Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

Economie et Politique - Revue marxiste d'économie
Accueil
 
 
 
 

Fusion Banques populaires et Caisses d’Épargne ou pôle financier public ?

Le projet  de fusion des Caisses d’Epargne et des Banques Populaires suscite de très vives inquiétudes pour au moins deux raisons.

La première de ces raisons est la prise en charge par l’Élysée de ce dossier, avec la nomination  de François Pérol. Ce Monsieur,  désigné (avec la bénédiction du pouvoir) Directeur général de la Banque Fédérale des Banques Populaires et Président du Directoire de la Caisse Nationale des Caisses d’Épargne, a été fortement impliqué dans la création de Natixis, entre autres le chantre «du travailler plus pour gagner plus », de la remise en cause des 35 h, l’artisan  de la privatisation de Gaz de France et l’initiateur du projet de privatisation de la Poste. Son passage comme banquier d’affaires chez Rothschild et Cie témoigne clairement du type de système économique qu’il défend à l’opposé du service public, de l’économie sociale mutualiste et coopérative.

La deuxième raison, c’est que la nomination par le pouvoir d’un homme chargé d’un tel passé pose la question de l’utilisation des milliards que l’État doit injecter dans le futur deuxième groupe bancaire français.

Les exigences de rentabilité des capitaux investis par l’État préjugent mal de leur utilisation au service des clients et des agents économiques qui risquent d’être étranglés par des taux prohibitifs. Ce que l’on sait, c’est que l’entrée de l’État à hauteur de 5 milliards d’euros sous forme d’actions privilégiées  sans droit de vote et de TSSDI (Titre Super Subordonné d’Investissement) n’a pas vocation à durer plus de 3 ans. Cela implique des objectifs de rentabilité élevés pour arriver à rembourser l’État et des cessions d’actifs importants.

À titre d’exemple cette somme à un taux de 10 % (ce qui risque d’être le cas) générera un remboursement annuel de l’ordre de 5 M €. Cette recherche de rentabilité va peser sur les clients et les agents économiques à travers des propositions de taux de prêts, de tarifications élevés, engendrant pour les uns une baisse du pouvoir d’achat et pour les autres la mise en place d’une politique sociale dure (suppressions d’emplois, salaires bloqués...) dans leur secteur d’activité.

Ces mêmes exigences de rentabilité vont peser lourd au plan social dans les Banques Populaires, les Caisses d’Épargne, Natixis, avec des restructurations destructrices d’emplois, la baisse des rémunérations, l’aggravation des conditions de travail.

Le montant des intérêts à rembourser à l’État et la recherche de la baisse du coefficient d’exploitation aura un effet ciseau sur les salariés des entreprises concernées. Ce fameux coefficient d’exploitation,  norme capitaliste bancaire, mis à mal par la crise financière (c.-à-d. en augmentation) est le résultat d’une fraction qui comporte à son numérateur les charges (salariales, de fonctionnement…) et à son dénominateur  le Produit Net Bancaire résultat de l’activité bancaire. Le taux d’intérêt, induit par les sommes injectées par l’État, minorant le résultat du PNB, et la concurrence que se livrent les banques entre elles avec la banalisation des activités, vont générer une très faible possibilité de développement du PNB. En conséquence, comme solution rapide pour baisser le coefficient d’exploitation les patrons vont, comme ils l’ont toujours fait, réduire les charges.

Pour ce faire ce projet va déboucher sur :

– la recherche d’économie d’échelles à travers la mise en commun d’activité par la création d’usines de production (crédit, pré-contentieux, contentieux etc.) supprimant immanquablement des emplois, créant de la mobilité fonctionnelle et géographique imposée.

– le gel de la masse salariale générant une baisse du pouvoir d’achat pour les salariés des établissements bancaires concernés.

– l’aggravation  des conditions de travail par plus de travail avec moins d’effectifs, moins de moyens et cela afin d’augmenter la rentabilité, productivité par ETP (effectif temps plein).

Compte tenu de tous ces éléments, pour le moins révoltants, il faut dès aujourd’hui exiger que l’octroi de fonds publics aux banques soit assorti de garanties tant sur le plan du financement des besoins de l’économie qu’en matière d’emplois et de pouvoir d’achat dans les établissements bancaires concernés.

Au-delà de cette exigence nous devons nous opposer à ce projet de fusion entre les Banques Populaires et les Caisses d’Épargne. Non pas pour un statu quo, bien au contraire la crise du système capitaliste  dans sa phase financière et bancaire doit être l’occasion pour les salariés, syndicats, acteurs économiques, le monde associatif et politique d’imposer un véritable débat sur le rôle que doivent assurer les banques : c’est-à-dire collecter de l’argent pour le réinjecter dans les rouages économiques et sociaux de la nation.

Pour ce faire l’année 2009 doit être l’année de l’émergence revendicative  pour la création d’un pôle financier public.

Celui-ci pourrait voir le jour autour, entre autres, de la CDC, la Poste, les Caisses d’Épargne, Oseo, Natixis,  des banques mutualistes. L’objectif de ce pôle financier public serait, pour l’essentiel, de pratiquer une autre politique de crédit en direction des différents acteurs économiques. Cette notion d’un nouveau crédit a été exposée dans le rapport d’introduction de Yves Dimicoli lors de la rencontre nationale pour la mise en place d’un pôle financier public à Orléans 2 décembre  2008 (Économie Politique de novembre-décembre  2008) Une telle proposition doit être débattue, poussée le plus loin possible dans sa faisabilité par tous ceux qui aujourd’hui attendent des banques autre chose que la fuite en avant pour la recherche de la rentabilité financière dont l’objectif unique est de rassurer les marchés financiers au détriment de l’emploi , des salaires, de la formation.

Le projet de fusion des Banques Populaires et des Caisses d’Épargne n’a qu’un seul but, satisfaire le projet du gouvernement actuel et des institutions européennes pour la constitution  de grands groupes bancaires européens.

Ces derniers, dans leur rôle de créateur de monnaie, par le biais des prêts, ont et auront comme objectif unique le maintien du système capitaliste,  aujourd’hui plus qu’ébranlé, au détriment des besoins économiques répondant à des critères sociaux et humains.

 

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.