Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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De la casse des régimes spéciaux à celle de l’ensemble des retraites

Une issue positive au grand mouvement  social engagé sur les régimes spéciaux dépendra  lar- gement de la bataille, pour démonter le projet de Sarkozy et démontrer que des pistes alterna- tives de réformes sont incontournables.

Un point central dans les plans de l’ultra-libéralisme repose sur l’idée que le financement des retraites serait devenu impossible et que la seule solution serait la remise en cause du système solidaire français.

Le pouvoir a choisi la dramatisation  et une fausse négocia- tion et menace de régler par décret les prétendus « privi- lèges » des  régimes spéciaux.  En fait, si ceux-ci apparais- sent quelquefois plus avantageux, c’est surtout en raison du laminage des retraites du régime général par les réformes de 1993 et de 2003.

On prétend que le financement des régimes spéciaux pèse sur le régime général des travailleurs  salariés (RG), alors que les règles de compensation les mettent également à contri- bution et que les taux de cotisations sont souvent beaucoup plus élevés, ainsi à la SNCF où le taux global de cotisation s’élève  à 41,96 % alors  qu’il est de 26,05 % pour un salarié du régime général.  Si l’État  doit assurer la compensation démo- graphique de ces régimes, ce qui coûte au total 4,4 milliards d’euros, en aucun cas le régime général n’assure le finan- cement des dits avantages spécifiques qui sont assurés par un taux de cotisation de l’employeur généralement très élevé. C’est en adossant les régimes spéciaux au régime général, comme cela a été le cas à EDF-GDF et à la RATP, que l’on risque de faire peser la charge sur le régime général des travailleurs salariés.

Pour ce qui des «privilèges», le taux de remplacement (rapport entre la pension et le dernier salaire) atteint à peine 60 % pour les roulants de la SNCF (71% en moyenne dans le privé avec 40 ans de cotisations),  puisque l’essen- tiel des primes n’est pas intégré dans le calcul de la pension, et souvent les personnes qui prennent leur retraite à 50 ans, ou 55 ans, n’atteignent pas les 37,5 années de cotisations requises pour le taux plein. En définitive la retraite moyenne des cheminots se situe à environ 1 400 euros, ce qui ne permet guère de les considérer comme des « nantis ».

En outre, les retraités des régimes spéciaux représentent moins  de 5 % des retraités et ce sera moins  de 2 % en 2030. Le passage de 37,5 à 40 ans de cotisation pour ces régimes annonce de nouveaux durcissements pour tous : dès 2012, on atteindra 41 ans, puis 42 ans en 2020, peut-être  ensuite 45 comme le veut le Medef, alors qu’aujourd’hui moins d’un salarié sur deux liquidant sa retraite dans le régime général atteint  40 années de cotisations. L’éviction des travailleurs vieillissants  dès 57 ans, la précarité au travail, notamment chez les jeunes et les femmes, vont faire exploser le nombre de retraités pauvres, y compris dans la fonction publique et dans les entreprises  publiques.  Sous couvert « d’équité », l’objectif consiste bien à organiser la régression globale de toutes les pensions.

Quels sont les problèmes auxquels sont confron- tés les régimes spéciaux de retraite comme ceux de la RATP, EDF, GDF, SNCF ?

C’est d’abord l’insuffisance des créations d’emplois et du développement des salaires. Cela est aggravé par la mise en œuvre des politiques ultra-libérales par l’État-Sarkozy qui cherche à casser les statuts des services publics et à réduire les emplois publics, alors que ceux-ci contribuent  à la croissance et au financement de la protection sociale. On favorise ainsi la dégradation du rapport cotisants/retraités qui est au cœur du problème de financement des retraites.

Les régimes spéciaux sont-ils condamnés à disparaître à cause de ce déséquilibre ?

Ces régimes jouent un rôle décisif dans des secteurs vitaux pour le développement du pays, permettant de former la force de travail, de la renouveler, de la stabiliser, en insufflant les valeurs du service public en relation avec les statuts. Alors qu’ils constituent un instrument de la gestion des res-sources humaines, on tendrait à les désorganiser complè- tement, même si l’on dit vouloir encourager une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. En outre, il convient de rappeler que les départs anticipés à la retraite, notamment pour les roulants de la SNCF, correspondent à des astreintes très lourdes, des conditions de travail et de vie qui restent extrêmement pénibles, même si ceci concerne aussi le secteur privé, le BTP par exemple, ce qui ne rend que plus urgente une véritable négociation sur la pénibilité que le MEDEF se refuse à financer.

