Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Face au rejet de sa politique Sarkozy redouble de démagogie sur le social et l’écologie

N. Sarkozy croit pouvoir se prévaloir  des résultats des élections européennes. Il entend pousser son avantage (relatif)  en développant une démagogie effrénée et en rassurant sur l’imminence d’une reprise mondiale suffisamment forte, à partir  des États-Unis, censée régler  tous les problèmes de financement qui s’accumulent.  Son but demeure  cependant totalement inchangé : il s’agit de mobiliser massivement les moyens de l’État au service de la domination de la rentabilité  financière de grands monopoles privés et, pour cela, de chercher à intégrer  les syndicats, et à travers eux les couches populaires,  et à instrumentaliser  la poussée du vote écologiste, et à travers lui, la demande  de novation  politique des couches moyennes salariées.

1 - Le chômage plombe la confiance des Français dans la politique  de Sarkozy :

La crainte du chômage et la peur du déclassement, pour soimême ou pour ses proches, demeure plus que jamais la préoccupation  no 1 des Français.

Or, selon le tout récent baromètre « BVA-Avanquest », réalisé pour La Tribune et BFM, 65 % des Français pensent que la politique du gouvernement aura un impact négatif (33 %), soit cinq points de plus que lors du précédent sondage, ou aucun impact (32 %) sur la situation du chômage.

Dans sa note de synthèse, Gaël Sliman, directeur général adjoint de BVA, souligne que ce niveau « très négatif » est à « corréler avec la grande impopularité de la politique économique du gouvernement (61 % des sondés la jugent mauvaise) ».

Ce commentateur  avisé ajoute que cela « confirme bien » que les élections européennes du 7 juin, remportées par l’UMP avec 12 points d’avance sur le PS, ne constituaient « nullement un feu vert à la politique menée ».

Ces données expliquent  pour une large part l’ampleur de l’abstention.  Elles confirment à quel point l’UMP, qui a perdu plus de 7 millions de voix aux élections européennes par rapport au score de Sarkozy à la présidentielle, est très loin d’être majoritaire.

2 - Une démagogie sans précédent sur les réponses sociales à la crise :

2.1 Démagogie planétaire  à partir de la protestation contre la mondialisation  actuelle :

Lundi 15 juin, à l’occasion du 90e anniversaire de l’OIT, il a « trouvé des accents dignes d’un Lula » (Le Monde du 17/06)

pour dénoncer « la marchandisation du monde », revendiquer que la santé, l’éducation,  la culture, la biodiversité, le climat, le travail ne soient pas traités comme « des marchandises comme les autres ». Il a plaidé pour « un ordre mondial plus respectueux de l’homme » sur le plan social et environnemental, bavardant volontiers sur le besoin de nouvelles normes et d’une nouvelle gouvernance mondiale laissant place à l’OIT... Mais il redouble, en France, dans la mise en concurrence des salariés par les allègements de « charges sociales » et dans la privatisation (gaz-électricité, poste, fret ferroviaire) contre les services publics, après avoir fait adopter le projet de traité de Lisbonne (avec sa concurrence libre et non faussée…) au mépris du choix exprimé en référendum par les Français en mai 2005.

2 . 2  Efforts d’intégration  des syndicats à par tir des besoins de sécurisation de l’emploi et de la formation  :

En prétendant vouloir favoriser le recours à d’autres instruments que les suppressions d’emploi pour répondre aux problèmes de compétitivité  des entreprises, N. Sarkozy a lancé, le 10 juin, une nouvelle négociation avec les « partenaires sociaux » sur « la gestion sociale des conséquences de la crise économique sur l’emploi ».

Cette réunion sera suivie de deux autres, les 24 juin et 8 juillet pour, au final, servir à élaborer un accord sur « le maintien du lien contractuel » au travers du « chômage partiel, du prêt de main d’œuvre, des groupements d’employeurs » et de « la mobilité au sein de l’entreprise et du groupe ».

Cet accord servirait alors de cadre pour un débat à l’Assemblée nationale sur la proposition de loi si réactionnaire sur le prêt de main d’œuvre déposée par l’UMP le 25 mai.

Dans un second temps, la négociation portera aussi sur la «sécurisation des parcours professionnels et l’anticipation de la sortie de crise » en s’intéressant particulièrement  à la formation et aux « compétences transférables ».

Bref c’est la suite des chantiers pour avancer vers « la flexicurité »  auxquels on doit déjà la « rupture à l’amiable du contrat de travail » ou la refonte de l’ANPE et de l’UNEDIC en pôle emploi, à l’appui de la chasse aux chômeurs et de l’obligation de leur faire accepter de plus en plus des emplois à bas coût salarial. C’est aussi le développement intensif du chômage partiel et de dispositifs pour faire se résigner les salariés aux suppressions d’emploi (contrats de transition professionnelle…) sur fond de baisse massive du coût salarial de l’emploi avec, notamment, la multiplication des allègements de cotisations sociales patronales.

