Nicolas Sarkozy, dans sa campagne pour l’élection présidentielle, avait fait cette promesse : «Pour les futures embauches, nous créerons un contrat de travail unique, plus souple pour les entreprises pour qu’elles soient incitées à embaucher, plus sécurisant pour les salariés, car il sera à durée indéterminé ».
Déjà en 2004, lorsqu’il était ministre de l’économie et des finances de J.-P. Raffarin, il avait commandé à Michel Camdessus, ancien gouverneur du FMI, un rapport intitulé «vers une nouvelle croissance pour la France» qui visait à instituer en lieu et place du CDI et du CDD, un «contrat de travail unique» (CTU). Le niveau des droits à une protection et une indemnisation en cas de licenciement y était conçu comme progressif dans le temps, en fonction de l’ancienneté du contrat de travail.
Un tel dispositif, assure-t-on, permettrait de concilier flexibilité requise par les exigences de rentabilité financière des entreprises avec les technologies informationnelles et sécurité des salariés. Cette «fléxicurité», sensée copier le modèle scandinave, devrait permettre de lutter contre la dualisation du marché du travail (une personne sur cinq en âge de travailler ne bénéficie pas de CDI).
D’un autre côté, ajoute-t-on, la liberté de licencier dont ce nouveau CDI serait assorti inciterait les employeurs à créer plus d’emplois, la législation actuelle des licenciements en France étant considérée comme le principal frein à l’embauche.
En réalité, le CTU tel que proposé par la droite, rapprocherait le CDI du CNE.
Les droits de protection contre les licenciements, sensés progresser avec le temps, seraient nuls ou extrêmement faibles les premières années, tandis que le contrat pourrait être systématiquement rompu à ce moment.
Ce nouveau CDI introduirait en quelque sorte la précarité du CDD dans le CDI et tendrait à rendre caduque la législation sur les licenciements : pas de contestation possible du motif de licenciement ; pas de consultation des représentants du personnel ; pas de plan social ni d’obligation de reclassement pour les employeurs.
Au total, les entreprises seraient dédouanées de toute responsabilité sociale vis à vis de l’emploi et de la formation, comme vis à vis des bassins et territoires concernés.
Or, l’expérience l’a bien montré, plus on a progressé dans cette déresponsabilisation, plus le chômage s’est accru, plus la création d’emplois s’est atrophiée et plus la croissance financière des capitaux s’est déployée. Simultanément, l’effort des entreprises en matière de formation et de recherchedéveloppement reculait. Cela les a encouragées, en effet, à utiliser les potentiels de productivité des technologies informationnelles, non pour réduire le temps de travail et accroître le temps passé par chaque salarié en formation qualifiante, mais pour réduire l’emploi, maintenant sous pression la part des salaires dans les richesses produites.
Les profits faciles ainsi réalisés ont été utilisés de plus en plus à faire des placements financiers. C’est cela qui a fini par briser les ressorts de la croissance en France incitant alors les groupes à chercher la croissance nécessaire à leur activité aux États-Unis et dans les pays émergents (Chine...).
Il s’agit de relever le défi lancé par Sarkozy et la droite sur le « contrat unique » avec des contre-propositions jusqu’au Parlement, à l’appui des luttes des salariés. Cela souligne d’ailleurs l’importance d’un groupe de députés communistes à l’Assemblée Nationale pour être en prise, sur les quatre sommets sociaux prévus à cet effet par le Président de la République.
Un principe novateur à faire prévaloir, dans une proposition de loi de sécurisation de l’emploi et de la formation, consisterait à ce que soient établis des droits nouveaux à des activités professionnelles sécurisées, avec un accroissement graduel de la durée de formation continue bien rémunérée et de droits progressivement améliorés par des contrats maintenus dans l’entreprise ou en passant d’une entreprise à une autre, d’un emploi à un autre, à une formation puis au retour à l’emploi. Ces droits devraient être attachés à chaque personne et transférables d’une entreprise à une autre.
Sur la base de ce principe, il s’agirait que le CDI redevienne la norme obligatoire, les autres contrats de travail devant être graduellement transformés en CDI, sous réserve d’exceptions limitées.
Cela implique la suppression du CNE, comme celle du contrat « senior ». Des mesures spécifiques devraient être exigées pour favoriser les conversions nécessaires, comme, par exemple, la fixation d’un pourcentage annuel de conversions obligatoires de CDD en CDI, ainsi que des pénalisations anti-précarité.
En outre, il s’agirait de renforcer le CDI. Au lieu de la suppression ou de l’atténuation des protections du salarié les premières années, celles-ci devraient être considérablement étendues dés le début. Le CDI devrait être lui-même inséré dans un processus de sécurisation par l’affiliation automatique de chaque résident, dés la fin de l’obligation scolaire, à un service public et social de sécurisation de l’emploi et de la formation.
Ce service public soutiendrait aussi le développement d’un statut de sécurisation et de promotion des travailleurs qui impliquerait dans l’immédiat :
– D’importantes avancées de la sécurisation des parcours professionnels incluant des rotations entre emploi et formation ;
– Un droit à formation continue rémunérée accru année après année ;
– Des pouvoirs de propositions alternatives aux décisions de gestion des employeurs, individuels et par les comités d’entreprise ou les délégués du personnel ;
– Un droit de saisine individuelle et collective d’un Fonds national et de Fonds régionaux de prise en charge des intérêts (bonifications) des crédits bancaires aux entreprises pour financer leurs investissements. Plus ceux-ci programmeraient d’emplois et de formations et plus importante serait la bonification ;
– Des droits et des pouvoirs directs et délégués dans une gestion prévisionnelle démocratisée des emplois et des compétences, contre les licenciements et pour de bons reclassements.
– Des droits de participation personnelle et par l’intermédiaire de représentants à des Conférences annuelles régionales et nationale sur l’emploi et la formation décidant d’objectifs annuels d’emplois et de formations.
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