Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Le plan d’urgence du PCF pour combattre la crise

L'amplification de la crise financière du système capitaliste en 2008 et ses conséquences  récessives pour toute l’économie mondiale, notamment dans la zone euro, en 2009 font des mois qui viennent une période décisive. Sans riposte sociale et politique forte, le prix à payer pour les salariés peut être très lourd.

Une nouvelle période politique est ouverte, celle d’une intense bataille politique et idéologique en France, en Europe et dans le monde, sur l’orientation de toutes les politiques économiques, sociales et financières, et plus globalement sur la légitimité des logiques capitalistes qui ont jusqu’ici dominé la mondialisation.

Cela fait maintenant plusieurs mois que les dirigeants capitalistes ont dû admettre le caractère systémique de la crise. En France, Nicolas Sarkozy prétend presque chaque jour combattre la crise, et même refonder le capitalisme. Mais cela fait quatre mois que les prévisions économiques chutent, que les conséquences de la crise s’aggravent, que les vagues de licenciement déferlent, que le pouvoir d’achat dégringole. Le gouvernement multiplie les annonces, les mesures de soutien au capital privé et à la finance, et rien n’enraye l’engrenage récessif. Les marges de manœuvre financières dégagées depuis l’automne par les différents plans gouvernementaux  – 428 milliards au total, pas mal pour un pays dont les caisses étaient soi-disant vides – sont pour l’essentiel promises à reconstituer les capacités de crédit du système financier sans changer un iota aux critères d’utilisation de cet argent.

Or tant que le crédit servira à soutenir les rendements financiers contre l’emploi et les salaires, la situation continuera à empirer. Ceux qui demandent d’attendre les effets du plan de relance sarkozyste mentent aux Français. Cette politique  est déjà signée du sceau de l’échec.

Les communistes ont clairement diagnostiqué le cancer financier qui est au cœur de cette crise, et dès l’automne avancé des propositions fortes pour une maîtrise publique et sociale de la monnaie et du crédit, notamment la constitution d’un pôle public et financier qui permette de changer radicalement les critères d’utilisation de l’argent. Aujourd’hui, nous articulons ces propositions aux grandes urgences sociales du pays.

Le congrès du Parti communiste s’est conclu sous le signe de l’offensive face au système capitaliste en crise. Nous voulons faire valoir dans les batailles sociales, dans le débat politique des axes de transformation du système qui permettent de faire reculer concrètement les logiques capitalistes qui aggravent la crise. Nous voulons construire des fronts politiques larges porteurs de ces exigences de transformations, avec l’ambition de marquer des points, de conforter les résistances mais aussi et surtout de rendre à nouveau possible des changements progressistes face à la crise.

s le 12 janvier, le PCF a présenté un plan d’urgence pour combattre la crise.

Trois jours de mobilisation nationale ont permis de populariser ces propositions à plusieurs millions d’exemplaires.  Nous agissons avec la volonté d’alimenter utilement les mobilisations sociales en cours. La journée d’action unitaire du 29 janvier est un événement comme le contenu de la plate-forme unitaire adoptée. Il ne s’agit plus seulement d’aligner des revendications. Un débat national s’ébauche sur les logiques qui doivent guider les mesures adoptées. Nous voulons pousser ce débat pour rassembler sur des solutions novatrices.

Notre plan de bataille contre la crise articule quatre grandes urgences.

1) Première  urgence : sécuriser et relancer l’emploi

Non seulement ce n’est pas aux salariés de payer la crise des marchés financiers, mais laisser les actionnaires éponger leurs pertes, soutenir et redresser leurs rendements financiers en licenciant, en écrasant le pouvoir d’achat, en empochant tous les financements publics et bancaires, c’est à coup sûr entretenir les logiques de crise. Voilà pourquoi nous proposons la suspension des projets de suppressions d’emplois et la convocation, là où des problèmes se posent, de tables rondes quadripartites directions d’entreprises-Étatélus-syndicats pour examiner des solutions alternatives aux politiques actuelles de réduction d’emplois ou de chômage technique. Les contre-propositions issues de ces tables rondes devraient être examinées prioritairement par les banques et les pouvoirs publics dans le cadre de l’utilisation des 428 milliards d’euros dégagés au nom de la relance. Bien des mesures alternatives aux licenciements et au chômage technique sont possibles : de la mise à contribution des profits, des dividendes versés aux actionnaires, à la réduction des intérêts payés aux banques; de l’utilisation de crédit à taux zéro pour les PME en cas de rupture de trésorerie sous condition de renoncement aux suppressions d’emploi à des mesures de taxation dissuasive et de conditionnement des aides contre les politiques de délocalisation...

2) Seconde urgence  : relever  fortement  le pouvoir d’achat populaire.

Un relèvement conséquent des salaires, des retraites et des minima sociaux est le plus sûr moyen de la relance du pouvoir d’achat et du soutien à la consommation et à la demande.

