des chutes plus importantes encore pour des vins d'Appellation d'Origine Contrôlée (AOC) ; ces baissent peuvent atteindre 20% pour certains vins tels que les Beaujolais et Bourgognes.

Mévente et baisse des prix ont évidemment des des conséquences sur les revenus des viticulteurs. Ainsi, pour l'année 2005, le revenu pour le producteur viticole se retrouve à 50% en dessous de son niveau de 1990 et 1998.

Cette crise, qui est une crise structurelle, s'est construite au fil des années depuis plusieurs décennies.

Les interprofessions viticoles et les tenants du libéralisme n'ont eu de cesse que d'appliquer à la viticulture des critères de gestion appliqués aux secteurs marchands et industriels afin d'aboutir à un résultat tirant toujours les prix à la production vers le bas ; pour cela, afin que la concurrence la plus exacerbée se déploie sur l'ensemble de la filière, ils ont décidé de « saturer » le marché en accordant par exemple le droit à la plantation de 70 000 Hectares supplémentaires en 20 ans dans le bordelais ; ceci a eu pour effet de multiplier par deux les surfaces de vignes AOC dans cette région.

Une telle politique est suicidaire car elle élimine les petits et moyens viticulteurs en concentrant les productions, mais elle fait aussi le jeu des tenants du négoce international en ouvrant la porte aux grandes vineries.

Suite aux accords de Marrakech où l'Europe a ouvert ses frontières aux importations de vins en provenance d'Amérique, d'Afrique et d'Asie, la France de cesse de perdre des marchés à l'exportation sur les pays d'Europe du Nord qui s'alimentent de plus en plus sur le marché mondial et notamment sur les marchés Américains.

Enfin, les réformes de l'organisation des marchés vitivinicoles vont de déréglementations en déréglementations, y compris au niveau européen, ce qui aboutit à une véritable anarchie dans l'organisation des plantations et à légaliser de véritables plantations « sauvages » dont les productions entre en concurrence directe avec celles réalisées dans l'hexagone.

Mais ces pratiques s'accompagnent aussi de méthodes pour le moins doûteuses, allant de l'utilisation de copeaux de bois pour simuler un « vieillissement en fûts », en passant par l'adjonction de certains produits chimiques, pratique pudiquement dénommée « mouillage des vins ».

La politique monétaire américaine de dépréciation du dollar, conjuguée avec la politique de la Banque Centrale Européenne de » l'euro fort », rend plus compétitives les exportations des vins de la zone dollar vers l'Union Européenne, au détriment des vins français qui perdent des marchés importants sur la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la Hollande et l'ensemble du marché mondial.

Devant cette situation, plutôt que s'appuyer sur la réputation d'excellence de nos productions, met en place un plan de restructuration ne valorisant que les appellations AOC les plus prestigieuses et abandonnant à l'industrialisation des modes de production les autres vins, livrés ainsi à la mondialisation des échanges !

Si la crise viticole frappe de plein fouet, en premier lieu, les viticulteurs, on comprend assez vite que cette crise en réalité nous concerne tous car c'est aussi du droit à accéder à des produits de qualité à des prix accessibles qu'il s'agit. Mais ce dossier revêt aussi une dimension culturelle évidente tenant dans une exceptionnalité de la qualité des vins produits en France...

A l'image des autres crises qui secouent l'agriculture, la crise avicole pose en grand, la néceesité d'une politique européenne de préférence communautaire renouvelée, la nécessité de renforcer l'encadrement de la filière oenologique et l'urgence de rendre obligatoire la mise en bouteille dans la région de production.

En soutenant une orientation de la politique agricole visant la juste rémunération du travail, les communistes préconisent la mise en place de prix minimum garantis avec une gestion maîtrisée de l'offre dans le cadre d'instances représentatives, pluralistes et transparentes.

En faisant de la qualité et de la souveraineté alimentaire un axe majeur de sa politique, le parti communiste Français est solidaire des luttes engagées dans la filière viticole et considère que la sécurisation des activités professionnelles et du travail en général, doit constituer un point de rassemblement de l'ensemble des forces progressistes.

Gérard LAHELLEC