Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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L’action, c’est maintenant !

Selon le FMI, la croissance du PIB en zone euro serait de -0,3 % en 2012. Huit pays sont déjà en récession et l’Allemagne elle-même est en difficulté. Il faut stopper la fuite en avant au service des marchés financiers, qui, au nom de la lutte contre le surendettement public et l’inflation, plonge la zone, qui compte déjà 17 millions de chômeurs, dans une austérité sans fond.

Pour 2013, du fait de ce traitement que rendrait pérenne le « pacte budgétaire Merkozy », le FMI prévoit que la croissance de la zone euro atteindrait 0,9 %, contre 4,2 % en moyenne dans le monde !

En France, au deuxième trimestre, la croissance du PIB a été nulle. Si on néglige le 3e trimestre 2011 (+0,3 %), elle est à 0 % depuis le printemps 2011. Aujourd’hui, l’activité n’a toujours pas retrouvé son niveau du début 2008. Le FMI prévoit que le PIB ne croîtrait que de 0,8 % en 2013 et le « consensus des économistes » s’en tient, lui, à 0,5 %, après 0,1 % cette année.

Cependant, F. Hollande veut faire adopter, sans référendum, le « pacte budgétaire Merkozy », a contrario de sa promesse de « renégociation » dont il assure pourtant s’être acquitté en obtenant un « pacte de croissance ». Mais, outre que le financement de celui-ci serait assuré par les marchés financiers, ce qui accroîtra leur domination, les 120 milliards d’euros sur trois ans qu’il prétend mobiliser ne font guère le compte à côté des 440 milliards d’euros d’économies sur cinq ans des principaux plans d’austérité déjà adoptés en Europe.

Au cœur de la dangereuse stagnation française, il y a le chômage.

Le Premier ministre a annoncé que le cap des 3 millions de chômeurs est franchi et que la situation « est extrêmement préoccupante ».

Cela écrase la masse salariale, d’autant qu’on refuse de relever hardiment le SMIC et d’ouvrir de grandes négociations dans le privé et le public pour rehausser les salaires, les qualifications et l’emploi, a contrario de la « conférence sociale » de juillet dernier où n’a été décidée aucune mesure d’urgence. Aussi, selon l’INSEE, le salaire réel par tête devrait diminuer de 0,5 % cette année dans les sociétés non financières, après -0,5 % et -1,1 % en 2011 et 2010 respectivement. D’où le recul « sans précédent depuis 1984 » du revenu disponible des ménages cette année qui fait fléchir la consommation, composante principale du PIB (56 %).

Aujourd’hui F. Hollande reconnaît que la crise est « d’une gravité exceptionnelle » et son Premier ministre dit qu’il « faudra peut-être réduire un peu » la prévision pour 2013 pourtant déjà abaissée à 1,2 %, contre 1,7 % initialement.

Mais le cap demeure de ramener à 3 % du PIB le déficit public l’an prochain, contre 4,5 % attendus cette année. Si la croissance n’est alors que de 0,5 %, le gouvernement devrait économiser, non pas 33 milliards d’euros comme estimé en juillet, mais 38 milliards d’euros.

Cette obstination traduit le maintien, comme priorité des priorités, de la réduction du déficit et de la dette publics, quoi qu’il advienne. F. Hollande, à Chalonsen-Champagne, a déclaré : « Mon devoir c’est de dire la vérité aux Français » et « notre devoir c’est de réduire le déficit public ». Mais alors il faut oser reconnaître qu’un tournant accentué dans l’austérité va être pris, alors que J.-M. Ayrault a promis de ne pas s’y engager dans sa déclaration de politique générale en juin. Et quelle contradiction, alors, avec la volonté affichée de la croissance et la dénonciation répétée par le Président de la République des « plans d’austérité [qui] s’additionnent » en Europe « sans d’ailleurs que la confiance ne revienne » !

Ces choix, qui vont se traduire par de nombreuses suppressions d’emplois publics dans les ministères « non prioritaires », n’empêchent nullement F. Hollande d’affirmer que « l’urgence c’est l’emploi ». Mais il se contente de dire « on accélère » les « emplois d’avenir » et les « contrats de génération », c’est-à-dire la réplique d’emplois subventionnés précaires, sans formation, dans les secteurs non marchands et la poursuite d’emplois à cotisations sociales patronales allégées dans les secteurs marchands. Des injections de tranquillisant dans le corps social qui, en réalité, contribueraient, en l’état, à le miner plus profondément avec la baisse du « coût du travail » et la déresponsabilisation sociale des entreprises.

Aucune disposition n’est annoncée contre les licenciements face à la multiplication des plans sociaux, ce que critiquent à juste titre la CGT et FO.