Cela passe par le relèvement immédiat du SMIC, des traitements de la fonction publique, du minimum vieillesse et des minima sociaux ; par la convocation dans le premier trimestre 2009 d’une conférence  nationale  sur les salaires et le pouvoir d’achat, donnant le signal de négociations  généralisées sur la revalorisation des salaires et des qualifications; par une une baisse significative de la TVA sur les produits de première nécessité et sur les transports.

3) Troisième  urgence : relancer  les investissements utiles à un nouveau type de croissance.

En finir avec les politiques d’écrasement des dépenses publiques et sociales aurait le double mérite de répondre à des besoins criants et de créer les conditions d’une relance intérieure saine. Il faut non seulement annuler les programmes massifs de suppression d’emplois publics et de rationnement des budgets publics mais lancer des programmes nationaux pluriannuels d’investissement dans la santé et l’hôpital, l’éducation, le logement, les transports publics et le fret, la recherche, les filières écologiques...

Cette mobilisation  publique nécessite l’adoption de premières mesures fortes de réorientation de la fiscalité avec notamment l’annulation du paquet fiscal de l’été 2007, la modulation immédiate de l’impôt sur les sociétés pour pénaliser les entreprises qui continueraient à donner la priorité aux rendements financiers sur la préservation et la création de l’emploi, et un plan d’aide exceptionnelle aux collectivités locales, dont l’activité est un élément essentiel de l’économie nationale, et dont l’asphyxie serait une catastrophe,  avec notamment le remboursement immédiat de la TVA, la compensation des transferts et une réforme de la taxe professionnelle qui, à l’inverse de la suppression programmée par le gouvernement, dote les collectivités de ressources nouvelles.

Les politiques d’exonération de cotisations sociales doivent être également abandonnées alors que le plan de relance du gouvernement les augmente encore.

La mobilisation nationale doit aussi concerner d’autres secteurs clés de notre économie. Les stratégies de la filière automobile doivent être repensées, dans le sens d’une industrie automobile durable et créatrice d’emplois en Europe, permettant notamment une lutte efficace contre les politiques de délocalisations et de dumping social et salarial des constructeurs, au contraire du soutien accru actuel aux politiques financières de ces groupes.

Autre exemple essentiel : la construction et le bâtiment. Il faut engager un grand plan de relance de toute la filière appuyé sur un effort de construction et de rénovation de 180 000 logements  sociaux  par an. Pour soutenir cette relance du logement social, l’ensemble de l’épargne populaire (Livret A, Livret B, Livret Bleu, LDD [ex-Codevi]  et LEP) doit être à nouveau intégralement centralisé par la Caisse des dépôts et consignation. Livrer ces ressources, après la crise, aux critères laissés intacts du système bancaire et financier est une aberration.

4) La quatrième  urgence est transversale : il s’agit de réorienter  tous les financements, notamment  l’utilisation des 360 milliards du plan d’aide aux banques.

Nous avons avancé de nombreuses propositions  à l’automne, dont celles, essentielles et pleinement d’actualité, de la constitution d’un pôle public et financier, à partir de la Banque  Postale,  d’Oséo,  de la CDC, des Caisses d’Épargne et de nouveaux outils d’interventions publiques crées par le gouvernement comme la Société de Prise de Participation de l’État et le Fonds stratégique d’investissement qui agissent aujourd’hui  sans contrôle transparent. Celle également de la refondation des missions et du rôle de la Banque Centrale Européenne, dont nous entendons faire une proposition forte dans le cadre de la bataille des prochaines élections européennes, d’autant que la fable de l’indépendance de la BCE à l’égard  des gouvernements vient de voler en éclat à la faveur de la crise financière.

La bataille pour savoir comment est utilisé l’argent des entreprises, notamment des grands groupes, les énormes sommes dégagées au nom des différents  plans relance, et surtout sur la base de quels critères, doit devenir une grande bataille publique, omniprésente sur tous les dossiers chauds.

Des pouvoirs d’intervention nouveaux doivent être créés à tous les niveaux pour les salariés, les syndicats, les élus, les populations. Mais il convient de faire de cette inter vention une exigence immédiate.  Le gouvernement, les groupes, les banques, les préfets, le médiateur du crédit... tous doivent rendre des comptes. Ne laissons pas Nicolas Sarkozy parader sur cette question alors qu’il donne en vérité son blanc-seing à la poursuite des stratégies financières actuelles. Proposons partout la création de cellules de crise ou de commissions transparentes, ouvertes aux élus et aux syndicats, dans les départements ou

les bassins d’emplois,  pour contrôler l’utilisation des milliards d’euros dégagés au nom des plans anti-crise. Saisissons publiquement les préfets et ouvrons en grand le débat public sur cette question clé.

Pierre Laurent

Coordinateur national du PCF

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