Economie et Politique - Revue marxiste d'économie

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Bettencourt : nous n’avons pas les mêmes valeurs

Les scandales récents autour de l’argent de la famille Bettencourt ont levé un coin de voile sur les pratiques à l’œuvre dans les grandes fortunes françaises tout comme les liens tissés entre celles-ci et un certain monde politique.

La dégradation de ces mœurs est directement liée à la montée des prélèvements financiers sur les richesses des entreprises au détriment des dépenses pour les salaires, les cotisations  sociales et les impôts ainsi que la concentration de ces dividendes versés aux plus gros actionnaires.

Chez L’Oréal, de 2000 à 2009, le montant des dividendes a progressé chaque année en moyenne de 13,3 %. Leur cumul s’élève à plus de 6 milliards d’euros, dont plus de la moitié au profit des deux principaux actionnaires, Bettencourt (31 % du capital) et Nestlé SA (29,8 %) en 2009.

En pleine crise la famille Bettencourt a donc touché au seul titre d’actionnaire en 2009 de l’ordre de 280 millions d’euros (+ 5 % sur 2008) sous forme de dividendes de L’Oréal.

Cet enrichissement de la famille Bettencourt a été possible pour deux raisons :

D’une part, parce qu’il a été décidé d’accroître chaque année les prélèvements en dividendes sur le résultat net de l’entreprise, ils sont passés de 29,7 % en 2001 à 45 % en 2009 (voir tableau 1).

D’autre part, parce que les deux principaux actionnaires ont fait le choix de détruire une partie des capitaux propres de L’Oréal pour accroître leur poids dans le capital (voir tableau 2).

Des rachats d’actions aux frais de l’entreprise

Pour cela ils ont fait racheter ses titres par l’entreprise elle-même pour un montant de 5,1 milliards d’euros de 2005 à 2009, générant d’importantes  sorties de trésorerie. Ce qui, d’un côté, a enrichi des actionnaires minoritaires  qui ont bénéficié de ces rachats et, de l’autre, a favorisé le renforcement du pouvoir du noyau dur des actionnaires. Ainsi, Bettencourt et Nestlé SA ont vu leur part dans le capital de L’Oréal passer de 55,3 % en 2005 à 60,8 % en 2009 sans que ces derniers aient engagé le moindre apport de fonds supplémentaire.

Comme cela ne devait sans doute pas suffire, l’assemblée générale des actionnaires vient de décider de verser à partir de 2012 une prime de 10 % supplémentaires des dividendes aux actionnaires  les plus fidèles. Mais, sans doute par décence, seulement sur un nombre d’actions limitées. Il est vrai que chez L’Oréal, on ne badine pas avec l’éthique comme nous le rappelle le texte de présentation des comptes 2009 : « La réussite économique repose aussi sur une éthique partagée par tous. Les hommes et les femmes de L’Oréal mettent leurs efforts à faire de leur entreprise un modèle emblématique de responsabilité citoyenne. Une entreprise solidaire des communautés humaines qui l’entourent et ouverte aux problèmes de son temps avec pour objectif de rendre le monde plus beau. » n

Tableau 1 : Un prélèvement croissant  des actionnaires sur les bénéfices (en millions d’€)

Anné e

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Résultat net  (1)

1229

1456

1653

1656

1972

2061

2656

2064

1997

Dividendes (2)

365

433

494

554

659

739

843

862

899

(2)  / (1)

29,70%

29,70%

29,90%

33,40%

36,70%

35,80%

31,70%

41,70%

45,00%

 

Tableau 2 : Évolution de la répartition des actions suite aux rachats d’actions

 

2005

2006

2007

2008

2009

Famille Bettencourt

28,20%

29,00%

30,00%

30,80%

31,00%

Nestlé SA

27,10%

27,90%

28,90%

29,60%

29,80%

public

38,80%

37,80%

37,40%

36,40%

36,80%

Actions autodétenues

5,90%

5,30%

3,70%

3,20%

2,40%

Part des deux principaux groupes d'actionnaires

 

55,30%

 

56,90%

 

58,90%

 

60,40%

 

60,80%

 

 

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