Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Proposition de loi du pcF et du pG : Garantir le financement de la retraite à 60 ans

La proposition de loi, que les député-e-s communistes, républicains, du Parti de gauche et apparentés ultramarins, ont déposée (1), est une alternative au projet de loi régressif de Sarkozy-Fillon-Woerth sur les retraites. Elle montre qu’un autre financement des retraites est possible et indispensable pour sortir de la crise systémique.

La part des salaires dans la valeur ajoutée a chuté en France de 9,3 points entre 1983 et 2006. Sur la même période, la part des dividendes versés aux actionnaires passait de 3.2 % à 8.5 % du PIB (et de 5 % de la valeur ajoutée à près de 25 %).

Outre qu’ils manquent pour les salaires et le social, ces revenus accaparés par le capital sont utilisés contre l’emploi (spéculation, délocalisation).

Malgré tout le capitalisme financiarisé, se heurte encore aujourd’hui à l’existence de notre système de protection sociale par répartition. Ainsi entre 1993 et 2009, à l’opposé des objectifs affichés par les gouvernements  successifs au nom du poids excessif des « charges sociales », le volume des cotisations sociales a continué d’augmenter (+19 %). Mais celui-ci n’a pas suivi l’évolution du PIB (+33 %), ni celle des revenus financiers des entreprises et des banques (+143 %).

Cette croissance vertigineuse des prélèvements financiers et aussi celle, certes moindre, des prélèvements sociaux a été possible en raison, notamment, des gains de productivité liés à la révolution informationnelle. Celle-ci a permis des économies massives en travail vivant et passé.

Cette financiarisation a conduit à une enflure de la part des produits financiers dans la valeur ajoutée des entreprises qui est désormais près de deux fois supérieure (29 %) à celle de leurs cotisations sociales (15 %).

Seuls une rupture avec les types de gestions des entreprises et les politiques économiques libérales, une meilleure répartition des richesses entre travail et capital combinée au développement de l’emploi qualifié et rémunéré permettront de répondre efficacement à l’enjeu du financement de la protection sociale.

Cela exige la désintoxication de l’économie à la financiarisation, alors qu’explosent les revenus financiers (2) des entreprises et des banques (+143 % entre 1993 et 2009 ; +626 % entre 1980 et 2009) dans la nouvelle phase en cours de la crise systémique :

Avec la proposition de loi, il s’agit de commencer à rompre avec ce type de gestion dominée par les critères des marchés financiers.

Le chapitre premier de la proposition de loi porte sur un dispositif dynamique poursuivant deux objectifs, le financement des régimes de retraite et le développement de l’emploi.

L’article 1 propose d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d’assurance vieillesse, à un taux égal (9.9 %). Cette nouvelle contribution, qui apportera un surcroît de recettes de l’ordre de 30 milliards d’euros, poursuit un double objectif : un financement rapide des régimes obligatoires de retraite, et une incitation forte pour les entreprises à privilégier le facteur travail.

L’article 2 propose une modulation des cotisations patronales d’assurance vieillesse en fonction des gestions des entreprises en matière de production et de répartition des richesses : les entreprises privilégiant une orientation des fonds en faveur du capital et au détriment de l’emploi, des salaires et de la formation professionnelle sont soumises à des cotisations additionnelles d’assurance vieillesse.

L’une  est calculée en fonction de l’évolution  du ratio exprimant la part de la masse salariale augmentée des dépenses de formation de la société (S), dans la valeur ajoutée (augmentée des produits  financiers) (VA) par rapport à l’évolution moyenne du ratio de répartition des richesses S/VA à l’échelle nationale. La seconde est calculée en fonction de l’écart entre le ratio S/VA dans l’entreprise et le ratio moyen du secteur dont elle relève. Ces deux cotisations additionnelles sont cumulatives.

Lorsque le ratio S/VA dans l’entreprise est supérieur au ratio du secteur dont elle relève, l’entreprise reste assujettie au taux de cotisation patronale de droit commun.

De même, lorsque la variation du ratio dans l’entreprise est positive et supérieure à celle du ratio national, elle reste assujettie au taux de cotisation patronale de droit commun.

En revanche, lorsque le ratio S/VA de l’entreprise est inférieur à celui du secteur dont elle relève, elle est assujettie à une cotisation additionnelle dont le taux est égal à l’écart entre le ratio du secteur et celui de la société.

Par ailleurs, lorsque la variation du ratio S/VA de l’entreprise est positive ou nulle mais néanmoins inférieure à la variation du ratio national, ou négative, l’entreprise s’acquitte d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse assise sur la totalité de sa masse salariale, dont le taux est  égal à la différence entre le taux de variation du ratio de l’entreprise et le taux de variation du ratio national.

L’article 3 propose de majorer de 10 % les cotisations sociales patronales des entreprises de plus de 20 salariés comptant dans leurs effectifs au moins 20 % de salariés à temps partiel, afin de décourager le recours au temps partiel subi et inciter à l’accroissement de la durée d’activité.

En effet, la question de l’emploi,  de la réduction du sous-emploi et de la revalorisation des salaires est une clé essentielle du financement des retraites et de la protection sociale en général. Pour les salarié-e-s, majoritairement les femmes  travaillant à temps partiel, cette précarité se répercute durement au moment de la retraite. Dans certains secteurs, dont celui du commerce, des services aux entreprises, de l’éducation, de la santé et de l’action sociale, le taux de salarié-e-s employés à temps partiel s’élève à plus de 20 %. Dans les services aux particuliers, c’est plus de 31 % !