L’équité, ce n’est pas de tirer toutes les retraites vers le bas, mais de se donner les moyens de financer les retraites à 75 % du salaire avec 37,5 annuités  pour tous les salariés du public et du privé.

Quelles propositions  peut- on faire pour en assurer le finan- cement  ?

Une refonte de progrès du financement des retraites est in- contournable pour répondre aux nouveaux besoins, notam- ment ceux liés à l’évolution  démographique.

Elle permettrait de sortir des réformes Balladur-Fillon en dégageant les moyens de revenir à 37,5 annuités pour tous, à l’indexation des retraites sur les salaires et non sur les prix afin de rétablir le pouvoir d’achat des retraités, à revenir aux meilleures années pour le calcul des pensions et à mettre en chantier de véritables négociations sur la pénibilité

Nous devons faire monter les résistances pour rompre avec les mesures Balladur-Fillon et s’opposer aux nouvelles mesu- res annoncées par Sarkozy en travaillant à des propositions alternatives. En premier lieu une réforme du financement doit garantir la solidarité de la répartition  au lieu de condam- ner dans l’avenir une grande part des travailleurs  à de bas- ses retraites tout en poussant ceux qui le peuvent à la capi- talisation.  Les réformes que nous proposons, représenteraient certes d’ici 2040, au moins 15 points de cotisations supplé- mentaires, mais on peut y faire face à la condition d’en- clencher d’urgence une refonte de progrès et d’efficacité du financement, branchée sur un nouveau type de croissance, en relation avec un nouveau type de progression de la productivité du travail, des salaires, de l’emploi et des quali- fications. Bien sûr la part des retraites dans le PIB va s’ac- croître de 2000 à 2040 de l’ordre de 50 %, en relation avec le vieillissement de la population, et devra monter au minimum à 18 %. Ceci doit être assumé en enclenchant une réforme alternative du financement, mais il convient de souligner que la réforme de progrès que nous proposons, en contribuant à un nouveau type de croissance et au renouvellement de la force de travail, peut finalement ralentir la progression rela- tive de la part des retraites dans le PIB, en participant à une nouvelle dynamique de la croissance du PIB.

En revanche tout nouveau retard dans l’exigence d’une telle réforme conduira, paradoxalement, à l’explosion  du taux de prélèvement des retraites par rapport au PIB, alors que ce taux pourrait progresser de manière raisonnable pour répondre aux besoins liés notamment au vieillissement de la population, ou bien cela conduira à une régression mas- sive des retraites. Plus probablement d’ailleurs, on risque- rait d’assister à la conjonction de ces deux tendances, d’où l’urgence renouvelée de nos propositions.

Devant cette urgence, nous proposons de soumettre les revenus financiers des entreprises (183 milliards  d’euros en 2006) ainsi que les revenus financiers nets des institutions financières (60 milliards) au taux de cotisations des salariés, soit autour  de 10 %.

Ceci ferait rentrer plus de 20 milliards d’euros de cotisations. Mais, notre proposition de fond c’est une réforme de l’as- siette des cotisations dites patronales tenant compte de la politique d’emplois et de salaires des entreprises. L’objectif serait de relever le taux et la masse des cotisations  patro- nales en incitant à un relèvement de la part des salaires dans la valeur ajoutée. Les entreprises où cette part est élevée auraient un taux de cotisations relativement abaissé. Inver- sement, les entreprises qui compriment les emplois et les salaires en aggravant précarité et licenciements, au bénéfice de la seule croissance financière, seraient soumises à des taux de cotisations plus lourds. Par ce mécanisme, les 15 points de cotisation supplémentaire que nous avons évoqués

,pourraient être dégagés à partir d’une nouvelle logique et d’une nouvelle dynamique de la croissance réelle , de l’em- ploi de la formation et des salaires .

Le pouvoir refuse d’en débattre et il nous faut rassembler, contre-proposer.  Au–delà de l’importante manifestation intersyndicale du 18 octobre, de l’ampleur de celle du 14 novembre,  nous devons organiser  la riposte  globale à la politique de Sarkozy et aux réformes hyper-libérales, la journée du 27 octobre à l’initiative du PCF constitue  un temps fort décisif qui doit trouver de nouveaux dévelop- pements. Le PCF travaille aux rassemblements ainsi qu’à une nouvelle dynamique des forces de résistance

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