3- Démagogie  sur l’écologie  :

N. Sarkozy entend, désormais, passer pour « le meilleur écologiste de France » avec la promesse annoncée que « là où on dépense 1 euro pour le nucléaire on dépensera 1 euro pour les énergies renouvelables » ! Promesse qui fait fi, cependant, des contraintes budgétaires du Pacte de stabilité que, par ailleurs, le Président ne cesse de mettre en avant pour justifier le rationnement des dépenses publiques et sociales.

Mais, c’est aussi, dans la foulée du Grenelle de l’environnement, la promesse d’une « taxe climat-énergie », qui sera supportée aveuglément par les consommateurs finaux, en contrepartie d’un nouvel «allègement de la taxation du travail » (baisses de cotisations sociales) comme l’a spécifié Sarkozy.

En occupant  le terrain  du social, Sarkozy entend neutraliser les syndicats, continuer à enfoncer la Parti socialiste dont il occupe désormais ouvertement le terrain de « la régulation », et empêcher que les frémissements prometteurs à gauche, avec le score du Front de gauche, ne prennent de l’ampleur.

En occupant  le terrain de l’écologie, comme il entend le faire, il cherche à entretenir la coupure entre respect de l’environnement et transformations sociales et, en réalité, il cherche à préparer le terrain pour l’adoption de mesures censées défendre et promouvoir l’écologie en imposant des reculs sociaux.

Crise économique  : le Conseil économique, social et environnemental prend position.

Le dernier avis de conjoncture du Conseil économique, social et environnemental (CESE) mérite qu’on lui prête attention(1). Présenté fin mai par Pierre Duharcourt, professeur des Universités, économiste, et représentant de la FSU au CESE, il a été voté avec le soutien des principales confédérations syndicales mais contre l’avis du groupe des entreprises privées (MEDEF, CGPME, chambres de commerce…). Et pour cause : loin d’exprimer un consensus sans relief, il propose une analyse vigoureuse des « racines » de la crise et des remèdes à y apporter.

Après beaucoup d’autres, le CESE critique la « timidité » des mesures de relance économique pratiquées dans les principales économies, particulièrement  dans la zone euro, et les « fluctuations » de la politique  économique en France face à la crise. Il plaide pour un rééquilibrage des mesures de relance en faveur d’un soutien aux salaires et d’une sécurisation des emplois et des parcours professionnels.

Mais l’un des intérêts principaux de l’avis est la vigueur avec laquelle il souligne que « loin d’être seulement conjoncturelle, la crise actuelle résulte de l’éclatement de contradictions  nouvelles dans la mondialisation : croissance reposant sur le gonflement de l’endettement (favorisé par le recours systématique à « l’effet de levier »), montée des pays émergents  et de leurs fonds souverains, transformation de la division internationale du travail pesant sur l’évolution et la structure de l’emploi dans les pays développés, nécessité de faire face au changement climatique et plus généralement aux exigences d’un « développement durable ».

Il en tire logiquement la conclusion que « sans transformations  structurelles,  les mesures de soutien aux banques ou de relance budgétaire risquent de déboucher sur une situation  où se retrouveront les racines de la crise actuelle ».

Le rôle des effets de domination et des excès de l’endettement des États-Unis dans la crise est signalé, ainsi que la nécessité de remédier aux dysfonctionnements résultant de l’hégémonie du dollar. La proposition chinoise en faveur de l’adoption d’une monnaie mondiale est citée.

L’avis est encore plus précis à propos des changements à apporter dans le financement des économies européennes, et particulièrement des PME.

Il se prononce ainsi pour « des politiques du crédit plus sélectives pour le système bancaire et financier (au niveau de la France mais aussi de l’Eurosystème) pour favoriser des investissements productifs porteurs d’un renforcement de l’activité, de l’emploi et de la qualification de la main-d’œuvre », reprenant dans une formulation particulièrement circonstanciée une proposition reprise dans plusieurs avis successifs du CESE.

Il rejoint à sa façon, les analyses avancées par Paul Boccara dans son dernier ouvrage et reprises dans notre revue.

 Bref, un avis à faire connaître et à utiliser dans les débats d’actualité sur la politique économique et la crise systémique.

La rédaction

(1) L’avis et le rapport préparatoire qui l’accompagne sont accessibles sur le site Web du CESE à l’adresse suivante :

http://www.ces.fr/rapport/doclon/09060316.pdf.

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