Les articles 4 et 5 traitent des exonérations sociales.

La baisse du coût du travail, au travers des exonérations de cotisations  sociales patronales,  fil conducteur des politiques libérales de l’emploi, est largement contestée aujourd’hui. En effet l’efficacité quantitative en matière de création d’emploi reste non démontrée alors que les effets négatifs sur la qualité de l’emploi et l’effet « trappes à bas salaires » sont flagrants. Le coût pour le budget de l’État se chiffre à près de 30 milliards d’euros. Tandis que le manque à gagner pour la protection sociale est creusé par ces politiques

Afin de lever la pression à la baisse sur  les salaires et sur les rentrées de cotisations  sociales, les articles 4 et 5 visent à revenir sur les allégements généraux de cotisations sociales qui représentent plus des trois quarts des mesures d’exonérations. Ils proposent la suppression des deux dispositifs phares du gouvernement que sont la réduction générale de cotisations patronales dite Fillon jusqu’à 1,6 SMIC 22,1 milliards d’euros en 2009 -, et les exonérations au titre des heures supplémentaires et complémentaires 2,9 milliards d’euros en 2009.

Le chapitre ii met à contribution des revenus du capital au financement de la protection sociale

L’article 6 vise à corriger les distorsions pour les recettes de la protection sociale introduites par d’autres dispositifs tels la participation financière, l’actionnariat salarié ou la protection sociale complémentaire  en entreprise, exemptés d’assiette de cotisations sociales. La perte de recettes résultant des niches sociales serait de 9,1 milliards d’euros. Il s’agirait aussi d‘assujettir ce type de revenus à des contributions sociales

L’article 6 modifie les articles du code de la sécurité sociale relatifs au forfait social, contribution de l’employeur créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, portant sur des éléments de rémunération soumis à la CSG mais exclus de l’assiette des cotisations sociales de Sécurité sociale. Actuellement, les sommes versées au titre de l’intéressement, au titre de la participation, les abondements de l’employeur aux plans d’épargne d’entreprise (PEE et Perco), les contributions des employeurs au financement des régimes de retraite supplémentaire,

Sont assujettis à cette contribution à un taux de 4 %. Le produit de cette contribution revient à la Cnam.

Au regard, d’une part, du fort développement de ces dispositifs au détriment des formes directes de rémunérationtion soumises, elles, à cotisations sociales et, d’autre part, de la perte de recettes conséquentes pour la protection sociale, il est proposé de porter de 4 à 20 % le taux du forfait social et de répartir le produit de cette contribution, estimée à 3,8 milliards d’euros, entre les régimes obligatoires d’assurance-maladie et vieillesse dont relèvent les bénéficiaires.

Les articles 7 à 11 intéressent plus particulièrement la mise à contribution des hauts revenus, ceux des dirigeants ou de la part variable de rémunération de certaines catégories de salariés, tels les opérateurs  de marchés financiers.

L’article 7 propose en premier lieu de porter de 10 à 40 % et de 2.5 % à 10 % le taux des contributions patronales et salariales sur les attributions d’options de souscription ou d’achat d’actions et sur les attributions d’actions gratuites

Les contributions,  instituées en 2007 au profit des seuls régimes obligatoires d’assurance-maladie bénéficieraient aussi au régime d’assurance vieillesse.

La Cour des comptes chiffrait en 2007 à plus de 3 milliards d’euros les pertes de recettes pour la Sécurité sociale générées par le dispositif des stock-options. L’application d’une telle mesure permettrait d’engranger aujourd’hui en année pleine environ 800 millions d’euros de recettes supplémentaires au bénéfice de la protection sociale.

L’article 8 concerne la constitution de droits à prestations à l’achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l’entreprise, notamment les fameuses « retraites chapeaux ». Il propose que les différentes contributions patronales ne soient pas perçues comme actuellement au profit du seul fonds de solidarité vieillesse mais encore au bénéfice du régime général d’assurance vieillesse, Les différents taux de cette contribution seraient relevés et on soumettrait les contributions des employeurs destinées au financement de ces régimes à la CSG et à la CRDS.

L’article 9 instaure une nouvelle contribution visant l’ensemble des éléments de la rémunération, indemnités et avantages concernant des rémunérations au bénéfice des mandataires de sociétés cotées. Cette contribution fixée, au taux de 40 %, concernerait les parachutes dorés et autres indemnités  de départ comme les indemnités versées en raison d’une clause de non-concurrence.

L’article 10 instaure une nouvelle contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs de marchés financiers qui excède le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 34 620 euros en 2010. Cette contribution fixée au taux de 40 % serait perçue au profit des régimes d’assurance-maladie et d’assurance vieillesse.

L’article 11 a pour objet de porter le taux du prélèvement social de 2 à 12 % sur les revenus de capitaux mobiliers et les plus-values, gains ou profits, en particulier ceux réalisés sur les marchés financiers.

L’article 12 propose, en dernier lieu, la suppression du dispositif dit du « bouclier fiscal »  afin que l’ensemble des contributions sociales sur les revenus du patrimoine, les revenus  d’activité  ou les revenus  de placement ne puisse faire à ce titre l’objet d’une restitution de la part de l’État.



(1) nous nous inspirons de l’exposé des motifs de la proposition de loi déposée par les députés communistes et Parti de gauche.

(2) Source INSEE, Comptes de la nation).

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