On entend parler de « sécurisation de l’emploi ». Mais rien n’est envisagé face aux immenses besoins de financement de la formation, de relance des salaires et des qualifications, de changement des relations banques/ entreprises, d’annulation des « licenciements boursiers », de pouvoirs nouveaux d’intervention des salariés pour changer les gestions... toutes choses indispensables pour sécuriser l’emploi.

J. Chérèque, pour la CFDT, propose les « contrats emploi-compétitivité » de Sarkozy, et d’accentuer le remplacement par la CSG, c’est-à-dire un prélèvement sur les salariés, les retraités et les chômeurs surtout, du financement mutualisé de la protection sociale à partir de la richesse produite dans les entreprises, comme le recommande le MEDEF.

De leur côté, la CGT et FO demandent à juste titre à F. Hollande de « choisir son camp ».

Car force est de constater que, au lieu de répondre aux luttes et attentes des salariés, F. Hollande et J.-M. Ayrault engagent une effort voyant de rapprochement avec le grand patronat. Ils accordent un écho très complaisant à son obsession de baisser le « coût du travail » rendu responsable des pertes de compétitivité de la France qui, en réalité, est rongée par les charges financières du crédit, les dividendes aux actionnaires et l’asphyxie des services publics.

Sur ces bases, A. Montebourg en appelle au « patriotisme économique », après J.-M. Ayrault qui, lui, a dit rechercher un « compromis à tous égards historique ». Bref, le vieux rêve d’union nationale alors que l’antagonisme s’exacerbe entre ce que font les patrons et les actionnaires des grands groupes et des banques et ce que veulent les salariés.

Sans les 4 millions de voix du Front de gauche, F. Hollande n’aurait jamais été élu. Or ces gens-là ont voté contre l’austérité et le chômage, pour une rupture avec la politique de Sarkozy et une réorientation de l’Europe.

La responsabilité du PCF dans le Front de gauche, pour construire les conditions politiques de ces réorientations avec des résultats immédiats, est considérable, au lieu de l’attentisme ou du pari sur l’échec de l’expérience engagée depuis le 6 mai par les Français.

Oui, il faut un référendum sur le Pacte budgétaire et réussir la manifestation du 30 septembre ! Oui, il faut dénoncer et combattre d’arrache-pied le contenu de ce pacte !

Mais cela doit s’articuler à des initiatives politiques d’action rassembleuses pour des mesures positives immédiates, avec l’appel à la mobilisation des salariés, des électeurs de gauche, de la gauche du PS sur des propositions précises, cohérentes, au risque, sinon, de leur donner à penser qu’il s’agit d’alimenter une posture anti-PS.

C’est vrai s’agissant de l’emploi. Exigeons partout, au-delà de l’interdiction nécessaire des « licenciements boursiers », des moratoires sur tous les licenciements pour permettre aux salariés et leurs organisations d’avancer des propositions alternatives. Au lieu de baisser le « coût du travail », baissons les charges financières du crédit, les dividendes, avec une autre implication des banques, dès le terrain, grâce à des Fonds publics régionaux. Dans les 22 régions, développons la veille et l’action contre les licenciements, imposons des confé-

rences avec les syndicats, les associations, les élus, les représentants de l’État, des banques, des employeurs pour décider d’objectifs chiffrés annuels d’emplois et de formations à réaliser en avançant, avec les moyens financiers nécessaires, dans la reconquête des filières industrielles.

La bataille pour un nouveau crédit sélectif pour les investissements matériels et de recherche des entreprises incitant à l’essor de l’emploi et de la formation correctement rémunérés, contre les gâchis de capitaux, peut prendre appui tout de suite sur les velléités du pouvoir socialiste de constituer une Banque publique d’investissement (BPI). Exigeons qu’elle contribue à changer le comportement de tout le système bancaire et à modifier les relations de ce dernier avec la BCE, via son refinancement, pour faire de l’emploi la priorité des priorités. Il s’agirait, ce faisant, d’avancer dans la conquête d’un pôle financier public avec de nécessaires nationalisations bancaires.

Enfin, last but not least, la défense acharnée des services publics pour leur relance est urgente, contre les préconisations du pacte budgétaire et l’objectif de limitation du déficit public. En développant la demande et en consolidant l’offre productive, cette défense-relance créera les conditions d’un recul effectif de la dette publique grâce à une nouvelle croissance durable, au lieu de son alourdissement avec l’austérité. Pour cela, exigeons la création d’un Fonds social, solidaire et écologique de développement européen qui, alimenté directement par la création monétaire de la BCE à l’occasion d’achats de titres de dette publique des États de la zone euro, finance leur expansion, en fonction des besoins propres à chaque pays.

En cette rentrée, il est décisif de bien conjuguer bataille pour un référendum sur le pacte budgétaire, luttes nationales et initiatives politiques d’action rassembleuses du PCF dans le Front de gauche pour répondre aux exigences sociales avec des propositions précises.

 

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L’action, c’est maintenant !

Par Yves Dimicoli, le 25 October 2012

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