Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Une exigence de novation dans l’action pour résister et pour rendre crédibles d'autres propositions

Selon Jean-Pierre Raffarin, la controverse sur la «TVA sociale» entre les deux tours des élections  législatives  a coûté au moins 60 sièges de députés à l’UMP. Illustration,  s’il en était besoin, de la place que tiennent les attentes sociales, et leur financement, dans les préoccupations des Français.

Pourtant, faute d’avoir répondu à ces attentes de façon crédible, la gauche a laissé se distendre ses liens avec les luttes  sociales, elle a perdu  l’élection présidentielle pour avoir perdu pied dans l’électorat populaire.

Elle a laissé la voie libre à Nicolas Sarkozy pour parler de «sécurité sociale professionnelle», se poser en défenseur de la «valeur travail» et convaincre une partie de l’électorat  que sa politique de libéralisation du marché du travail et de baisse du coût de la main-d’œuvre serait à même de conduire au «plein emploi» (en réalité, 5 % de chômeurs et combien de précaires en plus ?) à la fin de la législature.

Timide sur les objectifs sociaux et absente du débat sur les moyens économiques, financiers, institutionnels d’une autre croissance permettant de réaliser ces objectifs, Ségolène Royal n’a pas convaincu. Il aurait pourtant été possible de montrer, par exemple, quelles batailles politiques pourraient être engagées pour faire reculer le pouvoir des marchés financiers et mobiliser les crédits bancaires en faveur des investissements favorables  à l’emploi et à la croissance  réelle.

C’est ainsi que serait rendu possible le financement  du SMIC à 1500 euros.  Les mesures  immédiates concrètes que les luttes sociales et politiques sont en état d’imposer pour commencer tout de suite à aller dans ce sens ont fait l'objet d'une d’une élaboration très précise dans les Assises régionales et nationales de l’emploi animées par les militants communistes, jusqu’à l’élaboration d’une proposition de loi, soumise au débat public, pour la sécurisation de l’emploi et de la formation. N’avoir pas donné une priorité suffisante à cette bataille dans la campagne présidentielle  a coûté cher au Parti communiste et à la gauche.

Maintenant, le nouveau pouvoir veut aller vite. Il est conscient des contradictions et des déséquilibres que la suraccumulation financière fait peser sur l’économie mondiale alors même que le cycle conjoncturel  amorcé au début de la décennie  est encore dans sa phase ascendante. Ayant pu mesurer au deuxième tour des élections législatives que la confiance de l’électorat ne lui est pas nécessairement acquise, Nicolas Sarkozy  veut montrer  qu’il tiendra  ses promesses. Il déploie un effort énorme pour enrôler les catégories populaires et les forces qui les représentent au service d’un projet  de réformes «structurelles» destinées à faire de la France une terre d’accueil privilégiée pour les capitaux à la recherche de rentabilité.

Déjà, le cadre est fixé avec la relance de la réforme institutionnelle de l’Union européenne. Tournant le dos aux motivations profondes qui ont conduit, en 2005, une majorité de Français à dire «non» au traité constitutionnel, le projet de «traité simplifié» adopté au sommet européen du 23 juin reprend tout ce qui met la construction européenne au service des marchés financiers, à commencer par l’indépendance de la Banque centrale européenne et sa mission au service exclusif de la «stabilité des prix» (en réalité la répression des salaires et l’attraction des capitaux financiers), qui figurent dès la première partie du projet de traité constitutionnel.

En politique intérieure, privatisations et mises en cause des services publics reprennent. Le projet de loi «en faveur du travail,  de l’emploi  et du pouvoir  d’achat» vise à «diminuer le coût du travail» pour les employeurs et pousse à transférer sur la fiscalité la charge du financement de la protection sociale, comme l’a montré l’émergence de la proposition de «TVA sociale». La pression s’accroît sur les chômeurs et les salariés les plus modestes pour les contraindre, au nom de la «flexisécurité» et avec le projet de «contrat unique» de travail généralisant le CNE, à accepter de travailler plus dur, plus longtemps, pour un salaire plus aléatoire. Dans le même mouvement, le pouvoir multiplie les avantages fiscaux pour les détenteurs de patrimoines et de gros revenus.

Face à cette offensive cohérente, il y a besoin d’un Parti communiste qui sache mener les luttes concrètes en même temps que la bataille des idées et l’action dans les institutions,  dans la perspective d’un dépassement du capitalisme, d’un changement de civilisation.

C’est nécessaire pour l’efficacité  des luttes sociales. Elles doivent pouvoir  s’appuyer sur une force qui montre la possibilité  d’autres solutions mettant en cohérence, objectifs sociaux à la hauteur des urgences à satisfaire, conquête de nouveaux pouvoirs  pour les salariés et les citoyens et mobilisation des moyens nécessaires, en particulier  financiers. Pour répondre aux exigences sociales, en effet, il ne suffit pas de changer la répartition des richesses. Il faut créer plus de richesses, et surtout les créer autrement, en agissant dès à présent pour changer les critères de gestion et de financement des entreprises.

Pour les mêmes raisons, l’apport  original et ouvert d’un Parti communiste profondément transformé, de ses idées, de sa capacité à former des militants,  est nécessaire pour la renaissance de la gauche. Laisser se dissoudre  cet apport dans des recompositions  d’appareils  et des calculs électoraux serait le plus mauvais service à rendre à toutes les forces qui se réclament de la transformation sociale.

Malgré l’«effet de souffle» de l’élection  présidentielle, les résultats des élections législatives révèlent de réelles attentes envers le PCF. Ces signes sont porteurs d’une exigence de novation qui doit s’exprimer dès à présent dans l’action pour résister à la politique du nouveau pouvoir et pour rendre crédibles d’autres solutions.

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